Extraits du compte-rendu d’audience du TPIY – 30 mars 2000
1 TRIBUNAL PENAL INTERNATIONAL AFFAIRE N° IT-96-23-T
2 POUR L’EX-YOUGOSLAVIE
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4 Jeudi 30 mars 2000
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6 L’audience est ouverte à 09 heures 28.
7 Mme la Présidente (interprétation). – Madame la Greffière peut-
8 elle rappeler l’affaire ?
9 Mlle Lauer. – Affaire IT-96-23-T et IT-96-23/1-T, le Procureur
10 contre Dragoljub Kunarac, Radomir Kovac et Zoran Vukovic.
11 Mme la Présidente (interprétation). – Nous allons poursuivre le
12 contre-interrogatoire. Maître Jovanovic, je vous en prie.
1 (Le témoin 75 est déjà introduit dans le prétoire.)
22 Mme la Présidente (interprétation) – Bonjour Madame le Témoin.
23 Veuillez prononcer la déclaration solennelle.
24 Témoin 75 (interprétation). – Je déclare solennellement que je
25 dirai la vérité, tout la vérité, rien que la vérité.
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1 Mme la Présidente (interprétation) – Madame Uertz-Retzlaff,
2 c’est à vous.
3 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Bonjour, madame le
4 Témoin. Je souhaiterais que l’on remette au témoin la pièce à conviction
5 suivante de l’accusation, il s’agit d’une feuille de papier qui porte un
6 nom.
7 Mme la Présidente (interprétation) – Allez-vous utiliser les
8 deux ?
9 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Oui.
10 Mme la Présidente (interprétation) – Eh bien, essayons de régler
11 la question de ces documents tout de suite.
12 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Je ne vais pas les
13 utiliser en même temps.
14 Mlle Lauer. – Ces deux documents recevront donc la cote 188
15 et 189 des pièces du Procureur et seront enregistrés de façon
16 confidentielle.
17 Mme la Présidente (interprétation) – D ?
18 Mlle Lauer. – Rectification : il s’agit des pièces 188 et 189
19 des pièces du Procureur, sans le D.
20 Mme la Présidente (interprétation) – Est-ce que cela ne devrait
21 pas commencer par un P puisqu’il s’agit de l’accusation ?
22 Mlle Lauer. – Depuis le début de la procédure, nous avons coté
23 les pièces de cette façon. Quand on ne précise pas si c’est P ou D, il
24 s’agit des pièces du Procureur. Si vous souhaitez que l’on rajoute un P à
25 toutes les pièces du Procureur, cela peut être fait. Il n’y a pas de
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1 problème.
2 M. Hunt (interprétation). – La question, le problème est que
3 vous les avez appelées D.
4 Mlle Lauer. – Excusez-moi, je ne pensais pas avoir donné la
5 lettre D avant la cote. Peut-être s’agit-il d’un petit problème de
6 traduction ? Les pièces du Procureur ne reçoivent jamais, pour l’instant
7 du moins, la lettre P ou D.
8 Mme la Présidente (interprétation) – Madame le Procureur,
9 poursuivons.
10 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Madame le Témoin, je vais
11 vous demander d’examiner la première feuille de papier que vous avez sous
12 les yeux et qui comporte le moins de noms.
13 Le premier nom qui figure à côté du n° 75, est-ce votre nom ?
14 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
15 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Et la date qui figure qui
16 à côté du nom, est-ce votre date de naissance ?
17 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
18 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Ce qui figure au-dessous
19 du n° 75 est-ce votre surnom ?
20 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
21 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Le nom qui figure à la
22 ligne suivante, est-ce le nom de votre mère ?
23 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
24 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Et le nom qui figure à la
25 ligne suivante, est-ce le nom de votre père ?
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1 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
2 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Le nom qui suit, est-ce
3 celui de votre frère ?
4 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
5 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Et le dernier nom qui
6 figure sur cette liste, est-ce celui de votre oncle ?
7 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
8 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Quelle est votre
9 appartenance ethnique ?
10 Témoin 75 (interprétation). – Je suis musulmane.
11 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Où viviez-vous avant la
12 guerre ?
13 Témoin 75 (interprétation). – J’habitais dans le village de
14 Trosanj, qui se trouve à côté de Foca.
15 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Pouvez-vous nous
16 expliquer où se situe ce village par rapport à Mjesaja et Foca ?
17 Témoin 75 (interprétation). – Cela se trouve à environ
18 10 kilomètres de Foca en remontant le cours de la Drina.
19 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Où cela se trouve-t-il
20 par rapport à Mjesaja ?
21 Témoin 75 (interprétation). – C’est au même endroit. Sauf que
22 mon village se trouve un peu plus haut que Mjesaja.
23 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Combien y avait-il
24 d’habitants musulmans à Trosanj ?
25 Témoin 75 (interprétation). – Environ 150.
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1 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que Trosanj était
2 un village mixte ? Y avait-il également des Serbes ?
3 Témoin 75 (interprétation). – Pas dans le village lui-même, mais
4 autour du village, il y avait des maisons serbes.
5 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Pendant les événements
6 dont vous allez nous parler, quel âge aviez-vous ?
7 Témoin 75 (interprétation). – 24 ans.
8 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Quelle était votre
9 occupation professionnelle à ce moment-là ?
10 Témoin 75 (interprétation). – Je travaillais à Brod, pour la
11 société Sipad-Maglic.
12 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que vous-même ou
13 des membres de votre famille aviez des activités politiques ?
14 Témoin 75 (interprétation). – Non.
15 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Quel a été votre dernier
16 jour de travail ?
17 Témoin 75 (interprétation). – Le lundi 6 avril 1992.
18 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que vous êtes
19 allée travailler ce jour-là ?
20 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
21 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Et est-ce que vous avez
22 effectivement travaillé ce jour-là ? Etes-vous allée sur votre lieu de
23 travail, y avez-vous effectivement travaillé ?
24 Témoin 75 (interprétation). – Non.
25 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Pourquoi pas ?
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1 Témoin 75 (interprétation). – Quand je suis arrivée sur mon lieu
2 de travail, je n’y ai trouvé que deux de mes collègues de travail. Je leur
3 ai demandé ce qui se passait. Ils m’ont dit qu’ils n’en n’avaient aucune
4 idée. Quand Nenad Matovic, le Serbe qui était directeur de l’entreprise,
5 est arrivé, il nous a dit que la société allait cesser ses activités
6 jusqu’à nouvel ordre. Je n’avais aucune idée de la raison pour laquelle
7 personne n’était venu travailler. Ils ont dit qu’il y aurait une guerre ;
8 je ne le croyais pas. D’ailleurs, je ne comprenais pas bien de quoi il
9 s’agissait, qui allait nous attaquer, d’où ?
10 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – S’est-il produit quelque
11 chose ce jour-là, à Foca, dont vous avez été témoin ?
12 Témoin 75 (interprétation). – Nous sommes allés à Foca en bus,
13 nous y avons vu beaucoup de voitures. Il y avait également des banderoles
14 qui disaient, qui étaient en faveur de la paix. Nous nous attendions à ce
15 qu’un discours soit prononcé, mais cela n’a pas été le cas. Nous sommes
16 donc retournés chez nous en bus. Nous sommes allés à la maison.
17 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous dites « nous ». De qui
18 parlez-vous ?
19 Témoin 75 (interprétation). – Je parle de moi et de deux de mes
20 collègues avec qui j’étais dans mon entreprise. Nous sommes allés à Foca
21 ensemble.
22 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Ceux que vous avez vu
23 porter des banderoles, avez-vous vu si c’étaient des Serbes ou des
24 Musulmans ou appartenaient-il aux deux communautés ?
25 Témoin 75 (interprétation). – C’étaient des Musulmans. Il faut
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1 savoir qu’à l’époque les Serbes fuyaient Foca. Ils emmenaient leurs
2 familles en Serbie ou au Monténégro. Ils savaient exactement ce qui se
3 préparait. Nous, nous ne le savions pas.
4 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Comment savez-vous cela ?
5 Témoin 75 (interprétation). – Nous le savons parce que nous
6 l’avons appris de nos voisins serbes. Nos voisins serbes eux aussi
7 envoyaient leurs femmes et leurs enfants en Serbie ou au Monténégro.
8 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Quand la guerre s’est-
9 elle déclenchée à Foca ?
10 Témoin 75 (interprétation). – Elle a commencé à Foca le
11 8 avril 1992.
12 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Comment le savez-vous ?
13 Qu’avez-vous vu ?
14 Témoin 75 (interprétation). – Eh bien, ce jour-là, le 8 avril,
15 je suis allée faire des courses. Mais alors que j’étais en chemin, j’ai
16 rencontré un de mes parents, quelqu’un de ma famille, qui m’a dit qu’il ne
17 fallait surtout pas que je poursuive mon chemin parce que Foca était en
18 flammes et avait été attaquée. J’ai demandé qui avait attaqué Foca, et il
19 m’a répondu que c’étaient les Serbes, les Chetniks.
20 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que vous-même vous
21 avez vu ou entendu quoi que ce soit de ces combats, de ces activités
22 militaires ?
23 Témoin 75 (interprétation). – Non. On entendait des tirs, des
24 pilonnages tout à fait clairement alors que nous nous trouvions dans notre
25 village. On pouvait bien entendre les tirs et les pilonnages .
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1 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – A ce moment-là, c’est-à-
2 dire le 8 avril 1992, s’est-il passé quoi que ce soit dans votre village ?
3 Témoin 75 (interprétation). – Non. Non, rien ne s’est passé dans
4 mon village. Cependant, la peur et la tension régnaient dans le village et
5 nous sommes tous allés nous réfugier dans les bois. Et c’est là que nous
6 avons dormi.
7 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – A partir de quel moment,
8 de quelle date avez-vous commencé à dormir dans les bois ?
9 Témoin 75 (interprétation). – A partir du début avril jusqu’en
10 juillet, jusqu’au moment où nous avons nous-mêmes été attaqués.
11 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous avez dit que la peur
12 et la tension régnaient dans le village, quelle en était l’origine ? Que
13 craigniez-vous ?
14 Témoin 75 (interprétation). – Eh bien, nous avions peur des
15 Serbes, bien entendu, de l’armée serbe, des Chetniks qui venaient de
16 Serbie et du Monténégro. Les hommes d’Arkan, les Beli Orlovi c’est-à-dire
17 les Aigles blancs, les Ceselj.
18 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Dans quelles
19 circonstances avez-vous entendu parler de tout cela ?
20 Témoin 75 (interprétation). – Eh bien tout cela, on l’apprenait
21 à la radio, notamment. L’offensive a été lancée sur tout le territoire de
22 la Bosnie, nous avons donc eu beaucoup d’informations par la radio.
23 Et puis nos voisins serbes nous ont également parlé de cela. Ils
24 nous ont dit, par exemple, que personne ne nous ferait rien du tout, à
25 moins que les gens d’Arkan, les gens de Ceselj, les Beli Orlovi, etc., ne
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1 viennent. Ils ont dit que nous n’avions rien à craindre, que nous pouvions
2 dormir sans crainte chez nous, et qu’il n’était pas nécessaire que nous
3 partions où que ce soit. Mais nous n’avions pas tellement confiance.
4 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que vous-même vous
5 avez assisté à ce qui s’est passé dans les villages environnants ?
6 Témoin 75 (interprétation). – Oui, tous les villages
7 environnants ont été incendiés pendant ces mois dont je vous parle.
8 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que les habitants
9 du village de Trosanj étaient armés ?
10 Témoin 75 (interprétation). – Oui, mais la plupart d’entre eux
11 n’avaient que des fusils de chasse avec des ports d’armes. Il y en avait
12 également qui avaient des pistolets, ils avaient également des ports
13 d’armes. Et puis certains qui travaillaient au commissariat de police, au
14 poste de police avaient également des armes dans le cadre de leur travail.
15 C’est tout ce que je sais.
16 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que certains
17 membres de votre famille avaient également des armes ?
18 Témoin 75 (interprétation). – Non.
19 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que les habitants
20 du village ont conservé leurs armes jusqu’à la date de l’offensive contre
21 le village ?
22 Témoin 75 (interprétation). – Non. Ils sont allés négocier avec
23 les Serbes qui leur ont dit que tant qu’ils restitueraient, qu’ils
24 donneraient leurs armes, il ne leur arriverait rien du tout. Donc, les
25 Serbes sont venus et on leur a donné nos armes.
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1 On a signé une espèce de déclaration de loyauté sur la poursuite
2 de la cohabitation avec les Serbes. On nous a promis qu’on ne nous ferait
3 rien du tout, c’est pourquoi on a donné les armes. Et c’est pour cela
4 qu’on a attendu chez nous jusqu’au dernier moment parce qu’on était sûrs
5 que personne n’allait nous attaquer et attaquer notre village.
6 Mme la Présidente (interprétation). – Il est temps de faire la
7 pause. Nous allons donc lever l’audience jusqu’à 11 heures 30.
8 (L’audience, suspendue à 11 heures 03, est reprise à
9 11 heures 30.)
10 Mme la Présidente (interprétation). – Je vous en prie.
11 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Avant la pause, Madame,
12 vous avez dit que des armes ont été restituées. Vous avez dit que
13 c’étaient des gens qui devaient les restituer.
14 Par qui ? Je n’ai pas bien compris.
15 Témoin 75 (interprétation). – Ce sont des Musulmans qui ont
16 restitué les armes.
17 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – C’est à cela que je
18 pensais. Est-ce que les Serbes également étaient obligés de restituer les
19 armes, ou bien les ont-ils gardées, n’ont-ils pas eu d’armes ? Comment
20 cela s’est-il passé avec les Serbes ?
21 Témoin 75 (interprétation). – Comment avaient-ils été armés ?
22 Mais ils n’ont jamais restitué des armes.
23 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que vous-même vous
24 avez vu quand les Musulmans ont rendu les armes ?
25 Témoin 75 (interprétation). – Non. Moi, je n’ai pas observé
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1 parce que les femmes n’avaient pas le droit de toute façon de s’y rendre.
2 Et puis cela ne nous intéressait pas. Ce qui nous intéressait, c’était de
3 vivre en paix comme nous avions toujours vécu. Nous ne souhaitions pas la
4 guerre, c’était cela. C’était le souhait des femmes.
5 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Mais alors, comment
6 savez-vous que des Musulmans avaient restitué des armes ?
7 Témoin 75 (interprétation). – Je l’ai appris. J’ai appris des
8 hommes qui l’ont fait. Des villageois me l’ont raconté : ceux qui avaient
9 des armes et qui ont restitué les armes. Ce sont eux qui nous l’ont
10 raconté.
11 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous avez dit par
12 ailleurs qu’ils avaient signé un acte de loyauté ?
13 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
14 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Qu’est-ce que cela
15 voulait dire ?
16 Témoin 75 (interprétation). – Cela voulait tout simplement dire
17 qu’ils avaient signé un acte par lequel ils ont dit qu’ils allaient vivre
18 en paix, qu’ils n’allaient pas nous attaquer et que, nous, nous n’allions
19 pas les attaquer. Voilà.
20 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Quand est-ce que
21 l’attaque a commencé ?
22 Témoin 75 (interprétation). – C’était le 3 juillet 1992 à
23 6 heures 20. C’était très tôt le matin.
24 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – A ce moment-là, est-ce
25 qu’il y avait des Musulmans, des soldats qui étaient ou bien dans votre
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1 village ou bien dans les alentours ?
2 Témoin 75 (interprétation). – Non.
3 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Et vous-même, où vous
4 êtes-vous trouvée exactement au moment où votre village a subi cette
5 attaque ?
6 Témoin 75 (interprétation). – J’étais tout à fait en haut du
7 village. J’étais dans les bois et j’étais dans un groupe d’une
8 cinquantaine, il y avait des hommes, des femmes, des enfants, des
9 personnes âgées, des tout jeunes. C’est dans les bois que nous passions
10 les nuits.
11 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Y avait-il des membres de
12 votre famille qui vous accompagnaient ?
13 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
14 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que vous pouvez
15 nous dire qui ? Ne dites pas de noms, mais dites tout simplement quelles
16 sont vos relations avec les personnes en question.
17 Témoin 75 (interprétation). – Il y avait mon père, ma mère, mon
18 frère et moi-même.
19 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Votre frère avait quel
20 âge ?
21 Témoin 75 (interprétation). – Il avait à peine 20 ans.
22 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce qu’il portait des
23 armes ? Est-ce qu’il était vêtu en uniforme ?
24 Témoin 75 (interprétation). – Non.
25 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Et qu’est-ce qui s’est
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1 passé ce jour-là ? Est-ce que vous pouvez nous en donner la description ?
2 Témoin 75 (interprétation). – Ce matin, tout le monde était au
3 lit. On ne pensait même pas ce qui allait se passer. Subitement, nous
4 avons entendu des tirs très violents.
5 On a sursauté, on est partis des chambres à coucher vers les
6 montagnes. Il y avait des rochers et on ne pouvait pas véritablement
7 marcher trop vite. Ils nous suivaient et ils tiraient dans notre
8 direction. Ils avaient plein de munitions. On a donc essuyé des tirs.
9 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce qu’il y avait
10 quelqu’un qui a été tué à ce moment-là ?
11 Témoin 75 (interprétation). – Oui. Au moment où nous nous sommes
12 enfuis, ma mère a été tuée. Il y avait encore un homme et une femme, elle
13 portait dans ses bras un enfant de 3 ans ; il est tombé, cet enfant, et
14 c’est une autre femme qui a réussi à le récupérer. Il y avait des femmes
15 qui étaient ici dans ce groupe.
16 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Et votre mère avait quel
17 âge ?
18 Témoin 75 (interprétation). – 42 ans.
19 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Et les deux autres
20 personnes qui ont été tuées avaient quel âge ?
21 Témoin 75 (interprétation). – Il y avait un homme, comme j’ai
22 dit, qui a été tué et qui avait 42, 43 ans à peu près ; et la femme avait
23 35, 36 ans approximativement.
24 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Avez-vous vu le corps de
25 votre mère depuis ?
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1 Témoin 75 (interprétation). – Elle est tombée à 2 mètres par
2 rapport de moi. Je l’ai vue tomber, c’était une pente, et je ne l’ai plus
3 revue parce que son corps a roulé, et puis je ne l’ai plus jamais revue.
4 Cet homme également est tombé de la même façon. Alors que la troisième
5 personne qui a été tuée, son corps est resté à côté, et moi je l’ai vu
6 parce que nous étions tous en groupe.
7 Nous leur avons demandé de ne pas tirer parce qu’il y avait
8 beaucoup d’enfants. Nous ne pouvions pas courir. Comme il fallait monter
9 une pente, on a demandé qu’ils s’arrêtent. Nous avons dit : « Ecoutez, vous
10 allez tuer tous nos enfants ! Nous allons nous remettre, nous rendre ! »
11 Ils se sont arrêtés et, effectivement, ils se sont approchés de notre
12 groupe.
13 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Comment pouvez-vous être
14 sûre que votre mère a été tuée ? Quelqu’un d’autre a-t-il vu son corps ?
15 Témoin 75 (interprétation). – Oui, il y avait beaucoup d’autres
16 femmes qui étaient avec moi. Moi je vous dis, moi je l’ai vue au moment où
17 elle faisait sa chute. Je sais que ses cheveux étaient pleins de sang,
18 j’étais donc sûre qu’on l’avait touchée par une balle, et qu’elle a été
19 tuée.
20 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que quelqu’un de
21 votre famille a vu sa dépouille mortelle ?
22 Témoin 75 (interprétation). – Mon frère.
23 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – (hors micro) Et qu’est-ce
24 que les soldats ont fait une fois que vous vous êtes assis ?
25 Témoin 75 (interprétation). – Au moment où ils s’approchaient de
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1 nous, ils hurlaient, ils criaient, ils proféraient des injures : »Vous les
2 Balija, vous vous enfuyez, vous courez comme des chèvres ! Pourquoi vous
3 enfuyez-vous ? »
4 Il y avait cet homme qui était avec nous. Ils se sont approchés
5 de nous, et ils s’emparaient des hommes. Ils les passaient à tabac, il les
6 frappaient par des crosses. Puis on leur donnait des coups de pied. Il y
7 avait un soldat qui m’a prise par les cheveux, il m’a donné un coup de
8 pied. Moi également j’étais sur le point de tomber mais je me suis arrêtée
9 à côté de quelqu’un qui était derrière moi, un homme.
10 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Ces soldats, c’étaient
11 des Serbes ?
12 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
13 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Ils étaient vêtus en
14 uniforme ?
15 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
16 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que vous pouvez
17 donner la description de leurs uniformes ?
18 Témoin 75 (interprétation). – C’étaient des uniformes de
19 camouflage. De toute façon, avant je n’ai jamais vu de tels uniformes.
20 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Etaient-ils armés ?
21 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
22 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce qu’ils portaient
23 des fusils de chasse ou éventuellement d’autres armes ?
24 Témoin 75 (interprétation). – Non, ce n’étaient pas des fusils
25 de chasse, c’étaient des fusils automatiques, des kalashnikov, des
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1 scorpions, des pistolets, des grenades, des zolias également. Ils avaient
2 véritablement des armes de types différents.
3 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous avez dit par
4 ailleurs qu’ils frappaient des hommes, qu’ils vous ont tirée par les
5 cheveux. Est-ce que vous avez vu également des blessures sur les hommes ?
6 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
7 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Pourriez-vous s’il vous
8 plaît nous dire ce que vous avez vu ?
9 Témoin 75 (interprétation). – Il y avait un jeune homme qui
10 avait mon âge, et l’un d’eux le frappait par une crosse d’un fusil
11 automatique. Il lui donnait des coups sur la tête, je pense que même son
12 oeil est sorti de l’orbite -il disait que c’était son copain de classe.
13 Il y avait également son frère qui a été frappé par une matraque
14 et, chaque fois, quand on lui donnait le coup sur la tête, il tombait.
15 Evidemment, ils posaient la question : « Qui sont ceux parmi vous qui ont
16 des armes ? ». Alors, on leur répondait qu’on n’avait pas d’armes. De
17 nouveau on frappait les hommes, et ces hommes, il y en avait qui perdaient
18 connaissance. Cela a duré pendant une demi-heure.
19 Ensuite, il y avait quelqu’un dans ce groupe qui a dit qu’il ne
20 fallait certainement rien faire sans recevoir des ordres. Il a donc parlé
21 sur son mobile à quelqu’un.
22 J’ai vu également qu’une fille a été frappée par la crosse d’un
23 fusil, et le sang qui coulait sur son visage.
24 Ensuite, on nous a demandé d’aller en bas, à travers la forêt.
25 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous avez mentionné la
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1 fille également, une fille qui a été frappée. Est-ce que vous pouvez
2 regarder l’autre liste avec plusieurs noms, et est-ce que vous pouvez
3 trouver le nom de la personne en question ? Mais vous ne dites pas le nom,
4 vous dites tout simplement le numéro, éventuellement, ou les initiales.
5 Témoin 75 (interprétation). – C’est DB.
6 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Il y avait combien de
7 soldats qui ont participé à cet événement ?
8 Témoin 75 (interprétation). – Ils étaient une dizaine, à mon
9 avis, quand ils nous ont rejoint là-haut. Je pense qu’ils étaient une
10 dizaine. Ensuite, nous avons descendu une pente à travers la forêt, et
11 nous étions dans un pré par la suite.
12 Une fois que nous sommes sortis des bois, la première chose que
13 j’ai remarquée c’est Gojko Jankovic ; ensuite, Slavo Ivanovic, Dragan
14 Zelenovic et Janko Janjic. Il y avait Kovac également parmi eux, mais je
15 l’ai reconnu ultérieurement, quatre mois après ma détention.
16 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous avez mentionné
17 quelques personnes. Vous avez dit par exemple « Gojko Jankovic ». Etait-ce
18 un homme que vous connaissiez avant ?
19 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
20 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Comment le connaissiez-
21 vous ?
22 Témoin 75 (interprétation). – Je le connaissais parce que, moi,
23 j’avais l’occasion de passer chaque jour en car à l’endroit où se trouvait
24 sa maison. C’était pratiquement dans mon voisinage, il habitait dans mon
25 voisinage.
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1 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous avez parlé également
2 de Janko Janjic. Est-ce que vous le connaissiez avant la guerre
3 également ?
4 Témoin 75 (interprétation). – Oui. Avant la guerre, c’était en
5 quelque sorte un criminel, tout le monde avait peur de lui. Mais
6 personnellement je ne l’ai jamais rencontré. De toute façon, moi, je
7 traversais toujours sur l’autre trottoir au moment où il fallait que je le
8 croise. C’est quelqu’un qui posait toujours des problèmes à Foca.
9 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous avez parlé également
10 de Slavo Ivanovic ? Qui est-ce ? Comment le connaissiez-vous ?
11 Témoin 75 (interprétation). – Slavo Ivanovic travaillait comme
12 chauffeur de taxi à Foca. Il ramenait des produits différents aux
13 villageois. C’est lui qui transportait ces produits et qui les distribuait
14 aux villageois. C’est ainsi que je le connaissais.
15 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous avez parlé également
16 de Dragan Zelenovic ? Est-ce que lui également vous le connaissiez avant
17 la guerre ?
18 Témoin 75 (interprétation). – Non, pas personnellement. J’ai eu
19 l’occasion de le voir à plusieurs reprises dans le village. C’est lui qui
20 travaillait dans la compagnie d’électricité. Il se rendait pour vérifier
21 quel était l’état sur le compteur.
22 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Par conséquent, vous avez
23 eu l’occasion de le voir avant la guerre, mais vous ne connaissiez pas son
24 nom. Est-ce comme cela qu’il faut le comprendre ? Je vous ai bien
25 comprise ?
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1 Témoin 75 (interprétation). – Oui, effectivement. Je le
2 connaissais de vue mais je ne connaissais pas son nom.
3 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous avez mentionné
4 Kovac. Quel Kovac ?
5 Témoin 75 (interprétation). – Radomir Kovac, surnommé Klamfa.
6 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Excusez-moi, vous pouvez
7 nous redire le surnom ?
8 Témoin 75 (interprétation). – Klamfa.
9 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que vous le
10 connaissiez également avant la guerre ?
11 Témoin 75 (interprétation). – Non.
12 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Comment avez-vous appris
13 son nom ?
14 Témoin 75 (interprétation). – J’ai déjà dit qu’au bout de
15 quatre mois de ma détention, avec les Chetniks, c’est ainsi que j’ai
16 appris son nom.
17 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que vous pouvez
18 nous donner la description de ce monsieur ?
19 Témoin 75 (interprétation). – Oui. Bien évidemment. Il était
20 grand de taille, il avait le front assez élevé, des cheveux bruns. Il
21 avait toujours une veste en cuir noir.
22 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – A ce moment-là, au moment
23 où vous avez vu ces hommes dont vous venez de parler, est-ce qu’ils
24 étaient en uniforme ? Étaient-ils armés ?
25 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
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1 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que vous avez pu
2 apercevoir qui était le principal, si l’on peut dire ainsi, parmi les
3 soldats ?
4 Témoin 75 (interprétation). – Non, je ne peux pas dire que j’en
5 étais tellement sûre. Je pense que c’était Gojko Jankovic car tout le
6 monde s’adressait à lui en l’appelant commandant.
7 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que vous avez
8 entendu Gojko Jankovic donner des ordres aux autres soldats ?
9 Témoin 75 (interprétation). – Non. Je ne l’ai pas entendu donner
10 des ordres, mais une fois, quand j’étais dans les prés et quand je l’ai
11 aperçu, j’étais sûre qu’il contrôlait la situation. Kovac avait un couvre-
12 chef noir, il avait également une veste noire en cuir, et il avait un oeil
13 couvert par un bandeau, probablement pour qu’on ne le reconnaisse pas. Je
14 ne sais pas.
15 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous parlez du pré. Vous
16 y êtes restés un certain temps. Où vous a-t-on emmenés ?
17 Témoin 75 (interprétation). – Il y avait 7 hommes que l’on a
18 séparés de nous. Aux femmes et aux enfants, on nous a demandé de partir
19 vers le village. On entendait des bruits, des tirs. Pratiquement, au
20 moment où nous sommes descendus dans le village, pratiquement toutes les
21 maisons étaient incendiées. On nous a demandé de nous coucher par terre,
22 car ils ont dit que c’était les Balije, les Musulmans, qui attaquaient. Ce
23 n’était pas vrai, car ils ont tué, égorgé les 7 hommes qui sont restés en
24 haut.
25 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Comment le savez-vous ?
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1 Témoin 75 (interprétation). – Je le sais parce que rien d’autre
2 n’aurait pu vraiment arriver. Je sais qu’ils ont été tués. Une fois que
3 j’ai été relâchée, mon père m’a dit qu’il a trouvé mon frère qui avait été
4 tué. Il a trouvé ma mère et des voisins également qui étaient avec nous.
5 C’est à ce moment-là que j’en ai été pratiquement sûre. Mon père me l’a
6 confirmé, j’étais pratiquement sûre que c’était à ce moment-là. Il les a
7 tous trouvés dans le pré. Il était dans les bois et quand une fois, il est
8 descendu vers le pré, il les a tous trouvés. Ils ont été tués.
9 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que vous avez vu,
10 à un moment ou à un autre, avez-vous appris s’ils étaient enterrés quelque
11 part ?
12 Témoin 75 (interprétation). – Non.
13 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que vous savez où
14 votre mère a été enterrée ?
15 Témoin 75 (interprétation). – Non.
16 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que vous avez
17 entendu parler, avez-vous eu des informations sur ces 7 hommes par la
18 suite ?
19 Témoin 75 (interprétation). – Non.
20 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Et vous-même, ainsi que
21 d’autres femmes et enfants, où étiez-vous ? Ou vous a-t-on emmenés ?
22 Témoin 75 (interprétation). – On nous a demandé de descendre
23 dans le village Mjesaja. Et c’est dans le quartier nommé Buk Bijela que
24 nous nous sommes rendus. Les femmes étaient à moitié nues et pieds nus
25 également car nous avions été surpris pendant notre sommeil ; par
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1 conséquent, au moment où nous sommes sortis de chez nous, nous n’étions
2 pas vêtus correctement.
3 Il y avait beaucoup de soldats dans le village qui étaient le
4 long de la route. Il y a des soldats également qui ont pris des chèvres
5 avec eux. Il y avait un soldat qui nous escortait, et dont le nom était
6 Beban Vasiljevic. C’est lui qui nous chassait pratiquement. C’est lui qui
7 nous a demandé d’aller jusqu’à ce quartier nommé Buk Bijela.
8 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Sur le chemin de
9 Buk Bijela, vous avez déjà mentionné avoir vu votre village incendié.
10 Avez-vous vu des maisons serbes qui étaient en flammes ?
11 Témoin 75 (interprétation). – Non. Certainement, aucune.
12 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Avec l’aide de
13 l’huissier, j’aimerais montrer au témoin une photographie. C’est la pièce
14 à conviction 11 et la photographie porte le n° 74-16. C’est
15 l’agrandissement de la photographie que nous possédons déjà.
16 Madame le Témoin, pourriez-vous s’il vous plaît nous donner la
17 description de ce que vous voyez sur cet agrandissement ?
18 Témoin 75 (interprétation). – Je vois le quartier nommé
19 Buk Bijela.
20 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – C’est là où on vous a
21 emmenée ?
22 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
23 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Avec d’autres femmes ?
24 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
25 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Au moment où vous êtes
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1 arrivée sur place, pourriez-vous nous dire, s’il vous plaît, ce qui s’est
2 passé ?
3 Témoin 75 (interprétation). – Au moment où on nous a emmenées
4 ici, -c’est devant ce motel- on nous a alignés. C’est Beban Vasiljevic qui
5 l’a fait. Nous nous sommes alignés, aussi bien les femmes que les enfants,
6 les vieillards. Il a donc tenu un fusil-mitrailleur, et je pensais qu’il
7 allait nous tuer, mais on est restés cinq minutes sur place. Et puis
8 d’autres sont arrivés après et ont indiqué les personnes qui devaient
9 sortir de la file. Moi, j’ai été emmenée dans une baraque de chantier où
10 j’ai retrouvé Gojko Jankovic.
11 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Un petit moment, s’il
12 vous plaît. Pour la transcription, il est également indispensable que je
13 note que le témoin montre le tout dernier bâtiment au toit blanc, enfin la
14 baraque qui a le toit blanc.
15 Témoin 75 (interprétation). – Oui, j’ai donc été emmenée dans
16 cette baraque. Gojko s’y trouvait, Dragan Zelenovic également et
17 Janko Janjic. Ils m’ont demandé tout simplement de dire la vérité, sinon
18 ils ont dit qu’ils allaient abuser de moi. Moi, j’étais bien évidemment
19 sûre de ce qui allait se passer.
20 Il m’a posé la première question pour savoir si on était au
21 courant, si, moi, j’étais au courant plus précisément qui armait le peuple
22 à Trosanj. J’ai dit que je n’étais pas au courant parce que, de toute
23 façon, les femmes n’étaient pas au courant de ce qui se passait.
24 Il m’a demandé également quels étaient les noms et surnoms des
25 personnes qui vivaient dans le village. Ils ont donc marqué tout cela. Ils
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1 m’ont laissé partir par la suite. En sortant de cette pièce, j’ai vu mon
2 oncle qu’on emmenait. Il était plein de sang.
3 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Excusez-moi, je vais vous
4 interrompre ici. Est-ce que vous avez vu également qui accompagnait,
5 escortait votre oncle ?
6 Témoin 75 (interprétation). – Oui. Zoran Vukovic l’accompagnait.
7 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Pourriez-vous, s’il vous
8 plaît, donner la description de Zoran Vukovic ?
9 Témoin 75 (interprétation). – Petit de taille, blond. C’est à
10 peu près cela.
11 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que vous pouvez
12 décrire son visage ?
13 Témoin 75 (interprétation). – Non.
14 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Comment savez-vous que
15 cet homme répondait au nom de Zoran Vukovic ?
16 Témoin 75 (interprétation). – A ce moment-là, je l’ignorais
17 parce que je ne le connaissais pas. C’est au bout de quatre mois de mon
18 séjour à Foca que Kovac l’a emmené chez moi, dans mon appartement. C’est
19 là que j’ai appris qu’il s’agissait de l’homme dont je parle.
20 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Nous allons suivre un
21 ordre chronologique. Je vais poursuivre. Ce n’est que plus tard que je
22 vais revenir à cet incident. Par conséquent, le mieux maintenant est de
23 parler du 3 juillet 1992.
24 Est-ce que ce soldat Zoran Vukovic était le seul qui
25 accompagnait votre oncle ?
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1 Témoin 75 (interprétation). – Non, je ne suis pas sûre. Mais de
2 toute façon, il y en avait plusieurs. Peut-être un, peut-être deux ou
3 trois. Je n’avais pas véritablement le temps pour regarder. J’ai juste
4 jeté un coup d’oeil en direction de mon oncle, puis j’ai baissé la tête et
5 je suis allée de l’autre côté dans le même bâtiment.
6 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous avez dit tout à
7 l’heure que le visage de votre oncle était plein de sang ?
8 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
9 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce qu’il y avait des
10 blessures que vous avez pu remarquer sur son visage ?
11 Témoin 75 (interprétation). – Je ne me souviens pas, mais je
12 sais qu’il y avait du sang qui coulait sur son visage.
13 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous-même, où est-ce que
14 vous étiez emmenée après avoir croisé votre oncle ?
15 Témoin 75 (interprétation). – Dans une autre pièce, à 5 mètres
16 par rapport à cet endroit. Il y avait un vieillard, un Chetnik qui devait
17 avoir entre 40 et 50 ans, il m’a poussée dans la pièce, il m’a demandé
18 d’enlever mes vêtements. Et soi-disant, ce n’est que lui qui avait
19 l’intention de me violer sur place.
20 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – A ce moment-là, vous avez
21 eu peur ?
22 Témoin 75 (interprétation). – Mais bien sûr que j’avais peur !
23 Je ne peux même pas dire que j’avais peur, j’étais sous le choc.
24 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Il vous a violée ?
25 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
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1 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – C’était le seul homme qui
2 vous a violée à ce moment-là ?
3 Témoin 75 (interprétation). – Moi, j’ai compté jusqu’à 10. Dans
4 cette pièce, ils étaient dans une file. De toute façon, je n’étais pas
5 capable de compter par la suite. Je ne suis pas sûre mais ils étaient
6 peut-être 20 au total.
7 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Quand vous dites que vous
8 avez été violée, qu’est-ce que vous sous-entendez sous le viol ?
9 Témoin 75 (interprétation). – Je ne comprends pas.
10 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous dites que cet homme
11 âgé vous a violée, qu’est-ce qu’il a fait exactement ?
12 Témoin 75 (interprétation). – Il m’a demandé d’enlever mes
13 vêtements, de me coucher sur le canapé. Il s’est jeté sur moi et il m’a
14 violée.
15 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que ceci veut dire
16 qu’il vous a pénétrée, il a placé son pénis dans votre vagin ?
17 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
18 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – D’autres hommes ont fait
19 exactement la même chose ?
20 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
21 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que pendant tout
22 ce temps là, vous étiez consciente ?
23 Témoin 75 (interprétation). – Oui, j’étais consciente jusqu’au
24 dixième, ensuite j’ai perdu conscience. Et je sais qu’il y en avait qui
25 ont apporté de l’eau et qu’ils ont jeté de l’eau sur moi. Je suis revenue
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1 à moi-même, j’était toute mouillée. Il y en a un qui m’a demandé de tout
2 enlever, soi-disant pour voir comment j’étais faite, il a dit : « C’est
3 vraiment dommage pour toi parce que tu es tellement bien faite ».
4 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que vous
5 connaissiez l’un de ces hommes ?
6 Témoin 75 (interprétation). – Non.
7 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Avez-vous vu qui que ce
8 soit que vous connaissiez au moment où tout cela s’est passé ?
9 Témoin 75 (interprétation). – Dans le couloir, (expurgé)
10 (expurgé), Nezo Pavlovic, Veselin Vujicic et Rado Filipovic. Ils
11 étaient dans le couloir, je le sais parce qu’à un moment je suis passée
12 devant eux pour aller aux toilettes. Nezo s’est juste contenté de hocher
13 la tête mais il n’a rien fait.
14 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Pendant que vous étiez
15 violée, est-ce que vous avez entendu quoi que ce soit qui concerne votre
16 oncle ?
17 Témoin 75 (interprétation). – Alors que j’étais encore
18 consciente, j’ai entendu des tirs, j’ai entendu les hurlements de mon
19 oncle qui était passé à tabac. Et à un moment donné, j’ai entendu l’un
20 d’entre eux dire : « Le Balija s’est évadé ». A ce moment-là il y a eu une
21 rafale, tout est redevenu silencieux, et je n’ai plus entendu sa voix
22 après. Donc, à ce moment-là, j’étais sûre qu’ils venaient de le tuer.
23 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Le viol collectif dont
24 vous avez été victime, est-ce que cela a été douloureux ?
25 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
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1 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Quel sentiment avez-vous
2 éprouvé à ce moment-là ?
3 Témoin 75 (interprétation). – Je me sentais comme morte.
4 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Où vous a-t-on emmenée
5 après ce viol collectif ?
6 Témoin 75 (interprétation). – Ils m’avaient donc violée chacun à
7 leur tour, et pendant ce temps-là j’ai pensé qu’ils avaient tué toutes les
8 autres femmes, qu’ils avaient jeté leur corps dans la Drina. Mais là, l’un
9 d’entre eux m’a dit : « Dépêche-toi, va te rhabiller, tu vas monter dans le
10 bus ».
11 Quand je suis montée dans le bus, j’ai vu que tout le monde s’y
12 trouvait, à l’exception d’une jeune fille. Sa mère pleurait, elle se
13 tenait devant l’autobus et elle les implorait de lui redonner son enfant.
14 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Je vais vous demander
15 d’examiner la feuille de papier qui se trouve devant vous et de nous dire
16 si le nom de cette personne y figure.
17 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
18 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Y a-t-il un numéro à côté
19 du nom de cette personne ?
20 Témoin 75 (interprétation). – 87.
21 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Avez-vous vu qu’on ait
22 emmené d’autres femmes dans ces baraques avant que cela ne vous arrive à
23 vous-même ?
24 Témoin 75 (interprétation). – Non.
25 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Cela signifie-t-il que
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1 vous étiez une des premières à être emmenée ainsi ?
2 Témoin 75 (interprétation). – Oui, je crois.
3 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – En nous racontant ce qui
4 vous est arrivé, vous avez utilisé parfois le nom de « Chetnik ». Pour vous,
5 qu’est-ce que cela signifie ?
6 Témoin 75 (interprétation). – C’est ce qu’ils s’appelaient eux-
7 mêmes, c’est ainsi qu’ils se désignaient eux-mêmes. Les Serbes aiment bien
8 que lorsqu’on parle d’eux on utilise ce mot de Chetnik.
9 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Et vous, est-ce que vous
10 connaissiez ce mot, est-ce que vous le connaissiez déjà avant la guerre ?
11 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
12 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Pour vous, qu’est-ce que
13 cela signifiait ?
14 Témoin 75 (interprétation). – Pour moi, c’est un mot qui
15 évoquait la peur parce que ma grand-mère, pendant la Deuxième Guerre
16 mondiale, a connu quelque chose d’assez semblable à ce que j’ai connu moi
17 aussi. Elle m’a pas mal parlé des Chetniks et donc je savais bien ce que
18 c’était, qui étaient les Chetniks.
19 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Après votre séjour à
20 Buk Bijela, où vous a-t-on emmenés ?
21 Témoin 75 (interprétation). – Eh bien, nous sommes donc montés
22 dans les autocars et à ce moment-là ils nous ont emmenés à Foca. Ils nous
23 ont emmenés à l’immeuble du SUP. L’autocar s’est arrêté devant l’immeuble
24 du SUP, et nous avons attendu là, dans le bus, pendant environ 30 minutes.
25 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Y avait-il également des
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1 soldats avec vous dans l’autocar ?
2 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
3 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Avez-vous vu des
4 policiers s’entretenir avec les soldats qui étaient dans votre autocar ?
5 Témoin 75 (interprétation). – Non.
6 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que vous avez pu
7 voir des soldats pénétrer dans l’immeuble du SUP alors que vous
8 attendiez ?
9 Témoin 75 (interprétation). – Tous ceux qui étaient là sont
10 descendus et puis ils sont entrés dans l’immeuble du SUP. Il n’y a que
11 Janjic Janko, surnommé Tuta, qui est resté dans l’autocar, et Tarzo, un
12 dénommé Tarzo -enfin, c’est son surnom, je ne me souviens pas de son
13 véritable nom.
14 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous avez attendu environ
15 une demi-heure, ensuite où vous a-t-on emmenés ?
16 Témoin 75 (interprétation). – On nous a emmenés au lycée, dans
17 le quartier d’Aladza.
18 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Avec l’aide de
19 l’huissier, je souhaiterais présenter au témoin la photographie 7418 qui
20 fait partie de la pièce à conviction 11. Il s’agit également ici d’un
21 agrandissement d’une des photographies.
22 Madame le Témoin, s’agit-il ici du bâtiment auquel vous venez de
23 faire référence, le lycée ?
24 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
25 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous souvenez-vous
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1 exactement où on vous a emmenée à l’intérieur de ce bâtiment, dans quelle
2 pièce ou à quel étage ?
3 Témoin 75 (interprétation). – Eh bien, quand nous sommes entrés
4 à l’intérieur, tout d’abord on nous a emmenés dans une pièce qui se
5 trouvait au rez-de-chaussée, où il y avait beaucoup de chaises. C’était
6 une pièce où on montait les pièces de théâtre du lycée, enfin, vous voyez.
7 On y est donc restés à peu près une heure ou deux. Ensuite, on nous a
8 emmenés au premier étage, la dernière salle de classe du premier étage.
9 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Je souhaite signaler pour
10 le compte rendu que le témoin a indiqué sur la photographie la dernière
11 pièce se trouvant au premier étage, donc la pièce qui se trouve au premier
12 étage, à l’extrême droite de la photo.
13 Mme la Présidente (interprétation). – Bien.
14 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Cette salle de classe,
15 est-ce que ses fenêtres donnaient sur la rue ou est-ce qu’elles donnaient
16 sur l’arrière de l’école ? Ou y avait-il des fenêtres qui donnaient sur
17 ces deux endroits ?
18 Témoin 75 (interprétation). – Elles donnaient sur la route.
19 (Le témoin indique la photo avec le pointeur.)
20 Oui, elles donnaient sur la route.
21 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Merci. Est-ce qu’il vous
22 est arrivé de regarder par cette fenêtre ?
23 Témoin 75 (interprétation). – Eh bien, on voyait l’autre partie
24 de la ville, Codor Mahala, et le stade. Cela se trouvait tout à côté, le
25 stade. Et également le cimetière, le cimetière serbe. On pouvait voir tout
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1 cela de cette fenêtre.
2 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Quand vous regardiez par
3 la fenêtre, vous est-il arrivé de voir des soldats ?
4 Témoin 75 (interprétation). – Oui, oui, on pouvait voir des
5 soldats.
6 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Beaucoup de soldats ou
7 seulement quelques soldats ?
8 Témoin 75 (interprétation). – Ils passaient, on les voyait
9 passer devant l’école.
10 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce qu’il y avait des
11 soldats à l’intérieur du lycée ?
12 Témoin 75 (interprétation). – Non.
13 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous nous avez donc parlé
14 de cette salle de classe où vous vous trouviez. Combien de personnes y
15 avait-il dans cette salle de classe ?
16 Témoin 75 (interprétation). – Nous étions 30 à 40, donc des
17 femmes et des enfants.
18 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que tout le monde
19 est arrivé là le même jour ? Ou est-ce que, ultérieurement, vous avez été
20 rejoints par d’autres personnes ?
21 Témoin 75 (interprétation). – Non, il y a un groupe qui est venu
22 de mon village le lendemain. Quatre jours plus tard, on a emmené mon
23 grand-père (expurgé).
24 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce qu’il y avait là
25 des personnes qui venaient d’autres villages ? Je veux parler de la pièce
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1 où vous vous trouviez ou la pièce contiguë.
2 Témoin 75 (interprétation). – Dans notre salle de classe, il y a
3 en avait 3, et dans une autre salle de classe je crois qu’il y avait 10 ou
4 15 personnes supplémentaires qu’on a amenées ensuite.
5 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Si on prend donc tout le
6 monde en compte, pouvez-vous nous dire combien il y avait de Musulmans
7 dans l’école à ce moment-là ?
8 Témoin 75 (interprétation). – Environ 50 : des femmes, des
9 enfants, des personnes âgées. Et puis, il y avait 3 hommes âgés, très
10 âgés.
11 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Quelles étaient les
12 conditions de vie dans le lycée ?
13 Témoin 75 (interprétation). – C’était affreux. On avait des
14 matelas en mousse, des couvertures militaires, on nous donnait à manger
15 trois fois par jour, mais c’étaient les restes, ce que les soldats
16 n’avaient pas mangé. C’est ce que l’on nous donnait en guise de
17 nourriture.
18 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que vous étiez
19 gardés ?
20 Témoin 75 (interprétation). – Il y avait des gardes, mais quant
21 à savoir s’ils nous gardaient, s’ils nous protégeaient, effectivement on ne
22 peut pas vraiment dire cela ! On ne peut pas dire qu’ils nous gardaient
23 dans ce sens.
24 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Quel était l’uniforme que
25 portaient ces gardes ?
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1 Témoin 75 (interprétation). – C’était l’uniforme de la police.
2 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous aurait-il été
3 possible de quitter cet immeuble pendant le temps que vous y avez passé ?
4 Etait-il possible de partir ? Y étiez-vous autorisée ?
5 Témoin 75 (interprétation). – Non.
6 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Qui vous empêchait de
7 quitter le bâtiment ?
8 Témoin 75 (interprétation). – Au début, dès que nous sommes
9 arrivés, ils nous ont dit que nous n’avions pas le droit de sortir, que
10 c’était interdit.
11 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Qui vous a dit cela ?
12 Témoin 75 (interprétation). – Je ne me souviens pas exactement
13 de qui nous a dit cela. C’était celui qui nous a escortés vers l’école.
14 Ensuite, Mitar Sipcic est venu. Lui, il travaillait dans le dispensaire de
15 Brode ; c’est une sorte d’infirmier. Il s’est présenté à nous. Il nous a
16 dit qu’il était là pour nous protéger, que rien ne nous arriverait, que
17 personne ne nous ferait quoi que ce soit et que nous n’avions aucune
18 raison d’avoir peur.
19 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous a-t-il dit ce qui
20 allait vous arriver ?
21 Témoin 75 (interprétation). – Non.
22 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que vous avez été
23 victime d’agressions sexuelles pendant que vous vous trouviez au lycée ?
24 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
25 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Une fois ou plusieurs
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1 fois ?
2 Témoin 75 (interprétation). – A plusieurs reprises.
3 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous souvenez-vous de la
4 première fois où vous avez été victime de violences sexuelles ?
5 Témoin 75 (interprétation). – A l’école, Dragan Zelenovic est
6 venu, il est arrivé en coup de vent. Il a pris 5 ou 6 femmes et il les a
7 emmenées dans la salle de classe qui se trouvait à côté. Trois d’entre
8 nous sont restées à l’intérieur dans la salle de classe et deux autres ont
9 été envoyées à l’extérieur.
10 Zelenovic m’a demandé si je me souvenais de combien d’hommes
11 m’avaient violée à Buk Bijela. J’ai répondu que j’avais compté jusqu’à
12 dix, mais qu’ensuite, je n’avais plus compté.
13 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous dites que 5 ou
14 6 femmes ont été emmenées. Vous souvenez-vous si cela s’est passé la
15 première nuit ou plus tard ?
16 Témoin 75 (interprétation). – Je ne m’en souviens pas
17 exactement.
18 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Si vous examinez la
19 feuille de papier sur laquelle figure un certain nombre de noms, pouvez-
20 vous nous dire quelles sont les personnes que l’on a emmenées avec vous
21 lors de cet incident ?
22 Témoin 75 (interprétation). – 87, 95, 51, mais il y avait
23 2 femmes qui portaient le même prénom et le même nom. Je souhaite
24 l’indiquer. Je ne sais pas à quoi correspond le numéro. Ensuite, 74, 88.
25 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous venez de mentionner
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1 quelqu’un. Il y avait 2 personnes qui portaient le même nom. La personne
2 que l’on a aussi emmenée ce soir-là, était-ce votre cousine ?
3 Témoin 75 (interprétation). – Non.
4 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – La femme qui a un
5 homonyme, était-ce une jeune femme ?
6 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
7 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous dites que vous êtes
8 restées à trois dans la pièce et que les autres ont été renvoyées à
9 l’extérieur. Pouvez-vous me dire qui est resté à l’intérieur de la salle
10 de classe ?
11 Témoin 75 (interprétation). – Le n° 87 est restée, 95 et moi-
12 même.
13 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Savez-vous ce qu’il est
14 advenu des autres femmes que l’on a fait sortir de la première salle de
15 classe ? Savez-vous ce qu’il leur est arrivé à ce moment-là ?
16 Témoin 75 (interprétation). – Non, je ne le sais pas.
17 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Avez-vous été violée dans
18 cette salle de classe ?
19 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
20 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Par qui ?
21 Témoin 75 (interprétation). – Dragan Zelenovic et encore un
22 homme dont je ne sais pas le nom.
23 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que le numéro 95 a
24 été violée, et si c’est le cas, par qui ? Le savez-vous ?
25 Témoin 75 (interprétation). – Janko Janjic.
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1 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que le n°87 a été
2 violée et si c’est le cas, par qui ?
3 Témoin 75 (interprétation). – Oui, elle a été violée, mais je ne
4 sais pas qui l’a violée. Je ne peux pas vous le dire. Je ne connaissais
5 pas cet homme.
6 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Comment savez-vous que
7 ces deux autres femmes ont été violées ? Étiez-vous dans la même pièce
8 qu’elles quand cela s’est produit ?
9 Témoin 75 (interprétation). – Oui. Au même moment, dans la même
10 pièce. Toutes les trois, nous étions là dans la même pièce et nous avons
11 vu ce qu’ils faisaient à chacune d’entre nous.
12 Zelja a obligé la personne portant le n° 95 à se déshabiller en
13 la menaçant de son arme.
14 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Si j’ai bien compris, il
15 ne l’a pas violée en fin de compte. C’est Tuta qui l’a fait.
16 Témoin 75 (interprétation). – Non, il ne l’a pas violée -c’est
17 Tuta qui l’a violée-, mais c’est lui qui l’a forcée à se déshabiller parce
18 qu’elle refusait de le faire. Il a armé son pistolet, il l’a menacée de
19 son arme. Il lui a dit que si elle ne se déshabillait pas immédiatement,
20 il la tuerait.
21 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – En tout, combien de temps
22 êtes-vous restée au lycée ?
23 Témoin 75 (interprétation). – En tout, environ une quinzaine de
24 jours.
25 Jusqu’à ce que Mitar Sipcic arrive, entre dans la salle de
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1 classe et nous dise qu’il fallait faire un peu de rangement dans le lycée
2 parce que la télévision -l’ES, c’était une équipe de télévision qui venait
3 de Pale- allait venir pour nous filmer, pour voir comment on était
4 traitées et à quel point on était bien traitées, etc. Il a dit que
5 personne ne nous aiderait à ranger. En tout cas, nous, nous étions les
6 seules à savoir ce qui se passait en réalité.
7 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Lorsque ces journalistes
8 sont arrivés, est-ce que l’une d’entre vous leur a parlé pour leur dire ce
9 qui se passait effectivement ?
10 Témoin 75 (interprétation). – Non, personne n’a dit ce qui se
11 passait en vérité.
12 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Pourquoi pas ?
13 Témoin 75 (interprétation). – Personne ne leur a parlé
14 directement. Qu’est-ce que j’aurais pu dire ? Il aurait fallu simplement
15 regarder dans nos yeux. On avait tué mon frère, on avait tué ma mère. À ce
16 jour, j’avais déjà été violée par une cinquantaine de personnes. Comment
17 pouvais-je les regarder dans les yeux et leur dire que j’allais bien ? Je
18 n’ai même pas regardé qui allait et venait.
19 A un moment, j’ai commencé à saigner du nez, à tel point que
20 personne ne pouvait l’arrêter. Tout le monde pensait que j’allais mourir à
21 tel point je saignais. A chaque fois que l’on me ramenait à l’intérieur
22 après m’avoir fait sortir un peu, je me tenais la tête, je m’arrachais les
23 cheveux en me demandant ce qui se passait et pourquoi ils faisaient cela ?
24 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – En tout, pendant que vous
25 étiez dans le lycée, combien de fois vous a-t-on fait sortir de la salle
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1 de classe principale ?
2 Témoin 75 (interprétation). – Je dois dire que c’était
3 pratiquement tous les soirs pendant ces 15 jours. Il y a peut-être
4 seulement 2 soirs où l’on ne m’a pas fait sortir. Pratiquement chaque
5 nuit, on me faisait sortir.
6 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Pouvez-vous nous dire ce
7 qui se passait généralement ?
8 Témoin 75 (interprétation). – Généralement, Dragan Zelenovic
9 entrait dans cette salle, et là il y avait généralement un vieil homme qui
10 se tenait près de la porte. Zelenovic le frappait à la figure, au nez, à
11 la tête, il le menaçait, l’insultait, il lui disait : « Balija, tu t’es
12 échappé, mais tu ne quitteras pas cet endroit vivant ».
13 Le vieil homme commençait à gémir, à crier, les enfants aussi
14 commençaient à crier. Tout le monde avait peur. A ce moment-là, il me
15 désignait du doigt, moi-même ainsi que le n° 87, et il nous disait de
16 sortir pour aller nettoyer des appartements. Mais quand on arrivait dans
17 ces appartements, généralement, ils étaient au moins 5 ou 6. Ils étaient
18 assis, là, à boire et à manger ; et ensuite, ils s’en prenaient à nous un
19 par un. Ensuite, on nous ramenait à l’école à moitié mortes.
20 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous avez parlé de vous-
21 même et du n° 87 pour dire qu’on vous a donc emmenées pour vous violer. Si
22 vous examinez la liste, pouvez-vous nous dire qui d’autre a été emmené et
23 traité de la même façon que vous ?
24 Témoin 75 (interprétation). – Numéros 50, 95, 90, 48, 74, 88.
25 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Là, en ce moment, nous
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1 sommes en train de parler du lycée. Donc, les personnes dont vous venez de
2 nous indiquer les numéros sont des personnes qu’on a fait sortir de la
3 grande salle du lycée pour les emmener ailleurs ? C’est cela ?
4 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
5 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous avez parlé de
6 Dragan Zelenovic qui vous a fait sortir vous-même ainsi que le numéro 87.
7 Avez-vous été en mesure de reconnaître d’autres soldats qui sont venus
8 vous chercher au lycée ?
9 Témoin 75 (interprétation). – Généralement, pendant la période
10 de temps que j’ai passée au lycée, c’est Dragan Zelenovic qui venait me
11 voir, et Dragan Stankovic surnommé Dragic.
12 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Et est-ce que vous avez
13 vu qu’on est venu chercher d’autres femmes ? Et avez-vous reconnu certains
14 des hommes qui venaient les chercher ?
15 Témoin 75 (interprétation). – Je ne sais pas parce que
16 généralement, c’est moi qu’on venait chercher en premier.
17 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – A ce moment-là, comment
18 savez-vous que les femmes, dont vous nous avez donné les pseudonymes il y
19 a quelques instants, elles aussi, on est venu les chercher pour les
20 violer ?
21 Témoin 75 (interprétation). – Quand je revenais au lycée, on me
22 demandait généralement où j’avais été et comment j’allais. A ce moment-là,
23 par exemple, le n° 87 me disait : « Moi aussi, on m’a emmenée là-bas ». Et
24 le n° 51 me disait également la même chose. Je savais donc parfaitement
25 qui allait où, et qui restait sur place.
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1 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous nous dites : « Elles
2 me demandaient où j’avais été ». De qui parlez-vous ?
3 Témoin 75 (interprétation). – Je parle des femmes et des jeunes
4 filles qui se trouvaient au lycée.
5 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous nous avez dit qu’on
6 est venu vous chercher pour vous emmener à d’autres endroits. Pouvez-vous
7 nous en donner le nom, s’il vous plaît ?
8 Témoin 75 (interprétation). – Avec Dragan, on nous a emmenées à
9 plusieurs reprises dans… je ne sais pas si c’était son appartement, je
10 pense que ce n’était pas son appartement. Je pense que c’était un
11 appartement qui appartenait à un Musulman et qu’il l’avait pris. Il se
12 trouvait au troisième étage d’un immeuble. Il nous emmenait dans une
13 maison à Gornje Polje. Je ne me souviens plus s’il nous a emmenées
14 ailleurs aussi.
15 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Quand on vous amenait,
16 est-ce que vous étiez violée à chaque fois ?
17 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
18 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous a-t-on battue au
19 cours de ces incidents ?
20 Témoin 75 (interprétation). – Non.
21 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Savez-vous si d’autres
22 femmes ont été battues ou blessées d’une autre façon ?
23 Témoin 75 (interprétation). – Non, je crois que non.
24 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous souvenez-vous si
25 vous avez jamais vu des cicatrices sur les corps des femmes ?
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1 Témoin 75 (interprétation). – Non. Pendant que nous étions au
2 lycée, non.
3 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Et plus tard ?
4 Témoin 75 (interprétation). – Plus tard, oui. Plus tard, oui.
5 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Alors, nous allons parler
6 de cela plus tard.
7 Quand vous a-t-on transportés du lycée à un autre endroit ?
8 Témoin 75 (interprétation). – Quinze jours plus tard, à peu
9 près. Nous avons été transportées à Partizan. Il y avait un groupe de
10 femmes qu’on a mises dans un camion. On nous a dit qu’on allait nous
11 placer ailleurs, à un autre endroit. Ils nous ont emmenées devant la salle
12 Partizan.
13 C’est là qu’ils nous ont fait entrer dans la salle, ils nous ont
14 ordonné de tout arranger parce que c’était plein de poubelles. C’était
15 vraiment très sale. Nous étions cinq femmes à nettoyer cet endroit. Nous
16 nous sommes trouvées une place à l’intérieur. Il y en a eu d’autres qui
17 sont arrivées. Et c’est là que nous avons séjourné dorénavant.
18 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Où se trouve Partizan,
19 dans Foca ?
20 Témoin 75 (interprétation). – La salle Partizan est juste en
21 dessous de l’immeuble du SUP, donc au-dessus de la mairie. Peut-être à 200
22 ou 300 mètres de là.
23 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Avec l’aide de
24 l’huissier, je souhaiterais montrer au témoin la photo qui porte la
25 cote 7302. Il s’agit de la pièce à conviction D11, (l’interprète se
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1 reprend) la pièce à conviction 11. Est-ce bien la salle Partizan ?
2 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
3 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Pourriez-vous nous
4 montrer où vous étiez précisément dans cet immeuble ?
5 Témoin 75 (interprétation). – On voit bien l’entrée et
6 l’escalier, et nous étions là, dans cette partie-là de l’immeuble. Nous
7 toutes.
8 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Pour le transcript, le
9 témoin a montré la porte d’entrée de l’immeuble, de l’immeuble principal,
10 ainsi que les fenêtres à droite.
11 Mme la Présidente (interprétation). – Oui.
12 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Je vais demander à
13 l’huissier de s’approcher de moi, car je voudrais montrer une autre
14 photographie. Il s’agit de la photographie 7295, elle fait partie de la
15 même pièce à conviction. Cette fois-ci, il s’agit d’une photo de taille
16 normale, elle se trouve dans la liasse que tout le monde possède. Je vais
17 vous demander de nous montrer la salle Partizan.
18 (Le témoin indique la salle.)
19 Le témoin montre l’immeuble qui se trouve à droite sur la
20 photo : il s’agit d’un immeuble blanc, de taille assez importante.
21 Et l’autre immeuble, qu’est-ce que c’est ?
22 Témoin 75 (interprétation). – C’est l’immeuble du SUP. C’est
23 maintenant que je viens de me rappeler, c’est l’immeuble du SUP. Juste en
24 face, il y a la mairie, ici la mairie, l’immeuble du SUP et Partizan est
25 juste là.
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1 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Pourriez-vous montrer la
2 mairie ?
3 (Le témoin indique la mairie.)
4 Le témoin montre l’immeuble qui se trouve sur la photo, à
5 gauche.
6 Quelles étaient les conditions de vie à Partizan ?
7 Témoin 75 (interprétation). – Il n’y avait pas de conditions,
8 c’était terrible. Quand nous sommes arrivés à Partizan, quand nous avons
9 tout nettoyé, il ne restait que des espèces de matelas en plastique, des
10 matelas qui étaient probablement utilisés par des sportifs. C’était une
11 salle de sport, alors nous avons tout nettoyé. Il n’y avait plus rien, il
12 n’y avait plus de couverture, il n’y avait rien d’autre.
13 Alors, celles ou ceux qui avaient des pulls utilisaient ces
14 pulls pour couvrir les enfants. Sinon, nous, on dormait là dans ces
15 conditions.
16 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Et la nourriture, comment
17 était-elle ?
18 Témoin 75 (interprétation). – De très mauvaise qualité. Parfois,
19 le matin, on nous apportait du thé et du pain, du pain sec. D’autres fois
20 ils nous apportaient des conserves d’un kilo, des récipients, et ils y
21 mettaient des pâtes périmées ou des restes de la nourriture de l’armée.
22 Voilà, nous nous servions directement dans ces récipients. Nous mangions
23 directement avec là-dedans avec nos mains. Nous avions faim, tous, les
24 enfants avaient faim, on mangeait tout ce qu’on nous apportait.
25 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Quelles étaient les
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1 conditions d’hygiène ?
2 Témoin 75 (interprétation). – Il n’y en avait pas. Tout d’abord,
3 nous allumions le feu à l’extérieur de cette salle, et on se lavait les
4 cheveux avec l’eau qu’on avait préalablement chauffée parce que nous
5 craignions d’avoir des puces.
6 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Y avait-il des gardiens ?
7 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
8 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Ils étaient combien ?
9 Etaient-ce des policiers ou des militaires ?
10 Témoin 75 (interprétation). – Ils étaient par deux : deux dans
11 la matinée, deux dans l’après-midi et deux pendant la nuit. Ce n’étaient
12 pas vraiment des soldats, ce n’étaient pas vraiment des policiers,
13 c’étaient des membres de la police de réserve. C’est ce qu’on disait,
14 c’était la police de réserve, des personnes d’un certain âge ou âgées, des
15 gens qui étaient déjà retraités.
16 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Portaient-ils des
17 uniformes ? Avaient-ils des armes ?
18 Témoin 75 (interprétation). – Ils avaient des armes. Ils
19 portaient des uniformes qui ressemblaient aux uniformes de la police.
20 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que ces gardiens
21 vous protégeaient ?
22 Témoin 75 (interprétation). – Deux d’entre eux, oui. Quand ils
23 étaient là, personne ne pouvait entrer dans la salle. En ce qui concerne
24 les autres -ici, il y avait un club de scouts-, et quand des personnes
25 venaient pour nous chercher, les gardiens se mettaient dans la remise pour
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1 qu’on ne les voie pas. Ils se cachaient.
2 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Pourriez-vous montrer
3 cette photographie au témoin ?
4 Quand vous parlez de ce petit bâtiment qui est juste à côté du
5 grand bâtiment, le mot que vous avez prononcé est-il écrit à côté de la
6 porte ?
7 Témoin 75 (interprétation). – Oui, c’est bien cela, le club des
8 scouts.
9 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Merci. Combien de temps
10 êtes-vous restée à Partizan ?
11 Témoin 75 (interprétation). – Jusqu’au 2 août 1992.
12 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Comment se fait-il que
13 vous vous rappeliez de cette date si bien ?
14 Témoin 75 (interprétation). – Je m’en rappelle très bien parce
15 que, cette nuit-là, ils avaient fait exploser la mosquée d’Aladza à Foca,
16 une mosquée qui a plus de 500 ans. Nous, nous étions à peu près à
17 200 mètres de la mosquée.
18 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Nous allons en parler.
19 Nous allons parler de la date du 2 août plus tard. Mais tout d’abord,
20 racontez-nous ce qui s’est passé à Partizan. Etiez-vous agressée
21 sexuellement pendant votre séjour à Partizan ?
22 Témoin 75 (interprétation). – Pas directement dans la salle,
23 mais ils venaient nous chercher tous les soirs, toutes les nuits ils nous
24 emmenaient de nouveau dans des appartements.
25 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Quand vous dites « eux », à
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1 qui pensez-vous ?
2 Témoin 75 (interprétation). – Je pense aux Serbes, aux Chetniks.
3 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que vous pensez
4 aux soldats ou aux civils ?
5 Témoin 75 (interprétation). – Aux soldats, oui.
6 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que, par exemple,
7 Dragan Zelenovic, dont vous avez déjà parlé -vous avez dit qu’il venait
8 vous chercher au lycée-, est-ce qu’il venait chercher des femmes ?
9 Témoin 75 (interprétation). – Pendant que j’y étais, je crois
10 que non.
11 Mme la Présidente (interprétation). – Madame, quand vous parlez
12 de l’école, vous pensez à l’école ou à Partizan ?
13 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Je pensais à Partizan.
14 Avez-vous jamais vu Dragan Zelenovic à Partizan ?
15 Témoin 75 (interprétation). – Non.
16 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Les soldats qui venaient
17 à Partizan, étaient-ce les mêmes soldats que ceux qui venaient à l’école
18 secondaire, au lycée, ou bien il s’agissait d’autres soldats ?
19 Témoin 75 (interprétation). – C’étaient les mêmes, mais il y en
20 avait d’autres aussi.
21 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Quand ces soldats
22 venaient, que faisaient-ils ?
23 Témoin 75 (interprétation). – Eh bien, ils venaient souvent la
24 nuit. Cette salle n’était pas éclairée, alors ils hurlaient, ils
25 appelaient parce qu’ils avaient une liste, la liste des personnes
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1 détenues. Alors, ils nous appelaient par notre nom, et si votre nom était
2 appelé, il fallait vous lever et les suivre.
3 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Et quand on vous a amenée
4 à différents lieux, que se passait-il à ces endroits ? Etait-ce la même
5 chose que ce qui s’est passé quand on vous amenait de l’école secondaire ?
6 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
7 Mme la Présidente (interprétation). – Est-ce que le témoin peut
8 dire ce qui s’est passé, puisque c’est un autre endroit, c’est un autre
9 lieu ?
10 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Que s’est-il passé ?
11 Témoin 75 (interprétation). – Eh bien, j’ai dit : ils venaient
12 nous chercher, ils venaient chercher les femmes toutes les nuits. Ils les
13 emmenaient dans les appartements.
14 Un soir, Dragomir Kunarac, appelé Zaga, et son grand ami, qu’on
15 appelait Gaga -je ne connais pas son vrai nom-, ils sont venus dans la
16 salle de Partizan ainsi qu’un type du Monténégro, Bane. Ils nous ont fait
17 sortir, moi et une autre personne, DB. Ils nous ont dit que nous devions
18 aller préparer un dîner et nettoyer un appartement.
19 Alors, nous nous sommes assis dans une voiture rouge, de marque
20 Lada. Ils nous ont conduits à Aladza, dans une maison qui appartenait à un
21 Musulman. Et il y avait pas mal de Serbes déjà là-bas : ils attendaient.
22 Et plus tard, il y a eu encore d’autres personnes qui sont arrivées dans
23 cette maison. Ils avaient apporté de la viande de l’hôtel pour manger. Ils
24 nous ont proposé de la nourriture aussi, mais nous avions peur à cause de
25 tout ce qui s’est passé. Nous ne pouvions pas manger.
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1 Gaga m’a forcée à entrer dans une pièce en disant : « Il n’y a
2 que Zuca, un jeune homme âgé de 16 ans, il est encore vierge », il m’a
3 demandé d’aller dans la chambre avec lui pour lui faire plaisir et de…
4 Mais Zuca n’est pas venu. Ce n’est pas lui qui est entré dans la chambre,
5 je ne me souviens plus qui était le premier.
6 Zaga a emmené DB dans l’autre chambre, il s’est enfermé à clef.
7 Il lui a dit que cela allait mal se passer pour une de nous deux. Il m’a
8 laissée avec le groupe de personnes. Ils sont tous passés un par un. Les
9 viols ne se sont pas arrêtés avant 2 heures du matin.
10 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous avez dit que Zaga a
11 amené DB dans l’autre chambre, et qu’il lui a dit qu’une de vous deux… Je
12 n’ai pas de transcript, pouvez-vous vous répéter ce qu’il a dit vraiment ?
13 Témoin 75 (interprétation). – Il a dit qu’une de nous deux
14 allait vraiment être abusée, enfin souffrir, au cours de cette nuit. Il a
15 utilisé un mot grossier.
16 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – L’avez-vous entendu dire
17 cela ?
18 Témoin 75 (interprétation). – Non.
19 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Comment le savez-vous ?
20 Témoin 75 (interprétation). – C’est DB qui me l’a dit plus tard,
21 quand nous avons quitté ce lieu. C’est là qu’elle m’a dit ce qu’il lui
22 avait dit.
23 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Pouvez-vous décrire cette
24 maison, la maison dont vous parlez ?
25 Témoin 75 (interprétation). – Eh bien, c’était une maison
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1 simple, il fallait monter l’escalier et, au sous-sol, il y avait un
2 atelier de couture mais quand on nous amenait dans cette maison, il y
3 avait beaucoup d’outils. On avait l’impression que quelqu’un faisait de la
4 couture là-bas. A l’étage, je pense qu’il y avait trois chambres, la
5 cuisine, la salle de bain et un couloir.
6 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Et où se trouvait cette
7 maison ?
8 Témoin 75 (interprétation). – A Aladza, c’est un quartier de
9 Foca. Ce n’est pas loin du lycée. Si on part de la ville, vers le lycée,
10 c’est à droite, ce quartier se trouve à droite.
11 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Et vous avez déjà dit que
12 cette maison se trouvait à peu près à 200 mètres de distance de la
13 mosquée ?
14 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
15 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous souvenez-vous quand
16 on vous a emmenée à cet endroit pour la première fois ?
17 Témoin 75 (interprétation). – Je ne me souviens pas exactement
18 de la date. Je pense que c’était 5 ou 6 jours après mon arrivée à
19 Partizan. La première fois, il m’avait ramenée quand Zaga et Gaga étaient
20 venus à Partizan. Ils m’avaient ramenée, mais je ne me souviens plus qui
21 il avait fait sortir. La deuxième fois, ils sont venus me chercher moi et
22 DB.
23 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Cela veut-il dire qu’ils
24 étaient déjà venus à Partizan avant que vous ne soyez amenée pour la
25 première fois dans cette maison à Aladza ?
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1 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
2 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Combien de fois, avant
3 que vous ne soyez amenée pour la première fois, vous avez vu ces
4 deux personnes ?
5 Témoin 75 (interprétation). – Je crois un ou deux jours avant.
6 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous avez dit que Zaga et
7 Gaga vous avez été amenées, vous et la personne appelée DB. Pouvez-vous
8 décrire Gaga ?
9 Témoin 75 (interprétation). – Il avait les cheveux gris, il
10 avait peut-être 45 ans. Il n’était pas très grand, il était assez gros, il
11 était aussi d’origine monténégrine.
12 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous avez dit « aussi ».
13 Que voulez vous dire par ce mot « aussi ». ? Cela veut-il que Zaga aussi
14 venait du Monténégro ?
15 Témoin 75 (interprétation). – Non.
16 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Qui d’autre alors ?
17 Témoin 75 (interprétation). – Toutes les autres personnes qui se
18 trouvaient dans cette maison venaient du Monténégro. Toutes ces personnes
19 qui m’ont violée cette nuit-là.
20 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous souvenez-vous des
21 noms de ces personnes ?
22 Témoin 75 (interprétation). – Oui, bien sûr.
23 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Pourriez-vous nous dire
24 les noms dont vous vous souvenez ?
25 Témoin 75 (interprétation). – Eh bien, je me souviens de toutes
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1 les personnes mais peut-être que je vais oublier un ou deux noms : Jure
2 Radovic venait de Foca, Durko Dubljevic venait du Monténégro, Ranko
3 Radulovic Montenegrin, Tolja, Bane, ce sont des surnoms car je ne connais
4 pas leurs véritables noms ; Scepo, Puko, Miga…, je ne me souviens pas de
5 tous. Puis, il y en avait un qui avait une blessure à l’estomac, il avait
6 un pansement, et il m’a forcé de le satisfaire, puisqu’il ne pouvait pas
7 me violer. Il était blessé. Mais il ne l’a pas permis.
8 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Ces hommes que vous venez
9 de mentionner, étaient-ils tous soldats ?
10 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
11 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Ils se trouvaient tous,
12 ce jour-là, dans cette maison, la première fois où on vous a emmenée dans
13 cette maison ?
14 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
15 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous avez dit que vous
16 étiez obligée de satisfaire, que voulez-vous dire par là ?
17 Témoin 75 (interprétation). – Je veux dire, je ne sais pas
18 comment m’exprimer.
19 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Etiez-vous obligée de
20 placer leur pénis dans votre bouche ?
21 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
22 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Qu’ont-ils fait d’autre ?
23 Témoin 75 (interprétation). – Ils entraient un par un, ils se
24 relayaient sur moi. A un moment donné, il sont tous entrés, un était sur
25 moi, l’autre sous moi, le troisième le plaçait dans ma bouche et les
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1 autres dans mes mains… Pour les satisfaire, comme ils disaient.
2 Donc, ils ont tous éjaculé sur moi, en répandant leur sperme sur
3 mon corps et Bane était le dernier. Il est resté le dernier. J’avais
4 demandé à Tolja de me faire sortir, parce qu’il fallait que je boive.
5 J’avais perdu mon souffle, et il m’a fait sortir dans la salle de bain. Il
6 a apporté une bombe, une grenade à main. Il m’a dit : « Ecoute, si jamais
7 ils te font quoi que ce soit d’autre, active cette arme. Tu vas périr,
8 mais ils vont périr eux aussi. Pas mal d’entre eux. »
9 Je n’ai pas osé prendre cette bombe car j’avais peur qu’ils me
10 tuent à cause de cela. Bane avait un couteau et il a demandé : « Quel sein
11 tu préférais ? » Tolja a dit : »Ne la touche pas vraiment. Elle est vraiment
12 belle ». C’est là qu’il m’a violée.
13 Jaga est entré par la suite dans la chambre et il m’a demandé de
14 me rhabiller parce que nous allions partir. Je me suis habillée, je suis
15 sortie de la chambre. DB m’attendait dans le couloir. On nous a, à
16 nouveau, conduites à Partizan. Quand je suis arrivée à Partizan, je ne
17 pouvais pas marcher. Je ne tenais pas debout. Pendant 3 jours, je me suis
18 cachée sous ma grand-mère. Je me couchais sous ma grand-mère quand ils
19 rentraient la nuit dans la salle. Elle se couchait sur moi car moi, je ne
20 tenais plus. Je ne pouvais plus le supporter.
21 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous avez dit…
22 Mme la Présidente (interprétation). – Nous allons faire une
23 pause pour déjeuner.
24 Nous allons faire une pause et reprendre à 14 heures 30.
25 (L’audience, suspendue à 13 heures, est reprise à 14 heures 30.)
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1 Mme la Présidente (interprétation). – Bonjour, nous allons donc
2 poursuivre l’interrogatoire principal du bureau du Procureur.
3 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Merci, Madame la
4 Présidente.
5 Madame, vous venez de nous décrire un viol collectif dont vous
6 avez été victime dans une maison située dans le quartier d’Aladza ? Vous
7 souvenez-vous dans quelle pièce ceci a eu lieu ?
8 Témoin 75 (interprétation). – Dans la chambre à coucher.
9 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Il n’y avait qu’une seule
10 chambre à coucher dans cette maison ?
11 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
12 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Dans quelle pièce se
13 trouvait DB à ce moment-là ?
14 Témoin 75 (interprétation). – Dans la pièce qui était à côté de
15 la mienne, de celle où je me trouvais.
16 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous avez dit qu’à la
17 fin, vers la fin, Zaga est entré dans la pièce ?
18 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
19 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – A ce moment-là, étiez-
20 vous habillée ou étiez-vous nue ?
21 Témoin 75 (interprétation). – J’étais nue.
22 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – A ce moment-là, avez-vous
23 été violée ?
24 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
25 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Par qui ?
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1 Témoin 75 (interprétation). – Par Bane, celui qui venait du
2 Monténégro.
3 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que Zaga a assisté
4 à cela ?
5 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
6 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce qu’il a dit quoi
7 que ce soit au sujet de ce qu’il a vu ainsi ?
8 Témoin 75 (interprétation). – Non, il a seulement dit que je me
9 dépêche de me rhabiller pour que l’on puisse partir.
10 Témoin 75 (interprétation). – Comment êtes-vous retournée à la
11 salle de sport Partizan ?
12 Témoin 75 (interprétation). – Il nous y ramenées dans la même
13 voiture.
14 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous souvenez-vous de
15 quelle automobile il s’agissait ?
16 Témoin 75 (interprétation). – Il s’agissait d’une Lada Neva, une
17 voiture rouge.
18 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous souvenez-vous
19 combien de temps en tout vous avez passé dans cette maison, ce soir-là ?
20 Témoin 75 (interprétation). – Je crois que j’y suis restée de
21 19 heures à 1 heure ou 2 heures du matin.
22 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous souvenez-vous de la
23 durée de ce viol collectif ?
24 Témoin 75 (interprétation). – Cela a duré environ pendant tout
25 le temps, sauf la période de temps qu’ils ont passée à boire et à manger.
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1 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Savez-vous ce qu’il est
2 arrivé à DB pendant que vous-même étiez soumise à ce viol collectif ?
3 Témoin 75 (interprétation). – Je ne sais pas.
4 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Ces soldats dont vous
5 nous avez donné les noms et les surnoms, est-ce qu’ils appartenaient à un
6 même groupe de soldats ?
7 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
8 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que ce groupe,
9 cette unité portait un nom ?
10 Témoin 75 (interprétation). – Je ne sais pas. Tout ce que je
11 sais, c’est que leur chef était Dragomir Kunarac, alias Zaga.
12 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Comment saviez-vous que
13 c’était lui le chef de ce groupe ?
14 Témoin 75 (interprétation). – Parce que c’est lui qui commandait
15 et qui faisait toujours tout en premier. C’est lui qui venait nous
16 chercher à la salle Partizan, c’est lui qui nous y ramenait.
17 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Avez-vous entendu des
18 soldats s’adresser à lui comme s’il était leur chef ?
19 Témoin 75 (interprétation). – Je ne me souviens pas.
20 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Comment avez-vous
21 découvert, appris son surnom Zaga ?
22 Témoin 75 (interprétation). – Eh bien au début, la première
23 fois, on n’a pas vraiment compris à ce moment-là que son surnom était
24 Zaga. Mais quand on est retournées à la salle de sport Partizan, ils nous
25 ont demandé où est-ce qu’on était allées et on a dit : « Motarkan Zaga ».
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1 Cela veut dire la même chose. Quand il est venu nous chercher, pour la
2 deuxième fois, on avait entre-temps appris quel était son véritable nom et
3 son surnom.
4 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que vous avez
5 entendu ces soldats s’adresser à lui en l’appelant Zaga ou Kunarac ?
6 Témoin 75 (interprétation). – Zaga.
7 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Et comment se fait-il que
8 vous ayez appris quel était son nom de famille ?
9 Témoin 75 (interprétation). – Je ne me souviens pas bien.
10 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Comment avez-vous appris
11 les surnoms des autres soldats ou leur nom, le cas échéant ?
12 Témoin 75 (interprétation). – C’est parce qu’ils
13 s’interpellaient, ils se parlaient en utilisant ces noms. Donc c’est comme
14 cela que j’ai pu savoir qui était qui. Il y en avait beaucoup qui se
15 présentaient, qui nous disaient comment ils s’appelaient ; et beaucoup
16 nous ont demandé si on voulait aller à Niksic au Monténégro avec eux.
17 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous souvenez-vous qui
18 vous a dit pour la première fois que son surnom était Zaga ?
19 Témoin 75 (interprétation). – Non, je ne me souviens pas.
20 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Pouvez-vous nous décrire
21 cet homme ?
22 Témoin 75 (interprétation). – Il est grand, il était assez
23 mince, il était laid. Il avait des cheveux un peu bouclés. Je sais que
24 chaque fois que j’étais face à lui, je n’osais pas le regarder, parce
25 qu’il était assez terrifiant.
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1 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Le connaissiez-vous déjà
2 avant la guerre ?
3 Témoin 75 (interprétation). – Non, je n’avais jamais entendu
4 parler de lui.
5 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – La personne que vous
6 venez de me décrire est ce Zaga. Je voudrais vous demander, en regardant
7 dans ce prétoire, si vous voyez cette personne ici aujourd’hui, dans ce
8 prétoire ?
9 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
10 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Pouvez-vous indiquer du
11 doigt ou plutôt, pouvez-vous plutôt me dire où se trouve cette personne en
12 me disant où elle est assise et quelle est sa tenue vestimentaire ?
13 Témoin 75 (interprétation). – Il se trouve assis… c’est celui
14 qui est assis vers moi ; il porte un costume sombre.
15 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Pouvez-vous me dire de
16 quelle couleur est sa cravate ?
17 Témoin 75 (interprétation). – Violette, couleur lilas.
18 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Je voudrais signaler pour
19 le compte-rendu que le témoin a indiqué l’accusé Dragoljub Kunarac.
20 Mme la Présidente (interprétation). – Bien.
21 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous avez décrit
22 également une personne qui était présente lors de votre arrestation le
23 3 juillet 1992. Vous avez dit qu’il s’agissait de Klamfa ou Radomir Kovac.
24 Pouvez-vous, s’il vous plaît, regarder les personnes présentes dans ce
25 prétoire et nous dire si cet homme s’y trouve ?
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1 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
2 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Pouvez-vous me dire où il
3 est assis ?
4 Témoin 75 (interprétation). – C’est le deuxième à côté de Zaga,
5 de Kunarac.
6 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Quelle est sa tenue
7 vestimentaire ?
8 Témoin 75 (interprétation). – Je ne vois pas très bien. Est-ce
9 que je peux me lever pour voir ? Il porte une chemise bleue, un costume
10 gris ; je n’arrive pas bien à voir sa cravate.
11 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Pour le compte-rendu, je
12 souhaite signaler que le témoin a ainsi décrit l’accusé Radomir Kovac.
13 Mme la Présidente (interprétation). – Bien.
14 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous avez décrit un homme
15 que vous avez vu à Buk Bijela et que vous avez dit s’appeler Zoran
16 Vukovic. Voyez-vous cet homme aujourd’hui dans le prétoire ?
17 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
18 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Pouvez-vous me dire où il
19 est assis ?
20 Témoin 75 (interprétation). – C’est le troisième homme assis à
21 côté des deux autres.
22 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Madame la Présidente,
23 Messieurs les Juges, le témoin indique l’accusé Zoran Vukovic.
24 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Pouvez-vous me dire à
25 quelle fréquence on venait vous chercher pour vous emmener dans cette
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1 maison située dans le quartier Aladza.
2 Témoin 75 (interprétation). – Deux fois.
3 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous nous avez parlé de
4 la première fois. Pouvez-vous nous parler de la deuxième fois où l’on vous
5 a emmenée dans cette maison ?
6 Témoin 75 (interprétation). – C’était quelques jours plus tard.
7 Dragomir Kunarac, Dragan, a envoyé une femme, une journaliste qui était
8 soi-disant une journaliste de la chaîne S de Pale à la salle Partizan. Il
9 lui a dit de se présenter comme une journaliste venant de Sarajevo. Elle
10 est venue et s’est présentée comme appartenant à une chaîne de télévision
11 de Sarajevo. Elle a demandé aux femmes de raconter ce qui leur était
12 arrivé pendant toutes ces journées.
13 J’ai dit : « Est-il vraiment possible qu’une journaliste puisse
14 venir ici de Radio Sarajevo ? » A ce moment-là, elle nous a dit qu’elle
15 n’était pas journaliste de Sarajevo mais de Pale. Je lui ai dit :
16 « Pourquoi ne pas nous le dire ? Je savais très bien qu’il n’était pas
17 possible pour une journaliste de Sarajevo de venir ici. »
18 A ce moment-là, elle a commencé à poser des questions sur ce qui
19 nous était arrivé. J’étais étendue sur un des matelas de mousse avec un
20 jeune enfant de 3 ans. Elle est venue vers moi et m’a demandé ce qu’ils
21 m’avaient fait personnellement. Je lui ai dit qu’ils m’avaient tout fait,
22 sauf qu’ils ne m’avaient pas frappée.
23 Je savais que c’était Zaga qui avait organisé tout cela, que
24 c’était lui qui l’avait envoyée pour nous poser des questions afin de nous
25 créer encore plus d’ennuis ultérieurement.
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1 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Sur la base de quels
2 faits affirmez-vous que c’est Zaga qui a envoyé cette femme vous
3 rencontrer ?
4 Témoin 75 (interprétation). – Eh bien, après son arrivée, après
5 qu’elle se soit entretenue avec nous ainsi à la salle de sport Partizan,
6 Zaga est venu avec son acolyte Gaga et a dit : « Celles qui sont si fortes
7 pour parler, elles n’ont qu’à venir et sortir avec moi. Je ne vais même
8 pas dire leur nom. Venez avec moi. » On a très bien su à qui il faisait
9 référence et une fois de plus, il nous a amenées dans la même maison, la
10 maison qui se situe dans le quartier d’Aladza.
11 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Je vais vous demander
12 d’examiner la liste qui se trouve devant vous et de me dire qui on a
13 emmené avec vous ce jour dans cette maison ?
14 Témoin 75 (interprétation). – Eh bien oui : DB, le n° 87, le
15 n° 50 et moi-même.
16 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous souvenez-vous
17 comment on vous a emmenées là-bas dans cette maison ?
18 Témoin 75 (interprétation). – On nous a emmenées en voiture, je
19 n’arrive pas à me souvenir quelle était la marque de cette voiture.
20 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous souvenez-vous quel
21 jour c’était et à quel moment de la journée ?
22 Témoin 75 (interprétation). – C’était le 2 août 1992 et il
23 faisait déjà nuit. Il devait être peut-être 19 heures ou 20 heures parce
24 que c’est généralement vers cette heure-là qu’ils venaient à la salle de
25 sport Partizan.
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1 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Cette fois-là, avez-vous
2 encore été violée ?
3 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
4 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Pouvez-vous, s’il vous
5 plaît, donner les détails relatifs à ce viol ?
6 Témoin 75 (interprétation). – Comme je l’ai déjà dit, Zaga et
7 Gaga nous ont donc emmenées jusqu’à cette maison située dans le quartier
8 d’Aladza, et ils nous ont laissées là. Il y avait un groupe de soldats, de
9 Chetniks et de Monténégrins. Nous sommes entrés dans cette pièce, il y
10 avait déjà trois autres jeunes filles qui s’y trouvaient.
11 Tout d’abord, je n’ai pas su qui elles étaient ni d’où elles
12 venaient. Mais ensuite, en parlant avec elle, j’ai découvert qu’elle
13 devenait de Gacko, qu’elles avaient été arrêtées à Kalinovik où elles
14 étaient retenues prisonnières dans l’école, là-bas. Zaga et ces
15 Monténégrins les avaient amenées à la maison où nous nous trouvions.
16 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Je vais vous demander de
17 vous reporter une fois de plus à la liste qui se trouve sous vos yeux et
18 de nous donner le pseudonyme, le numéro de ces jeunes filles, ou les
19 initiales, le cas échéant.
20 Témoin 75 (interprétation). – Une seule de ces jeunes filles
21 figure sur la liste que j’ai sous les yeux. Après, je la connaissais assez
22 bien, c’est le n° 190.
23 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Sans nous donner de nom,
24 je voudrais juste que vous nous disiez si vous connaissez le nom des deux
25 autres jeunes filles qui venaient de Gacko ?
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1 Témoin 75 (interprétation). – Je crois que je connais le nom de
2 l’une d’entre elles, mais je n’ai jamais su le nom de l’autre parce qu’on
3 l’a emmenée avant que je n’ai eu la possibilité de le faire.
4 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Je voudrais que
5 l’huissier donne au témoin une feuille de papier sur laquelle elle pourra
6 inscrire ce nom.
7 (Le témoin inscrit le nom sur la feuille de papier.)
8 Mlle Lauer. – Ce document sera coté 190 des pièces du Procureur.
9 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Cette nuit-là, est-ce que
10 vous avez vu parmi les femmes qui se trouvaient là une femme enceinte ?
11 Témoin 75 (interprétation). – Oui. C’est celle dont je viens de
12 parler, elle était enceinte de 8 mois.
13 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – En dehors de ces trois
14 jeunes filles que vous avez mentionnées, est-ce que vous avez vu d’autres
15 femmes ou d’autres jeunes filles cette même nuit, dans cette maison ?
16 Témoin 75 (interprétation). – En dehors de nous quatre et de ces
17 trois jeunes filles ou femmes qui se trouvaient déjà là, je n’en ai pas
18 vues d’autres, non.
19 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous nous avez dit que
20 vous avez été violée dans cette maison. Pouvez-vous nous dire qui vous a
21 violée, et combien de fois ?
22 Témoin 75 (interprétation). – Pendant la nuit que j’ai passée
23 là, c’est Durko Dubljevic qui m’a violée, il était du Monténégro.
24 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que quelqu’un
25 d’autre vous a violée ?
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1 Témoin 75 (interprétation). – Oui Kontic, surnommé Konta, et
2 Rado Radulovic qui lui aussi était du Monténégro. En fait, les deux hommes
3 dont je viens de parler étaient du Monténégro.
4 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Comment avez-vous été
5 violée ? Qu’est-ce qu’ils vous ont fait ?
6 Témoin 75 (interprétation). – Durko Dubljevic m’a enfermée dans
7 une pièce avec lui. Il a refusé de laisser qui que ce soit d’autre dans
8 cette pièce, et il a refusé de me laisser partir. Toutes les 10 minutes,
9 pendant toute cette nuit, il m’a violée.
10 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce qu’il y a eu
11 pénétration vaginale de sa part ?
12 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
13 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Et pénétration annale ?
14 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
15 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce qu’il y a eu
16 fellation ?
17 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
18 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Les deux autres hommes
19 que vous avez mentionnés, quand vous ont-ils violée ?
20 Témoin 75 (interprétation). – Le matin, le matin à l’aube, au
21 petit matin.
22 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce qu’ils vous ont
23 violée en même temps, ou l’un après l’autre ?
24 Témoin 75 (interprétation). – L’un après l’autre, et Gaga aussi.
25 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Quand Gaga vous a-t-il
Page 1431
1 violée ?
2 Témoin 75 (interprétation). – Le matin.
3 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous nous dites le matin.
4 Est-ce qu’il faisait déjà jour ? Est-ce que vous pouvez dire à peu près
5 quelle heure il était ?
6 Témoin 75 (interprétation). – Je ne peux pas vous dire
7 exactement quelle heure il était parce que je n’avais pas de montre, mais
8 en tout cas il faisait jour. C’était dans la matinée.
9 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que vous avez pu
10 voir que, pendant cette même nuit, d’autres jeunes filles étaient
11 violées ? L’avez-vous vu ?
12 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
13 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Qu’est-ce que vous avez
14 vu ?
15 Témoin 75 (interprétation). – J’ai vu le n° 87 dans la voiture,
16 pas dans la maison, dans la voiture. Bane l’a violée.
17 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous voulez dire qu’il
18 l’a violait dans la voiture ?
19 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
20 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Au moment où on vous
21 amenait à la maison ? A quel moment ?
22 Témoin 75 (interprétation). – Non, non. Cette nuit-là, pendant
23 qu’on était dans la maison, il l’a emmenée dans la voiture et il l’a
24 violée dans la voiture.
25 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Qu’avez-vous vu
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1 exactement ? Avez-vous vu quand il l’a violait dans la voiture, ou bien
2 avez-vous simplement vu le moment où il l’a emmenée dans la voiture ?
3 Témoin 75 (interprétation). – Non, j’ai vu qu’elle était dans la
4 voiture avec lui. Parce que d’abord, Gaga m’a obligée à descendre au sous-
5 sol ; et en descendant les escaliers, j’ai vu que la personne portant le
6 n° 87 se trouvait dans la voiture avec Bane. Ensuite, elle m’a dit elle-
7 même qu’elle avait été violée dans la voiture.
8 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous avez parlé de Gaga à
9 l’instant. Est-ce que cela veut dire que l’incident dont vous nous parlez
10 s’est produit le matin ?
11 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
12 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Avez-vous pu voir ce qui
13 est arrivé aux jeunes filles venant de Gacko ?
14 Témoin 75 (interprétation). – Gica Vasiljevic de Brod est venu
15 cette nuit-là, il n’est pas reparti avec une jeune fille, celle dont je ne
16 connais pas le nom, mais il est reparti également avec la personne qui
17 porte le n° 50.
18 Dans la maison, il y avait DB, le n° 87, la personne portant les
19 n° 190, et moi-même. Nous, nous sommes restées dans la maison. Donc,
20 pendant cette nuit-là, alors que nous étions dans la pièce, à minuit moins
21 20, la mosquée d’Aladza a explosé. Et je le sais parce que, sous le
22 souffle de l’explosion, toutes les vitres ont explosé, et certains murs
23 se sont effondrés également.
24 Les Monténégrins se sont plaints, ils ont dit : « Mais pourquoi
25 ne nous a-t-on pas prévenus à l’avance ? », parce que Brane a été coupé par
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1 l’explosion des fenêtres.
2 Quand cela s’est donc produit, cela les a fait sursauter. Ils
3 ont commencé à hurler à la fenêtre, en jurant parce qu’on ne les avait pas
4 prévenus qu’il y aurait une telle explosion à ce moment-là.
5 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Mais comment pouvez-vous
6 être aussi sûre de l’heure à laquelle s’est produite cette explosion ?
7 Témoin 75 (interprétation). – Parce que j’ai regardé l’horloge à
8 ce moment-là. Cela m’intéressait de savoir à quelle heure cela s’était
9 produit.
10 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous nous avez dit que la
11 personne portant le n° 50 et la personne enceinte ont été emmenées par
12 Gica. Est-ce que vous vous souvenez du moment où cela s’est passé, au
13 début de la soirée ?
14 Témoin 75 (interprétation). – Non, non la femme enceinte est
15 restée là, mais c’est l’autre dont je ne sais pas le nom qui a été emmenée
16 par Gica.
17 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Quand cela s’est-il
18 produit ? Est-ce que c’est au moment où vous êtes arrivée dans la maison
19 ou plus tard dans la soirée, dans la nuit ?
20 Témoin 75 (interprétation). – C’était pendant la nuit parce que
21 nous étions encore tous, là, dans la maison au moment où il y a eu
22 l’explosion dans la mosquée.
23 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que vous avez vu
24 Zaga cette même nuit, après qu’il vous a emmenée dans la maison ? Est-ce
25 que vous l’avez vu ?
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1 Témoin 75 (interprétation). – Non.
2 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Quand vous êtes arrivée
3 dans cette maison, où exactement êtes-vous allée, dans quelle pièce ?
4 Témoin 75 (interprétation). – Dans la cuisine, c’est ainsi qu’il
5 appelait cette pièce : la cuisine. Elle était de l’autre côté du couloir
6 en face de la chambre à coucher.
7 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Quand vous étiez dans la
8 cuisine, est-ce qu’il vous était possible de voir ce qui se passait dans
9 les autres pièces ?
10 Témoin 75 (interprétation). – Non.
11 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Et quand vous-même vous
12 avez été violée, dans quelle pièce cela s’est-il passé ? Est-ce que c’est
13 dans la même pièce où avait eu lieu le viol collectif ?
14 Témoin 75 (interprétation). – Non. C’était dans une autre pièce,
15 sur le divan.
16 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Et au moment où vous
17 étiez dans cette pièce, est-ce que vous étiez en mesure de voir ce qui se
18 passait dans d’autres pièces ?
19 Témoin 75 (interprétation). – Non.
20 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Qu’est-ce qu’il s’est
21 passé le lendemain matin ?
22 Témoin 75 (interprétation). – Le lendemain matin, c’est
23 Dragan Stankovic, surnommé Dragec, qui est venu, ainsi que Stjepo, et je
24 pense qu’il y avait Miga également avec eux. Ils nous ont rassemblées,
25 nous étions quatre filles. Ils nous ont emmenées de cet immeuble par une
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1 voiture, la petite Fiat, ils nous ont donc fait monter dans cette Fiat.
2 Dehors, il y avait beaucoup de soldats ; il y avait Zaga, Gaga
3 et les autres. Ils nous ont vu monter dans la voiture avec les trois
4 hommes, dont j’ai cité les noms. Ils ont demandé à ce qu’ils nous ramènent
5 à la maison, de nouveau à l’intérieur. Nous sommes donc rentrées à la
6 maison. Zaga nous a dit qu’il fallait aller à Miljevina parce que nous
7 parlions bien et que nous allions faire face à une journaliste. De toute
8 façon, ils allaient nous laisser descendre la rivière de la Drina. Ce sont
9 des gens qui sont pires que des gens de Foca.
10 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous avez parlé de
11 Pero Elez ? Qui est-ce ?
12 Témoin 75 (interprétation). – C’est un Chetnik.
13 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Comment savez-vous son
14 nom ?
15 Témoin 75 (interprétation). – Ce n’est que plus tard que j’ai
16 connu cet homme parce que j’ai passé dans sa maison trois mois.
17 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que vous vous
18 souvenez dans quelle voiture Zaga vous a emmenée à Miljevina ?
19 Témoin 75 (interprétation). – Je me souviens que c’était une
20 voiture, une voiture assez vieille. Je pense que c’était une Fiat, mais on
21 appelait chez nous cela « Pezeac », ou c’était peut-être une Lada. Je ne
22 suis vraiment pas sûre. Je sais que c’était une voiture assez vieille.
23 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Qui était dans la
24 voiture ? Combien de filles et combien d’hommes y avait-il ?
25 Témoin 75 (interprétation). – Il n’y avait que Zaga qui était
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1 avec nous et qui nous amenait, alors que du côté des filles, il y avait
2 DB, 87, 190 et moi-même.
3 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Où vous a-t-on emmenées à
4 Miljevina ?
5 Témoin 75 (interprétation). – On nous a d’abord emmenées devant
6 un café. Il y avait beaucoup de soldats qui étaient assis sur la terrasse
7 de ce café, ils buvaient et ils mangeaient. Ils nous ont demandé de nous
8 asseoir, de manger et de boire. Mais aucune de nous ne mangeait, on ne
9 pouvait pas véritablement manger. D’abord, Zaga nous a fait tellement peur
10 que moi je perdais le souffle. Je ne pouvais même pas respirer et encore
11 moins manger.
12 Nous attendions tout simplement cette journaliste, car il en a
13 parlé, et il fallait soi-disant faire face et voir si éventuellement on
14 avait dit des choses vraies ou si on avait menti, etc. Puis il a dit,
15 comme je l’ai dit, qu’ils allaient nous attacher sur une planche et nous
16 faire descendre par la rivière de la Drina. C’est ce qu’il nous a promis
17 et nous avions peur. Ils ont commencé à nous provoquer, ils ont dit
18 n’importe quoi sur notre compte. Il y en a un qui a dit : « Vous ne voyez
19 pas que, pratiquement, elle est à la fin de ses jours. Je peux la tuer
20 plus tôt. ».
21 Je n’ai pas osé regarder ; je ne savais pas de qui il parlait.
22 Il y avait Misko Savic, un Monténégrin qui était dans le groupe. Il nous a
23 emmenées dans la maison de Nusret Karaman. C’était à Miljevina.
24 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – La jeune fille dont on a
25 parlé et à propos de laquelle on a dit qu’elle était pratiquement à la fin
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1 de ses jours, est-ce à vous qu’il pensait ?
2 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
3 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Je vais demander l’aide
4 de l’huissier pour montrer les deux photographies au témoin. C’est la
5 pièce à conviction 11 et les photographies 1359 et 1358.
6 (La greffière montre les deux photographies.)
7 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Il s’agit
8 d’agrandissements des photographies qui sont déjà rangées dans le
9 classeur.
10 La maison que vous voyez sur cette photographie… Est-ce 59 ou
11 58 ? Je pose la question à l’huissier.
12 Mlle Lauer. – Je pense que c’est marqué 55.
13 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Excusez-moi. Je pense
14 avoir commis une erreur. C’est donc 55 et non pas 58 et 59 dont j’ai
15 parlé. On va d’abord voir la photographie 55. Pouvez-vous nous dire,
16 madame le Témoin, ce que vous voyez sur la photographie ?
17 Témoin 75 (interprétation). – Je vois la maison particulière où
18 j’ai été.
19 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – C’était la maison de
20 Karaman ?
21 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
22 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Monsieur l’huissier,
23 pourriez-vous montrer l’autre photographie au témoin et surtout vérifier
24 le numéro de la photo car j’ai commis une erreur en donnant les numéros ?
25 Je n’avais pas mes lunettes. Est-ce bien la même maison ?
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1 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
2 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Merci. La maison de
3 Karaman, comment saviez-vous qu’il en était le propriétaire ?
4 Témoin 75 (interprétation). – J’ai passé trois mois dans cette
5 maison ; je ne pouvais pas ne pas le savoir. Je l’ai appris.
6 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Mais qui vous l’a dit ?
7 Témoin 75 (interprétation). – C’est le frère de cette dame qui
8 répondait au nom de Karaman qui me l’a dit. Il avait sa maison qui n’était
9 pas très loin par rapport à la maison où j’étais enfermée. Il était resté
10 dans sa propre maison avec sa famille. Les Serbes le protégeaient. Si
11 jamais par exemple ils avaient besoin de lui, ils le prenaient. Ils lui
12 demandaient de marcher devant le camion pour que si jamais il tombe sur
13 les champs de mines, que ce soit lui et non pas ceux dans le camion. C’est
14 ce monsieur qui nous apportait de la nourriture.
15 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Au moment où vous vous
16 êtes rendues dans cette maison, qui était dans la maison ?
17 Témoin 75 (interprétation). – Au moment où nous sommes arrivées
18 à la maison, nous avons rencontré deux filles. Je pense que c’était la
19 fille de Karaman et une autre jeune fille. Mais je ne les connaissais pas.
20 C’étaient les copines de cette fille n° 87 et puis, à l’entrée, nous avons
21 également rencontré Zaga. C’est deux jeunes filles ont été emmenées par
22 Zaga. Je ne sais pas où.
23 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Y avait-il des soldats à
24 la maison, outre Zaga ?
25 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
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1 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Auriez-vous l’amabilité
2 de nous dire qui était sur place ?
3 Témoin 75 (interprétation). – Il y avait Radovan Stankovic,
4 Rasco, Nedzo Samardzic et Nikola Brcic, surnommé Rodzo. Il y avait une
5 jeune fille de Gacko, -excusez-moi- de Kalinovik. Je n’ai pas ici son nom
6 sur la liste.
7 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous êtes restée combien
8 de temps à la maison ?
9 Témoin 75 (interprétation). – Trois mois.
10 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Au cours de cette période
11 que vous avez passée dans cette maison, on a abusé de vous sexuellement ?
12 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
13 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Pouvez-vous nous dire
14 quelques détails à ce sujet-là ?
15 Témoin 75 (interprétation). – Tout premièrement, ce commandant
16 -ils l’appelaient comme cela-, Pero Elez, surnommé Gingilo, ce qu’il avait
17 pour intention et pour objectif, c’est que ce soit lui le premier à
18 violer, que ce soit une mineure ou pas, l’important pour lui était que ce
19 soit lui le premier, notamment quand c’était une mineure.
20 Au début, le n° 87 et moi-même, nous étions tellement épuisées
21 de ce qui s’est passé à Foca, il nous a dit qu’il serait seul avec nous-
22 mêmes et qu’il allait nous garder pour lui-même, que plus personne ne
23 pourrait nous violer, qu’il serait le seul. Je parle de Pero Elez. Il l’a
24 dit comme cela, mais ce n’était pas vrai !
25 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Il vous a violée, Pero
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1 Elez ?
2 Témoin 75 (interprétation). – A plusieurs reprises. Oui. Dans le
3 même lit, ensemble, avec le n°87.
4 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que d’autres
5 soldats également vous ont violée pendant que vous étiez dans cette
6 maison ?
7 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
8 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Oui. Quand nous sommes
9 rentrées pour la première fois dans cette maison, on nous a demandé de
10 montrer au premier étage. Il y avait une chambre qui avait été arrangée.
11 On nous a fait entrer. On nous a demandé d’abord de faire le ménage dans
12 une autre pièce, de placer les matelas en mousse pour pouvoir dormir.
13 Ensuite, Nikola Brcic Rodzo est venu ; il m’a fait entrer de force dans
14 cette pièce qui avait déjà été arrangée, aménagée et c’est lui qui a été
15 le premier à me violer.
16 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que d’autres
17 également personnes vous ont violée ?
18 Témoin 75 (interprétation). – Oui. Nedzo Samardzic, Zoran
19 Samardzic, Misko Savic. Et puis, il y avait un certain nombre d’autres que
20 je ne connaissais pas et qui ont été emmenées par les Monténégrins parce
21 qu’il n’y avait pas de bière à Foca. C’est du Monténégro qu’on emmenait de
22 la bière et de Miljevina qu’on ramenait du charbon. On transportait le
23 charbon en direction du Monténégro.
24 Pero nous a donc envoyées ces gens-là. Nous étions obligées de
25 préparer de la cuisine, de leur préparer le dîner, de leur servir tout
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1 cela, à boire, à manger. Une fois, quand ils étaient rassasiés de tout,
2 ils ont indiqué les jeunes filles qui devaient les suivre et les
3 violaient.
4 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – A part vous quatre et
5 cette jeune fille dont vous avez parlé et qui était sur place au moment où
6 vous êtes arrivée, y avait-il d’autres filles qui étaient dans la maison ?
7 Mais je vais vous demander de ne pas prononcer leur nom, vous allez
8 regarder juste la liste et vous nous direz quels sont les numéros qui
9 correspondent.
10 Témoin 75 (interprétation). – C’est 132. Ensuite les
11 initiales AB, ensuite les initiales AS.
12 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce qu’il y avait une
13 autre jeune fille dont le nom ne figure pas sur la liste ? Si c’est le
14 cas, je vous prie de ne pas prononcer son nom. Mais si vous voulez bien
15 inscrire son nom sur un bout de papier que l’huissier va vous présenter ?
16 Témoin 75 (interprétation). – Vous voulez que je vous donne le
17 nom et le prénom ?
18 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Si vous le connaissez,
19 bien évidemment.
20 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
21 (Le témoin inscrit le nom et le prénom.)
22 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Madame la Présidente,
23 Messieurs les Juges, juste pour donner quelques explications au sujet du
24 nom et du prénom qui sont marqués, cela correspond aux initiales JG.
25 Madame le Témoin, comme il s’agit de ce nom que vous avez
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1 inscrit, j’aimerais que vous le marquiez comme JG.
2 Mlle Lauer. – (Hors micro)
3 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Quand JG est-elle arrivée
4 à la maison ?
5 Témoin 75 (interprétation). – Je pense quatre ou cinq jours
6 après notre arrivée à la maison.
7 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que vous vous
8 souvenez qui l’avait emmenée à la maison ?
9 Témoin 75 (interprétation). – Je pense que c’est Misko Savic qui
10 l’a emmenée.
11 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Quand cette personne dont
12 le nom correspond au 132 est-elle arrivée à la maison ?
13 Témoin 75 (interprétation). – Mais moi, je suis restée assez
14 longtemps dans cette maison. Peut-être un mois, un mois et demi après mon
15 arrivée dans cette maison, c’est la personne AB qui est arrivée. Ensuite,
16 on l’a ramenée avec une autre jeune fille, elles ont passé deux nuits à la
17 maison, et ensuite, on les a ramenées chez elles.
18 Et ils ont rassemblé toutes les jeunes filles, toutes les femmes
19 de Miljevina, les enfants également. Quand ils les ont pratiquement
20 escortées jusqu’à Foca, c’est Radovan Stankovic qu’il l’a fait sortir du
21 car, il a fait sortir du car cette personne AB, et il l’a acheminée
22 jusqu’à chez nous, dans cette maison de Karaman. Alors que la personne
23 dont le nom correspond à 132 est arrivée plus tard. Elle n’a pas été
24 touchée sur place.
25 Mme la Présidente (interprétation). – Excusez-moi, madame.
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1 Maître Kolesar, je pense que vous voulez dire quelque chose ?
2 M. Kolesar (interprétation). – Est-ce que mon client peut sortir
3 du prétoire ? Il a besoin de sortir aux toilettes.
4 Mme la Présidente (interprétation). – Oui, je vous en prie,
5 laissez-le sortir.
6 (L’accusé Kovac sort et revient dans le prétoire.)
7 Je vous en prie, vous pouvez continuer, Maître.
8 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Qu’est-ce qui s’est passé
9 avec la personne AS ? Vous en aviez parlé. Vous avez dit que son nom ne
10 figurait pas sur la liste. A quel moment est-elle arrivée ?
11 Témoin 75 (interprétation). – Vous parlez de AB et de AS, les
12 deux sont arrivées en même temps. C’est Radovan Stankovic qui les a fait
13 descendre du car et les a emmenées chez nous. C’est Pero qui lui a ordonné
14 d’emmener ces deux jeunes filles AS, AB.
15 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Comment le savez-vous ?
16 Témoin 75 (interprétation). – Mais je le sais, eux-mêmes se
17 racontaient entre eux. Pendant trois mois, Radovan Stankovic est resté
18 avec nous le plus de temps. Nikola Brcic, Nedzo Samardzic, ces trois
19 hommes pratiquement passaient chaque nuit avec nous.
20 Mais ils nous l’ont dit : « Quand on aura plus besoin de vous,on
21 va vous tuer. »‘ C’est la raison pour laquelle ils pouvaient bien dire
22 n’importe quoi parce qu’ils étaient pratiquement sûrs que personne
23 n’allait s’en sortir et que personne ne puisse venir un jour et dire quoi
24 que ce soit à leur égard et raconter le destin et les épreuves qu’il a
25 passées.
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1 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que vous avez eu
2 l’idée de vous enfuir à un moment donné ou à un autre ?
3 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
4 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que vous avez
5 essayé ?
6 Témoin 75 (interprétation). – Non, car on ne savait pas où et on
7 ne savait pas comment. Cette nuit-là, il y avait des tirs assez violents
8 qu’on avait entendus à Miljevina. Par la suite, j’ai appris que c’étaient
9 nos civils qui s’enfuyaient de Tjentiste et qu’ils se retiraient vers
10 Igman et Grebak.
11 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Comment l’avez vous
12 appris ?
13 Témoin 75 (interprétation). – Chaque fois qu’ils retournaient à
14 la maison, ils racontaient. Ils disaient également combien d’entre eux
15 avaient été tués, combien ont réussi à s’échapper, etc.
16 Donc ils se racontaient parce qu’ils n’ont absolument rien
17 caché. A partir du moment où ils étaient à la maison, ils parlaient
18 ouvertement. Ils disaient où ils allaient, ce qu’ils faisaient. Ce qui
19 était très dur pour moi, c’était surtout de laver leurs uniformes,
20 uniformes qui étaient ensanglantés. Car malheureusement je savais que,
21 entre autres, il y avait également l’uniforme de mon frère. J’étais bien
22 obligée de laver le sang de mon frère.
23 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que vous vous
24 souvenez quel âge avait la jeune fille AB à l’époque des événements ?
25 Témoin 75 (interprétation). – Douze ans.
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1 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Toutes les filles dont
2 vous avez parlé et qui étaient avec vous dans cette maison, toutes les
3 jeunes filles ont été violées ?
4 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
5 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que l’un de vous
6 était là-bas bénévolement ?
7 Témoin 75 (interprétation). – Non.
8 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que vous avez vu
9 un jour ou l’autre Zaga qui se rendait à la maison de Karaman ?
10 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
11 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Combien de fois l’avez-
12 vous vu ?
13 Témoin 75 (interprétation). – Deux ou trois fois. D’abord, il
14 demandait qu’on prépare de la viande pour lui, et ensuite, il montait. Il
15 demandait également qu’on lui prépare le pain. Il disait : « Je suis venu
16 pour manger du pain ».
17 Une fois, il est arrivé, il était fracturé de partout, il était
18 plâtré, soi-disant il avait eu un accident de la circulation, la question
19 qu’il a posée : « Qui de vous pensait du mal sur moi ? C’est probablement à
20 cause de cela que cet accident m’est arrivé ». J’avais l’intention de lui
21 dire que c’était moi, mais je n’ai pas osé.
22 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Au moment où il se
23 rendait à la maison, est-ce qu’il avait agressé quelqu’un à la maison ?
24 Est-ce qu’il avait abusé sexuellement de quelqu’un ?
25 Témoin 75 (interprétation). – Je ne suis pas sûre.
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1 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce qu’il avait emmené
2 une des jeunes filles au deuxième étage dans une autre pièce ?
3 Témoin 75 (interprétation). – Je ne suis pas sûre. Je pense
4 qu’il avait éventuellement pris la jeune fille DB ou éventuellement le
5 n° 87. Je ne me souviens pas exactement.
6 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que vous vous
7 souvenez à quel moment cela s’est passé ?
8 Témoin 75 (interprétation). – C’est la première fois, quand il
9 est venu pour la première fois.
10 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – C’était au moment où il a
11 été plâtré ?
12 Témoin 75 (interprétation). – Non.
13 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que vous avez vu
14 Gaga à la maison ?
15 Témoin 75 (interprétation). – Non. Mais c’est plus tard que j’ai
16 appris qu’ils l’ont tué à Miljevina, car il avait demandé qu’on nous
17 ramène à Foca, alors que les hommes de Pero ne l’ont pas permis. Il y
18 avait donc un petit conflit, un malentendu. C’est comme cela qu’ils l’ont
19 tué à Miljevina. Nous avons été soulagées quand nous l’avons appris.
20 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Et comment l’avez-vous
21 appris ?
22 Témoin 75 (interprétation). – Ce sont Radovan Stankovic et
23 Nikola Brcic qui l’ont dit. Ils ont raconté que Zaga et Gaga nous ont
24 réclamées, qu’ils voulaient qu’on nous ramène à Foca. Ils se sont
25 disputés. Ils ont commencé à tirer, et c’est à cette occasion-là que Gaga
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1 a été tué.
2 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Quand est-ce que vous
3 avez quitté la maison de Karaman ?
4 Témoin 75 (interprétation). – Nous avons quitté cette maison le
5 30 octobre 1992.
6 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Qui vous a emmenées ?
7 Témoin 75 (interprétation). – Ce jour-là, Gojko Jankovic,
8 Janko Janjic et Dragan Zelenovic sont venus à la maison. Avant il y avait
9 un homme Cicmil qui soi-disant était enseignant dans une école, et c’est
10 lui qui nous a baptisées. Il nous a donné des noms serbes, il nous a dit
11 que nous étions des Serbes à partir de ce moment-là.
12 Et bien évidemment, à ce moment-là, je ne savais pas comment
13 faire le signe de la croix et puis il était fâché après moi. Il m’a dit
14 qu’il allait me couper la main parce que je ne savais pas faire le signe
15 de la croix. C’est ce jour-là que Gojko Jankovic, Zelenovic et Tuta sont
16 arrivés à la maison. Il y avait Pero qui était également sur place. On
17 nous a mises à part, nous quatre, et on nous a emmenées à Foca.
18 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous dites « quatre », qui
19 parmi les quatre ?
20 Témoin 75 (interprétation). – Les n° 87, AB, AS et moi-même.
21 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous ont-ils dit pourquoi
22 ils voulaient vous emmener ?
23 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
24 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Qu’ont-ils dit ?
25 Témoin 75 (interprétation). – Ils nous ont dit qu’ils devaient
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1 nous envoyer à Foca puisqu’ils ne pouvaient plus nous nourrir. Ils
2 n’avaient plus de nourriture. Ils ont dit que nous devions par conséquent
3 partir à Foca.
4 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Où vous a-t-on emmenées à
5 Foca ? À quel endroit ?
6 Témoin 75 (interprétation). – On nous a emmenées dans un
7 appartement, dans le quartier que l’on appelait Ribarsko, le quartier des
8 pêcheurs.
9 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Avez-vous été violée
10 aussi dans cet appartement ?
11 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
12 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Quand cela s’est-il
13 produit ?
14 Témoin 75 (interprétation). – Eh bien, cette nuit, la même nuit
15 où nous sommes arrivées à cet endroit, je ne me souviens plus de l’heure
16 exacte. En tout cas, au cours de la nuit.
17 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Qui vous a violée à cette
18 occasion ?
19 Témoin 75 (interprétation). – Tuta.
20 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – En ce qui concerne les
21 autres jeunes femmes que vous avez mentionnées, ont-elles aussi été
22 violées ?
23 Témoin 75 (interprétation). – Zelenovic a violé le n° 87 et
24 Gojko Jankovic a violé la personne qui porte le pseudonyme AB. Auparavant,
25 il nous a forcé à nettoyer la salle de bain, à remplir la baignoire avec
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1 de l’eau et c’est là qu’il s’est enfermé avec cette jeune fille dans la
2 salle de bain.
3 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Etes-vous restées un
4 certain temps dans cet appartement ou avez-vous été emmenées ailleurs ?
5 Témoin 75 (interprétation). – Nous avons passé la nuit dans cet
6 endroit et le lendemain après-midi, Radomir Kovac appelé Klamfa est venu,
7 ainsi que Jagos Kotic, appelé Jada. Ils nous ont emmenées dans l’immeuble
8 Brena, au quatrième étage dans un appartement. C’était un appartement qui
9 auparavant appartenait à un Musulman, mais Kovac a pris cet appartement et
10 il a écrit avec un feutre « Klamfa ». Ainsi, on savait que, lui, il habitait
11 dans cet appartement.
12 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Avec l’aide de
13 l’huissier, je souhaiterais présenter une photographie au témoin. Il
14 s’agit de la pièce à conviction 11 et la photo porte la cote 7401.
15 Pourriez-vous placer autrement cette photographie ? Merci.
16 Témoin, reconnaissez-vous cet immeuble ?
17 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
18 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Qu’est-ce que c’est ?
19 Est-ce bien cet immeuble ?
20 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
21 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous voulez dire
22 l’immeuble qu’on appelait Brena ?
23 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
24 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – L’appartement dont vous
25 venez de parler, l’appartement de Klamfa, se trouve-t-il dans cette partie
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1 de l’immeuble que l’on voit sur la photographie ?
2 Témoin 75 (interprétation). – Oui, en effet. Au quatrième étage,
3 c’est à peu près là. Cet appartement se trouvait au quatrième étage.
4 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Avant que l’on vous amène
5 à cet endroit, vous a-t-on expliqué pourquoi vous deviez être amenées à
6 cet endroit et ce qui allait vous arriver ?
7 Témoin 75 (interprétation). – Klamfa nous avait clairement dit :
8 « On va vous emmener chez nous. Vous allez être protégées ». Mais ils
9 avaient tous dit cela. Ils s’étaient tous exprimés comme cela, gentiment
10 au début. Ils disaient que personne n’allait venir, qu’on n’allait pas
11 nous toucher, que nous allions passer un bon moment avant de pouvoir
12 sortir ou être libérées.
13 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce qu’à aucun moment
14 vous vous êtes senties protégées à cet endroit ?
15 Témoin 75 (interprétation). – Non, jamais.
16 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Comment vous sentiez-vous
17 en réalité ?
18 Témoin 75 (interprétation). – Comment ? J’avais peur, très peur,
19 tout le temps. J’étais toujours en état de choc. J’ai toujours attendu les
20 moments où ils allaient dire qu’ils allaient nous tuer. Je ne leur faisais
21 pas confiance. Jamais, quoi qu’ils disent, je ne leur ai jamais fait
22 confiance.
23 Car même avant la guerre, c’étaient des gens de peu de valeur.
24 Ils demandaient des cigarettes parce qu’ils ne pouvaient même pas
25 s’acheter des cigarettes. A partir du moment où ils ont eu des fusils, ils
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1 se sentaient grands. Klamfa n’avait pas de pain avant la guerre ; il
2 n’avait pas de quoi manger. J’ai appris beaucoup de choses sur son compte
3 plus tard.
4 Avec Dragan Ginic, c’étaient vraiment des gens de peu de valeur,
5 mais avec la guerre, quand ils ont eu des armes, ils se sont sentis
6 grands, puissants. Mais leur pouvoir, ils l’exerçaient, ils étaient
7 courageux sur des femmes et des enfants. C’est là qu’ils étaient
8 courageux.
9 Quand ils ont attrapé tous ces gens de mon village, des femmes,
10 des enfants, ils ont fait la fête, une grande fête. Car bien sûr, c’est
11 facile de tuer un être humain qui n’a pas d’arme. C’était cela leur
12 courage, le courage qu’ils exerçaient sur des gens qui n’avaient aucun
13 pouvoir.
14 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Avant que Klamfa et
15 Kostic ne vous emmènent, est-ce que Gojko Jankovic vous a dit ce qui
16 allait arriver ? Est-ce que vous avez vu Gojko et Klamfa en train de
17 discuter de votre sort ?
18 Témoin 75 (interprétation). – Non. Quand nous nous sommes levées
19 le matin, Gojko et Tuta sont partis. Zelja est parti au cours de la nuit.
20 Il n’a même pas passé la nuit dans cet appartement. Ils sont partis et ont
21 dit que deux autres personnes allaient venir pour nous emmener ailleurs,
22 que nous allions être très bien à ce nouvel endroit et qu’on n’allait pas
23 nous toucher. Ils sont partis et ces deux nouveaux sont arrivés dans
24 l’après-midi.
25 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Combien de temps êtes-
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1 vous restées dans l’appartement de Klamfa ?
2 Témoin 75 (interprétation). – Eh bien à peu près un mois, un
3 mois et demi, à peu près un mois dans son appartement à lui et ensuite, il
4 nous a données à des Serbes de Serbie. On est restées chez eux. Puis, on
5 est retournées chez lui. En tout cas, tout cela a dû durer un mois et demi
6 à peu près.
7 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Quand vous dites « nous »,
8 vous pensez à d’autres jeunes filles ? Est-ce que vous pensez à toutes les
9 quatre, les quatre jeunes filles dont vous avez parlé ?
10 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
11 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Pendant que vous étiez
12 dans l’appartement de Klamfa, étiez-vous agressée sexuellement ?
13 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
14 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Les autres jeunes femmes
15 ont-elles été agressées sexuellement elles aussi ?
16 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
17 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Quand étiez-vous violée
18 pour la première fois dans cet appartement et qui l’a fait ?
19 Témoin 75 (interprétation). – La première fois, j’ai été violée
20 par Klamfa dans son appartement.
21 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Cela s’est produit juste
22 après votre arrivée ou bien… ? Quand ?
23 Témoin 75 (interprétation). – Je pense que cela ne s’est pas
24 produit juste après. Je ne me souviens pas. Mais en tout cas, le lendemain
25 soir, oui.
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1 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Pouvez-vous décrire ce
2 qu’il vous a fait exactement ?
3 Témoin 75 (interprétation). – Eh bien, il disait qu’il allait me
4 protéger, que je n’allais être qu’avec lui, qu’il n’allait amener personne
5 d’autre, que personne d’autre n’allait me violer. Ceci a duré peut-être
6 cinq ou six jours, une semaine, je ne sais plus exactement.
7 Ensuite, il s’est tourné vers d’autres jeunes filles : le n° 87
8 et le pseudonyme AB. Il a donc commencé à les violer, elles, et à amener
9 d’autres personnes pour me violer, moi. Si moi, si je n’acceptais pas
10 d’aller dans la chambre avec eux, il me giflait, il me tapait, me
11 demandant pourquoi je ne voulais pas aller dans la chambre avec eux.
12 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Quand Klamfa vous a
13 violée, vous a-t-il pénétrée vaginalement ?
14 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
15 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Analement ?
16 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
17 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Oralement ? Vous a-t-il
18 forcée à faire une fellation ?
19 Témoin 75 (interprétation). – Non.
20 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Combien de fois vous a-t-
21 il violée au cours de ces cinq ou six premiers jours ?
22 Témoin 75 (interprétation). – Je pense que cela s’est produit
23 tous les soirs. Moi et le n° 85, il nous a violées dans un même lit, avec
24 la musique du Lac des cygnes. Il prenait manifestement du plaisir, il
25 m’avait dit : « Ecoute, j’ai tué ton frère. Qu’est-ce que tu peux me
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1 faire ? » C’est comme cela qu’il a dit. Mais moi je me suis dit, je l’ai
2 supporté. C’est tout.
3 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous venez de dire 85, il
4 s’agit probablement d’une erreur.
5 Témoin 75 (interprétation). – Non, en effet, c’était le n° 87.
6 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Avez-vous vu Klamfa en
7 train de violer d’autres jeunes filles, à part vous et le n° 87 dont vous
8 venez de parler ?
9 Témoin 75 (interprétation). – Je ne l’ai pas vu, mais je suis
10 certaine qu’il a aussi violé la jeune femme qui porte le pseudonyme AB.
11 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous avez dit que, après
12 un moment, il a commencé à amener d’autres hommes qui vous ont violée ?
13 Pouvez-vous dire qui c’était ?
14 Témoin 75 (interprétation). – Une fois, il a amené Zoran
15 Vukovic. Il me l’a amené.
16 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous souvenez-vous quand
17 cela s’est produit ?
18 Témoin 75 (interprétation). – Je ne m’en souviens pas
19 exactement.
20 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Cela s’est-il produit
21 avant que l’on vous livre aux soldats venant de Serbie ?
22 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
23 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Quand vous dites Zoran
24 Vukovic, quand Zoran Vukovic était venu vous voir, est-ce que c’est ce
25 même Zoran Vukovic que vous aviez vu avec votre oncle et le même Zoran
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1 Vukovic que vous avez identifié juste après la pause du déjeuner ?
2 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
3 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Pouvez-vous décrire ce
4 qui s’est produit exactement ?
5 Témoin 75 (interprétation). – Il m’a enfermée avec lui dans la
6 cuisine. Nous étions assis, nous parlions « qui a été tué », « qui n’a pas
7 été tué ». C’est là qu’il a dit qu’il avait tué mon oncle, que soi-disant
8 il avait tenté de s’échapper en traversant la rivière de la Drina et que
9 c’est là qu’ils l’ont tué par un tir de mitraillette, par une rafale.
10 Mais je ne le crois pas, je pense qu’ils l’ont tout d’abord
11 égorgé et ensuite ils l’ont jeté dans la Drina. J’en suis sûre à 100 %.
12 Parce qu’il a tellement hurlé, crié à l’aide.
13 Lui, il pouvait raconter, car il avait ordonné à Branic de nous
14 tuer parce que nous étions là depuis assez longtemps. On savait beaucoup
15 de choses. On leur avait ordonné de ne pas nous laisser partir vivantes,
16 alors il pouvait raconter ce qu’il voulait.
17 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Comment le savez-vous ?
18 Témoin 75 (interprétation). – Je l’ai appris plus tard d’un
19 Serbe qui me l’a dit.
20 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – A cette occasion, quand
21 Zoran Vukovic est venu dans l’appartement de Klamfa, et quand vous étiez
22 ensemble, dans la cuisine, vous a-t-il agressée sexuellement, et si c’est
23 exact, de quelle façon ? Qu’a-t-il fait exactement ?
24 Témoin 75 (interprétation). – Il m’a d’abord forcée à -comment
25 dire ?- à l’exciter puisque, après tout ce que nous nous sommes dit, il
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1 avait du mal à obtenir une érection. Ensuite, il a sorti son pénis, et il
2 m’a forcé de le masturber pour être suffisamment excité pour être en
3 mesure de me violer.
4 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Voulez-vous dire que vous
5 étiez obligé de prendre son pénis dans votre bouche ?
6 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
7 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Quand il a réussi à
8 obtenir, avoir une érection, vous a-t-il pénétrée vaginalement ?
9 Témoin 75 (interprétation). – Non, je ne m’en souviens pas.
10 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Avant que cela ne se
11 produise, l’avez-vous vu en train de discuter avec Klamfa ?
12 Témoin 75 (interprétation). – Je ne me souviens pas.
13 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous avez dit qu’il vous
14 a forcée à l’exciter. Que voulez-vous dire par le mot « il m’a forcée » ?
15 Témoin 75 (interprétation). – Eh bien, il m’a forcée… Comment
16 expliquer cela ?
17 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous a-t-il menacée,
18 menacée d’un fusil ou d’un pistolet ?
19 Témoin 75 (interprétation). – Non, il m’a dit après tout qu’il
20 n’arrivait pas avoir une érection et qu’il fallait que je le stimule
21 manuellement et oralement pour qu’il arrive en état où il pouvait me
22 violer.
23 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Aviez-vous peur au moment
24 de ces événements ?
25 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
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1 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous avez dit que vous
2 avez passé à peu près un mois dans l’appartement de Klamfa et que,
3 ensuite, on vous a emmenée vers un autre groupe de soldats. Comment cela
4 s’est-il produit ?
5 Témoin 75 (interprétation). – Jadzic Vojkan est venu dans la
6 maison, il venait de Titovo Uzice, de la Serbie. Mais nous n’avions pas le
7 droit d’appeler cela Titovo Uzice, on devait l’appeler dorénavant Srpsko
8 Uzice. Il est donc venu et il m’a amenée Tarza, Slavo Ivanovic, et moi
9 j’ai refusé de me rendre dans la chambre avec eux.
10 C’est là qu’il m’a frappée, il m’a demandé pourquoi je ne
11 voulais pas y aller. Et donc il a envoyé AB. Cet enfant, qui avait 12 ans,
12 a donc été violée par un vieillard de 50 ans.
13 Après, Klamfa a amené Vojkan Radzic, un Serbe de Serbie, et il
14 m’a dit à moi et à AB que nous allions aller dans une maison, à côté d’un
15 hôtel, chez des Serbes de Serbie, que nous allions bien nous amuser là-
16 bas, que personne ne nous dérangerait, que nous n’avions rien d’autre à
17 faire que de nettoyer et de préparer les repas quand ils rentraient de
18 quelque part. Voilà, c’était à peu près tout.
19 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que vous avez
20 jamais vu un des soldats payer Klamfa pour pouvoir vous agresser
21 sexuellement ?
22 Témoin 75 (interprétation). – Oui, mais plus tard.
23 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Mais, à l’époque où vous
24 étiez dans l’appartement de Klamfa, avez-vous remarqué de tels événements
25 ou quelque chose qui aurait pu vous faire penser que cela s’était
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1 effectivement produit ?
2 Témoin 75 (interprétation). – Non, je ne l’ai pas vu.
3 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – A part les personnes que
4 vous venez de mentionner, dont vous dites qu’elles ont été violées dans
5 l’appartement de Klamfa, est-ce qu’il y a eu d’autres hommes qui vous ont
6 violées ?
7 Témoin 75 (interprétation). – Non, pas à cet endroit.
8 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous avez parlé d’une
9 maison qui se trouvait à la proximité de l’hôtel. Qui vous a emmenées à
10 cet endroit ?
11 Témoin 75 (interprétation). – Il est Serbe, Jadzic Vojkan. On
12 l’appelait Jadza.
13 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Combien de temps avez-
14 vous passé à cet endroit ?
15 Témoin 75 (interprétation). – Nous y sommes restées à peu près
16 15 jours.
17 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous et AB ?
18 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
19 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Que s’est-il passé ?
20 Qu’est-ce qui vous est arrivé, à vous et à cette jeune fille, dans cette
21 maison ? Est-ce que vous avez été violées ?
22 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
23 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Une fois seulement ou
24 souvent ?
25 Témoin 75 (interprétation). – Souvent.
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1 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Avez-vous vu Klamfa Kovac
2 dans cette maison ?
3 Témoin 75 (interprétation). – Oui, il venait souvent pour voir
4 ce qui se passait. Il venait nous voir pour nous demander comment on
5 allait, si on nous maltraitait. Il avait pitié de nous.
6 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Vous l’a-t-il dit ?
7 Comment êtes-vous arrivée à cette conclusion ?
8 Témoin 75 (interprétation). – Quand il venait dans la maison, il
9 disait : « Alors mes filles, comment ça va ? Que faites-vous ? Est-ce qu’on
10 vous dérange ? Est-ce que vous êtes bien là ? » Voilà, il venait, il disait
11 cela, ensuite, il partait, il rentrait.
12 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Ces soldats qui venaient
13 de Serbie, ils étaient combien ?
14 Témoin 75 (interprétation). – Je ne me rappelle pas de tous, ils
15 étaient assez nombreux : 10, 15, sûrement.
16 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce qu’ils
17 appartenaient à une unité particulière ?
18 Témoin 75 (interprétation). – Je ne me souviens pas.
19 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Où est-ce qu’on vous a
20 amenées après cette maison à proximité de l’hôtel Zelengora ?
21 Témoin 75 (interprétation). – On nous a emmenées dans un
22 appartement, dans une autre partie de la ville de Foca, dans un autre
23 quartier, Pod Masala.
24 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Qui vous a emmenées dans
25 cet endroit ?
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1 Témoin 75 (interprétation). – Les Serbes, Jadzic Vojkan, Zeljko,
2 Dole, et encore d’autres personnes. Je ne me souviens pas des noms.
3 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Combien de temps êtes-
4 vous restées à cet endroit ?
5 Témoin 75 (interprétation). – Je crois aussi à peu près
6 7 jours ; entre 7 et 10 jours.
7 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce qu’on vous a
8 amenées à cet endroit avec AB ?
9 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
10 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce qu’à cet endroit
11 vous avez aussi été sexuellement agressées ?
12 Témoin 75 (interprétation). – Oui.
13 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Est-ce que Klamfa Kovac
14 était venu à cet endroit ?
15 Témoin 75 (interprétation). – Non.
16 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation). – Quand l’avez-vous vu à
17 nouveau ?
18 Témoin 75 (interprétation). – Après 7 ou 10 jours que nous avons
19 passés dans cet appartement situé à Pod Masala, un soir, Jadzic m’a amenée
20 ainsi que AB à nouveau dans l’appartement de Klamfa, donc dans l’immeuble
21 Brena.
22 Nous avons à nouveau rencontré les autres jeunes filles, celles
23 qui étaient restées dans l’appartement, donc 87 et AS. Et ils ont amené
24 une dame-jeanne de 25 litres d’eau-de-vie, et ils ont dit qu’ils allaient
25 nous laisser à cet endroit, et qu’ils allaient boire dans un café
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1 ailleurs. Quand ils sont rentrés du café, c’était le chaos.
2 Jadzic Vojkan voulait violer la femme qui est désignée par le
3 n° 87, puisque Klamfa lui aurait promis cela. Et ils étaient assis, ils
4 tiraient des coups de feu à travers les fenêtres, ils avaient donc brisé
5 toutes les fenêtres. Donc, cette personne a pris AB et l’a emmenée dans
6 l’appartement Pod Masala. C’était Zeljko et l’autre personne était Jagos
7 Kostic. Il a pris AS et l’a emmenée dans l’appartement à Donje Polje.
8 Je suis restée toute seule dans cet endroit, dans cet
9 appartement avec AB. Ils étaient assis en train de boire, tirer des coups
10 de feu. Klamfa avait promis à Jadzic qu’il allait lui permettre de coucher
11 avec le n° 87. Alors qu’il était en train d’entrer dans la chambre, il l’a
12 suivie et lui a dit de sortir. Elle est sortie, ils m’ont forcée à aller
13 me coucher. C’était Jadzic qui m’a dit d’aller me coucher. Klamfa est
14 entré et il m’a dit : « Ecoute, lève-toi. Qui t’a donné l’ordre de te
15 coucher ? ».
16 Cela a duré toute la nuit. Toutes les cinq minutes, Jadzic me
17 forçait d’aller me coucher, et l’autre entrait et disait : « Lève-toi. Qui
18 t’a donné l’ordre de te coucher ? ». Cela a duré jusqu’à 9 heures du matin
19 quand ils se sont endormis sous l’effet de l’alcool. Quand Klamfa s’est
20 endormi, Tuta est venu. Jadzic et Klamfa s’étaient endormis. Moi et le
21 n° 87, nous sommes allées dans l’autre chambre pour essayer de dormir un
22 peu, nous étions tellement fatiguées que nous ne tenions pas debout.
23 Au moment où nous nous sommes couchées, quelqu’un a frappé à la
24 porte, je suis allée ouvrir, et c’était Tuta. Il est entré. Il a commencé
25 à les injurier en disant qu’ils n’ont permis à personne de dormir car ils
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1 avaient tiré des coups de feu. Il a dit qu’il voulait venir les tuer parce
2 qu’ils tiraient ces coups de feu. Il m’a forcée, moi et le n° 87, à faire
3 nos bagages pour aller chez lui en disant que, là-bas, nous serions bien
4 traitées. A partir de ce jour-là, nous étions vraiment protégées et
5 personne n’allait plus nous toucher.
6 Entre-temps, Jadzic Vojkan s’est levé. Ils nous ont amenées à
7 Brena mais de l’autre côté, au troisième étage. Le même immeuble, mais
8 juste une autre entrée, au troisième étage, dans l’appartement de Tuta.
9 Nous y sommes restés jusqu’après midi, à peu près dans cet
10 appartement, donc. Jadzic insistait pour violer le n° 87. Moi, j’étais
11 assise. Tuta nous avait donné du fromage parce que nous avions faim. Et
12 c’est là que Klamfa est entré avec un couteau. Il a juste désigné : « Toi
13 et toi, levez-vous ! » Tuta ne s’est pas levé pour protester. Nous l’avons
14 alors suivi. Il m’a dit : « Regarde, c’est cela ton destin parce que, pour
15 toi, une balle, tu serais contente d’avoir une balle. Mais ce n’est pas ce
16 que tu vas avoir ».
17 Il nous a emmenées dans une salle à Masala. Nous sommes passés à
18 côté de la mairie, nous avions la tête baissée, je n’ai rien pu voir. A un
19 moment, j’ai senti qu’il m’a frappée dans le visage. J’ai pratiquement
20 perdu conscience, et je suis tombée. Le n° 87 m’a prise sous le bras, elle
21 a essayé de me soulever, elle m’a montré son visage. Elle saignait du nez,
22 son visage était complètement gonflé. En allant vers Masala, il marchait
23 dernière nous. Il avait un couteau dans la main, et il m’a tapée avec le
24 manche du couteau, et j’avais un bleu, une bosse sur la tête.
25 J’avais peur, j’étais tellement fatiguée que je perdais l’usage
Page 1463
1 de mes jambes. Je n’avais plus de force. Nous sommes arrivées dans cet
2 appartement, à Pod Masala. Nous y avons trouvé AB, elle avait été passée à
3 tabac. Elle criait, pleurait, elle nous demandait où nous étions, car il
4 est allé chez elle, il l’avait déjà battue en lui demandant où nous
5 étions. Elle ne pouvait pas le savoir parce que Zeljko l’avait emmenée
6 dans cet autre appartement la veille. Il l’avait d’abord battue, ensuite,
7 il est allé chez Tuta.
8 Ensuite, il nous a forcées, toutes les trois, à nous déshabiller
9 complètement sous la menace du couteau qu’il avait dans sa main. Il nous a
10 déshabillées, il nous a forcées. Il nous a fait monter sur la table, il
11 faisait froid, il n’y avait pas de chauffage. Pendant une demi-heure, une
12 heure, nous étions comme cela, toutes les trois, nues sur la table, et lui
13 était affaissé sur le canapé. Il nous a dit : « Maintenant, vous allez
14 descendre jusqu’à la rivière de la Drina, comme cela, toutes nues. Là,
15 vous allez être égorgées, jetées dans la rivière de la Drina ».
16 Il nous a forcées à partir nues. Nous avons pris des vêtements
17 avec nous mais nous n’étions pas habillées, il nous a forcées à marcher
18 vers la mairie. Entre-temps, Jagos Kostic courait vers lui. Je ne sais pas
19 ce qu’ils se sont dit. Je ne l’ai pas entendu mais, en tout cas, ils se
20 mettaient d’accord sur quelque chose. Il nous a, à nouveau, forcées à
21 revenir vers l’appartement pour nous habiller.
22 Nous sommes donc entrées dans l’appartement. Nous avons été
23 habillées, nous avons été à nouveau dehors, il nous a chassées vers la
24 mairie, vers le pont sur la Drina. Il ne pouvait pas passer, il y avait un
25 escalier. Il ne pouvait pas passer à côté du pont, donc il nous a fait
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1 revenir. Nous sommes passées à nouveau devant la mairie et à côté d’un
2 café, le café des pêcheurs, et il nous a amenées à un endroit où les
3 rivières Drina et Cehotina se croisent.
4 Je le regardais. Je me disais en moi-même : « Non, non, tu ne vas
5 pas m’égorger. De toute façon, si je vois qu’il commence à égorger qui que
6 ce soit, je vais me jeter dans la Drina ». La Drina était là et je me
7 disais que j’allais m’y jeter. Alors, qu’il nous amenait vers la Drina et
8 la Cehotina, Kostic Jagos courait dernière nous en lui demandant de
9 s’arrêter. Klamfa s’est arrêté, il a fait demi-tour, ils ont à nouveau
10 discuté.
11 Ils ont discuté et discuté et, tout à coup, il m’a jeté une clef
12 et m’a dit : « On retourne dans l’immeuble Brena. Il faut nettoyer les
13 débris de verre et les munitions », les balles qu’ils avaient tirées la
14 veille. Nous sommes tous revenus.
15 Mme la Présidente (interprétation) – Maître, peut-être
16 pourrions-nous faire une pause. Et nous allons continuer lundi, à
17 9 heures 30.
18 (L’audience est levée à 16 heures 8.)
19
20
21
24 [Le témoin entre dans la Cour]
25 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Bonjour,
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1 témoin. Nous poursuivons ce matin votre interrogatoire
2 principal. Vous êtes toujours sous serment, serment que
3 vous avez fait au début de votre interrogatoire principal.
4 Donc, le Procureur continuera à vous poser des questions.
5 TÉMOIN : TÉMOIN 75
6 (SOUS LE MÊME SERMENT)
7 INTERROGÉE PAR
8 Me UERTZ-RETZLAFF (interprétation) :
9 (Suite)
10 Q. Bonjour.
11 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Oui. Je
12 vois que Me Kolesar est debout.
13 Me KOLESAR (interprétation) : Madame la
14 Présidente, les accusés me disent que l’écran les empêche
15 de voir le témoin. Donc, je demande que ce soit déplacé un
16 petit peu pour qu’ils puissent voir le témoin.
17 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Je souhaite
18 savoir ce que le Procureur en pense. Je ne me souviens pas
19 de toutes les mesures de protection. Je me souviens qu’un
20 témoin a demandé d’être protégé de la vue des accusés.
21 Me UERTZ-RETZLAFF (interprétation) : Oui, mais
22 pas celui-ci.
23 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Très bien !
24 Donc, nous pouvons déplacer cette partie de l’écran. Vous
25 pouvez même le faire plus puisque les stores sont baissés
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1 derrière.
2 Ça suffit ?
3 Me KOLESAR (interprétation) : Oui. Ça va
4 maintenant.
5 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Merci,
6 Monsieur l’Huissier. Laissez ça comme ça. C’est bon.
7 Me UERTZ-RETZLAFF (interprétation) :
8 Q. Bonjour, Madame le Témoin. Je souhaite que
9 l’on clarifie certains points concernant la salle des
10 sports de Partizan. Vous avez déjà décrit les incidents
11 concernant la maison dont vous avez dit qu’il s’agissait de
12 la maison du tailleur et puis vous avez dit également que
13 d’autres soldats vous ont amenée à d’autres endroits.
14 Est-ce que vous pourriez me dire si d’autres
15 femmes, on les faisait sortir aussi de la salle des sports
16 de Partizan ?
17 R. Oui.
18 Me UERTZ-RETZLAFF (interprétation) : Peut-on
19 donner au témoin la liste que nous avons utilisée la
20 dernière fois ? Il s’agit de la pièce à conviction du
21 Procureur 189.
22 Q. Veuillez examiner cette liste s’il vous plaît
23 et me dire qui étaient les autres personnes qu’on a fait
24 sortir de Partizan, sans indiquer les noms, juste les
25 initiales.
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1 R. DB, le numéro 87, 50, 95, 189, 51, 90, 48, 74
2 et 88.
3 Q. Est-ce que vous avez vu lorsqu’on les faisait
4 sortir ou bien comment est-ce que vous le savez ?
5 R. Moi, j’ai été la moins présente puisque moi,
6 on me faisait sortir le plus de toutes, mais à chaque fois
7 que je rentrais, je savais ce qui s’était passé entre-
8 temps. Une nuit lorsque je suis rentrée, lorsque Tuta m’a
9 fait rentrer, je n’ai vu que des femmes âgées dans la
10 salle. En ce qui concerne toutes les femmes jeunes, aucune
11 d’entre elles n’y était plus.
12 Q. Est-ce que vous ou une quelconque autre femme
13 a été passée à tabac lorsque les soldats vous faisaient
14 sortir ?
15 R. Personnellement, non. C’est Klanfa qui m’a
16 frappée le plus.
17 Q. Est-ce que vous ou bien une quelconque des
18 femmes, est-ce que vous avez jamais osé refuser de sortir
19 avec les soldats qui vous faisaient sortir de Partizan ?
20 R. Personnellement, non. Je ne savais pas ce
21 qui m’attendait. DB, oui, une fois, elle s’est opposée et
22 quand elle est sortie devant la porte, c’est là qu’on l’a
23 giflée et ensuite, ils l’ont ramenée dans la salle.
24 Q. Est-ce que vous avez jamais vu des traces de
25 blessures sur les femmes à Partizan ?
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1 R. Non.
2 Q. Est-ce que vous vous souvenez ou plutôt est-
3 ce que vous avez vu des brûlures de cigarettes sur une des
4 femmes ?
5 R. Je n’en ai pas vu, mais par la suite, j’en ai
6 entendu parler parce qu’au moment des faits, je n’étais pas
7 là-bas.
8 Q. Est-ce que vous pouvez me dire de quoi il
9 s’agissait, ce que vous avez entendu dire ?
10 R. J’ai entendu dire que 95, qu’on l’a fait
11 sortir et amener à Bijela, dans une conglomération et qu’il
12 y avait des Chetniks de Serbie, environ 500, qu’elle a été
13 amenée à Bijela, qu’on l’a tabassée et qu’on éteignait des
14 cigarettes sur elle.
15 Q. Est-ce que vous l’avez vue ? Est-ce que vous
16 avez vu des blessures, des brûlures ?
17 R. Non, parce qu’à partir du 2 août 1992, je
18 n’ai plus jamais revu cette personne.
19 Q. Mis à part l’incident que vous avez déjà
20 décrit lorsqu’on vous a fait sortir avec d’autres femmes,
21 est-ce que vous avez vu l’Accusé Kunarac ou ses hommes
22 lorsqu’ils étaient en train de faire sortir des femmes du
23 Partizan ?
24 R. Oui.
25 Q. Quand est-ce que vous avez vu ça et qui est-
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1 ce qu’on faisait sortir ? Est-ce que vous vous en souvenez
2 ?
3 R. Eh bien, une fois, la première fois qu’ils
4 m’ont fait sortir, ensuite, ils sont revenus encore une
5 fois afin de me faire sortir de nouveau et ils ont fait en
6 sorte que je me lève, mais je crois qu’il y avait Tolja, je
7 pense que c’était lui, il a vu tout ça. Il leur a dit de
8 me ramener parce qu’il savait ce qui m’était déjà arrivé.
9 Ensuite, ils ont fait sortir DB, 87 et 50. Ils
10 les ont fait sortir. Ils les ont amenées quelque part.
11 Q. Vous avez décrit lorsque le 2 août 1992,
12 l’Accusé Kunarac vous a fait sortir et il ne vous a plus
13 jamais ramenée. Avant ce 2 août, est-ce qu’on vous a
14 jamais fait sortir de Foca pour vous amener dans une autre
15 municipalité ?
16 R. Non.
17 Q. Est-ce qu’on vous a jamais amenée à Cajnice ?
18 R. Oui.
19 Q. Quand est-ce que ceci s’est produit ?
20 R. Ceci a eu lieu vers 10 ou 15 jours après le
21 début de mon séjour dans le Partizan. Mitar Sipcic et une
22 autre personne âgée, je ne sais pas comment il s’appelait
23 mais il portait plusieurs insignes de grade et ce leader
24 Chetnik de Cajnice est venu avec eux. Il s’appelait
25 Kornjaca. C’est comme ça qu’on l’appelait.
Page 1487
1 Ils sont d’abord venus un matin. Soi-disant un
2 car devait venir pour nous transporter jusqu’à Gorazde,
3 mais ceci ne s’est pas produit. Le lendemain, ils sont
4 revenus et notre groupe de 20, 25 peut-être, ils nous ont
5 placés dans une camionnette et ils nous ont amenés jusqu’à
6 Cajnice, et avant cela, ils ont placé dans ce camion 16
7 hommes de la prison de Foca, et donc, nous avons été
8 transportés ensemble dans le même camion.
9 Nous avons passé deux nuits à Cajnice dans une
10 école à Mijeljina. Le lendemain, ils ont amené encore deux
11 femmes et trois enfants. Lorsqu’ils nous amenaient à
12 Cajnice, lorsqu’ils nous conduisaient, j’ai entendu
13 lorsqu’ils se parlaient par le Motorola : « Tout va bien.
14 Il n’y aura pas de problème. Tout est arrangé. »
15 Soi-disant, un échange devait avoir lieu. Les
16 nôtres devaient faire venir quelques civils de Gorazde afin
17 de procéder à l’échange, mais il s’agissait simplement d’un
18 mensonge et lorsque j’ai entendu leur conversation, j’ai
19 entendu simplement qu’ils disaient : « Comporte-toi
20 conformément aux ordres », ce qui voulait dire que si
21 jamais il devait y avoir un échange, ils devaient tirer sur
22 nos dos.
23 Lorsqu’ils nous ont amenés à Cajnice, beaucoup
24 d’habitants locaux sont venus, des femmes, d’autres. Ils
25 apportaient de la nourriture, des cigarettes, des
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1 sandwichs, du lait, et cætera, afin de prouver qu’ils sont
2 tellement gentils, accueillants, qu’ils regrettent vraiment
3 ce qui nous arrivait, mais peu de temps après, de nouveau,
4 la télévision est venue pour montrer à quel point ces gens
5 étaient merveilleux, comment ils nous accueillent, comment
6 ils sont gentils.
7 C’est comme ça qu’on a passé deux nuits et
8 ensuite, ils nous ont ramenés encore une fois en autobus
9 jusqu’au Partizan à Foca.
10 Q. Est-ce que vous savez pourquoi ils vous ont
11 ramenés jusqu’à Partizan, pourquoi ils ne vous ont pas
12 laissé rester à Cajnice, pourquoi est-ce qu’ils ne vous ont
13 pas libérés ?
14 R. À Pljevlja, nous avons demandé qu’ils nous
15 relâchent puisque nous avons traversé le Monténégro. Il
16 s’agissait quand même d’un autre État du territoire libre,
17 mais ils ne nous ont pas laissé partir. Ils ont dit :
18 « Nous avons reçu les ordres de vous ramener jusqu’à
19 Foca. » De telle manière, ils ont ramené les 16 hommes à
20 la prison de Foca et nous, les autres, à Partizan.
21 Q. Je souhaite clarifier certains points
22 concernant la période que vous avez passée dans
23 l’appartement de Klanfa. Vous avez dit que l’Accusé Kovac
24 et Jagos Kostic vous ont violées toutes les quatre. Est-ce
25 que vous avez vu lorsque l’Accusé Kovac a violé AB ?
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1 R. Non, je ne l’ai pas vu.
2 Q. Comment est-ce que vous le savez alors ?
3 R. Tout ce qui se passait, nous racontions ce
4 qui nous est arrivé l’une à l’autre.
5 Q. Vous avez dit également qu’au bout d’un
6 certain moment, l’accusé a arrêté de vous violer
7 personnellement mais qu’il a amené des hommes dans
8 l’appartement afin qu’ils vous violent et vous avez déjà
9 décrit cet incident concernant l’Accusé Vukovic.
10 Est-ce que vous vous souvenez si les accusés Kovac
11 et Vukovic sont venus ensemble cette fois-ci ou bien est-ce
12 que l’un d’eux y était déjà et un autre est arrivé par la
13 suite ? Est-ce que vous vous souvenez de ces détails ?
14 R. Non, je ne m’en souviens pas.
15 Q. Est-ce que l’Accusé Kovac vous a donné
16 l’ordre d’aller auprès de Vukovic ou bien comment est-ce
17 que vous avez fini par vous retrouver dans la cuisine avec
18 Vukovic ?
19 R. C’est lui qui m’a forcée à aller avec lui,
20 avec l’autre dans la cuisine.
21 Q. Lorsque vous dites « lui », vous parlez de
22 l’Accusé Vukovic ?
23 R. Je parle de Kovac.
24 Q. Mis à part les deux incidents que vous avez
25 décrits lorsque vous avez été violée et lorsqu’on vous a
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1 dit d’aller avec d’autres hommes, est-ce que d’autres
2 hommes, mis à part Vukovic, vous ont violée également dans
3 l’appartement de Klanfa, les autres hommes, mis à part donc
4 Vukovic et l’autre personne que vous avez mentionné le nom
5 ?
6 R. Je sais simplement Slavo Ivanovic et Tarza.
7 Il les a amenés à moi. Puisque moi, je ne voulais pas
8 aller dans la chambre avec eux, tout d’abord, il m’a donné
9 des gifles. Je pleurais et ensuite, il a envoyé AB avec
10 Slavo Ivanovic dans la chambre et je ne me souviens plus si
11 quelqu’un d’autre m’a violée là-bas.
12 Q. Les accusés Kovac et Vukovic, à l’époque,
13 est-ce qu’ils portaient des uniformes ?
14 R. Oui.
15 Q. Est-ce qu’ils appartenaient à une quelconque
16 unité particulière ?
17 R. Je pense qu’ils appartenaient au groupe de
18 Brane Cosovic appelé Dragan Nikolic.
19 Q. Comment avez-vous entendu parler de cela ?
20 R. C’est eux personnellement qui me l’ont dit
21 puisque ce Dragan Nikolic, au début de la guerre à Foca, il
22 est mort et soi-disant c’était un grand ami à eux, témoin
23 de mariage de Pero Elez et c’est d’après lui qu’ils ont
24 nommé le groupe Dragan Nikolic.
25 Q. Pendant que vous étiez dans l’appartement de
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1 Klanfa, est-ce que vous deviez faire le ménage ?
2 R. Oui.
3 Q. Qu’est-ce que vous deviez faire ?
4 R. Eh bien, nous devions nettoyer, laver leur
5 linge sale. Nous ne devions pas cuisiner parce que de
6 toute façon, il n’y avait rien à cuisiner. De temps en
7 temps parfois, ils nous amenaient quelques boîtes de
8 conserve. C’est ce que nous mangions. Voilà !
9 Q. Vous avez dit que Kovac, l’Accusé Kovac était
10 la personne qui vous a tabassée le plus et vous avez déjà
11 décrit l’incident au cours duquel ceci s’est produit, l’un
12 de ces incidents. Est-ce que vous pouvez me dire à quelles
13 autres occasions il vous a battue et pourquoi ?
14 R. Eh bien, cette nuit-là, lorsqu’ils sont venus
15 ivres, lui et ce Serbe de Serbie, Vojkan Jadzic, ils sont
16 rentrés du café. Avant cela, moi et 87, nous avions bu un
17 peu d’alcool parce que nous avions l’impression que la vie
18 allait être moins dure comme ça, et lorsqu’il est entré
19 dans l’appartement et qu’il a vu que j’étais saoule, il a
20 commencé à me dire : « Pourquoi as-tu Busovaca ? », et il a
21 commencé à me frapper.
22 Q. Quand est-ce que ceci s’est produit ?
23 R. Eh bien, c’était une ou deux nuits avant que
24 moi et AB, on soit renvoyé, remis aux autres personnes.
25 Q. À la fin de l’audience jeudi, vous avez
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1 décrit les événements qui se sont produits après que
2 l’Accusé Kovac vous a amenée avec 87 dans l’appartement de
3 Tuta et comment vous êtes rentrée dans l’appartement de
4 Klanfa. Est-ce que vous pouvez me dire ce qui est arrivé à
5 AS ?
6 R. C’est Jagos Kostic qui a amené AS dans un
7 appartement à Donje Polje puisqu’il y avait des coups de
8 feu et c’est pour ça qu’il l’a amenée à Donje Polje, dans
9 un appartement.
10 Q. Comment est-ce que vous le savez ?
11 R. Je le sais puisque le lendemain, après tous
12 ces événements, lorsque nous sommes rentrées dans cet
13 appartement, à ce moment-là, Jagos a amené AS dans
14 l’appartement et c’est ainsi qu’elle nous a dit qu’elle
15 avait été dans un appartement à Donje Polje.
16 Q. Est-ce qu’elle a continué à rester dans
17 l’appartement de Klanfa ou bien est-ce qu’on l’a amenée
18 ailleurs ?
19 R. Elle y est restée.
20 Q. Qu’est-ce qui est arrivé à AB ?
21 R. Le lendemain, lorsque nous nous sommes
22 levées, Klanfa est venu et il a dit que Dragec allait venir
23 afin d’amener AB et à moi, il a dit que Tuta et Zelja, ils
24 allaient venir afin de m’amener. Au bout d’un certain
25 temps, Dragec est venu, il a sonné à la porte et Klanfa a
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1 vu à travers le judas, il a vu Dragec compter l’argent, il
2 a souri et il a dit : « Regarde-le compter l’argent. » Il
3 a ouvert la porte. Dragec est entré. J’ai vu qu’il a
4 donné 200 deutschmarks et il a pris la petite et il est
5 parti.
6 Au bout d’un certain temps, Tuta et Zelja se sont
7 arrêtés en voiture devant la porte et il a dit à moi que je
8 devais sortir, partir avec eux. Je suis sortie. Je me
9 suis mise dans la voiture. Ils m’ont conduite vers Aladze
10 et le premier bâtiment en sortant du parc, c’est là que la
11 voiture s’est arrêtée et ils sont montés à l’étage de cet
12 immeuble.
13 Ils sont restés assez longtemps dans l’immeuble et
14 lorsqu’ils sont revenus, ils ont dit que je devais aller
15 chez AB. Moi, je suis entrée. J’avais très peur, je
16 pleurais et Dragec, il a crié sur moi et il a dit :
17 « Pourquoi pleures-tu ? Ne sais-tu pas que je viens de te
18 sauver la vie ? Ils voulaient te tuer maintenant. Est-ce
19 que tu sais qu’ils voulaient te tuer ? » Quand il m’a dit
20 ça, je me suis calmée un peu. J’ai compris ce qui se
21 passait.
22 Q. Quand est-ce que vous avez vu AB la dernière
23 fois ?
24 R. Nous sommes restées ensemble pendant assez
25 longtemps encore, probablement encore deux mois puisque
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1 Dragec, il nous vendait partout. Il faisait du commerce
2 avec nous. Un mois ou peut-être 15 jours avant, à ce
3 moment-là, ils nous ont séparées. C’est Jasko Gazdic qui
4 l’a amenée et je ne l’ai plus revue, plus jamais, mais je
5 suis sûre et je sais avec certitude que ce même Kovac sait
6 personnellement ce qui est arrivé à cette jeune fille. Il
7 s’agit d’une fille de 12 ans, d’un enfant de 12 ans.
8 J’avais oublié de dire qu’il y avait un verre
9 plein de dents en or dans son appartement. Quand j’ai vu
10 ça, je tremblais de froid et il m’a dit à ce moment-là :
11 « Qu’as-tu vu ? Qu’est-ce qu’il y a ? » Moi, j’ai dit que
12 je n’avais rien vu.
13 Q. Vous-même, quand est-ce que vous avez quitté
14 Foca ?
15 R. Moi, j’ai quitté Foca le 5 mars 1993.
16 Q. Comment êtes-vous sortie ?
17 R. Deux Serbes m’ont aidée. Ils m’ont fait
18 sortir jusqu’au territoire libre.
19 Q. Vous nous avez décrit huit mois de détention
20 et de sévices sexuels. Est-ce que ceci a laissé des
21 séquelles sur votre état de santé ?
22 R. Oui.
23 Q. Comment ?
24 R. Je souffre toujours de traumatismes. Je
25 continue à rêver de ça. J’ai encore beaucoup de peurs. Je
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1 pense que je ne me libérerai jamais de cela parce que si
2 j’ai peur à un moment, je commence à trembler tout de
3 suite.
4 Q. Jeudi, vous avez identifié l’Accusé Dragoljub
5 Kunarac dans le prétoire. Est-ce que les enquêteurs du
6 Bureau du Procureur vous avaient montré une série de
7 photographies ?
8 R. Oui.
9 Q. Vous souvenez-vous quand cela s’est passé ?
10 Est-ce que c’était éventuellement en avril 1998 ? C’était
11 il y a deux ans, n’est-ce pas ?
12 R. Oui, c’est possible, mais je ne m’en souviens
13 pas exactement.
14 Q. Est-ce que vous vous souvenez si vous avez
15 reconnu qui que ce soit sur la photo ?
16 R. Non.
17 Q. Pourquoi ?
18 R. Je pense qu’il s’agissait des copies, des
19 copies de photographies. C’est la raison pour laquelle je
20 ne pouvais pas reconnaître et il y a des années qui se sont
21 passées. Je ne pouvais pas véritablement m’en souvenir.
22 Q. Vous avez reconnu dans le prétoire Dragoljub
23 Kunarac, n’est-ce pas ?
24 R. Oui.
25 Q. Est-ce que vous en êtes sûre ?
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1 R. Oui.
2 Q. Vous avez reconnu également l’Accusé Zoran
3 Vukovic dans ce prétoire, n’est-ce pas ?
4 R. Oui.
5 Q. Vous avez dit que vous ne le connaissiez pas
6 avant la guerre, n’est-ce pas ?
7 R. C’est vrai.
8 Q. Est-ce que vous connaissiez un autre Zoran
9 Vukovic, une autre personne répondant au nom Zoran Vukovic
10 avant la guerre ?
11 R. Non. Je sais qu’il y avait une personne qui
12 répondait au même nom et qui habitait à Brod et ensuite, il
13 était à Foca et son surnom était Kifla.
14 Q. Vous connaissez ce Kifla ?
15 R. Oui.
16 Q. Est-ce que vous pouvez, s’il vous plaît, nous
17 donner la description de cette personne répondant au surnom
18 Kifla, Zoran Vukovic, surnommée Kifla ?
19 R. Il était châtain clair et il était assez
20 gros, de taille moyenne.
21 Q. Quel âge avait-il ?
22 R. Je ne le sais pas exactement mais il avait
23 plus que 30 ans.
24 Q. Est-ce que vous avez vu cette personne
25 répondant au nom Zoran Vukovic et au surnom Kifla ? Vous
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1 l’avez vue pendant la guerre ?
2 R. Oui.
3 Q. Quand ? À quel moment ?
4 R. Eh bien, je pense que c’était le mois de
5 février, février 1993. C’était peut-être en janvier,
6 janvier, février 1993. Dragec m’a vendue à Todovic et il
7 m’a gardée dans un studio à Mahala, et une nuit, lui-même
8 ainsi qu’un enseignant répondant au nom de Dzurovic qui
9 était venu jusqu’à ce studio et avant la guerre, il
10 enseignait la culture physique dans une école élémentaire,
11 donc, ils ont enfoncé la porte du studio que j’habitais.
12 Q. Qu’est-ce qu’ils ont fait ?
13 R. À ce moment-là, Kifla m’a violée. Ensuite,
14 il m’a emmenée dans son appartement, chez sa mère, et je
15 sais qu’il proférait des injures à l’égard de sa mère.
16 C’était sa propre mère et elle était vieille, elle était
17 malade et puis je suis restée toute la nuit dans son
18 appartement. C’est là-bas également qu’il m’a violée. Le
19 lendemain matin à midi, il m’a ramenée dans ce studio.
20 Q. Ce Kifla, ce Zoran Vukovic, est-ce que vous
21 l’avez vu à Buk Bijela, au lycée ou bien à Partizan ?
22 R. Non, je ne m’en souviens pas.
23 Me UERTZ-RETZLAFF (interprétation) : Madame la
24 Présidente, je n’ai plus de questions.
25 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Je pense que
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1 maintenant, nous allons passer au contre-interrogatoire.
2 Me Prodanovic.
3 Me PRODANOVIC (interprétation) : Merci, Madame la
4 Présidente.
5 CONTRE-INTERROGÉE PAR Me
6 PRODANOVIC (interprétation) :
7 Q. Bonjour, Madame le Témoin. Je voudrais vous
8 poser une première question. Vous avez donné combien de
9 déclarations aux enquêteurs du Tribunal à La Haye ?
10 R. Une seule.
11 Q. Est-ce que j’ai bien entendu : une seule ?
12 R. Oui.
13 Q. Est-ce que vous vous souvenez à quel moment
14 vous avez donné cette déclaration ?
15 R. Je ne m’en souviens pas.
16 Q. Est-ce qu’entre-temps, vous avez donné des
17 déclarations à d’autres organes outre les enquêteurs du
18 Tribunal ?
19 R. Je ne sais pas.
20 Q. Est-ce que vous avez donné éventuellement une
21 déclaration au Service de sécurité à Sarajevo ?
22 R. Oui.
23 Q. Est-ce que c’était le 22 août 1996 ?
24 R. Je ne m’en souviens pas. Il est possible.
25 Me PRODANOVIC (interprétation) : Je vais demander
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1 à l’Huissier de m’aider à remettre au témoin les
2 déclarations que le témoin a données aux enquêteurs du
3 Tribunal – il y a deux déclarations, pas une seule, comme
4 le témoin vient de nous dire – et de lui remettre également
5 une déclaration qu’elle a donnée aux représentants du
6 Service de sécurité à Sarajevo en date du 22 août 1996.
7 LA GREFFIÈRE : Alors, la déclaration du témoin en
8 date du 6 mars 1998 sera cotée D23 des pièces de la
9 Défense. La déclaration du témoin en date du 15 et du 18
10 novembre 1995 sera cotée D24 des pièces de la Défense.
11 En ce qui concerne la déclaration du témoin du 22
12 août 1996, celle-ci n’a été communiquée au Greffe qu’en
13 version B/C/S. Je voudrais savoir la position de la
14 Chambre quant à une cotation éventuelle.
15 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Me
16 Prodanovic, comment ça se fait qu’il n’y a pas de version
17 anglaise ou éventuellement en français, notamment en
18 anglais parce qu’il s’agit de la Chambre qui suit
19 uniquement en anglais ?
20 Me PRODANOVIC (interprétation) : Madame la
21 Présidente, c’est l’Accusation qui nous a remis ces
22 déclarations. Je n’ai jamais vu la déclaration en langue
23 anglaise.
24 Me UERTZ-RETZLAFF (interprétation) : Oui. Nous
25 avons une traduction mais officieuse et il faudrait que je
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1 vérifie mais je pense que vous l’avez vérifiée.
2 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Bon. Nous
3 allons par conséquent pouvoir attribuer la cote mais à
4 condition que la version en anglais nous soit remise
5 ultérieurement par l’Accusation.
6 Me UERTZ-RETZLAFF (interprétation) : D’accord.
7 Il n’y a aucun problème.
8 LA GREFFIÈRE : [Hors microphone] …22 août 1996 en
9 version B/C/S portera la cote D25 des pièces du Procureur.
10 Toutes ces pièces seront enregistrées de façon
11 confidentielle.
12 La dernière pièce est cotée D25 des pièces du
13 Procureur et non D26 comme il est indiqué dans le
14 transcript.
15 Me PRODANOVIC (interprétation) :
16 Q. Je vous en prie, est-ce que vous pouvez, s’il
17 vous plaît, regarder ces déclarations et puis nous
18 confirmer s’il s’agit ou non de vos déclarations ?
19 R. Oui.
20 Q. Est-ce que nous pouvons constater que vous
21 avez donné les deux déclarations aux enquêteurs du Tribunal
22 et pas une seule, comme vous l’avez dit tout à l’heure ?
23 R. C’est possible, mais je ne me souviens pas.
24 Quand même, ça s’est passé il y a longtemps. Donc, je ne
25 m’en souviens pas. Je ne sais pas si j’en ai donné une
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1 seule ou deux, mais de toute façon, je sais que je n’avais
2 pas honte de les donner. Je voulais tout simplement que le
3 monde entier sache ce que j’ai vécu.
4 Q. Excusez-moi. Est-ce que vous avez dit au
5 Service de sécurité que vous avez donné la déclaration aux
6 enquêteurs du Tribunal ?
7 R. Oui.
8 Q. Qu’est-ce que les représentants du Service de
9 sécurité d’État vous ont dit et quelles étaient les raisons
10 pour lesquelles ils vous ont convoquée pour donner la
11 déclaration ?
12 R. Je ne m’en souviens pas.
13 Q. Est-ce qu’on vous a dit également qu’il
14 faudrait que vous donniez la déclaration parce que cette
15 déclaration serait utilisée également devant le Tribunal
16 international à La Haye ?
17 R. Je ne m’en souviens pas.
18 Q. Pourriez-vous nous dire comment s’est passé
19 l’interrogatoire auprès du Service de sécurité à Sarajevo ?
20 Est-ce que vous avez donné éventuellement ces déclarations
21 à Sarajevo ou dans un autre lieu ou une autre ville ?
22 R. Normalement, comme toutes les autres
23 déclarations, à Sarajevo, oui.
24 Q. Est-ce que les représentants du Service de
25 sécurité d’État vous ont posé des questions ou bien ils
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1 vous ont dit de relater ce que vous connaissez sur les
2 événements qui avaient trait au conflit de Foca ?
3 R. Mais ils m’ont posé des questions, et puis
4 d’un autre côté, j’ai relaté également un certain nombre
5 d’événements. J’ai dit tout ce qui s’était passé.
6 Q. Est-ce que vous vous souvenez des noms des
7 personnes qui vous ont interrogée ? Est-ce que le Greffe
8 était présent lors de l’interrogatoire ?
9 R. Oui, mais je ne me souviens pas de noms.
10 Q. Est-ce que c’est vous qui avez dicté ce qui
11 allait être intégré dans la déclaration ou quelqu’un
12 d’autre éventuellement ?
13 R. Mais personne ne pouvait dicter ce que je
14 voulais dire et ce que j’ai eu à dire.
15 Q. Est-ce que ça veut dire que vous avez dit au
16 Greffe ce qui allait rentrer dans la déclaration ?
17 R. Oui.
18 Q. Est-ce que vous étiez d’accord avec ce qui a
19 été marqué dans la déclaration ? Éventuellement, vous
20 aviez des remarques, observations ?
21 R. Oui. J’ai signé la déclaration mais pour ce
22 qui est des remarques, je ne me souviens pas.
23 Q. Est-ce que vous vous souvenez ce que vous
24 avez déclaré à cette occasion ? Est-ce que vous maintenez
25 ce que vous avez dit à cette occasion ?
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1 R. Je pense que je m’en souviens.
2 Q. Est-ce que vous avez dit la vérité à cette
3 occasion-là ?
4 R. Je pense que oui.
5 Q. Vous souvenez-vous si le Greffe a signé cette
6 déclaration ?
7 R. Je ne m’en souviens pas.
8 Q. Est-ce qu’à cette époque-là, vous aviez un
9 bon souvenir en ce qui concerne les événements qui se sont
10 passés ?
11 R. Oui, certainement.
12 Q. Est-ce que vous avez parlé de la même façon
13 de ces événements comme ce fut le cas au moment où vous
14 vous êtes entretenue avec les enquêteurs du Tribunal
15 international ?
16 R. Je pense que oui.
17 Q. Excusez-moi, je ne vous ai pas compris.
18 R. Je pense que oui.
19 Q. Entendu ! Pourriez-vous me dire sur
20 l’initiative de qui vous avez participé à ce deuxième
21 interrogatoire ?
22 R. Je ne m’en souviens pas.
23 Q. Vous avez dit par ailleurs que vous avez
24 travaillé à la société Sipad de Maglic comme balayeuse ?
25 R. Oui, c’est exact.
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1 Q. Vous avez dit dans vos déclarations
2 préalables que vous avez travaillé avec quatre Serbes.
3 Est-ce qu’elles étaient également des balayeuses ?
4 R. Oui.
5 Q. Est-ce que, outre ces quatre Serbes,
6 éventuellement il y avait des musulmans parmi vous qui
7 travaillaient avec vous ?
8 R. Oui, avec une seule.
9 Q. Excusez-moi.
10 R. Avec une musulmane. Avec une autre
11 musulmane.
12 Q. Vous avez dit par ailleurs que vos collègues
13 serves ne sont pas venus travailler ce jour-là ?
14 R. Oui.
15 Q. Est-ce que votre collègue musulmane est venue
16 au travail ?
17 R. Non, parce qu’elle était déjà à la retraite.
18 Q. Est-ce que c’était la centrale thermique qui
19 faisait partie de Sipad ?
20 R. Est-ce que je dois donner la réponse ?
21 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Oui. Vous
22 devez donner la réponse.
23 R. Oui.
24 Me PRODANOVIC (interprétation) :
25 Q. Qui était le directeur de la centrale
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1 thermique ?
2 R. Nenad Matovic.
3 Q. Et Omer Hasanbegovic, qu’est-ce qu’il
4 occupait comme poste ?
5 R. Il était directeur également mais il était
6 chargé d’une nouvelle unité d’électricité qui était en
7 train d’être construite.
8 Q. Est-ce que vous savez qui avait un rang qui
9 était supérieur?
10 R. Non, je ne sais pas.
11 Q. Et Djordje Pavlovic, quel était le poste
12 qu’il avait occupé ?
13 R. Il était chef de l’équipe.
14 Q. Et qui était votre supérieur direct ? Qui
15 vous a affecté pour les activités diverses ? Vous étiez
16 responsable devant qui ?
17 R. Il y avait Hajrudin Selimovic qui était le
18 chef et puis, tous les deux jours, on avait des chefs des
19 équipes qui se reléguaient.
20 Q. Et Hajrudin, c’était un musulman ?
21 R. Oui.
22 Q. Est-ce que vous savez comment les partis
23 politiques ont été constitués ?
24 R. Non.
25 Q. Est-ce que vous savez quel était le parti qui
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1 était le premier à être mis en place en Bosnie ?
2 R. Je ne m’en souviens pas.
3 Q. Vous avez dit dans votre déclaration que les
4 Serbes et les musulmans ont commencé à s’écarter les uns
5 des autres à partir de l’affaire de Focatrans ?
6 R. Oui.
7 Q. Vous avez dit qu’il y avait des partis
8 nationaux qui ont été créés, que ça s’est passé par la
9 suite. La question que j’aimerais vous poser c’est de
10 savoir si vous êtes sûre que cet incident Focatrans avait
11 eu lieu après la création des partis politiques.
12 R. Je pense que c’était avant.
13 Q. Excusez-moi.
14 R. Avant.
15 Q. Mais dans votre déclaration, vous disiez que
16 c’était après.
17 R. Je ne m’en souviens pas.
18 Q. Est-ce qu’avant le 6 avril 1992, vous avez
19 entendu parler des problèmes dans l’ex-Bosnie-Herzégovine,
20 des problèmes qui surgissaient ?
21 R. Oui. Lors du dernier congrès à Sarajevo
22 quand Karadzic avait déclaré que si jamais la guerre allait
23 être déclenchée que des musulmans allaient disparaître,
24 oui, ça je l’ai appris.
25 Q. Est-ce que vous savez ce qui s’est passé
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1 avant, avant que Karadzic ait déclaré ce que vous venez de
2 nous citer ?
3 R. Je ne m’en souviens pas.
4 Q. Est-ce que vous connaissez uniquement ce que
5 Karadzic a dit, donc cet extrait qui se rapporte à lui et
6 qui s’est passé lors de cette assemblée générale ?
7 R. Oui.
8 Q. Est-ce que vous avez appris qu’il y avait des
9 incidents qui ont eu lieu et qu’il y avait un conflit, un
10 conflit armé qui a eu lieu le 6 avril 1992 ?
11 R. Je ne m’en souviens pas.
12 Q. Pourriez-vous nous dire entre qui ce conflit
13 s’est déclenché ?
14 R. Je ne m’en souviens pas.
15 Q. Dans vos déclarations, vous utilisez le terme
16 « agression ». Est-ce que vous savez ce que ça couvre,
17 quelle est la notion que ce terme couvre ?
18 R. Bien, ce sont les Serbes qui se sont attaqués
19 sur la Bosnie, sur les musulmans et sur le peuple désarmé.
20 Q. Est-ce que vous utilisez ce terme normalement
21 quand vous parlez couramment ?
22 R. Non. Je ne me souviens pas. Je ne sais pas.
23 Q. Qui vous a dit qu’il n’y avait plus de
24 travail au moment où vous vous êtes rendue au travail le 6
25 avril 1992 ?
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1 R. C’était Nenad Matovic.
2 Q. Il vous a dit où ?
3 R. Mais j’étais dans l’enceinte de la société où
4 je travaillais.
5 Q. Est-ce qu’il vous a rassemblé à un seul
6 endroit ou bien éventuellement il vous l’a dit à vous-même
7 dans les quat’z’yeux ?
8 R. Mais nous étions quatre. Nous étions quatre
9 dans toute l’entreprise et au moment où il est arrivé, nous
10 étions tous les quatre ensemble et on ne savait pas ce qui
11 se passait.
12 Q. Est-ce que ceci concernait aussi bien les
13 Serbes que des musulmans ?
14 R. Oui.
15 Q. Est-ce qu’il y avait des problèmes entre les
16 musulmans et les Serbes dans votre entreprise ?
17 R. À ma connaissance, non, mais il y avait une
18 certaine séparation. Mais personnellement, je n’avais
19 aucun problème avec mes collègues.
20 Q. Vous avez dit que le 6 avril 1992, au moment
21 où on vous a informé qu’il n’y avait plus de travail, vous
22 vous êtes rendue à Foca : Est-ce que c’est exact ?
23 R. Oui.
24 Q. Est-ce que vous pouvez vous souvenir de
25 l’heure ? Quand est-ce que vous êtes partie ?
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1 R. Je pense que c’était 9 h 00, 9 h 00 ou peut-
2 être 8 h 30.
3 Q. Vous avez dit que vous êtes partie avec deux
4 camarades, deux amies filles à Foca ?
5 R. Moi, je pense que c’était plutôt deux hommes.
6 Q. Est-ce que c’était des musulmanes ?
7 R. C’était les deux musulmans.
8 Q. Excusez-moi mais c’est peut-être une erreur
9 de traduction, mais dans la déclaration, c’est marqué
10 « deux filles », « deux femmes ».
11 R. Non. C’était deux camarades, deux musulmans.
12 C’était mon cousin et puis un ami homme.
13 Q. Ce n’est pas important. Passons.
14 Dans votre déclaration que vous avez donnée en
15 1995, en novembre, la première phrase, paragraphe 4, vous
16 avez dit que c’est avec votre cousin que vous êtes allée à
17 Foca : Est-ce que c’est exact maintenant ?
18 R. Oui.
19 Q. Et comment êtes-vous partis : à pied ou par
20 un moyen de transport ?
21 R. Par le car.
22 Q. Et qu’est-ce qui s’est passé ce jour-là à
23 Foca ?
24 R. À Foca, il y avait des véhicules différents
25 qui circulaient. Il y avait également des gens qui
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1 criaient : « Nous sommes pour la paix. » Mais je n’étais
2 pas au clair. Je ne savais pas ce qui se passait.
3 Q. Vous avez dit qu’il y avait un groupe assez
4 nombreux de personnes et qu’ils affichaient : « Nous
5 souhaitons la paix. » Qui c’était, ces gens-là ?
6 R. Je pense que c’était des musulmans.
7 Q. Et maintenant, vous maintenez que c’était des
8 musulmans ?
9 R. Oui.
10 Q. Est-ce que vous pouvez savoir à peu près
11 combien de personnes étaient rassemblées ?
12 R. Mais il ne s’agissait pas d’une
13 manifestation. Il y avait des véhicules qui circulaient
14 mais il y avait également des haut-parleurs normalement
15 devant la mairie. Il fallait également prononcer un
16 discours mais rien ne s’est passé.
17 Q. Mais comment saviez-vous que la plupart
18 étaient des musulmans ?
19 R. Je sais parce que j’en connaissais beaucoup
20 parmi eux.
21 Q. Est-ce que vous, vous êtes restée jusqu’à la
22 fin de la manifestation ?
23 R. Non. Je suis partie à 10 h 15. J’ai pris le
24 car et je suis retournée chez moi.
25 Q. Vous avez dit que des musulmans affichaient
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1 qu’ils voulaient la paix alors que les Serbes ont quitté
2 Foca. Est-ce qu’ils ont quitté massivement Foca ?
3 R. Oui.
4 Q. Et sur la base de quoi vous l’affirmez ?
5 R. Ils se sont préparés, puis ils faisaient
6 partir leurs familles au Monténégro, puis ils déployaient
7 des armes, des canons, et cætera, alors que les nôtres, ils
8 sont restés sur place. De toute façon, ils ne savaient
9 même pas ce qui se préparait parce que sinon, bien
10 évidemment, on n’aurait pas permis que ça se passe parce
11 qu’on aurait pu sauver nos propres vies. On aurait pu… on
12 ne serait pas à attendre les Chetniks pour qu’ils viennent
13 nous égorger.
14 Q. Est-ce que vous vous souvenez quels étaient
15 les Serbes qui sont partis ce jour-là ?
16 R. Oui, (expurgé) qui vivaient
17 (expurgé) dans le village.
18 Q. Est-ce que vous pouvez nous citer ici un
19 nom ?
20 R. Zivanovic, Rosa. Elle-même, elle est partie
21 avec ses enfants au Monténégro.
22 Q. C’est tout ce que vous savez ?
23 R. Je ne me souviens pas.
24 Q. Est-ce que vous savez si éventuellement une
25 famille musulmane a quitté Foca ?
Page 1512
1 R. Non.
2 Q. Mais qu’est-ce que ça veut dire : « Non » ?
3 Vous ne connaissez pas ou il n’y a pas une seule famille
4 qui ait quitté Foca ?
5 R. Je ne sais pas. Je ne connais pas parce que
6 je n’étais pas à Foca.
7 Me PRODANOVIC (interprétation) : C’est peut-être
8 le moment, Madame la Présidente. Je pense que nous sommes
9 à l’heure où normalement, on fait la pause et c’est après
10 la pause que je pourrais poursuivre si vous êtes d’accord
11 avec moi.
12 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Oui, jusqu’à
13 11 h 30.
14 — Suspension de l’audience à 11 h 02
15 — Reprise de l’audience à 11 h 30
16 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Me
17 Prodanovic, vous pouvez poursuivre le contre-interrogatoire
18 du témoin.
19 Me PRODANOVIC (interprétation) : Merci, Madame la
20 Présidente.
21 Q. Vous avez dit que cette manifestation avait
22 été organisée par des musulmans, un groupe de musulmans.
23 Savez-vous qu’à Foca, il y avait une association de civils
24 qui s’opposaient aux partis nationalistes ?
25 R. Non, je ne le savais pas.
Page 1513
1 Q. Savez-vous qu’à Foca, il y avait des
2 manifestations qui étaient organisées contre les partis du
3 SDA et du SDS ?
4 R. Oui, je le sais.
5 Q. Avez-vous jamais participé à une de ces
6 manifestations ?
7 R. Oui. À Foca où était formé le Parti du SDA.
8 Q. Je ne crois pas que nous nous soyons compris.
9 Moi, ce que je vous avais demandé, c’est si vous saviez
10 qu’à Foca, il y avait des manifestations montées par des
11 associations de personnes opposées aux partis nationalistes
12 et lors de ces manifestations, on insistait beaucoup sur le
13 caractère néfaste du SDS et du SDA.
14 R. Je ne sais pas.
15 Q. Avez-vous connaissance, lors de la
16 manifestation que vous avez mentionnée qui s’est déroulée
17 en face de l’immeuble de la municipalité, est-ce que cette
18 association a demandé à rencontrer les représentants de la
19 municipalité ?
20 R. Il n’y avait personne devant la mairie ou
21 devant l’immeuble municipal. Il y avait des micros, des
22 porte-voix, des haut-parleurs, mais il n’y avait personne
23 devant.
24 Q. Comment le savez-vous puisque vous n’êtes pas
25 restée jusqu’au bout ?
Page 1514
1 R. Quand j’y étais, en tout cas, il n’y avait
2 personne
3 Q. Donc, vous nous avez dit qu’il y avait des
4 micros et des haut-parleurs ?
5 R. Oui.
6 Q. Est-ce que Novica Kostovic, ça vous dit
7 quelque chose et Dr Janovic, ça vous dit quelque chose ?
8 L’un était serbe et l’autre musulman.
9 R. Non.
10 Q. Est-ce que vous affirmez toujours aujourd’hui
11 que personne n’a prononcé de discours ?
12 R. Je n’ai pas dit que quelqu’un avait prononcé
13 un discours. Je ne sais pas, d’ailleurs, si ça a été le
14 cas. Je ne peux pas vous le dire.
15 Q. Passons à des choses plus précises et plus
16 concrètes. Quand avez-vous été transférée du lycée au
17 gymnase Partizan ?
18 R. À peu près une quinzaine de jours après mon
19 arrivée au lycée. Je ne peux pas vous dire la date exacte.
20 Q. Est-ce que vous affirmez toujours que vous
21 êtes restée au gymnase Partizan pendant 15 jours ?
22 R. Oui.
23 Q. Conviendrez-vous que si on vous a amenée à
24 l’école, au lycée le 3 juillet et si vous y êtes restée
25 jusqu’au 18 ou au 19 juillet, ça fait donc 15 jours, comme
Page 1515
1 vous nous l’avez dit, donc est-ce que ça correspondrait à
2 ce que vous nous dites, 18 ou 19 juillet ?
3 R. Oui, à peu près. Je ne peux pas vous dire
4 exactement. Je ne suis pas sûre des dates, mais je dirais
5 oui, environ 10 à 15 jours.
6 Q. Est-ce qu’on vous a dit pourquoi on vous
7 transférait au gymnase Partizan ?
8 R. Je ne m’en souviens pas.
9 Q. Est-ce que vous savez que des réfugiés serbes
10 sont arrivés et que c’est eux que l’on a installés dans le
11 lycée ?
12 R. Je ne sais pas.
13 Q. Savez-vous ou avez-vous entendu dire la chose
14 suivante : Il y a eu un massacre de la population civile
15 du village de Jabuka lors duquel plusieurs dizaines de
16 civils ont trouvé la mort ? Le saviez-vous ?
17 R. Non, je ne le savais pas.
18 Q. Étiez-vous libre de vos mouvements au gymnase
19 Partizan ?
20 R. Bien…
21 Q. Je parle des périodes de temps pendant
22 lesquelles on ne vous faisait pas sortir du gymnase.
23 R. Oui, oui. À l’intérieur, on pouvait se
24 déplacer, on pouvait aller aux toilettes, mais où est-ce
25 qu’on aurait pu aller d’ailleurs ?
Page 1516
1 Q. Est-ce que vous aviez le droit de sortir
2 devant le gymnase ?
3 R. C’est surtout les enfants qui sortaient.
4 Q. Vous, est-ce qu’il vous est arrivé de sortir
5 ?
6 R. Parfois pour de brefs instants. J’attendais
7 pour voir si les Chetniks allaient m’emmener. Donc, moi,
8 je préférais en fait me cacher plutôt que de sortir.
9 Q. Combien y avait-il de gardes dans le gymnase
10 Partizan ?
11 R. Chaque équipe de garde était composée de deux
12 hommes.
13 Q. Connaissiez-vous certains de ces gardes ?
14 R. Personnellement, non mais peu à peu, j’ai
15 appris à les connaître. Attendez un instant, s’il vous
16 plaît. Oui, j’en connaissais un, mais je ne me souviens
17 plus de son nom. C’était peut-être Bogdan.
18 Q. Comment se fait-il que vous le connaissiez,
19 parce qu’il était bon ou parce qu’il était mauvais ?
20 R. C’était quelqu’un de bien.
21 Q. Vous avez parlé de Bosko Partalo et du garde
22 Sonivoje.
23 R. Je ne les connaissais pas en arrivant, mais
24 après, j’ai appris à les connaître. C’était des gens biens
25 parce que quand c’est eux qui nous gardaient, personne ne
Page 1517
1 pouvait venir nous chercher. Aucun Chetnik ne pouvait
2 venir au gymnase nous chercher quand ces deux hommes
3 étaient de garde. Pour nous, quand eux, ils étaient de
4 garde, c’était vraiment formidable pour nous.
5 Q. Est-ce que les gardes vous empêchaient de
6 vous déplacer quand il y avait du danger ?
7 R. Oui.
8 Q. Pouvez-vous nous dire quelle était la durée
9 de leur service ?
10 R. Bien, il y avait trois équipes. Je ne peux
11 pas vous dire exactement combien de temps ils restaient.
12 Enfin, je crois que c’était deux jours à peu près.
13 Q. Est-ce que cela veut dire que quand ces
14 hommes étaient de garde, vous étiez protégée ?
15 R. Oui. À ce moment-là, on ne nous embêtait
16 pas.
17 Q. Est-ce qu’il vous est arrivé de parler avec
18 les gardes ?
19 R. Oui. Avec ces deux-là en particulier, on a
20 souvent beaucoup parlé.
21 Q. De quoi parliez-vous avec eux ?
22 R. Je ne me souviens pas vraiment de toutes les
23 choses dont nous parlions ensemble. Je ne me souviens pas
24 des détails.
25 Q. Savez-vous quelle était leur fonction, leur
Page 1518
1 mission ?
2 R. Non, je ne sais pas.
3 Q. Vous souvenez-vous si une femme serbe
4 habitait à côté du gymnase Partizan ?
5 R. Oui.
6 Q. Connaissez-vous son nom ?
7 R. Oui.
8 Q. Pouvez-vous nous donner son nom ?
9 R. Elle s’appelait Vida. Je ne connais pas son
10 nom de famille.
11 Q. Est-ce que c’était quelqu’un de bien ?
12 R. Oui, oui. Une fois, elle nous a sauvés d’un
13 Chetnik. C’est un Chetnik qui était entré dans le gymnase.
14 Ils s’étaient tirés dessus. Il était en sang et il est
15 venu au gymnase avec un fusil. Il s’apprêtait à nous tuer
16 tous et elle, elle est venue au gymnase, elle l’a calmé,
17 elle l’a emmené prendre un café chez elle.
18 Q. Est-ce qu’il vous est arrivé à certains
19 d’entre vous d’aller chez elle pour prendre un café ?
20 R. Je ne sais pas. Je ne me souviens pas.
21 Q. Quand vous sortiez du gymnase, est-ce qu’il
22 arrivait à certaines d’entre vous d’aller acheter quelque
23 chose, d’aller dans un magasin ?
24 R. Oui. Les femmes à qui il restait un peu
25 d’argent, qui avaient réussi à le cacher aux Chetniks, à
Page 1519
1 qui on ne l’avait pas encore pris, elles sortaient et elles
2 essayaient d’aller acheter quelque chose, du pain parce
3 qu’on n’avait rien à manger au gymnase.
4 Q. Donc, ça veut dire que personne ne vous
5 empêchait de sortir pour aller faire des commissions ?
6 R. On ne nous arrêtait pas, mais celles qui y
7 allaient n’y allaient pas ouvertement. Moi, je ne suis
8 jamais sortie pour aller faire des courses mais je connais
9 des femmes qui sortaient discrètement.
10 Q. Nous avons déjà convenu que vous êtes restée
11 environ 15 jours au lycée et que c’est le 3 juillet que
12 vous y êtes arrivée. Pouvons-nous partir du principe que
13 vous avez été transférée le 18 ou le 19 juillet à partir du
14 gymnase Partizan ?
15 R. Je vous ai dit que je ne peux plus me
16 souvenir très bien des dates. Je vous ai dit que je suis
17 restée à peu près une quinzaine de jours dans le lycée et
18 que je suis restée à peu près autant de temps au gymnase.
19 Q. Oui, mais dans une de vos déclarations, vous
20 avez dit que vous êtes restée au lycée pendant une
21 quinzaine de jours et que vous êtes restée au gymnase
22 Partizan une quinzaine de jours. Donc, c’est pour ça que
23 j’essaie de déterminer les dates sur la base de vos
24 déclarations.
25 Au cours de ces 15 jours que vous avez passés au
Page 1520
1 gymnase Partizan, je voudrais savoir combien de fois on
2 vous a fait sortir, on vous a emmenée.
3 R. Pratiquement tous les soirs. Je ne peux pas
4 vous dire, je ne sais pas si même il y a une seule nuit où
5 je suis restée dans le gymnase. Peut-être la nuit où ma
6 grand-mère m’a cachée, où j’ai dormi sous son corps.
7 Q. La dernière fois, vous avez dit que vous avez
8 passé trois jours cachée sous les vêtements de votre grand-
9 mère.
10 R. Je ne me souviens pas de tous les détails.
11 Q. Je suis un petit peu préoccupé. Vous semblez
12 ne vous souvenir d’aucun détail quand moi, je vous pose des
13 questions, alors que vous vous souvenez de tous les détails
14 et que vous racontez en détail tout ce qui vous est arrivé
15 quand l’Accusation vous pose des questions. Pourquoi cette
16 différence ? Peut-être parce que je vous pose des
17 questions bien précises et bien concrètes.
18 R. Moi, je ne peux vous dire que ce dont je me
19 souviens et que je sais. Peut-être ai-je dit des choses
20 dont je ne me souviens pas. C’est une situation très
21 perturbante pour moi.
22 Q. Vous souvenez-vous quelle est la première
23 personne qui vous a fait sortir du gymnase, qui et quand ?
24 R. Je crois que c’était Stankovic, Dragec
25 Stankovic.
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1 Q. Vous avez dit Dragec Stankovic ?
2 R. Oui.
3 Q. Dans votre déclaration de 1995, à la page 10,
4 paragraphe 3, vous avez dit qu’on vous a fait sortir pour
5 la première fois à la mi-juillet 1992 et ensuite, vous avez
6 décrit Kunarac et ses hommes. Où est la vérité, s’il vous
7 plaît ?
8 R. Je ne me souviens pas. Je crois que tout est
9 dans les déclarations que j’ai données parce que, comme je
10 l’ai déjà dit, beaucoup de temps a passé depuis.
11 Q. Pouvez-vous me dire quand votre mémoire était
12 meilleure, il y a quelques années ou aujourd’hui ?
13 R. Bien entendu, il y a quelques années.
14 Aujourd’hui, j’essaie d’oublier tout ce qui est m’est
15 arrivé.
16 Q. Oui, mais vous devrez reconnaître que vous
17 avez fait preuve d’une excellente mémoire lorsque vous avez
18 répondu aux questions de l’Accusation. Vous vous êtes
19 souvenue de détails que vous n’aviez pas donnés lorsqu’on a
20 recueilli vos déclarations préalables.
21 R. C’est possible.
22 Q. Vous souvenez-vous de la date où pour la
23 dernière fois on vous a fait sortir du gymnase Partizan ?
24 R. C’était le 2 août.
25 Q. La première fois où on est venu vous
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1 chercher, vous nous dites que c’est Dragec Stankovic qui
2 vous a fait sortir et ensuite, qui vous a fait sortir et où
3 vous a-t-on emmenée ?
4 R. Après, il y a eu Zaga qui m’a emmenée à
5 Aladze, je l’ai déjà dit, et puis il y en a quatre autres
6 dont je ne connais pas les noms, ils nous ont emmenées à
7 Masala. Ensuite, il y a eu Tuta et puis…
8 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Me
9 Prodanovic, il ne faut pas s’attendre à ce que le témoin
10 vous rappelle et répète tout ce qu’elle a dit dans le cadre
11 de l’interrogatoire principal. Dans le cadre du contre-
12 interrogatoire, si vous essayez de mettre en doute ce
13 qu’elle a dit, il faut lui poser des questions directes.
14 Il ne faut pas lui demander de répéter ce qu’elle a déjà
15 dit dans le cadre de l’interrogatoire principal.
16 Me PRODANOVIC (interprétation) : Je n’ai pas bien
17 compris ce que vous avez dit. Je n’ai pas entendu
18 l’interprétation.
19 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Oui.
20 J’étais en train de dire qu’il ne faut pas demander au
21 témoin de répéter ce qu’elle a dit.
22 Me PRODANOVIC (interprétation) : Je n’entends pas
23 de traduction. C’est bon maintenant.
24 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Donc, je
25 vous dis qu’il ne faut pas demander au témoin de répéter ce
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1 qu’elle a déjà dit dans le cadre de l’interrogatoire
2 principal. Nous avons tout entendu ce qu’elle a dit.
3 Donc, il convient de ne pas perdre de temps.
4 Donc, ce que vous devez faire, si vous contestez
5 ce qu’elle a dit, c’est de lui présenter votre version des
6 faits, la version de l’accusé, mais ne lui faites pas
7 répéter ce qui a été dit dans le cadre de l’interrogatoire
8 principal. Ne nous refaites pas un interrogatoire
9 principal, s’il vous plaît.
10 Me PRODANOVIC (interprétation) : Merci, Madame la
11 Présidente. Je vais faire de mon mieux pour me conformer à
12 vos instructions.
13 Q. Madame le Témoin, pouvez-vous nous dire en
14 tout combien de fois on est venu vous chercher et on vous a
15 fait sortir entre le 18 juillet et le 3 août, période que
16 vous avez passée au gymnase Partizan ?
17 R. Je ne peux pas vous donner le chiffre exact.
18 Q. Pouvez-vous nous dire quand vous êtes allée à
19 Cajnice où on devait normalement vous échanger ?
20 R. C’était au bout de cinq ou 10 jours au
21 gymnase Partizan.
22 Q. Est-ce qu’à cette occasion, il y avait
23 quelqu’un dont le nom figure sur la liste qui est devant
24 vous ?
25 R. Non.
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1 Q. Vous souvenez-vous combien de jours vous avez
2 passés à Cajnice ?
3 R. Je l’ai déjà dit. J’ai passé deux nuits.
4 Q. Dans votre déclaration, vous avez dit que
5 vous avez passé une nuit dans l’école primaire et deux
6 autres dans la plus grande école.
7 R. C’est exact. En fait, non, je ne m’en
8 souviens pas vraiment. On a passé une nuit dans la
9 « petite école » et je ne me souviens pas combien de nuits
10 nous avons passées dans l’autre école. Je ne sais pas si
11 c’est une ou deux.
12 Q. Oui, mais dans cette déclaration, vous avez
13 dit qu’un certain nombre de personnes qui figurent sur les
14 listes devant vous ont fait partie de ce voyage. Où est la
15 vérité ?
16 R. Ah, vous voulez parler des femmes dont le nom
17 figure sur la liste ? Oui, oui, en effet, elles étaient
18 avec moi.
19 Q. Sans nous dire leurs noms, pouvez-vous nous
20 donner leurs numéros, s’il vous plaît ?
21 R. Eh bien, DB, 87, 189, 48, 74 et 88.
22 Q. Pouvez-vous nous dire avec précision combien
23 de fois on vous a emmenée dans le quartier de Aladze ?
24 Dans votre première déclaration, vous avez dit cinq fois,
25 mais pendant votre interrogatoire principal, vous avez dit
Page 1525
1 deux fois.
2 R. Deux fois. Deux fois dont je me souvienne.
3 Q. Conviendrez-vous qu’il est arrivé que vous
4 passiez plusieurs jours au gymnase Partizan sans que l’on
5 vous en fasse sortir ?
6 R. Je ne m’en souviens pas. Il est possible
7 qu’il y ait eu un jour ou deux où cela se soit passé comme
8 vous me dites.
9 Q. Oui. Dans votre déclaration, vous dites
10 qu’il vous est arrivé de vous cacher sous votre grand-mère
11 pendant trois jours. Plus tard, vous avez dit que c’était
12 deux nuits. Vous avez dit que pendant deux nuits, personne
13 n’était venu vous chercher. Je ne veux pas ainsi
14 répertorier tous les passages de vos déclarations où l’on
15 constate des discordances.
16 R. Je ne me souviens pas du nombre exact de
17 jours où on m’a laissée tranquille.
18 Q. Est-ce que vous pouvez nous dire combien de
19 fois, pendant combien de périodes de temps on ne vous a pas
20 fait sortir du gymnase ?
21 R. Non, je ne peux pas vous le dire, mais en
22 tout cas, ce n’était pas très souvent.
23 Q. Pouvez-vous nous dire quelle était la tenue
24 vestimentaire des soldats qui venaient chercher des femmes
25 et des jeunes filles ?
Page 1526
1 R. Ils étaient habillés d’uniformes de
2 camouflage.
3 Q. Est-ce qu’ils avaient des insignes sur leurs
4 uniformes ?
5 R. Ils avaient la cocarde Chetnik.
6 Q. Pouvez-vous nous expliquer où cela se
7 trouvait sur leurs uniformes ?
8 R. Sur leur couvre-chef, sur leurs manches.
9 Q. Est-ce que Zaga avait une cocarde sur la tête
10 ?
11 R. Je ne crois pas. Il ne me semble pas qu’il
12 portait un couvre-chef. Il avait des cheveux très fournis
13 noirs ou foncés. Il semblait…
14 Q. Connaissez-vous les noms des soldats qui
15 venaient vous chercher au gymnase Partizan ?
16 R. Oui. Je connaissais la plupart d’entre eux.
17 Q. Pouvez-vous nous donner leurs noms ?
18 R. Je l’ai déjà dit.
19 Q. Comment se fait-il que vous connaissiez leurs
20 noms ?
21 R. Parce que je les ai appris. Je ne suis pas
22 restée là seulement une journée ou deux. Je suis restée là
23 huit mois. Donc, c’est normal que j’ai appris leurs noms.
24 Q. Vous avez parlé de soldats venant du
25 Monténégro et qui vous ont emmenée dans le quartier Aladze.
Page 1527
1 R. Oui.
2 Q. Qui en particulier ?
3 R. Il y avait Zaga et Bane. Ils étaient du
4 Monténégro et ils faisaient partie de l’escorte de Kunarac.
5 Q. Comment saviez-vous qu’ils venaient du
6 Monténégro ? Est-ce qu’ils avaient un accent ?
7 R. Oui. Je les ai entendu parler en dialecte.
8 Donc, j’ai tout de suite vu qu’ils étaient du Monténégro.
9 Q. Est-ce que Zaga, lui, avait le même type
10 d’accent ou est-ce qu’il parlait comme les gens de Foca ?
11 R. Lui, il n’avait pas d’accent particulier. Il
12 parlait comme tout le monde à Foca.
13 Q. Est-ce qu’ils vous ont agressée physiquement
14 lorsqu’ils vous ont emmenée dans la maison ? Je pense aux
15 deux incidents que vous avez mentionnés.
16 R. Comment ça physiquement ? Vous voulez dire
17 est-ce qu’ils m’ont frappée ?
18 Q. Oui.
19 R. Non, ils ne m’ont pas frappée.
20 Q. Est-ce qu’ils étaient saouls quand ils vous
21 ont violée ?
22 R. Je ne sais pas vraiment, mais en tout cas,
23 ils n’avaient pas un comportement normal parce qu’un homme
24 normal ne ferait jamais quelque chose comme ça. Je parle
25 d’un homme normal, d’un homme civilisé.
Page 1528
1 Q. Maintenant, parlons du deuxième incident,
2 celui du 2 août dont vous nous avez parlé. Est-ce qu’il
3 faisait déjà nuit quand on vous a emmenée dans la maison ?
4 R. Oui.
5 Q. Vous étiez quatre. On vous a emmenées depuis
6 le gymnase Partizan. Donc, vous étiez quatre d’après vos
7 déclarations. Je voudrais savoir si à un moment donné,
8 vous vous êtes trouvées toutes dans la même pièce.
9 R. Oui.
10 Q. Est-ce que vous avez pu voir qui a fait
11 sortir le numéro 50 de la pièce où vous vous trouviez ?
12 R. Oui.
13 Q. Est-ce qu’il y avait de la lumière, est-ce
14 qu’il y avait de l’électricité cette nuit-là ?
15 R. Oui, jusqu’à minuit moins 20. À ce moment-
16 là, la mosquée de Aladze a été plastiquée, a explosé, et du
17 fait de l’explosion, le courant a été coupé car les lignes
18 ont été coupées. Moi, ce que je sais c’est que les hommes
19 du Monténégro hurlaient parce qu’ils ne comprenaient pas
20 pourquoi on ne les avait pas prévenus à l’avance.
21 Q. Est-ce qu’il y avait des lampadaires qui
22 fonctionnaient dans la rue et qui fournissaient de la
23 lumière, qui éclairaient ce qui se passait dans la pièce ?
24 R. Je ne m’en souviens pas.
25 Q. Pouvez-vous nous dire ce que faisaient les
Page 1529
1 gens que vous avez trouvés dans cette pièce lorsque vous
2 êtes entrée ?
3 R. Ce qu’ils faisaient ? Bien, il y avait trois
4 filles, trois jeunes filles, et l’un d’eux – je crois qu’il
5 était de Capljina – il avait des traces de sang sur ses
6 bottes et il était armé jusqu’aux dents. Et elle venait de
7 Gacko…
8 Q. Non, je suis désolé, je ne vous ai pas posé
9 cette question-là.
10 R. Eh bien, il y avait trois personnes qui
11 étaient assises là dans cette pièce.
12 Q. Elles étaient dans la même pièce que vous
13 avant cet incident ?
14 R. Oui.
15 Q. Est-ce que l’une d’entre elles a également
16 été violée ?
17 R. Oui.
18 Q. Pouvez-vous, s’il vous plaît, écrire le nom
19 de la personne qui a également été violée ce soir-là ?
20 R. C’est le numéro 190. Puis, il y a également
21 le numéro 87.
22 Q. Oui. Nous avons entendu cela précédemment,
23 mais ma question a trait aux personnes qui se trouvaient là
24 quand vous êtes arrivée.
25 R. Oui. Le numéro 190.
Page 1530
1 Q. Pouvez-vous nous dire si vous vous souvenez
2 si la personne désignée par le numéro 50 vous a dit qui est
3 venu la chercher ce soir et quand ?
4 R. Je me souviens que c’est Gica qui l’a fait
5 sortir ce soir, mais quant à savoir qui l’a violée, ça, je
6 ne sais pas. Je ne sais même pas si elle a été violée. Je
7 ne sais pas.
8 Q. Dans votre déclaration, vous avez mentionné
9 un soldat blessé. Je voudrais savoir s’il était là la
10 première fois que vous vous êtes rendue à cet endroit, la
11 deuxième fois ou les deux fois.
12 R. Il était là la première fois.
13 Q. Pouvez-vous nous décrire cet homme ?
14 R. Je ne me souviens pas du tout maintenant.
15 Q. Est-ce qu’il est possible que ce soit Goran
16 Milicic cet homme ?
17 R. Je ne sais pas.
18 Q. Pouvez-vous nous dire quand le numéro 50 et
19 la jeune fille de Gacko ont été contraintes de sortir ?
20 R. Je sais que c’était un peu après minuit. En
21 tout cas, je suis sûre d’une chose : c’est qu’elles étaient
22 là au moment où la mosquée Aladze a sauté. Ensuite, ce
23 Gica est arrivé et il m’a dit de sortir. Je l’ai imploré.
24 Je lui ai dit de me laisser parce que je m’occupais de deux
25 enfants dont la mère avait été tuée au village. Donc, je
Page 1531
1 l’ai imploré de me laisser retrouver ces enfants au gymnase
2 Partizan.
3 Alors, ce type de Capljina ensuite a pris un bâton
4 et il s’apprêtait à me frapper. Il m’a insultée, il a
5 insulté ma mère et il m’a dit : « Ne t’occupe pas des
6 enfants », mais cependant, malgré cela, il m’a dit de
7 retourner d’où je venais et il a emmené le numéro 50.
8 Q. Est-ce que vous maintenez toujours que les
9 événements du 2 août se sont déroulés exactement de la
10 façon dont vous nous les avez décrits ici dans ce prétoire
11 ?
12 R. Oui.
13 Q. Nous avons appris ce matin que le Témoin DB
14 va venir déposer ici. Est-ce qu’elle sera en mesure de
15 confirmer vos dires ?
16 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Me
17 Prodanovic, vous ne pouvez pas poser cette question au
18 témoin. Elle ne sait pas ce que le Témoin DB va dire à la
19 Chambre de première instance.
20 Me PRODANOVIC (interprétation) : Je vous présente
21 mes excuses, Madame la Présidente. Si j’avais reçu la
22 déclaration un peu plus tôt, j’aurais pu préparer des
23 questions au sujet de cette déclaration qui m’auraient
24 permis de m’assurer que ce témoin dit bien la vérité. Je
25 vous prie de m’excuser.
Page 1532
1 Q. Nous avons presque terminé. Est-ce que vous
2 avez fait une déclaration à Sarajevo le 1er septembre 1999
3 sur la base de laquelle une note officielle a été écrite ?
4 R. Oui.
5 Me PRODANOVIC (interprétation) : Je demanderais à
6 l’Huissier de remettre au témoin cette note officielle.
7 LA GREFFIÈRE : Pourrais-je connaître la date de
8 cette note officielle, s’il vous plaît ? Le Greffe n’est
9 pas en possession de ce document.
10 Me PRODANOVIC (interprétation) : C’est le
11 Procureur qui nous a remis ce document.
12 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Le Procureur
13 peut-il nous aider ?
14 Me UERTZ-RETZLAFF (interprétation) : Je ne sais
15 pas en ce moment ce dont Me Prodanovic parle.
16 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : S’il vous
17 plaît, est-ce que vous pouvez montrer ça par le biais de
18 l’Huissier pour que le Procureur puisse savoir si cela
19 rappelle quelque chose ou pas ?
20 Me UERTZ-RETZLAFF (interprétation) : Il s’agit du
21 document que nous avons remis récemment aux conseils de la
22 Défense puisque nous-mêmes, nous avons reçu ce document il
23 y a une semaine seulement et nous avons été surpris, nous
24 aussi. Il s’agit du document émanant de la police locale
25 concernant une identification sur base de photos concernant
Page 1533
1 ce Dragan Stankovic, je crois.
2 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Lorsque vous
3 dites la « police locale », vous parlez de qui ?
4 Me UERTZ-RETZLAFF (interprétation) : De Sarajevo.
5 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Et la date ?
6 Me UERTZ-RETZLAFF (interprétation) : Le 29
7 janvier 1999, mais en haut du document, il est écrit le 1er
8 février 1999 et nous avons communiqué ce document à la
9 Défense dès que nous l’avons reçu.
10 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Ça veut dire
11 que les juges ne disposent pas de copie ?
12 Me UERTZ-RETZLAFF (interprétation) : Non, et puis
13 nous n’avons pas encore de traduction de ce document.
14 Simplement, nous savons de quoi il s’agit.
15 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Vous
16 connaissez le contenu général ?
17 Me UERTZ-RETZLAFF (interprétation) : Nous avons
18 un projet de traduction, une ébauche de traduction.
19 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Me
20 Prodanovic, vous comprenez quel est le problème ? Je vais
21 vous expliquer. Lorsque vous traitez de documents qui
22 n’existent qu’en serbo-croate et si les juges n’ont pas une
23 copie en anglais, lorsque vous utilisez un tel document
24 afin de contre-interroger le témoin, nous ne pouvons pas
25 suivre. Peut-être vous avez votre propre interprétation du
Page 1534
1 contenu du document. Peut-être nous pouvons entendre
2 d’autres interprétations.
3 Donc, s’il n’y a pas de texte en anglais, il nous
4 est difficile de contrôler la procédure, même de la suivre.
5 Me UERTZ-RETZLAFF (interprétation) : Ce que nous
6 pouvons faire, Madame la Présidente, c’est vous remettre
7 dès à présent cette ébauche de traduction, mais j’ai une
8 seule copie de ceci.
9 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Oui. Peut-
10 être l’Huissier pourrait photocopier cela. Vous pouvez
11 passer à autre chose et dès que l’Huissier reviendra avec
12 les copies, vous pourrez poser des questions concernant ce
13 document parce qu’il faut comprendre qu’il est nécessaire
14 pour nous, les juges, de connaître le contenu pour pouvoir
15 suivre et pour pouvoir protéger le témoin.
16 Me PRODANOVIC (interprétation) : Je comprends ça
17 tout à fait, Madame la Présidente, mais moi, je m’attendais
18 à ce que le Procureur dispose de ce document dans une
19 version qui vous est disponible également.
20 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : De toute
21 façon, il est parti faire des photocopies. Le Procureur
22 peut parfois vous communiquer des documents qu’il n’a pas
23 l’intention d’utiliser et donc il considère qu’il n’est pas
24 nécessaire de le traduire et lorsque vous décidez
25 d’utiliser un tel document, veuillez vérifier avec le
Page 1535
1 Procureur si le document a déjà été traduit pour que ce qui
2 s’est passé aujourd’hui ne se reproduise plus.
3 Me PRODANOVIC (interprétation) : Je comprends
4 tout à fait. Ceci ne se reproduira plus.
5 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Est-ce que
6 vous avez d’autres questions qui ne sont pas liées au
7 document que nous attendons ? Ainsi, vous pouvez poser vos
8 autres questions et revenir au document que nous attendons
9 par la suite.
10 Me PRODANOVIC (interprétation) : Tout à fait.
11 Q. Connaissez-vous ou plutôt savez-vous qu’à
12 Sarajevo, un livre a été publié contenant également votre
13 déclaration identique aux déclarations que vous avez
14 données aux enquêteurs de ce Tribunal ?
15 R. Oui.
16 Q. Est-ce qu’on vous a consultée au moment de la
17 publication de ce livre ?
18 R. Non.
19 Q. Comment se fait-il que les personnes publiant
20 ce livre ont eu votre déclaration si elles ne vous ont pas
21 consultée ?
22 R. Je sais que j’ai donné la déclaration, mais
23 on n’en parlait pas.
24 Q. Je n’ai pas compris. Excusez-moi.
25 R. Lorsque j’ai fait la déclaration, personne ne
Page 1536
1 m’a parlé du livre, de l’intention de publier un livre.
2 Q. Est-ce que vous avez assisté à la promotion
3 de ce livre ?
4 R. Oui.
5 Q. Est-ce que vous avez été à la télévision de
6 Bosnie-Herzégovine au moment de la promotion de ce livre ?
7 R. Oui.
8 Q. Est-ce que vous avez eu une intervention
9 télévisée ?
10 R. Oui.
11 Q. Est-ce qu’à la télé, on pouvait voir votre
12 nom et votre prénom ?
13 R. Oui.
14 Q. J’essaie de savoir pourquoi alors vous avez
15 demandé des mesures de protection ici.
16 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Me
17 Prodanovic, je souhaite encore une fois protéger le témoin.
18 Ça n’a absolument rien à voir avec ce qui s’est passé sur
19 le terrain. À l’époque, elle vivait dans un pays libre.
20 Il ne faut pas lui poser une telle question.
21 M. LE JUGE HUNT (interprétation) : Il y a une
22 grande différence entre des interventions télévisées de ce
23 témoin concernant les événements qui se sont produits et le
24 fait de révéler qu’elle apparaît en tant que témoin de
25 l’Accusation à l’encontre de certains accusés concrets.
Page 1537
1 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Est-ce que
2 nous avons le document maintenant ?
3 Me PRODANOVIC (interprétation) :
4 Q. Sur la base de cette déclaration où nous ne
5 voyons pas qui l’a rédigée, vous avez affirmé que le 2
6 août, c’est Dragan Stankovic, Dragec qui vous a violée.
7 Pourtant, vous n’avez pas raconté cela ici. Qu’est-ce qui
8 est vrai ? C’est vers la fin.
9 R. Je n’ai pas raconté tous les détails. Je ne
10 me souviens pas de ce que j’ai raconté là.
11 LA GREFFIÈRE : Donc, ce document daté du 1er
12 février 1999 prendra la cote D26 des pièces de la Défense
13 et sera enregistré de façon confidentielle.
14 Me PRODANOVIC (interprétation) :
15 Q. Est-ce que vous savez peut-être pourquoi Zaga
16 vous a fait venir le 2 août lorsqu’il est parti ?
17 R. Pourquoi ? Vous le savez très bien vous-
18 même.
19 Q. Je vous pose cette question parce que, comme
20 vous l’avez dit, chacun avait accès au Partizan.
21 R. C’est exact.
22 Q. Est-ce que vous pouvez me dire quand la
23 journaliste est-elle venue au Partizan et qui était avec
24 elle ?
25 R. Elle était toute seule. La date, je ne sais
Page 1538
1 pas. C’est après la première fois que Zaga nous a fait
2 sortir. Le lendemain, elle est venue, mais je ne sais pas
3 quelle était la date exacte.
4 Q. Est-ce que vous savez quelles sont les
5 personnes parmi vous qui ont parlé avec elle ?
6 R. Je ne sais pas qui lui a parlé, mais moi,
7 j’étais allongée sur le tapis de gymnastique lorsque j’ai
8 entendu qu’elle était une journaliste de la radio de
9 Sarajevo. Moi, je me suis dit : ce n’est pas possible.
10 Ensuite, elle s’est approchée de moi et elle m’a dit :
11 « N’ayez pas peur de rien. Dites-moi simplement ce qui
12 s’est passé. Dites-le librement. »
13 Q. Ce soldat blessé qui était là-bas,
14 s’agissait-il d’une personne jeune ou plutôt âgée, la
15 personne à Aladze ?
16 R. C’était quelqu’un de jeune.
17 Q. Vous avez dit que vous-même, vous vous seriez
18 enfuie si vous aviez su que la guerre allait éclater.
19 Pouvez-vous me dire où est-ce que vous vous seriez enfuie ?
20 R. Où ? Eh bien, sur le territoire libre, là où
21 j’aurais pu être sauvée.
22 Q. Ma dernière question concerne l’échange.
23 Lorsqu’on vous a amenée à Cajnice, vous avez dit qu’on vous
24 a amenée afin de vous échanger. Est-ce qu’il y a eu des
25 civils serbes capturés à Gorazde ?
Page 1539
1 R. Je ne sais pas. C’est ce que j’ai entendu
2 dire de la part de ce Kornjaca. Soi-disant ils y étaient,
3 on devait être échangé, soi-disant l’échange allait avoir
4 lieu, un accord était passé puis finalement, rien ne s’est
5 passé. Donc, je ne sais pas où est la vérité.
6 Q. Finalement, vous avez dit que vous avez
7 entendu que l’un d’eux disait par le biais de la Motorola
8 qu’il fallait exécuter les ordres ?
9 R. Oui.
10 Q. Pourquoi est-ce que vous concluez que ça
11 voulait dire qu’ils s’apprêtaient à tirer sur vos dos ?
12 R. Que voulez-vous dire que ceci signifie
13 d’autre s’il dit les choses comme ça ?
14 Me PRODANOVIC (interprétation) : Je n’ai plus de
15 questions, Madame la Présidente.
16 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Me Kolesar,
17 est-ce que vous avez des questions ?
18 Me KOLESAR (interprétation) : Oui, Madame la
19 Présidente.
20 Madame la Présidente, avant de commencer à poser
21 mes questions, je souhaite demander la chose suivante. Je
22 sais quelles sont les épreuves que ce témoin a traversées
23 pendant la guerre, je sais que c’est les juges qui décident
24 de quelle manière le témoin et les autres personnes
25 présentes dans ce prétoire seront assis, mais je
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1 demanderais au témoin de ne pas ignorer la Défense en
2 tournant le dos aux représentants de la Défense au moment
3 où elle répond aux questions.
4 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Me Kolesar,
5 les juges ne s’opposent pas à la manière dont le témoin est
6 assise, compte tenu des événements qu’elle a vécus.
7 Veuillez poursuivre. Ce qui est important c’est que le
8 témoin puisse vous entendre et que vous puissiez entendre
9 ses réponses.
10 Me KOLESAR (interprétation) : Merci, Madame la
11 Présidente.
12 CONTRE-INTERROGÉE PAR Me KOLESAR
13 (interprétation) :
14 Q. Vous avez dit dans votre déclaration donnée
15 aux enquêteurs de ce Tribunal en novembre 1995 que rien de
16 particulier n’est arrivé dans votre village avant le 3
17 juillet 1992. Est-ce exact ?
18 R. Oui.
19 Q. Vous avez dit également que votre village se
20 trouve à environ 10 kilomètres de Foca ?
21 R. Oui.
22 Q. Est-ce que dans votre village, on pouvait
23 entendre des coups de feu en général, des bruits de combats
24 qui se déroulaient à Foca et autour de Foca au début du
25 mois d’avril ?
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1 R. Tout à fait et beaucoup.
2 Q. Est-ce que depuis votre village, on peut voir
3 Foca ou bien Brod sur la Drina qui est plus proche de votre
4 village ?
5 R. Brod, oui, mais pas Foca.
6 Q. Qu’avez-vous entendu pendant que ces combats
7 se déroulaient ?
8 R. Nous avons entendu des coups de feu, des
9 coups de pilonnage, de l’artillerie lourde, des mortiers.
10 De toute façon, je sais qu’on voyait de gros incendies à
11 Foca.
12 Q. S’il vous plaît, si depuis votre village,
13 vous ne pouvez pas voir Foca, comment est-ce que vous
14 pouviez voir le feu ?
15 R. Eh bien, pendant la nuit, pendant qu’on
16 tirait, on pouvait voir si l’artillerie lourde tirait. On
17 voyait la trace lumineuse.
18 Q. Est-ce que vous savez depuis quelle distance
19 il est possible d’entendre les tirs ou bien le son de
20 l’explosion d’un obus, qu’il provienne d’un char ou d’un
21 canon ?
22 R. Je ne sais pas. Je ne sais pas quelle est la
23 distance, mais je sais qu’on entendait bien.
24 LA GREFFIÈRE : Me Kolesar, le Greffe vous prie de
25 bien vouloir éteindre votre microphone lorsque le témoin
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1 répond à votre question.
2 Me KOLESAR (interprétation) : Excusez-moi.
3 J’avais oublié et j’avais compris que les moyens techniques
4 fonctionnaient mieux ici que dans la salle d’audience
5 numéro III.
6 Q. Dans la même déclaration, à la page 3, vous
7 avez dit que vous avez continué à vous occuper de vos
8 tâches journalières, mais que vous aviez peur et que vous
9 dormiez dans la forêt. De quoi aviez-vous peur donc ?
10 R. De quoi ? Des Chetniks, de gens de Arkan, de
11 Seselj. Nous ne pensions même pas à nos voisins. Nous
12 espérions que nos voisins n’allaient pas nous attaquer,
13 mais pendant l’attaque, il n’y avait ni des gens de Arkan,
14 que nos voisins, les gens de Foca. De quoi voulez-vous
15 qu’on ait peur ? On entendait tous les jours par le biais
16 de Radio Sarajevo ce qui se passait ailleurs, dans d’autres
17 villes, dans d’autres endroits.
18 Q. Excusez-moi, je ne vous comprends pas si vous
19 vous acquittiez de vos tâches quotidiennes tous les jours
20 et vous passiez les nuits dans la forêt.
21 R. Oui. Le matin, on revenait chez nous et on
22 s’occupait de nos affaires normalement, mais nous, les
23 jeunes, nous restions surtout dans la forêt et ceux qui
24 étaient plus âgés, ils rentraient, ils préparaient de la
25 nourriture, ils cuisinaient et le soir, ils nous ramenaient
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1 la nourriture.
2 Q. Dites-moi, après la reddition des armes,
3 après que les habitants du village ont rendu leurs armes à
4 certaines personnes, est-ce que vous avez été soumise aux
5 mauvais traitements ? Est-ce que quelqu’un vous a attaquée
6 physiquement ? Est-ce que quelqu’un vous a menacée ?
7 R. Non. Je pense que non. Non. Une fois, ils
8 sont venus au-dessus du village. Je l’ai déjà dit. Ils
9 tiraient. Ils tiraient de leurs pistolets, mais jusqu’au 3
10 juillet, jusqu’à l’attaque, il n’y avait rien d’autre qui
11 s’est passé.
12 Q. Est-ce que vous savez qui avait des armes
13 dans votre village ?
14 R. Oui.
15 Q. Est-ce que vous pourriez me le dire ?
16 R. Non.
17 Q. Pardon ?
18 R. Je ne peux pas.
19 Q. Pourquoi ?
20 R. Je ne peux pas.
21 Q. Vous êtes témoin ici, vous êtes sous serment
22 et vous avez l’obligation de dire la vérité et de répondre
23 aux questions posées.
24 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Peut-être
25 elle ne veut pas mentionner des noms à cause des mesures de
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1 protection. Elle peut les écrire si vous le souhaitez.
2 Me KOLESAR (interprétation) : Madame la
3 Présidente, le témoin, dans sa déclaration donnée aux
4 autorités de la Bosnie-Herzégovine, a énuméré les personnes
5 qui disposaient des armes, qui avaient rendu leurs armes.
6 Moi, je voulais simplement vérifier cette déclaration.
7 R. La déclaration est correcte, mais moi, je ne
8 peux pas donner les noms.
9 Q. Vous ne pouvez pas donner leurs noms parce
10 que vous ne vous en souvenez pas ou bien parce que vous ne
11 souhaitez pas le faire ?
12 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Témoin, ne
13 répondez pas à cette question.
14 Posez une autre question, Me Kolesar.
15 [La Chambre discute]
16 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Me Kolesar,
17 comme je vous l’ai dit, si vous avez besoin de ces noms,
18 elle peut les écrire par la suite.
19 Me UERTZ-RETZLAFF (interprétation) : Madame la
20 Présidente, j’ai la déclaration devant moi et au moins deux
21 de ces personnes sont des cousins à cette personne. Si
22 elle dit leurs noms, peut-être il sera plus facile de
23 deviner son identité.
24 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : C’est
25 justement ce que j’allais proposer. Donnez-lui un papier
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1 et elle pourra écrire les noms et ceci sera versé au
2 dossier sous scellé.
3 Me KOLESAR (interprétation) : Je demanderais à
4 l’Huissier…
5 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Veuillez
6 répéter la question pour qu’elle sache exactement ce
7 qu’elle doit faire.
8 Me KOLESAR (interprétation) :
9 Q. Est-ce que vous savez quelqu’un de votre
10 village qui avait des armes et, s’il vous plaît, veuillez
11 écrire leurs noms ?
12 R. Après que les armes ont été rendues ?
13 Q. Avant la reddition, le dépôt d’armes.
14 R. Avant ?
15 [Le témoin le fait]
16 LA GREFFIÈRE : Ce document sera coté D27 des
17 pièces de la Défense et sera enregistré de façon
18 confidentielle.
19 Me KOLESAR (interprétation) :
20 Q. Serions-nous d’accord que dans la déclaration
21 que vous avez donnée aux enquêteurs du Tribunal à La Haye,
22 deuxième page, dernier paragraphe et dernière phrase – je
23 ne sais pas si vous avez cette déclaration devant vous –
24 que vous avez déclaré que votre famille ne possédait pas
25 des armes mais que d’autres villageois ont restitué les
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1 armes ?
2 R. Oui.
3 Q. Dans la déclaration que vous avez donnée le
4 22 août 1996 aux autorités de Bosnie-Herzégovine, vous avez
5 dit que votre frère [nom expurgé] a déposé un fusil
6 automatique M-48.
7 Me UERTZ-RETZLAFF (interprétation) : On parle du
8 nom du frère.
9 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Maître, est-
10 ce que vous vous souvenez ? C’est que vous parlez d’un
11 nom. Vous le citez. Il faut l’expurger de la
12 transcription, sinon on va pouvoir l’identifier.
13 Me KOLESAR (interprétation) : Je vais reformuler
14 ma question si vous permettez. Excusez-moi, Madame la
15 Présidente, mais je ne peux pas éviter sans poser des
16 questions. Sur la liste que le témoin vient de déposer à
17 la Chambre figure également le nom de son frère.
18 R. Oui.
19 Q. Est-ce que devant les autorités de Bosnie-
20 Herzégovine devant lesquelles vous avez donné la
21 déclaration le 22-8-1996, vous avez également déclaré que
22 votre frère possédait un fusil ?
23 R. Je pense que oui, mais de toute façon, il
24 n’avait pas un fusil lui-même. C’est quelqu’un d’autre qui
25 lui avait donné ce fusil.
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1 Q. Il s’agissait de quel fusil, s’il vous plaît
2 ?
3 R. Moi, je ne m’y comprends pas dans les armes
4 et par conséquent je ne sais pas de quel type de fusil il
5 s’agit.
6 Q. Vous dites que vous ne comprenez rien alors
7 que dans la déclaration, vous citez le type de fusil. Par
8 la suite, vous avez déposé devant la Chambre et vous avez
9 également parlé d’un certain nombre d’armes, de Scorpions,
10 de Kalashnikovs, de Zoljas, et cætera. Comment vous avez
11 pu citer tout ça ?
12 R. Je ne me souviens pas.
13 Q. Savez-vous que pour avoir le droit de garder
14 un fusil, il faut avoir également le permis de port d’armes
15 ?
16 R. Oui.
17 Q. Est-ce que votre frère disposait de ce permis
18 ?
19 R. Non, parce que quand la guerre s’est
20 déclenchée, c’est à ce moment-là qu’on lui avait donné
21 cette arme parce qu’on avait organisé les patrouilles
22 villageoises.
23 Q. C’est bien la première fois que nous
24 entendons de vous qu’il y avait des patrouilles
25 villageoises. Jusqu’à maintenant, vous avez toujours été
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1 négative et vous avez toujours dit que les musulmans n’ont
2 pas organisé des patrouilles villageoises. Est-ce que
3 véritablement, vous avez organisé des patrouilles ou non ?
4 R. Moi, je ne me souviens pas avoir dit qu’ils
5 n’avaient pas organisé des patrouilles villageoises.
6 Q. En ce qui concerne les fusils automatiques,
7 d’autres personnes également avaient des permis ?
8 R. C’était les fusils qui étaient à la
9 disposition des policiers qui travaillaient au poste de
10 police.
11 Q. Est-ce que les armes et les uniformes ont été
12 confisqués aussi bien en ce qui concerne des unités
13 régulières que ceux qui appartenaient à la réserve ?
14 R. Oui.
15 Q. Si c’était le cas, comment ils avaient
16 possédé les armes ?
17 R. Je pense qu’il y avait une seule personne qui
18 avait caché son fusil dans la forêt et quand la guerre
19 s’est déclenchée, quand on a été attaqué, c’est là où il
20 est parti chercher. Donc, il est allé le soir chercher ce
21 fusil et le lendemain matin, quand nous avons été attaqués,
22 c’est quelqu’un d’autre qui s’est emparé de ce fusil, mais
23 on l’a tué sur place.
24 Q. Moi, je vous ai demandé au sujet des fusils
25 automatiques pour lesquels vous dites qu’ils appartenaient
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1 aux unités de réserve et je ne parle pas de ce fusil très
2 particulier.
3 R. Je ne sais pas s’il y avait d’autres fusils,
4 si d’autres fusils ont été restitués.
5 Q. Moi, je parle de l’événement qui a eu lieu
6 fin mai, début juin avant que les armes aient été
7 restituées. Est-ce que vous pouvez me donner la réponse ?
8 R. Je ne vous ai pas compris.
9 Q. La dernière question que je vous ai posée
10 était la suivante : Nous discutons actuellement sur les
11 événements qui ont eu lieu fin mai, début juin, donc avant
12 que des villageois aient restitué des armes. Donc, ils ont
13 accepté à cette époque-là de restituer des armes, mais je
14 parle des événements qui ont précédé.
15 R. Oui, d’accord.
16 Q. Donc, je vais une fois de plus vous poser la
17 question. Avant que les villageois restituent, rendent les
18 armes, d’où viennent les fusils qui provenaient donc des
19 unités de réserve alors que vous avez dit qu’on avait
20 confisqué aussi bien des uniformes que des armes avant que
21 la guerre éclate ?
22 R. Tout premièrement, il n’y avait pas
23 d’uniformes et personne n’a parlé d’uniformes et en ce qui
24 concerne les fusils, les fusils ont été remis.
25 Q. À quel moment, s’il vous plaît ?
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1 R. Je ne me souviens pas de la date et du jour.
2 Q. Avant que ces fusils soient rendus, comment
3 ça se fait qu’ils les ont possédés alors que tout ceci a
4 été restitué, comme vous l’avez dit ?
5 R. Je ne sais pas pourquoi vous utilisez le
6 terme que c’est « retiré », que les fusils « ont été
7 retirés ».
8 Q. Avant que la guerre soit déclenchée, soi-
9 disant les uniformes et les armes ont été retirés ?
10 R. Non. Je n’ai jamais utilisé le terme
11 « retirés ». Les armes n’ont pas été retirées.
12 Q. À ce moment-là, on ne se comprend pas.
13 R. Probablement.
14 Q. Je pense que la situation était totalement
15 différente.
16 Dans votre déclaration, phrase suivante, vous
17 dites qu’après que les armes aient été restituées, les
18 trois, y compris votre frère, sont partis du village. Si
19 j’ai bien compris, ils sont partis du village, ils ont
20 quitté le village ?
21 R. Oui. Ils sont partis une journée ou passer
22 deux journées dans les montagnes et puis ils sont
23 redescendus.
24 Q. Où ça à la montagne ?
25 R. Au-dessus de notre village, dans les
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1 montagnes.
2 Q. Vous nous avez dit que vous ne savez pas
3 quelle est donc la date où les armes ont été restituées ?
4 R. Oui, c’est vrai.
5 Q. Est-ce que vous étiez présente ?
6 R. Non. Ce n’est pas aux femmes auxquelles on
7 avait permis d’assister à de tel type d’événement et puis,
8 de toute façon, les femmes, elles ne se mêlaient pas dans
9 ces affaires.
10 Q. Vous avez également dit qu’au moment où les
11 armes ont été restituées, il y avait également un papier
12 qui a été signé. Je ne sais pas comment vous l’avez appelé
13 exactement.
14 R. Oui. Il y avait une sorte de loyauté, comme
15 ils l’ont dit, qu’il fallait signer que soi-disant nous
16 allons poursuivre notre vie dans des conditions normales,
17 que personne n’allait nous attaquer, que nous allons
18 pouvoir poursuivre toutes nos activités, activités
19 agricoles, et cætera, même si le village manquait de
20 farine. Déjà la moitié des gens en manquaient puis on ne
21 pouvait pas quand même circuler librement, mais c’est ce
22 que la partie serbe nous a promis.
23 Q. Il s’agissait d’un document écrit ou bien
24 éventuellement c’était oralement qu’il y avait un accord
25 auquel les deux parties sont parvenues ?
Page 1552
1 R. Si j’ai bien compris, il y avait quelque
2 chose qui a été signée.
3 Q. Est-ce que vous avez vu ce document ?
4 R. Non.
5 Q. Mais avant que ce document soit signé, il y
6 avait des entretiens éventuellement entre les villageois
7 musulmans et ces gens-là qui sont arrivés pour négocier le
8 document, négocier tout ça ?
9 R. Je ne sais pas.
10 Q. Est-ce que vous savez qui a signé le document
11 au nom des villageois musulmans ?
12 R. Non.
13 Q. Vous ne savez pas ?
14 R. Non.
15 Q. Nous allons revenir maintenant à ce que vous
16 avez dit tout à l’heure en parlant de votre frère avec les
17 deux camarades. Il est parti à la montagne, n’est-ce pas ?
18 Je vous ai bien compris ?
19 R. Oui, c’est exact.
20 Q. Est-ce qu’éventuellement, ils sont allés à
21 Trebova ?
22 R. Non.
23 Q. Il y a des positions là-bas ?
24 R. Non, certainement pas.
25 Q. Mais est-ce que vous êtes au courant qu’à
Page 1553
1 Trebova, à ce moment-là, il y avait un bataillon Sutjeska,
2 un bataillon indépendant ?
3 R. Non, je n’étais pas au courant.
4 Q. Vous n’étiez pas au courant ?
5 R. Non.
6 Q. Est-ce que le nom « Taib Bekan » vous dit
7 quelque chose ?
8 R. Je pense qu’il était secrétaire ou
9 éventuellement enseignant à l’école primaire. Je ne suis
10 pas sûre.
11 Q. Mais est-ce que vous savez quelque chose
12 d’autre sur lui ?
13 R. Non.
14 Q. Est-ce que « Zaim Besevic » vous dit quelque
15 chose ?
16 R. Non.
17 Q. C’est lui qui a été commandant de ce
18 bataillon indépendant Sutjeska. Est-ce que maintenant,
19 vous vous en souvenez ?
20 R. Non, car je n’ai jamais entendu parler de ça
21 et puis, je ne sais rien là-dessus.
22 Q. Est-ce que vous saviez que les unités des
23 Bérets Verts avaient posé des mines tout le long vers
24 Tjentiste ?
25 R. Mais comment voulez-vous que je le sache ?
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1 Q. Vous ne le savez pas mais je vais vous poser
2 d’autres questions. Peut-être vous le sauriez.
3 À quelle distance se trouve votre village par
4 rapport à la route principale Tjentiste-Zelengora ?
5 R. Mais vous pourriez me poser d’autres
6 questions. Là, je ne suis absolument pas au courant et je
7 n’ai pas mesuré la distance entre Tjentiste et Bare.
8 Q. Mais combien à pied ?
9 R. Mais je n’ai jamais traversé à pied cette
10 route.
11 Q. Mais est-ce que cette route traverse ou
12 plutôt passe à côté de votre village ?
13 R. Non. Je ne le sais pas.
14 Q. Vous ne le savez pas ?
15 R. Je ne suis jamais allée à Zelengora.
16 Q. Et Tjentiste, Bare et ensuite Zelengora ?
17 C’est la route dont je vous parle.
18 R. Je pense que c’est une trentaine de
19 kilomètres, quelque chose comme ça par rapport à mon
20 village, et je ne sais pas. Je ne suis jamais allée par là
21 et puis… je ne suis jamais passée par là.
22 Q. Et la route qui est en contrebas par rapport
23 à Trosanj-Mjesaja, elle mène où ?
24 R. Elle mène à Foca, Tjentiste et Gacko.
25 Q. Est-ce qu’il y a, outre cette route
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1 principale, une autre, une route régionale ?
2 R. Oui. Je pense qu’il y en a beaucoup. Il y a
3 beaucoup de villages qui sont à côté. Je ne sais pas à
4 quelle route vous pensez de manière très précise, si vous
5 voulez bien me dire.
6 Q. Je pense à la route où le 2 juin 1992, entre
7 Potoka Suhoj et le village Suhoj, il y avait un véhicule
8 qui passait et les deux personnes se sont fait tuées à
9 cause d’une mine antichar qui y était placée.
10 R. Non. Je ne me souviens pas.
11 Q. Mais est-ce que vous vous souvenez qu’à
12 Potoka Suhoj, il y avait un pont, un pont qui a été
13 détruit ?
14 R. Eh bien, vraiment, je ne le sais pas.
15 Q. Mais est-ce que vous avez entendu dire
16 également qu’il y avait eu une embuscade également le 2
17 juillet et que Dzurovic, Dragan, et Banovic, Branko, deux
18 Serbes, ont été blessés. Ils y passaient dans leur
19 véhicule et il y avait un musulman qui a été blessé, et de
20 nom, Pekaz ?
21 R. Non. J’étais déjà au camp et je ne savais
22 strictement rien ce qui se passait en dehors.
23 Q. Le 20 juin, vous n’étiez pas au camp mais
24 vous perdez votre liberté le 3 juillet, tout au moins
25 d’après ce que vous avez relaté ici ?
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1 R. Que Pekaz était blessé ? Je ne sais pas,
2 vraiment non. Je ne savais même pas qu’à cette époque-là,
3 il y avait Pekaz quelque part, mais de toute façon, c’est
4 possible. Je ne sais pas.
5 Q. (expurgée)
6 (expurgée)
7 R. (expurgée)
8 Q. (expurgée)
9 (expurgée)
10 (expurgée)
11 Me UERTZ-RETZLAFF (interprétation) : Madame la
12 Présidente.
13 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Oui, je vous
14 en prie.
15 Me UERTZ-RETZLAFF (interprétation) : Le Maître de
16 la Défense, une fois de plus, parle d’un certain nombre de
17 détails d’un témoin. Moi personnellement, je pense que ce
18 n’est pas bien.
19 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Je vous en
20 prie.
21 Me KOLESAR (interprétation) : Je n’ai pas parlé
22 du nom du témoin. Je n’ai pas parlé de son numéro. J’ai
23 tout simplement rappelé. Je n’ai certainement pas
24 identifié le témoin. Je ne l’ai pas mis en danger.
25 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Je vous en
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1 prie.
2 Me UERTZ-RETZLAFF (interprétation) : Oui, mais il
3 a parlé du nom. Le Maître a parlé du nom de l’époux.
4 Me KOLESAR (interprétation) : Est-ce que je peux
5 poursuivre ?
6 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Oui, mais il
7 y a un certain nombre d’informations qui viennent dans le
8 cadre des questions. Il y en a beaucoup. Par conséquent,
9 il y a en a qui peuvent éventuellement identifier, à partir
10 de ces détails, identifier les témoins.
11 Est-ce que vous pouvez reformuler votre question,
12 s’il vous plaît ou bien si vous insistez sur le témoin très
13 concret, dans ce cas-là, une fois de plus, vous pouvez
14 marquer sur le papier le nom, vous le présentez au témoin,
15 elle répond par oui ou non. Voilà ! C’est de cette
16 manière-là, et ensuite, nous le mettons sous scellé.
17 Me KOLESAR (interprétation) : Non. On ne va pas
18 compliquer. Je vais retirer cette toute dernière question.
19 Par conséquent, ce n’est pas important. En ce qui concerne
20 les personnes qui ont été blessées, bien évidemment, ça
21 reste tel comme ceci a été formulé.
22 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Oui. Je
23 vous en prie. Allez-y, procédez.
24 Me KOLESAR (interprétation) : Merci.
25 Q. Est-ce que vous êtes au courant que deux
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1 jours plus tard, le 22 juin, il y avait un minibus où se
2 trouvaient des Serbes qui est tombé également sur un champ
3 de mines à Kosur et ce sont les musulmans qui ont placé ces
4 mines – Slavko Kovacevic, Radovan Drajic (ph.), Radenko
5 Milanovic, Joko Vukovic, Filipovic, Momir Kukic et Nenad
6 Maric ont été tués et beaucoup d’autres ont été blessés,
7 des invalides à perpétuité – et qu’au moment où les
8 personnes ont été tuées, le camion également qui avait
9 l’intention de les transférer a été victime d’un autre
10 événement ?
11 R. Je ne suis pas au courant.
12 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Mais quelle
13 est la pertinence également de votre question et quel est
14 le rapport avec votre client ?
15 Me KOLESAR (interprétation) : Madame la
16 Présidente, on a bien précisé qu’il y avait le conflit armé
17 entre les communautés ethniques dans le territoire de Foca.
18 Ce n’est pas contestable.
19 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Mais ceci a
20 déjà été accepté. C’est un fait. Par conséquent, il y a
21 eu ce conflit armé. Ce n’est pas contestable.
22 Me KOLESAR (interprétation) : Oui, mais c’était à
23 titre d’introduction, Madame la Présidente, et je n’ai pas
24 terminé encore. Donc, le témoin essaie de présenter que
25 l’autre communauté ethnique qui a participé au conflit
Page 1559
1 n’était pas armée. Moi, j’essaie tout simplement de mettre
2 en question la crédibilité du témoin parce qu’elle affirme
3 que l’autre partie n’a pas été armée alors que moi,
4 j’affaire qu’il y avait également des attaques qui ont été
5 organisées par les musulmans et qu’il y avait des victimes
6 également du côté des Serbes.
7 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Oui d’accord
8 mais ce n’est pas pertinent dans le cas concret. De toute
9 façon, ça n’aide pas la Défense dans le cas concret.
10 Je vous en prie, vous pouvez poursuivre.
11 Me KOLESAR (interprétation) :
12 Q. Si c’est comme ça, je vais passer à
13 l’événement du 3 juillet. Je voudrais tout simplement
14 faire une observation : c’est qu’il y avait également parmi
15 les victimes des Serbes qui étaient des victimes et qui
16 provenaient du village Mjesaja.
17 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Mais il n’y
18 avait pas d’interprétation en langue anglaise.
19 Est-ce que vous pouvez répéter ? Excusez-moi,
20 parce qu’il n’y avait pas d’interprétation en anglais.
21 Me KOLESAR (interprétation) : Oui, Madame la
22 Présidente. J’ai dit tout simplement que je vais passer à
23 d’autres questions bien évidemment, des événements qui ont
24 eu lieu le 3 juillet. Mais moi, je fais une observation
25 selon laquelle je voulais tout simplement dire que parmi
Page 1560
1 les personnes qui ont été victimes, qui ont été tuées, il
2 s’agit donc des Serbes qui étaient dans ce car. Il y avait
3 par conséquent des villageois du village de Mjesaja, par
4 conséquent, des villageois du témoin, et il me semble que
5 ce n’est pas négligeable.
6 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Entendu,
7 mais vous pouvez poursuivre, s’il vous plaît. On a noté ce
8 que vous avez dit.
9 Me KOLESAR (interprétation) :
10 Q. Je vais vous demander s’il vous plaît de
11 prendre la déclaration qui se trouve devant vous et qui
12 concerne donc ce qui a été dit par le témoin en novembre
13 1995. Est-ce que vous pouvez voir la page 2, s’il vous
14 plaît ?
15 Est-ce que vous avez trouvé la page 2, s’il vous
16 plaît ?
17 R. Oui.
18 Q. La page 2, dernier paragraphe qui commence :
19 « Moi, le 3 juillet… » [Hors microphone]
20 Je vais vous demander de bien vouloir lire ce
21 dernier paragraphe jusqu’à l’avant-dernière phrase.
22 R. Je ne peux pas lire.
23 Q. Est-ce que vous pouvez me dire pourquoi, s’il
24 vous plaît ?
25 R. Parce qu’il y a un certain nombre de noms.
Page 1561
1 Q. Mais je pense que c’est déjà la pratique que
2 nous poursuivons. À partir du moment où vous voyez le nom,
3 vous utilisez tout simplement le numéro. Vous ne lisez pas
4 le nom. Par conséquent, je veux bien vous rappeler, mais
5 il n’y a pas de problème. Je pense que nous avons accepté.
6 Vous ne donner pas, lors de la lecture, le nom que vous
7 voyez ou bien vous les sautez carrément ou vous dites le
8 numéro.
9 R. « Le 3 juillet 1992, nous étions 50
10 villageois qui étions dans les bois. Il y avait mon frère,
11 ensuite ma cousine, 88, et mes parents. Dans ce premier
12 groupe, il y avait le numéro 48 et 74. Le matin à 6 h 30,
13 j’ai entendu les tirs. Beaucoup de soldats serbes en tenue
14 de camouflage descendaient d’en haut en tirant en notre
15 direction. Le matin était sous le brouillard et je ne
16 pouvais pas reconnaître les soldats. »
17 Q. Merci. Vous avez dit qu’il y avait du
18 brouillard et que vous n’avez pas pu reconnaître les
19 soldats ?
20 R. Oui.
21 Q. Pourriez-vous nous dire maintenant s’il vous
22 plaît si le brouillard était épais et est-ce que la
23 visibilité était bonne ou non ?
24 R. Moi, j’ai dit qu’il y avait du brouillard
25 mais je pensais bien évidemment, à une plus grande
Page 1562
1 distance, que nous ne pouvions pas les reconnaître, mais au
2 moment où ils se sont approchés de nous, nous les avons
3 vus. On les a vus très bien.
4 Q. Maintenant, je vous ai compris. Mais est-ce
5 que vous pouvez me dire, s’il vous plaît, si le brouillard
6 était très épais et quelle était la visibilité par rapport
7 au brouillard ?
8 R. Je pense qu’on pouvait reconnaître à cinq
9 mètres éventuellement.
10 Q. Par conséquent, c’est à cinq mètres que vous
11 pouviez reconnaître déjà les soldats parce que sinon, il y
12 avait un brouillard qui était épais ?
13 R. Oui. Vous m’avez bien compris.
14 Q. Merci. Il y avait combien de soldats dans ce
15 groupe et comment ils étaient vêtus ? Vous l’avez déjà dit
16 mais je vais quand même vous demander de me dire le nombre
17 de soldats.
18 R. Je ne les ai pas comptés, véritablement. Je
19 sais qu’ils étaient nombreux mais je ne sais pas quel était
20 le nombre. J’avais trop peur. J’étais terrifiée et je
21 n’avais même pas osé de les regarder, encore moins de les
22 compter.
23 Q. Au moment où vous êtes arrivée dans le pré,
24 vous en parlez dans votre déclaration, alors, le brouillard
25 s’est levé ou bien c’était pareil ?
Page 1563
1 R. Oui, il y avait encore du brouillard.
2 Q. Et la densité était la même ?
3 R. Non vraiment, je ne le sais pas. Vraiment,
4 je n’ai pas fait attention à ça.
5 Q. Pourriez-vous s’il vous plaît me décrire la
6 grandeur de ce pré et où se trouvait ce rocher dont vous
7 avez parlé ? Vous avez dit qu’il y avait un groupe de
8 soldats qui étaient de ce côté-là. Est-ce que vous pouvez
9 me donner également approximativement la taille de ce
10 rocher ?
11 R. Le pré était assez grand, et pour ce qui est
12 le rocher, il se trouvait du côté des bois. Donc, il y
13 avait le pré, et du côté du bois, il y avait le rocher.
14 Q. Qu’est-ce que ça veut dire : « le pré assez
15 grand » ?
16 R. Ce n’était pas énorme mais de toute façon,
17 c’était un pré assez grand. Mais je ne peux pas vous dire
18 exactement combien de mètres. Je ne sais pas comment vous
19 expliquer de plus près.
20 Q. Mais bon, vous vous êtes rendue dans le pré
21 et d’après votre déclaration, vous avez vu ce groupe de
22 soldats ?
23 R. Oui.
24 Q. Est-ce que vous pouvez me donner un peu plus
25 d’explications ?
Page 1564
1 R. Ils nous ont emmenés jusqu’au pré et le
2 premier que j’ai vu c’était Radomir Kovac, et à deux, trois
3 mètres, Gojko Jankovic, Dragan Zelenovic, Tuta, et puis il
4 y avait encore d’autres soldats. Je ne sais pas combien
5 ils étaient au total.
6 Q. Par conséquent, vous vous êtes approchés à
7 deux mètres à peu près par rapport au groupe ?
8 R. Je ne sais pas exactement mais deux, trois
9 mètres.
10 Q. Et comment vous êtes tombée directement sur
11 Radomir Kovac ?
12 R. Mais c’est tout simplement parce qu’il s’y
13 trouvait. Moi, j’ignorais qui c’était. Ce n’est que plus
14 tard que je l’ai appris. C’est plus tard quand j’étais
15 dans son appartement et c’est là où j’étais au clair.
16 Me KOLESAR (interprétation) : Madame la
17 Présidente, j’ai une série de questions encore. Il est 1 h
18 00. Je ne sais pas si je poursuis ou bien on s’arrête.
19 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Non. Nous
20 allons avoir une pause-déjeuner et nous allons poursuivre à
21 14 h 30.
22 — Suspension de l’audience à 13 h 00
23 — Reprise de l’audience à 14 h 30
24 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Me Kolesar,
25 vous poursuivez donc le contre-interrogatoire du témoin.
Page 1565
1 Me KOLESAR (interprétation) :
2 Q. Madame le Témoin, avant la pause-déjeuner, je
3 vous avais demandé de nous expliquer à quelle distance vous
4 vous trouviez du groupe de soldats qui étaient contre le
5 rocher. C’est bien exact ?
6 R. Oui.
7 Q. Vous avez dit que vous étiez à environ deux
8 ou trois mètres de l’Accusé Kovac. Est-ce bien exact ?
9 R. Oui.
10 Q. Pourriez-vous me dire, s’il vous plaît, la
11 chose suivante : D’après ce que vous nous avez dit,
12 l’attaque a été très soudaine, les gens ont commencé à
13 s’enfuir vers le haut de la colline, la panique régnait
14 parmi les civils, mais je voudrais savoir, étant donné la
15 situation psychologique, si je puis dire, qui régnait,
16 comment avez-vous trouvé le courage de vous approcher des
17 soldats de deux ou trois mètres ?
18 R. Qu’est-ce que je pouvais faire puisqu’il y en
19 avait qui venaient derrière moi ? Qu’est-ce que j’aurais
20 pu faire, courir ?
21 Q. Oui. La logique aurait été pour vous de vous
22 éloigner au maximum de ces hommes.
23 R. Oui, mais ils nous poursuivaient.
24 Q. Oui, mais vous avez dit que le pré, le champ
25 était très vaste ?
Page 1566
1 R. Oui, oui, c’est vrai.
2 Q. Donc, il vous était possible d’aller vous
3 réfugier plus loin ?
4 R. Ce n’était pas à nous de décider où nous
5 allions. C’est eux qui décidaient où nous allions et où
6 nous nous arrêtions.
7 Q. Je vous demanderais de prendre votre
8 déclaration, celle que vous avez donnée en novembre aux
9 enquêteurs du Tribunal, en novembre 1995. Il s’agit de la
10 page 3 et du dernier paragraphe à la page 3. Je vais vous
11 demander de le lire, s’il vous plaît.
12 M. LE JUGE HUNT (interprétation) : Quel
13 paragraphe, Me Kolesar ?
14 Me KOLESAR (interprétation) : Je vous prie de
15 m’excuser. Ça commence par les mots :
16 « Radomir Kovac… »
17 R. « Radomir Kovac avait 32 ou 33 ans. Il était
18 grand, mince. Il avait des cheveux noirs et courts. Il
19 était laid et il était glabre. Je ne le connaissais pas
20 avant la guerre. »
21 Q. Pouvez-vous poursuivre, s’il vous plaît ?
22 R. « Plus tard pendant ma détention, lorsque
23 l’on m’a emmenée dans son appartement, j’y ai vu une photo
24 qui le représentait et en train de vendre des légumes à
25 Sarajevo. »
Page 1567
1 Q. Vous confirmez et vous maintenez que vous
2 avez vu une photographie dans son appartement ?
3 R. Oui.
4 Q. Pouvez-vous nous décrire cette photographie,
5 s’il vous plaît ?
6 R. Malheureusement, je ne m’en souviens plus
7 aujourd’hui.
8 Q. Vous souvenez-vous combien de personnes
9 figuraient sur cette photographie ?
10 R. Je crois qu’il était seul sur cette
11 photographie.
12 Q. À quoi ressemblait-il sur cette photographie
13 ?
14 R. Je ne me souviens pas.
15 Q. Quelle était sa tenue vestimentaire ?
16 R. Je ne m’en souviens pas non plus.
17 Q. Avait-il une barbe, une moustache, avait-il
18 une barbe et une moustache ?
19 R. Je ne sais pas. Je ne m’en souviens pas.
20 Q. Pourriez-vous, s’il vous plaît, nous dire ce
21 qu’il portait et où il se trouvait sur ce rocher ?
22 R. Il n’était pas sur le rocher. Il se trouvait
23 à environ un ou deux mètres de là et il portait une
24 casquette noire, une veste de cuir noir, des pantalons
25 bigarrés et un fusil automatique ainsi que quelque chose de
Page 1568
1 noir sur l’œil, un œil noir.
2 Q. Justement, je voudrais savoir ce que vous
3 entendez par un « œil noir ».
4 R. Bien, c’est difficile à vous dire. En fait,
5 il avait une pièce de tissu ou quelque chose sur un œil,
6 sur un de ses yeux, donc sans doute pour qu’on ne puisse
7 pas le reconnaître.
8 Q. Est-ce que c’est le genre de chose que l’on
9 voit dans les films, que portent les pirates ou que portent
10 les gens qui ont perdu un œil dans les films ?
11 R. Oui.
12 Me KOLESAR (interprétation) : Je vous prie de me
13 donner quelques instants, Madame la Présidente.
14 Q. Dans la déclaration que vous avez donnée aux
15 autorités de Bosnie-Herzégovine, vous dites qu’il portait
16 des lunettes à verres foncés, fumés et un des verres
17 manquait. Où est la vérité, s’il vous plaît ?
18 R. Un instant, s’il vous plaît. Je ne me
19 souviens plus aujourd’hui. Vraiment, je ne m’en souviens
20 plus.
21 Q. Fort bien ! Oui, mais il est intéressant de
22 voir, quand je vous pose mes questions, toutes les choses
23 dont vous ne vous souvenez plus. Pendant que vous étiez
24 dans l’appartement, que portait Kovac lorsqu’il n’était pas
25 de service, lorsqu’il ne devait pas se rendre sur le front,
Page 1569
1 mettons ? Disons les choses ainsi.
2 R. Je ne sais pas. Je sais juste que je l’ai
3 reconnu dans son uniforme. Je ne sais rien d’autre.
4 Q. Oui, mais je ne comprends pas comment ça se
5 fait que vous ne savez pas si vous avez passé une vingtaine
6 de jours dans l’appartement.
7 R. Je ne m’en souviens pas aujourd’hui.
8 Q. Bien ! Nous considérons que c’est votre
9 réponse. Pourquoi dans votre déclaration, la déclaration
10 que vous avez donnée aux enquêteurs, pourquoi dans cette
11 déclaration n’avez-vous pas décrit à quoi ressemblait
12 Monsieur Kovac, à savoir quelle tenue il portait le 3
13 juillet ? Cependant, vous l’avez fait dans la déclaration
14 donnée aux autorités de Bosnie-Herzégovine et puis vous
15 avez de nouveau donné cette description dans le prétoire il
16 y a quelques jours.
17 R. Je n’en ai aucune idée. Peut-être parce que
18 la première fois, ils ne m’ont pas posé la question. Je ne
19 m’en souviens plus.
20 Q. Connaissiez-vous le frère de Kovac qui est
21 connu sous le nom de Micko… (l’interprète se reprend) le
22 frère de Kovac qui s’appelle Micko ?
23 R. Non.
24 Q. Je vais vous demander de vous reporter à la
25 page 7 de votre déclaration, déclaration donnée aux
Page 1570
1 enquêteurs du Tribunal, page 7, deuxième paragraphe à
2 partir du haut qui commence par les mots suivants : « Je
3 me souviens que Slavo… »
4 R. Quelle page ?
5 Q. Page 7 de la déclaration que vous avez donnée
6 en novembre, deuxième paragraphe à partir du haut et cela
7 commence par une phrase : « Je me souviens que c’est
8 Slavo… »
9 Avez-vous trouvé ?
10 R. Non.
11 Me KOLESAR (interprétation) : Je vais demander à
12 l’Huissier d’aider le témoin.
13 R. Oui, ça y est. J’ai trouvé.
14 « Je me souviens que Slavo Ivanovic et un certain
15 Kovac, alias Micko, le frère de Radomir Kovac, venaient
16 souvent chercher des femmes. Kovac choisissait souvent le
17 numéro 50. »
18 Q. Pourquoi, s’il vous plaît, avez-vous dit aux
19 enquêteurs du Tribunal que vous connaissiez le frère de
20 Radomir Kovac ? Or, aujourd’hui, vous nous dites que vous
21 ne le connaissez pas.
22 R. Je ne le connaissais pas d’avant. C’est au
23 centre scolaire, c’est au lycée que je l’ai rencontré.
24 Q. Je ne vous ai pas demandé si vous avez fait
25 la connaissance du frère de Radomir Kovac au lycée. Moi,
Page 1571
1 ce que je vous ai demandé c’est si vous aviez jamais
2 rencontré ou vu le frère de Radomir Kovac, alias Micko.
3 R. Pas avant cet événement, ce moment-là.
4 Q. Avant, que voulez-vous dire ?
5 R. Avant l’attaque. Enfin, je veux dire avant,
6 je ne le connaissais pas.
7 Q. Vous voulez dire que vous ne l’aviez jamais
8 vu, jamais ?
9 R. Je ne sais pas. Je ne m’en souviens pas.
10 Q. [Hors microphone] Oui. Dans votre
11 déclaration, vous dites : « Je me souviens qu’il est venu
12 et qu’il est venu souvent et qu’il est venu chercher telle
13 ou telle personne. »
14 R. Ce que j’ai voulu dire c’est que jusqu’à ce
15 moment-là, je ne le connaissais pas, jusqu’à ce qu’il
16 commence à venir avec Slavo Ivanovic au lycée, mais je ne
17 m’en souviens plus de lui aujourd’hui, je ne me souviens
18 plus du tout de lui.
19 Q. Conviendrez-vous cependant que vous l’avez
20 vu, qu’il est venu au lycée ?
21 R. Oui.
22 Q. Comment savez-vous qu’il faisait souvent
23 sortir le Témoin numéro 50 ?
24 R. Je le sais parce qu’elle me l’a dit, parce
25 qu’elle me l’a dit elle-même.
Page 1572
1 Q. Est-ce que j’ai bien entendu, c’est elle-même
2 qui vous l’a dit ?
3 R. Oui.
4 Q. Donc, vous êtes en train de nous dire que
5 c’est elle qui vous l’a dit. Est-ce que vous savez que ce
6 témoin a déjà été entendue ?
7 R. Oui.
8 Q. Savez-vous qu’elle ne l’a jamais mentionné,
9 qu’elle n’a jamais mentionné cet homme ?
10 R. Je ne sais pas.
11 Q. Avant la guerre, vous ne connaissiez pas non
12 plus Radomir Kovac et vous ne connaissiez pas non plus
13 Micko ?
14 R. Oui, c’est exact. Je ne les connaissais pas.
15 Q. Vous avez donc vu Radomir Kovac, vous nous
16 l’avez dit, le 3. Est-ce que c’était la première fois que
17 vous le voyiez ? Vous l’avez vu habillé de cette façon
18 pour la première fois le 3. C’est bien exact ?
19 R. Oui.
20 Q. Est-ce que vous l’avez revu habillé de la
21 même façon ?
22 R. Oui.
23 Q. Quand ?
24 R. Quatre mois plus tard, lorsqu’ils nous ont
25 emmenées chez lui, lorsque je suis restée un certain temps
Page 1573
1 dans son appartement.
2 Q. Vous ai-je bien compris, est-ce que vous nous
3 dites que pendant votre séjour dans cet appartement, il
4 portait une casquette noire, un bandeau sur l’œil, des
5 pantalons de camouflage et une veste de cuir noir ?
6 R. Il ne portait pas de bandeau sur l’œil, mais
7 généralement, il portait en effet une veste noire, un
8 pantalon de camouflage ainsi qu’une casquette noire. Je le
9 sais.
10 Q. Est-ce qu’il lui arrivait de porter un béret
11 ?
12 R. Oui. C’est un béret qu’il portait, un béret
13 noir ou peut-être bleu. Je ne me souviens pas très
14 exactement. C’est ce que je mentionnais en parlant de
15 casquette.
16 Q. Est-il possible que cela ait été un béret
17 rouge ?
18 R. Je ne sais pas.
19 Q. Vous ne savez pas. Bien ! Étant donné les
20 circonstances, tout ce qui se passait le 3, le brouillard,
21 la peur, le fait que vous ne connaissiez pas ces gens, que
22 vous avez vu Micko plus tard, est-il possible que ce soit
23 Micko que vous ayez vu avec les soldats le 3 juillet, au
24 milieu du groupe de soldats près du rocher ?
25 R. Je ne sais pas.
Page 1574
1 Q. Dans votre déclaration, vous avez dit qu’à
2 votre avis, il n’avait pas d’argent, pas assez d’argent
3 pour s’acheter des cigarettes ou du pain avant la guerre.
4 D’où sortez-vous cela ?
5 R. Ce sont ses collègues eux-mêmes qui me l’ont
6 dit, des gens qui le connaissaient très bien.
7 Me UERTZ-RETZLAFF (interprétation) : Je
8 souhaiterais clarifier quelque chose en ce qui concerne la
9 traduction. Je ne parle pas B/C/S, mais moi, j’ai entendu
10 le témoin dire « ne » et pour moi, cela veut dire « non ».
11 Peut-être me suis-je trompée. Quand on lui a demandé si ça
12 pouvait être le frère, elle a dit « ne » et ça a été
13 traduit par : « Je ne sais pas ». Donc, je voudrais
14 clarifier cela, s’il vous plaît. Je suis un petit peu
15 surprise.
16 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Est-ce que
17 les interprètes peuvent nous apporter des éclaircissements
18 à ce sujet ?
19 Me KOLESAR (interprétation) : Si vous me
20 permettez, Madame la Présidente, je souhaite dire, pour
21 ceux qui parlent serbo-croate, la réponse était : « Je ne
22 sais pas », « Ne Znam ».
23 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Bien !
24 Demandons au témoin de nous dire de quoi il retourne, de
25 clarifier les choses.
Page 1575
1 Me KOLESAR (interprétation) :
2 Q. Madame le Témoin, quand je vous ai demandé
3 s’il était possible que ça ait été Micko et non pas Radomir
4 qui se trouvait avec les soldats, je vous ai entendu
5 dire : « Je ne sais pas. »
6 R. Non. J’ai dit que ce n’était pas lui. J’ai
7 dit que ce n’était pas lui. Je n’ai pas dit : « Je ne sais
8 pas. » J’ai dit que ce n’était pas lui. J’ai dit :
9 « Non. » Je suis tout à fait sûre que c’était Klanfa.
10 Me KOLESAR (interprétation) : J’ai une demande à
11 formuler à l’intention du Greffe. Je voudrais savoir si la
12 procédure est enregistrée dans la langue originale ou non.
13 LA GREFFIÈRE : Nous avons effectivement des
14 cassettes que nous pouvons réécouter si vous le désirez
15 mais peut-être pas tout de suite, mais une vérification
16 peut être faite effectivement au niveau des cassettes, de
17 la retranscription des débats.
18 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Oui, en
19 effet, peut-être qu’on pourra faire ça plus tard, mais plus
20 tard, comme nous le dit bien Madame la Greffière
21 d’audience. Pouvons-nous poursuivre ?
22 Me KOLESAR (interprétation) : Merci. Je
23 souhaiterais demander la possibilité de pouvoir entendre
24 cette cassette aussi rapidement que possible.
25 Q. Madame le Témoin, vous avez dit que vous
Page 1576
1 aviez peur, donc, vous avez dormi dans les bois pour cette
2 raison ?
3 R. Oui.
4 Q. Pouvez-vous, s’il vous plaît, me dire sans
5 nous donner les noms des personnes s’il s’agit de personnes
6 protégées, je voudrais savoir, s’il vous plaît, qui était
7 là avec vous ce matin-là quand les soldats sont arrivés ?
8 R. Je l’ai déjà dit, je crois, mais bon, il y
9 avait donc DB, le numéro 87… un instant, s’il vous plaît.
10 Oui. Il y avait également le numéro 90, le numéro 48, le
11 numéro 74 ainsi que le numéro 88.
12 Q. Donc, à la page 4 de votre déclaration aux
13 enquêteurs du Tribunal, et je parle du sixième paragraphe
14 dans la version serbo/croate, cela commence par les mots
15 suivants : « Et ensuite, les soldats… »
16 R. « Et ensuite, les soldats nous ont obligés à
17 descendre de la colline et quand nous nous sommes approchés
18 du village, j’ai vu qu’il y avait des maisons qui étaient
19 complètement incendiées. J’ai entendu des tirs et j’ai su
20 qu’ils avaient tué les hommes qui avaient été appréhendés.
21 Ceci a été confirmé par mon père qui a vu leurs corps et
22 parmi eux se trouvait celui de mon frère de 20 ans. Mon
23 père a également trouvé le corps de ma mère de 42 ans. Il
24 a essayé de l’enterrer, mais il a entendu les Chetniks
25 approcher et il a fui. » Fin de la citation.
Page 1577
1 Q. [Hors microphone] Je voudrais vous demander
2 maintenant de vous référer à l’autre déclaration, celle que
3 vous avez donnée à l’AID et de vous pencher sur la page 1
4 de cette déclaration. Je parle du dernier paragraphe qui
5 commence par les mots : « Le 3 juillet… »
6 R. « Le 3 juillet 1992, à environ 6 h 20, il y a
7 eu des tirs dans la zone où nous nous trouvions. Nous
8 avons réalisé que nous étions encerclés. Nous avons
9 commencé à fuir vers la montagne et un homme, ma mère et
10 une autre femme ont été tués dans ces échanges de tirs.
11 Ils ont réussi à nous encercler et à nous capturer. Il y
12 avait environ 30 femmes, enfants et hommes âgés et environ
13 sept hommes plus jeunes. Mon frère a été blessé. Il a
14 également été capturé. Dans le groupe de ceux qui ont été
15 pris se trouvaient… »
16 Q. Ne dites pas les noms. Je vous prie donc,
17 Madame, de ne pas donner les noms des témoins puisqu’il
18 s’agit d’éléments d’identification. Donc, je voudrais
19 savoir d’où vient la différence entre ces deux
20 déclarations.
21 R. Ce n’est dû qu’à la traduction, à la façon
22 dont cela a été traduit.
23 Q. Oui, mais la déclaration que vous avez faite
24 aux autorités de la République de Bosnie-Herzégovine, vous
25 l’avez donnée en serbo-croate. Est-ce que cela signifie
Page 1578
1 que la traduction de la déclaration que vous avez donnée au
2 Tribunal ne correspond pas à ce que vous avez dit ?
3 R. Je ne vois pas de différence énorme.
4 Q. Puis-je passer à la question suivante ? Est-
5 ce qu’il est possible, d’après vous, que votre frère ait
6 été blessé dans les échanges de tirs qui ont opposé les
7 soldats serbes et les soldats musulmans étant donné qu’il
8 était armé, qu’il avait une arme, une arme qui été saisie,
9 c’est vrai, mais plus tard, apparemment, il a réussi à se
10 procurer une autre arme et donc il n’a pas été blessé
11 pendant qu’il fuyait ?
12 R. Il a été blessé alors qu’il fuyait dans le
13 groupe où moi-même, je me trouvais. À ce moment-là, il n’y
14 avait pas d’échange de tirs entre les musulmans et les…
15 Q. Pouvez-vous me dire, s’il vous plaît, combien
16 il y a de maisons dans votre village, combien il y a de
17 foyers, de familles sans tenir compte des appartenances
18 ethniques ?
19 R. Je ne peux pas vous dire exactement.
20 Q. Savez-vous combien il y avait de maisons
21 appartenant à des musulmans ?
22 R. Environ 30. Je n’ai jamais compté.
23 Q. Est-ce que j’ai bien compris : 30 maisons ou
24 30 familles ? C’est ça ?
25 R. Oui, à peu près.
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1 Q. Sur ces 30 maisons, sur ces 30 foyers ou
2 familles, combien y avait-il d’hommes âgés de 16 à 60 ans ?
3 R. Je ne peux pas vous répondre non plus. Je ne
4 le sais pas.
5 Q. C’était vos voisins. Ce n’est quand même pas
6 trop vous demander.
7 R. Je sais, mais je n’ai jamais compté. Je n’ai
8 jamais écrit cela pour obtenir un chiffre exact. Ça ne
9 m’intéressait pas. Je n’ai jamais vraiment fait attention.
10 Je ne sais pas. Si je les passais en revue, si je le
11 notais comme ça sur une feuille de papier, peut-être je
12 pourrais vous le dire, mais comme ça de but en blanc, je ne
13 peux pas vous le dire.
14 Q. Bien ! Pouvez-vous me dire combien de gens
15 on a emmenés ce 3 juillet à la caserne de Buk Bijela ou aux
16 baraques de Buk Bijela (se reprend l’interprète) ?
17 R. Aux baraques, seulement un homme a été emmené
18 aux baraques.
19 Q. Je n’ai pas parlé des hommes. Je vous ai
20 parlé de tout le monde, femmes, enfants, hommes, jeunes
21 filles.
22 R. J’ai pensé que vous parliez uniquement des
23 hommes.
24 Q. Peu importe, mais pouvez-vous répondre à ma
25 question ?
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1 R. Je ne peux pas vous dire. En tout cas,
2 disons que le premier jour, nous étions une trentaine de
3 femmes et d’enfants qui avons été rassemblés, appréhendés,
4 regroupés.
5 Q. Vous nous dites qu’il y avait combien
6 d’hommes ?
7 R. Un homme.
8 Q. Je vois, mais qu’en est-il des autres hommes
9 ?
10 R. Monsieur Kovac le sait parfaitement parce
11 qu’il m’a dit à moi personnellement ce qui leur était
12 arrivé.
13 Q. Moi, je vais vous demander, s’il vous plaît,
14 de répondre à mes questions et de ne pas faire ce que vous
15 êtes en train de faire, s’il vous plaît.
16 R. Sept d’entre eux ont été rassemblés, ils
17 étaient vivants et avant cela, un d’entre eux a été tué.
18 Q. Et les autres, ont-ils fui ?
19 R. Oui.
20 Q. Je vais poursuivre. Comment est-ce que vous
21 savez que c’est Radomir Kovac qui a tué votre frère ?
22 R. Parce qu’il me l’a dit directement. Il me
23 violait chez lui dans son appartement. Il m’a dit : « Que
24 veux-tu ? C’est moi qui ai tué ton frère. » Et moi, je
25 suis venue assister à son procès.
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1 Q. Est-ce que ça vous paraît logique que la
2 personne qui tue quelqu’un le dit, l’admet devant la
3 personne qui est plus proche à la victime, qu’il y ait viol
4 ou pas ?
5 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Le témoin ne
6 doit pas répondre à cette question. Ce n’est pas une
7 question qui doit être posée à ce témoin.
8 Me KOLESAR (interprétation) :
9 Q. Parlons maintenant de votre séjour dans
10 l’immeuble Lepa Brena. D’où êtes-vous venue dans cet
11 appartement ?
12 R. D’un appartement qui était dans le Ribarsko
13 Naselje, dans l’agglomération Ribarsko. Nous avons été
14 emmenés dans cet appartement par Klanfa et Cosovic.
15 Q. De quel appartement ?
16 R. Un appartement qui était dans la partie
17 Ribarsko.
18 Q. Comment est-ce que vous ne savez pas puisque
19 vous avez participé à ces événements ?
20 R. Eh bien, je ne sais pas.
21 Q. Pourquoi êtes-vous venue ?
22 R. Pourquoi ? Vraiment, je ne sais pas pourquoi
23 je suis venue.
24 Q. C’est moi qui vous pose cette question.
25 R. Parce qu’on m’a amenée là-bas.
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1 Q. Voilà ! C’est une réponse. Qui est venu
2 avec vous ? Ne citez pas de noms, s’il vous plaît.
3 R. Je pensais aux hommes. Le numéro 87 et aussi
4 AB et AS.
5 Q. Vous maintenez l’affirmation que vous avez
6 été rendue dans un appartement à Lepa Brena ?
7 R. On a été rendu dans un appartement dans
8 l’agglomération Ribarsko. C’était des appartements de
9 Gojko Jankovic, de Zelenovic et… (Note de l’interprète :
10 d’une troisième personne dont l’interprète n’a pas entendu
11 le nom). Jagos Kostic et Klanfa sont venus et ils nous ont
12 amenés dans le groupe d’immeubles Brena.
13 Q. Je souhaite maintenant que vous regardiez
14 votre déclaration donnée aux enquêteurs de ce Tribunal, la
15 page 13. Avez-vous trouvé la page 13 ?
16 R. Oui.
17 Q. L’avant-dernier paragraphe qui commence par
18 les mots : « Le matin suivant… »
19 Est-ce que vous pouvez lire juste cette première
20 phrase ?
21 R. « Le matin suivant, Tuta et Zelja nous ont
22 rendus à Klanfa Kovac et Jagos Kostic qui sont venus et qui
23 nous ont amenés dans un appartement dans l’immeuble
24 résidentiel Brena où nous sommes restés 20 jours. »
25 Q. Veuillez trouver maintenant la page 8, s’il
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1 vous plaît. Paragraphe 3, huitième ligne, la phrase qui
2 commence par : « Le lendemain matin est venu… »
3 Est-ce que vous pourriez nous lire cette partie-là
4 ?
5 R. Page 8 ?
6 Q. [Hors microphone] Page 8, paragraphe 4, la
7 huitième ligne à partir du début du paragraphe qui
8 commence par les mots : « Le lendemain matin… »
9 R. « Le lendemain matin est venu Kovac, Radomir,
10 surnommé Klanfa et Jagos Kostic. Soi-disant ce jour-là,
11 ils devaient être nos protecteurs. Gojko a donné son
12 accord pour faire ça et il a dit que ces jeunes hommes
13 allaient nous garder dans un appartement. »
14 Q. Finalement, devant le Tribunal, il a été dit
15 que Tuta, Gojko, Zelja et Pero vous ont rendues. Qu’est-ce
16 qui est vrai ? Quelle est la vérité parmi ces trois
17 versions ?
18 R. Eh bien, c’est Tuta et Zelja qui nous ont
19 rendues. En ce qui concerne ça, c’était Gojko, Tuta et
20 Zelja et je ne sais pas quels étaient les détails de leur
21 accord. Je sais qu’ils ont dit que ces jeunes hommes
22 allaient venir pour nous amener et nous protéger.
23 Q. Oui, mais dans vos trois déclarations, vous
24 mentionnez des personnes différentes. Pourriez-vous nous
25 expliquer ?
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1 R. Ils étaient là ensemble tous les trois. Je
2 ne me souviens pas très exactement de qui a dit quoi.
3 Q. Donc, deux, trois, peut-être même quatre
4 personnes vous ont rendues à Kovac et à Kostic, mais
5 comment est-ce que vous êtes arrivées jusqu’à l’immeuble
6 Lepa Brena depuis l’endroit où vous avez été rendues ?
7 R. À pied.
8 Q. Est-ce qu’ils vous ont dit pourquoi vous y
9 alliez et ce à quoi la situation allait ressembler dans cet
10 appartement ?
11 R. Ils nous ont dit qu’à partir de ce jour-là,
12 ils étaient les seuls qui allaient s’occuper de nous, que
13 personne d’autre ne pourrait venir, que personne n’allait
14 nous toucher, personne d’autre.
15 Q. Ce jour-là où Kostic et Kovac sont venus vous
16 chercher, comment étaient-ils vêtus, en vêtements civils ou
17 en uniformes ?
18 R. En uniformes.
19 Q. Très bien ! Dites-moi, s’il vous plaît, est-
20 ce qu’il est exact qu’à ce moment-là, Kovac vous a dit que
21 vous alliez être protégée, que personne n’allait vous
22 toucher, qu’il n’allait faire venir personne ?
23 R. Oui.
24 Q. Et que vous alliez y rester jusqu’au moment
25 où vous pouviez sortir ?
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1 R. Oui.
2 Q. Là, je cite vos mots. Sortir, que voulez-
3 vous dire par là ?
4 R. Eh bien, être transférée jusqu’au territoire
5 libre, transférée à partir de là jusqu’au territoire libre.
6 Q. Donc, vous avez fait ce chemin à pied entre
7 cet endroit et l’immeuble Lepa Brena. Sur le chemin, est-
8 ce que quelqu’un vous a maltraitée, est-ce que quelqu’un
9 vous a menacée, est-ce qu’on a abusé de vous ?
10 R. Non. Je ne me souviens pas de cela.
11 Q. Est-ce que vous vous êtes arrêtée pour aller
12 dans un magasin ?
13 R. Je ne m’en souviens pas.
14 Q. Est-ce que vous vous souvenez que dans
15 l’immeuble de Lepa Brena, il existe un magasin Maglic au
16 rez-de-chaussée ?
17 R. Je m’en souviens.
18 Q. Est-ce que vous y êtes entrée ?
19 R. Non.
20 Q. Vous ne savez pas ?
21 R. Nous n’y sommes pas entrées.
22 Q. Non ?
23 R. Non.
24 Me KOLESAR (interprétation) : Je souhaite que
25 l’on montre au témoin la photo dont la cote est 407401.
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1 Elle a été versée en tant que pièce à conviction numéro 11
2 des pièces à conviction du Procureur, d’après le compte-
3 rendu.
4 Q. Est-ce que vous vous souvenez de cette photo
5 ? Est-ce que vous vous souvenez que le Procureur vous a
6 montré cette photo pendant votre interrogatoire principal ?
7 R. Oui.
8 Q. Vous avez dit que c’était l’immeuble de Lepa
9 Brena où vous avez été amenée ?
10 R. Oui.
11 Q. Vous avez dit également et vous avez montré
12 l’appartement de Radomir Kovac. Est-ce que vous pouvez
13 faire la même chose ?
14 R. C’est l’appartement au quatrième étage.
15 Q. Revenons à la déclaration que vous avez
16 donnée aux autorités de la République de Bosnie-
17 Herzégovine, page 8 de nouveau, la phrase d’après celle que
18 vous avez déjà lue : « Ils nous ont emmenées… »
19 R. Page 8 ?
20 Q. Oui, page 8. Vous avez lu tout à l’heure la
21 phrase commençant par : « Le lendemain matin est venu… »
22 La phrase d’après, la phrase après celle-là :
23 « Ils nous ont emmenées… »
24 Est-ce que vous voulez que moi, je lise ça ?
25 R. Oui.
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1 Q. « Klanfa et Jagos nous ont emmenées dans un
2 appartement au sixième ou septième étage de l’immeuble Lepa
3 Brena. »
4 Est-ce que vous avez trouvé ça ?
5 R. Oui, j’ai trouvé.
6 Q. Quelle est la vérité, le quatrième, cinquième
7 ou bien le sixième ou septième étage ?
8 R. Quatrième ou cinquième. Je ne me souviens
9 pas très exactement.
10 Q. Très bien ! Revenons à cette photo, s’il
11 vous plaît. Qu’est-ce que vous voyez au rez-de-chaussée ?
12 R. Je vois un magasin qui s’appelait Market.
13 Q. [Hors microphone] Pouvez-vous lire le nom ?
14 R. Je peux lire Market, mais l’inscription en
15 haut, je ne peux pas la lire.
16 Q. Ce que vous venez de nous montrer, est-ce que
17 vous êtes sûre qu’il s’agit de l’appartement dans lequel
18 vous avez séjourné, de l’appartement dans lequel Radomir
19 Kovac vous a amenée ?
20 R. Je pense que oui.
21 Q. Comment ça vous pensez que oui puisque avant,
22 vous avez montré exactement l’étage et l’immeuble ?
23 R. Oui, logiquement puisque si le magasin est au
24 rez-de-chaussée, ça veut dire que c’est le même immeuble.
25 LA GREFFIÈRE : [Hors microphone] …l’attention de
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1 la Chambre de première instance quant au fait qu’il ne peut
2 garantir à 100 pour cent une protection du témoin quant à
3 la déformation de sa voix si les avocats ne font pas
4 l’effort d’éteindre leur micro à chaque fois qu’ils ont
5 fini de poser leurs questions.
6 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Monsieur
7 l’Avocat, veuillez tenir compte de cela.
8 Me KOLESAR (interprétation) : Je comprends et
9 j’essaie d’appuyer, mais d’habitude, le témoin répond avant
10 que je débranche le micro et je demanderais au témoin
11 également de ne pas répondre tout de suite mais d’attendre
12 que je débranche mon micro d’abord.
13 Q. S’il vous plaît, cette porte en bois, où
14 porte-t-elle, où mène-t-elle ?
15 R. Aucune idée. Je ne me souviens pas avoir vu
16 cette porte. Tout comme à Partizan, il n’y avait jamais de
17 Croix-Rouge.
18 Q. S’il vous plaît, montrez-moi où se trouve
19 l’entrée de l’immeuble par laquelle on passe pour aller
20 dans l’appartement dans lequel vous avez séjourné.
21 R. Justement là où se trouve cette porte en
22 bois, mais à l’époque, cette porte n’existait pas.
23 Q. Pour votre information, cette porte en bois
24 constitue l’entrée du magasin.
25 R. Je pense que non. Pour autant que je sache,
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1 c’est à partir de cet endroit de ce côté-là [indication du
2 témoin] qu’on entrait dans le magasin, si je m’en souviens
3 bien.
4 Q. Est-ce qu’à l’entrée, il y avait un ascenseur
5 près de l’escalier ?
6 R. Je ne sais pas. Je ne m’en souviens pas.
7 Q. Si l’on examine cette photo, est-ce que vous
8 pouvez me dire si l’immeuble continue du côté gauche, est-
9 ce qu’il y a une entrée avec l’escalier là-bas aussi ?
10 R. Oui, ici [indication du témoin]. Il y a une
11 autre entrée aussi et je pense que devant l’immeuble, il y
12 avait un salon de coiffure, j’ai l’impression, si je m’en
13 souviens bien.
14 Q. En ce qui concerne cet immeuble Lepa Brena,
15 est-ce qu’il y a une partie de l’immeuble qui est de
16 moindre taille par rapport au reste de l’immeuble ?
17 R. Je n’ai pas compris.
18 Q. Je vous ai demandé si une partie de
19 l’immeuble Lepa Brena du côté gauche, si l’on se base sur
20 la photo, qui est de moindre taille vis-à-vis de l’immeuble
21 que l’on voit sur cette photo et, de toute évidence, il
22 s’agit de l’immeuble Lepa Brena ?
23 R. Je ne sais pas.
24 Q. Comment ça vous ne savez pas puisque vous y
25 êtes entrée plusieurs fois pendant votre séjour ?
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1 R. Oui, j’y entrais, mais je ne l’ai
2 pratiquement pas vu parce que moi, je ne faisais pas
3 attention. Je n’essayais pas de voir autour de moi, mais
4 j’avais la tête penchée en avant et je regardais droit
5 devant moi.
6 Q. Très bien ! Parlons maintenant de
7 l’appartement lui-même. Quelle est la surface de cet
8 appartement ?
9 R. Je crois qu’il s’agissait d’un deux pièces.
10 Oui, deux pièces.
11 Q. Quelles étaient les pièces ?
12 R. Deux chambres, une cuisine, une salle de bain
13 et un couloir et un balcon.
14 Q. Le balcon se trouvait devant quelle pièce ?
15 R. La cuisine, je pense.
16 Q. Est-ce que vous pouvez nous décrire la
17 disposition des meubles dans la cuisine ?
18 R. Je n’ai vraiment aucune idée.
19 Q. Est-ce que vous pourriez me décrire la
20 disposition des meubles dans la salle de séjour ?
21 R. Dans la salle de séjour, il y avait un lit à
22 coucher, un lit double, il y avait une sorte de sofa, il y
23 avait une table ronde, et en face, il y avait une étagère.
24 Q. Quand vous dites « secia (ph.) », sofa, de
25 quoi parlez-vous ?
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1 R. Ce n’est pas vraiment un canapé. Ça
2 ressemble à cela, mais il ne s’agit pas d’un canapé-lit.
3 Ça ne sert qu’à s’asseoir dessus.
4 Q. La table, est-ce que vous pouvez la décrire ?
5 R. Tout ce que je sais c’est que c’était une
6 table ronde.
7 Q. De quelle taille ?
8 R. Je ne l’ai vraiment pas mesurée.
9 Q. Table basse ou bien est-ce que c’était une
10 table de la salle à manger, table haute ?
11 R. Non. Une table basse.
12 Q. Quel était le matériel dont la surface de la
13 table était constituée ?
14 R. Vraiment, je ne m’en souviens pas.
15 Q. Dans la chambre à coucher, qu’est-ce qu’il y
16 avait ?
17 R. Ce n’était pas vraiment une chambre à
18 coucher. C’était une sorte de chambre d’enfant. Je crois
19 qu’il y avait deux lits l’un au-dessus de l’autre, ensuite,
20 une armoire et je ne sais pas très exactement s’il y avait
21 un canapé ou pas à gauche par rapport à l’entrée.
22 Q. Les fenêtres de cette chambre donnaient sur
23 quoi ?
24 R. Je ne sais pas.
25 Q. Est-ce que vous savez sur quoi donnaient les
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1 fenêtres de la salle de séjour ?
2 R. Ici, ici même [indication du témoin], sur
3 cette rue. La fenêtre de la cuisine et du séjour, ces
4 fenêtres-là donnent sur cette rue, la rue devant.
5 Q. Est-ce que je vous ai bien comprise, les
6 fenêtres de la cuisine et de la salle de séjour donnent sur
7 la rue ?
8 R. Oui.
9 Q. Merci. Dites-nous, s’il vous plaît, qu’est-
10 ce qu’il y avait dans la salle de bain : une machine à
11 laver ?
12 R. Oui, il y avait une machine à laver. Ça, je
13 me souviens très bien puisqu’on lavait beaucoup de linge.
14 Q. Est-ce que vous aviez un poste de télé ou
15 bien un magnétoscope ?
16 R. Je crois que non. Je ne sais pas. Je ne
17 m’en souviens pas.
18 Q. Dites-moi, s’il vous plaît, lorsque vous êtes
19 venue dans cet appartement, quelle a été votre disposition
20 ? Je veux dire qui dormait où ? Donc, je parle de vous
21 qui avez été emmenée et les deux hommes.
22 R. Eh bien, puisque Monsieur Kovac m’a prise,
23 moi d’abord, et le numéro 87 afin de nous protéger, nous
24 dormions avec lui sur le canapé dans la salle de séjour,
25 alors que Jagos Kostic a amené dans la chambre AS et AB.
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1 Q. Est-ce que vous avez gardé la même
2 disposition par la suite ou bien est-ce que ça a changé ?
3 R. Vous parlez de nous ou des meubles ?
4 Q. Je parle de la manière dont vous dormiez.
5 R. Bien sûr que ça a changé.
6 Q. Dans quel sens ?
7 R. Eh bien, Kovac avait l’intention de violer
8 toutes les quatre. Puisque Jagos Kostic avait dit qu’il
9 allait protéger AS, donc il ne pouvait pas puisque c’était
10 un collègue qu’il respectait beaucoup. Donc, il ne pouvait
11 pas la violer elle et nous, bien sûr, personne ne nous… je
12 veux dire nous, il pouvait le faire.
13 Q. Madame le Témoin, ce n’était pas ma question.
14 Je vous ai demandé si, pendant votre séjour dans cet
15 appartement, vous avez changé d’endroit où vous dormiez.
16 Est-ce que les places des gens qui séjournaient dans
17 l’appartement ont changé ?
18 R. Oui.
19 Q. Dites-moi comment ceci s’est produit.
20 Qu’est-ce qui a changé ?
21 R. Eh bien, il m’a rejetée et ensuite, il a pris
22 AB, mais elle non plus, il ne l’a pas gardée pendant
23 longtemps, il l’a rejetée elle aussi. Ensuite, il a pris
24 le numéro 87 et ensuite, il passait le plus de temps avec
25 elle.
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1 Q. Je ne comprends pas ce terme, « rejetée ».
2 C’est un terme qui est employé lorsqu’on parle de l’amour
3 entre un homme et une femme. C’est là qu’un homme rejette
4 une femme.
5 R. Eh bien, pendant qu’il abusait de moi,
6 c’était comme ça. Ensuite, il en a eu assez et là, il ne
7 m’a plus gardée auprès de lui. Il m’a placée dans une
8 autre chambre et il a gardé AB, mais elle non plus, il n’a
9 pas eu besoin d’elle pendant longtemps et puis ensuite,
10 quand il en a eu assez d’elle, c’est là qu’il a pris le
11 numéro 87. C’est ce que j’ai voulu dire.
12 Q. Vous me répondez toujours à côté, mais ce
13 n’est pas la question que je vous ai posée.
14 R. À ce moment-là, je ne vous ai pas compris, je
15 n’ai pas compris la question.
16 Q. Vous m’avez dit que vous-même ainsi que 87,
17 vous étiez sur le grand lit ensemble avec Kovac et AB et AS
18 étaient dans une autre chambre avec Jagos. Est-ce que je
19 vous ai bien comprise ?
20 R. Oui.
21 Q. À partir du moment où il vous a rejetée,
22 qu’est-ce qui s’est passé avec vous ?
23 R. Je suis partie dans l’autre chambre ou à la
24 cuisine. Je ne me souviens plus exactement où je dormais
25 par la suite. Je ne sais plus, mais je pense que j’étais à
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1 la cuisine.
2 Q. Est-ce que dans la cuisine, il y avait un lit
3 ?
4 R. Oui. Il y avait un lit, un canapé-lit,
5 enfin, quelque chose de ce type-là.
6 Q. Eh bien, c’est 87 qui est restée toute seule
7 dans la salle de séjour avec Kovac, n’est-ce pas ?
8 R. Oui.
9 Q. Tout à l’heure, vous avez dit qu’ensuite, il
10 a pris AB.
11 R. Oui. AB était également avec lui, mais très
12 peu de temps. C’est ce que j’ai dit. Elle est restée peu
13 de temps. Ensuite, il a pris 87 avec lui.
14 Q. Au moment où il vous prenait, il ne prenait
15 pas en même temps 87 ? Je ne pense pas au moment même,
16 mais les mêmes jours.
17 R. Oui. Au début, oui. En même temps, il la
18 violait dans un même lit, 87 et moi-même.
19 Q. Et après ?
20 R. Après, il l’a prise toute seule mais il
21 emmenait d’autres femmes.
22 Q. Au moment où vous vous êtes rendue dans cet
23 appartement, qu’est-ce que vous avez emmené comme vêtements
24 ?
25 R. J’ai pris des vêtements dans l’appartement où
Page 1596
1 j’étais avant, où j’ai été emmenée par Tuta et Zelja.
2 Donc, c’était également indispensable de prendre quelques
3 vêtements pour pouvoir se changer parce qu’on n’avait pas
4 grand-chose. On avait peu de choses, pas trop.
5 Q. Est-ce que dans l’appartement où vous étiez
6 éventuellement, il y avait des vêtements que vous auriez pu
7 mettre ?
8 R. Non, je ne pense pas. Je ne me souviens pas.
9 Q. Vous en êtes sûre ? Il n’y en avait pas ?
10 R. Oui, j’en suis sûre parce qu’au bout d’un
11 certain temps, il y avait des personnes qui sont arrivées
12 et puis elles nous ont pris des vêtements et puis il n’y
13 avait pratiquement plus rien pour nous. Si, on a trouvé
14 quelque peu de vêtements qui étaient sales et c’est la
15 raison pour laquelle on a été obligé d’abord de le passer
16 au lave-linge pour ensuite mettre ces vêtements.
17 Q. Il y avait un lave-linge, n’est-ce pas ?
18 Vous l’avez dit.
19 R. Oui. J’ai dit qu’il y avait un lave-linge.
20 Q. Vous avez dit qu’effectivement il y avait ce
21 lave-linge, mais je ne vous ai pas posé la question si vous
22 aviez le droit de laver vos propres vêtements.
23 R. Oui, on avait le droit de laver nos
24 vêtements.
25 Q. Comment ça se passait avec d’autres affaires,
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1 d’autres affaires d’hygiène enfin ?
2 R. Rien.
3 Q. Vous aviez du savon ? Vous pouviez vous
4 laver ? Est-ce que vous aviez également de la lessive ?
5 R. Oui, quelque peu. Pas trop. Quand il n’y en
6 avait plus, bien, on n’avait plus rien.
7 Q. Est-ce que vous pouviez également vous
8 préparer à manger quelque chose ? Est-ce que ceci vous a
9 été permis ?
10 R. Il n’y avait rien. Il y avait quelques
11 conserves éventuellement qu’on a ouvertes et puis c’était
12 tout.
13 Q. Vous l’affirmez ?
14 R. Oui.
15 Q. Pendant que les deux en question étaient sur
16 place dans l’appartement, est-ce que vous avez mangé
17 ensemble à une même table, vous preniez des repas ensemble
18 ou bien vous mangiez à part, vous quatre ?
19 R. Je ne me souviens pas.
20 Q. Combien de temps en continuité êtes-vous
21 restée dans cet appartement ?
22 R. Un mois à peu près. Un mois.
23 Q. Je vais vous rappeler ce que vous avez dit
24 devant les enquêteurs du Tribunal et où vous avez dit que
25 vous avez passé dans cet appartement une vingtaine de jours
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1 et vous l’avez dit également au moment où vous avez donné
2 les déclarations devant les autorités de Bosnie-
3 Herzégovine. Est-ce que vous voulez me dire ce qui est
4 vrai, ce qui est exact ?
5 R. C’est exact que j’ai dit comme je l’ai dit,
6 mais il nous a remis aux gens qui sont arrivés de Serbie.
7 Ensuite, il nous a ramenées de nouveau dans cet
8 appartement. Par conséquent, tout ceci a duré à peu près
9 un mois, un mois et demi parce qu’il nous avait remises à
10 un moment donné aux autres personnes.
11 Q. Est-ce que vous pouvez me dire également
12 autre chose ? Pendant que vous étiez dans cet appartement,
13 pendant que vous étiez donc dans l’appartement, combien de
14 fois Kovac a passé dans cet appartement, combien de nuits
15 il était dans l’appartement étant donné qu’il allait quand
16 même remplir un certain nombre de missions qui lui ont été
17 confiées ?
18 R. Je ne me souviens pas véritablement. Je ne
19 m’en souviens pas.
20 Q. Est-ce que vous pouvez nous dire
21 approximativement le nombre de nuits qu’il avait passées
22 dans l’appartement ?
23 R. Je ne sais pas.
24 Q. Seriez-vous d’accord avec moi que sur le
25 nombre total de jours que vous étiez dans cet appartement,
Page 1599
1 il y a passé la moitié du temps ?
2 R. Je ne sais pas. Je ne sais pas exactement.
3 Q. Dites-moi, s’il vous plaît, pendant leur
4 absence, est-ce que l’appartement était fermé à clé, est-ce
5 que vous-même, vous aviez des clés de l’entrée principale,
6 est-ce que vous pouviez vous déplacer, aller chez des
7 voisins et aller faire des courses dans les magasins ?
8 R. On a été enfermé à clé.
9 Q. Est-ce que je vous ai bien comprise que
10 pendant qu’il n’était pas dans l’appartement, vous ne
11 pouviez pas sortir parce que la porte a été fermée à clé ?
12 R. Oui, c’est ce que j’ai dit.
13 Q. Vous souvenez-vous que vous étiez de temps à
14 autre partie voir les voisins pour prêter du café, du sucre
15 ?
16 R. Non, pas moi.
17 Q. Et d’autres jeunes filles qui étaient avec
18 vous ?
19 R. Pendant que moi, j’étais dans l’appartement,
20 certainement pas, mais je ne peux pas vous dire en dehors
21 du temps où je n’étais pas dans cet appartement comment ça
22 s’est passé.
23 Q. Est-ce que les voisines venaient vous voir ?
24 R. Une vieille dame a enfoncé l’appartement,
25 elle nous a demandé de prendre tout et de laisser rien dans
Page 1600
1 l’appartement et je me souviens que Gojko Jankovic était
2 venu parce que Klanfa était enfermé à l’établissement
3 pénitentiaire de Foca et Gojko était venu et il l’avait
4 expulsée.
5 Q. Je ne vous ai pas tellement bien comprise.
6 Qui était à l’établissement pénitentiaire à Foca ?
7 R. Klanfa était au KP Dom.
8 Q. Est-ce que vous savez pourquoi ?
9 R. Non.
10 Q. Est-ce que vous savez quelle était la raison
11 et combien de jours il y est resté ? Je parle de la
12 prison.
13 R. Deux, trois nuits. Je ne sais pas
14 exactement.
15 Q. Au moment où Kovac et Kostic n’étaient pas en
16 mission, est-ce que vous les avez accompagnés, est-ce que
17 vous étiez dans des cafés, est-ce que vous avez pris des
18 boissons avec eux en ville ?
19 R. Avec eux-mêmes, non, personnellement. Étant
20 donné qu’ils nous ont mises à la disposition des hommes de
21 Serbie, une nuit, il y avait l’homme de Serbie qui m’a
22 emmenée dans un café et à cette époque-là, il y avait
23 Klanfa qui était avec 87 dans ce même café. Donc, c’est
24 une nuit que nous avons effectivement passée ensemble dans
25 un café.
Page 1601
1 Q. Vous étiez ensemble à une table, n’est-ce pas
2 ?
3 R. Oui.
4 Me LOPICIC (interprétation) : Je vous en prie, je
5 suis le compte-rendu et il n’y a pas donc de nom ou surnom
6 Klanfa au KP Dom. Je pense qu’il y a le nom qui manque.
7 C’est donc 15:38:22, page 1234, donc quatorzième ligne.
8 M. LE JUGE HUNT (interprétation) : Me Lopicic,
9 est-ce que vous voulez dire que c’est la réponse qui n’a
10 pas été entendue par l’interprète qui se trouvait à
11 l’établissement pénitentiaire ? Est-ce que la réponse
12 était que justement, c’était Klanfa ?
13 Me LOPICIC (interprétation) : Effectivement, la
14 transcription ne comprend pas le nom et le nom n’est pas
15 marqué. Je ne sais pas si vous avez entendu qu’il
16 s’agissait de Klanfa.
17 M. LE JUGE HUNT (interprétation) : Merci.
18 Me LOPICIC (interprétation) : C’était bien ça.
19 Me UERTZ-RETZLAFF (interprétation) : Je vous en
20 prie, est-ce qu’on peut demander éventuellement au témoin
21 de la répéter ? Les interprètes ne l’ont pas entendue.
22 Par conséquent, il faut peut-être reposer la question.
23 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Me Kolesar,
24 est-ce que vous voulez bien poser la question une fois de
25 plus ? Le témoin pourrait nous donner la réponse et tout
Page 1602
1 le monde pourrait entendre la réponse de manière claire et
2 nette.
3 Me KOLESAR (interprétation) :
4 Q. Est-ce que je vous ai bien comprise que
5 l’Accusé Kovac a passé un certain temps au KP Dom ?
6 R. Oui.
7 Q. Est-ce que vous savez pourquoi ?
8 R. Non.
9 Q. Est-ce que vous savez combien de temps il est
10 resté à la prison ?
11 R. Je ne sais pas. Deux, trois nuits. Je ne
12 suis pas sûre.
13 Q. Pendant votre séjour dans l’appartement, est-
14 ce qu’une de vos cousines proches vous a visitée ? La
15 cousine proche de l’accusé ainsi que sa mère se rendaient
16 chez vous pour vous apporter de la nourriture pendant que
17 Kovac remplissait sa mission ?
18 R. Pas à moi.
19 Q. Peut-être pas à vous, mais éventuellement,
20 elles apportaient de la nourriture aux quelques autres ?
21 R. Je ne sais pas.
22 Q. Vous étiez toutes les quatre dans le même
23 appartement ?
24 R. Pendant que moi-même, j’étais dans
25 l’appartement, personne n’est venu pour m’apporter quoi que
Page 1603
1 ce soit et je ne peux rien dire d’autre.
2 Q. Vous avez mentionné qu’il y avait un certain
3 homme dont le surnom est Tarza qui s’était rendu dans
4 l’appartement. Est-ce que vous pouvez nous dire de qui il
5 s’agissait ?
6 R. Je sais qu’il a travaillé à Sipad de Maglic.
7 On l’appelait Tarza. Je ne connais pas son prénom, son nom
8 à l’époque. Je connaissais son nom, mais de toute façon,
9 là maintenant, je ne m’en souviens plus. Je connais son
10 surnom.
11 Q. Vous avez travaillé dans la même société ?
12 Vous avez travaillé au sein de la même organisation de
13 travail ?
14 R. C’était la même entreprise mais ce n’était
15 pas la même unité, le même département. Il y avait la
16 centrale thermique et il y avait également la chaudière.
17 Donc, il s’agissait d’un même département mais au sein du
18 département, il y avait deux sections et tout ça dans une
19 seule entreprise.
20 Q. Ce Tarza, qu’est-ce qu’il a fait ? Combien
21 de fois il s’était rendu dans l’appartement ? Quelles
22 étaient les raisons pour lesquelles il est venu ?
23 R. Je me souviens qu’une fois, c’est Klanfa qui
24 l’a emmené et puis je lui ai demandé s’il se souvenait de
25 moi. Il m’a dit qu’il ne se souvenait pas de moi et
Page 1604
1 depuis, je n’ai jamais parlé avec cet homme.
2 Q. C’est comme ça que vous avez terminé votre
3 discussion entre Tarza et vous-même ?
4 R. Il a parlé d’un certain nombre de choses,
5 mais de toute façon, je ne me souviens plus des sujets et
6 je ne me souviens plus des détails.
7 Q. En ce qui concerne Slavo Ivanovic, est-ce que
8 vous connaissiez avant Slavo Ivanovic ?
9 R. Oui.
10 Q. Je n’ai pas bien compris votre réponse.
11 R. Oui.
12 Q. Est-ce que vous pouvez donner la description
13 de cet âge, quel âge avait-il, comment il se présentait ?
14 R. Il avait des cheveux gris. Il avait un peu
15 plus que 50 ans. Je sais qu’il travaillait comme chauffeur
16 de taxi à Foca. Je sais qu’il est de taille moyenne, gros.
17 Q. Il vous a apporté un cadeau quand il est venu
18 vous voir ?
19 R. Non. Je ne me souviens vraiment pas du tout.
20 Je ne me souviens pas du tout.
21 Q. C’est peut-être de la charcuterie qu’il avait
22 apportée, prcut (ph.) ?
23 R. Non, je ne me souviens pas.
24 Q. Il était l’ami de Kovac ou de Jagos ?
25 R. Je ne me souviens pas.
Page 1605
1 Me KOLESAR (interprétation) : Excusez-moi, Madame
2 la Présidente, juste un petit moment pour consulter mes
3 notes.
4 Q. Pouvez-vous trouver la page 13, s’il vous
5 plaît, et jeter un coup d’œil sur la page 13 de votre
6 déclaration que vous avez donnée aux enquêteurs du Tribunal
7 au mois de novembre 1995 ? Avant-dernier paragraphe, vous
8 avez donc la phrase, troisième ligne, qui commence : « Les
9 deux, trois premiers jours… »
10 R. « Les deux, trois premiers jours, Klanfa nous
11 a violées et ensuite, il a pris… »
12 Q. Je vous en prie, ne dites pas les noms. Je
13 vous en prie.
14 R. Excusez-moi. Tout est de ma faute.
15 « …il a pris donc AB, Kostic a pris AS et 87 et
16 moi-même, on nous a laissées tranquilles pendant une
17 dizaine de jours, alors que les deux autres jeunes filles
18 ont été violées de manière permanente. Moi-même et 87,
19 nous étions tranquilles. Rien ne s’est passé avec nous. »
20 Q. Merci. Je vous en prie, ça me suffit.
21 Maintenant, je vais vous demander de regarder votre
22 déclaration, page 8, donc la déclaration que vous avez
23 donnée aux autorités de Bosnie-Herzégovine. Est-ce que
24 vous avez trouvé ?
25 Seizième ligne, dernier paragraphe et qui
Page 1606
1 commence : « Nous y étions pendant une vingtaine de
2 jours… »
3 Est-ce que vous pouvez nous donner lecture ?
4 R. « Klanfa nous a violées de manière
5 permanente, alors que Jagos dormait uniquement avec AS.
6 Ceci se passait en général pendant les nuits, pratiquement
7 chaque nuit, et au bout d’une vingtaine de jours, Klanfa a
8 pris pour lui numéro 87 et en ce qui me concerne et AB, il
9 nous a dit que nous devons aller pour satisfaire les hommes
10 qui sont venus de Serbie. »
11 Q. Merci. Ça suffit. Par conséquent, il y a
12 les deux déclarations. Il y en a une première que vous
13 avez donnée en 1995, l’autre en 1996. L’autre jour, lors
14 de votre déposition, vous avez relaté différemment ce qui
15 s’était passé. Au cours du contre-interrogatoire de cet
16 après-midi, vous avez dit que vous aviez la meilleure
17 mémoire bien évidemment avant.
18 Par conséquent, si vous comparez les trois
19 déclarations, pouvez-vous me dire maintenant quelles sont
20 les raisons pour lesquelles il y a eu de telles
21 contradictions, de telles discordances ? À mon sens, il
22 s’agit véritablement de discordances qui sont très, très
23 grandes.
24 R. Je n’ai aucune idée. Je n’en ai pas la
25 moindre idée.
Page 1607
1 Q. Il me semble que ce n’est pas véritablement
2 la réponse. Pourriez-vous, s’il vous plaît, nous donner la
3 réponse ?
4 R. Je ne sais pas quoi vous dire. De toute
5 façon, je ne pouvais pas me souvenir de tous les détails et
6 bien évidemment ça ne pouvait pas concorder à 100 pour
7 cent.
8 Q. Madame le Témoin, ce ne sont pas des détails
9 qui ne sont pas importants. Ce sont des choses qui, si
10 ceci vous est arrivé, c’est de telle nature que vous ne
11 pouvez pas oublier. C’est la raison pour laquelle je vais
12 vous demander, s’il vous plaît, de bien vouloir essayer de
13 vous en souvenir et de nous dire quelles sont les raisons
14 pour lesquelles vous avez donné les trois déclarations et
15 les trois sont différentes d’une manière drastique.
16 R. Je n’en ai pas la moindre idée. Je l’ai déjà
17 dit. Je répète que je ne me souviens pas quand j’ai dit
18 quoi, mais je me souviens d’un certain nombre de détails
19 quand même.
20 Q. Vous donnez des réponses non pas seulement à
21 cette question mais en général qui ne sont pas
22 permissibles. Faites un effort, s’il vous plaît, essayez
23 de m’expliquer. Dites-moi quelles sont les raisons pour
24 lesquelles ces trois déclarations sont aussi différentes.
25 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Me Kolesar,
Page 1608
1 le témoin vient de dire qu’elle ne sait pas plus. Elle ne
2 peut pas satisfaire votre curiosité. Vous pouvez donc
3 continuer. Il s’agit par conséquent d’un certain nombre
4 d’arguments que vous allez utiliser lors de votre
5 plaidoirie. Par conséquent, vous ne pouvez pas obtenir des
6 réponses que le témoin ne veut pas et ne peut pas peut-être
7 vous donner. Vous accélérez, s’il vous plaît.
8 Me KOLESAR (interprétation) : Je n’insiste pas.
9 Je ne force pas le témoin de me répondre comme moi, je
10 souhaiterais recevoir la réponse, mais il n’y a aucune
11 réponse. Elle ne me donne aucune réponse.
12 M. LE JUGE HUNT (interprétation) : Me Kolesar,
13 vous avez essayé donc d’insister sur un certain nombre de
14 points lors du contre-interrogatoire. Le témoin vous dit
15 qu’elle ne peut dire rien de plus. Par conséquent, je
16 pense que vous pouvez passer à d’autres sujets, s’il vous
17 plaît.
18 Me KOLESAR (interprétation) : Merci.
19 Q. Je vais vous demander maintenant de bien
20 vouloir regarder la page 14 de votre déclaration,
21 déclaration que vous avez donnée aux enquêteurs du
22 Tribunal, premier paragraphe…
23 R. Quatorzième page ?
24 Q. Oui. Premier paragraphe qui commence : « On
25 nous a emmené passer une nuit dans l’appartement de
Page 1609
1 Klanfa. »
2 R. « Une nuit, on nous a emmenées dans
3 l’appartement de Klanfa. Il y avait des soldats serbes qui
4 buvaient et qui tiraient par les fenêtres. Cette nuit,
5 Klanfa avec Dragan Stankovic a négocié la vente de AB.
6 J’ai entendu que Klanfa a vendu AB à Stankovic pour un prix
7 de 200 deutschmarks. Cette nuit, le soldat serbe répondant
8 au nom Zeljko a emmené AB dans le quartier Pod Masala alors
9 que AS a été emmenée dans l’appartement à Donje Polje. »
10 Jagos Kostic n’existe pas. Ce n’est pas bien fait. « Tuta
11 m’a emmenée ainsi que 87 dans son appartement qui se
12 trouvait dans l’immeuble Brena. »
13 Q. Est-ce que vous avez déclaré la même chose
14 aux autorités de la République de Bosnie-Herzégovine au
15 moment de votre interrogatoire ou bien c’était différent ?
16 R. Je ne me souviens pas. Je ne me souviens pas
17 exactement quand est-ce que j’ai dit des choses exactes.
18 Q. D’accord. Ça ne fait rien. On va y revenir
19 plus tard.
20 Maintenant, j’ai une autre question que j’aimerais
21 vous poser. D’après ce que vous avez déclaré jusqu’à
22 maintenant, disons ensemble que compte tenu donc de la
23 déclaration que vous avez donnée au Tribunal en novembre
24 1995, vous avez passé donc 20 jours dans l’appartement de
25 Klanfa. Est-ce que nous sommes bien d’accord jusque là ?
Page 1610
1 R. Oui, approximativement.
2 Q. Ensuite, vous avez dit que vous avez passé 20
3 jours dans l’appartement qui se trouvait dans l’immeuble à
4 côté de l’hôtel Zelengora ?
5 R. Je ne me souviens pas exactement combien de
6 jours j’ai passés dans ces deux endroits différents.
7 Q. J’essaie d’attirer votre attention sur ce que
8 vous avez dit dans vos déclarations respectives. Si vous
9 ne me faites pas confiance, on peut vérifier.
10 R. Moi, je me souviens que j’ai dit des choses
11 qui sont exactes, mais la moitié de ce que j’ai dit, je ne
12 m’en souviens plus.
13 Q. Est-ce que vous pouvez voir maintenant la
14 page 14 de votre déclaration que vous avez donnée au mois
15 de novembre devant les enquêteurs du Tribunal ? Deuxième
16 paragraphe d’en haut, la phrase qui commence avec : « Nous
17 sommes restées là-bas… »
18 R. « Nous sommes restées une quinzaine de
19 jours. »
20 Q. Vous parlez de l’appartement qui se trouvait
21 dans le quartier Pod Masala ?
22 R. Oui, je le pense.
23 Q. Revenez à la page 13, s’il vous plaît.
24 Dernier paragraphe qui commence : « De l’immeuble… »
25 R. « De l’immeuble Brena, Klanfa et AB ainsi que
Page 1611
1 moi-même, on nous a transférés jusqu’à la maison à côté de
2 l’hôtel Zelengora où nous sommes restés une vingtaine de
3 jours avec un certain nombre de soldats qui sont venus de
4 Serbie et qui appartenaient au groupe. »
5 Q. Ça suffit. Merci. Nous pouvons conclure que
6 vous avez déclaré que vous avez passé une vingtaine de
7 jours dans l’appartement de l’immeuble Brena, une vingtaine
8 dans un appartement qui est à côté de l’hôtel Zelengora et
9 une vingtaine auprès des hommes qui sont arrivés de Serbie.
10 Ça fait 55 jours à peu près. Est-ce que j’ai bien compté ?
11 R. Je ne peux pas vous dire exactement.
12 Q. Est-ce que 20, en plus 20 et en plus 15, ça
13 fait 55, n’est-ce pas ?
14 R. Oui, exactement, c’est 55.
15 Q. C’est la question que je vous posais.
16 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Me Kolesar,
17 je pense que maintenant, c’est le temps de lever
18 l’audience. Vous avez eu une partie de l’après-midi, une
19 partie ce matin. Est-ce que vous avez encore d’autres
20 questions à poser ?
21 Me KOLESAR (interprétation) : Oui.
22 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Combien de
23 temps vous avez besoin pour demain matin ?
24 Me KOLESAR (interprétation) : Une demi-heure au
25 moins.
Page 1612
1 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Non, Me
2 Kolesar, c’est un peu trop. Vous ne gérez pas très bien
3 votre temps, mais on vous laisse 15 minutes. Nous allons
4 commencer à 9 h 30 et j’espère que vous allez vraiment
5 planifier les questions que vous voulez poser. Donc, ça ne
6 doit pas aller au-delà d’un quart d’heure. Vous avez eu
7 beaucoup de temps, plus que ce qui est normalement permis.
8 Me KOLESAR (interprétation) : D’accord.
9 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Demain, 9 h
10 30.
11 — L’audience est levée à 16 h 02
12 pour reprendre le mardi
13 4 avril 2000 à 9 h 30
14
15
16
17
Le mardi 4 avril 2000
2 [Audience publique]
3 [Les accusés entrent dans la Cour]
4 [Le témoin entre dans la Cour]
5 — L’audience débute à 9 h 30
6 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Veuillez
7 donner le numéro de l’affaire, s’il vous plaît.
8 LA GREFFIÈRE : Affaire IT-96-23-T, IT-96-23/1-T,
9 Le Procureur contre Dragoljub Kunarac, Radomir Kovac et
10 Zoran Vukovic.
TÉMOIN : TÉMOIN 75
11 (SOUS LE MÊME SERMENT)
12 CONTRE-INTERROGÉE PAR Me KOLESAR (Suite)
13 (interprétation) :
14 Q. Madame le Témoin, nous avons terminé hier
15 notre contre-interrogatoire au moment où nous avons essayé
16 de voir combien de temps vous avez passé dans l’appartement
17 de Monsieur Kovac, ensuite dans l’immeuble à côté de
18 l’hôtel Zelengora et enfin dans le quartier Pod Masala,
19 mais nous nous sommes mis d’accord que c’était 55 jours.
20 R. Nous ne nous sommes pas mis d’accord. J’ai
21 dit que je ne suis pas tout à fait au courant, que je ne
22 sais pas, mais approximativement.
23 Q. Mais vous avez dit que ce que vous avez
24 déclaré déjà et ce qui est contenu dans vos déclarations
25 est la vérité ?
Page 1618
1 R. Je répète une fois de plus : Mais je ne suis
2 pas sûre. Je l’ai dit à cette époque-là également quand
3 j’ai donné des déclarations. Je le répète maintenant
4 également : Je ne suis pas tout à fait sûre.
5 Q. Est-ce que ça peut être 55 jours ?
6 R. Je ne sais pas.
7 Q. Mais supposons que c’est 55 jours, à ce
8 moment-là, c’est le 25 décembre que ces 55 jours se sont
9 écoulés ?
10 R. Je ne me souviens pas.
11 Q. Par conséquent, ça serait le 25 décembre :
12 Est-ce que vous êtes d’accord avec moi ?
13 R. J’ai dit que je ne m’en souvenais pas. Je ne
14 peux pas vous dire quoi que ce soit dont je ne me souviens
15 pas. Je ne peux pas vous dire que c’était vraiment à ce
16 moment-là. Je ne m’en souviens pas et puis c’est tout.
17 Q. La deuxième moitié du mois de décembre, vous
18 étiez encore à Foca, n’est-ce pas ?
19 R. Oui.
20 Q. Est-ce que vous savez que dans la deuxième
21 moitié du mois de décembre, à St-Nicholas – c’est une fête
22 orthodoxe – je suppose que vous savez qu’il y a eu une
23 attaque qui a été organisée sur Foca ?
24 R. Je ne me souviens pas.
25 Q. Mais vous ne vous souvenez pas qu’il y avait
Page 1619
1 une alerte par sirène et puis ensuite, il y avait des
2 combats et qu’on entendait les tirs ?
3 R. Non. Je ne sais pas. Je n’ai pas entendu.
4 Dans le studio où j’étais, il n’y avait ni radio ni
5 télévision. Je ne pouvais absolument rien entendre.
6 Q. Mais vous avez pu entendre des tirs, et en
7 dehors de la radio et de la télévision ?
8 R. Je ne l’ai pas entendu. J’ai entendu les
9 tirs uniquement quand ils fêtaient le Jour de l’An ou Noël.
10 C’est dans la ville que j’ai entendu qu’on tirait en l’air.
11 C’est tout ce que j’ai entendu comme tirs et pas en dehors
12 de ça.
13 Q. Est-ce que vous savez où se trouvait Klanfa à
14 cette époque-là ? Est-ce qu’il était sur le front ?
15 R. Je ne sais pas.
16 Q. Est-ce que vous savez qu’à ce moment-là, il a
17 été blessé, que c’était les jours où il a été blessé ?
18 R. Non.
19 Me KOLESAR (interprétation) : Mais si le témoin
20 continue comme ça, Madame la Présidente, j’aurai besoin de
21 moins de 10 minutes.
22 Q. Devant la Chambre, vous avez déclaré
23 concernant donc cet incident qui s’est passé dans
24 l’appartement où on vous a chassée pour vous conduire vers
25 la rivière de la Drina, c’est Kovac qui vous a fait sortir,
Page 1620
1 c’est Jagos Kostic qui vous a ramenée dans l’appartement et
2 puis ensuite, ils vous ont fait ressortir jusqu’au
3 confluent de Cehotina et de la Drina ?
4 R. Vous ne l’avez pas compris, tout au moins pas
5 ce que j’ai dit. Au moment où il nous a fait sortir de
6 l’appartement de Tuta, il nous a emmenées jusqu’au quartier
7 de Masala, il nous a demandé d’enlever les vêtements,
8 ensuite, il nous a fait revenir vers l’appartement et ce
9 n’est qu’en troisième temps qu’il nous a demandé d’aller au
10 confluent de Cehotina et de Drina. Je ne pense pas que
11 vous avez bien lu ce que j’ai dit.
12 Q. Excusez-moi mais je vous demande quand même
13 d’être un peu plus correcte parce que moi, je suis correct
14 vis-à-vis de vous quand je vous pose des questions.
15 R. Je ne sais pas. Moi, je pense que je suis
16 polie également.
17 Q. Est-ce que vous pouvez prendre la page 14 de
18 votre déclaration que vous avez donnée aux enquêteurs du
19 Tribunal ? Page 14, deuxième paragraphe. Vers le milieu
20 de ce deuxième paragraphe, vous pouvez lire, si vous voulez
21 bien, la phrase – c’est l’avant-dernière – « Il nous a
22 forcées… » C’est l’avant-dernière phrase.
23 R. « Il nous a forcées d’aller jusqu’à Drina,
24 jusqu’au confluent de Drina et Cehotina. À ce moment-là,
25 c’est Jagos qui est arrivé. Il a échangé quelques mots
Page 1621
1 avec Klanfa et ensuite, il nous a fait revenir dans
2 l’appartement. »
3 Q. Merci. Maintenant, je vais vous demander de
4 trouver la déclaration que vous avez donnée devant les
5 autorités respectives de la République de Bosnie-
6 Herzégovine, page 9, quinzième par rapport… enfin, vers le
7 milieu d’en haut.
8 R. Mais je n’ai pas cette déclaration.
9 Q. Mais hier, vous l’aviez ?
10 R. Maintenant, je ne l’ai pas.
11 M. LE JUGE HUNT (interprétation) : Est-ce que
12 vous pouvez s’il vous plaît donner lecture de ce
13 paragraphe, Me Kolesar ?
14 Me KOLESAR (interprétation) : Oui, bien sûr.
15 Q. « Il nous a forcées de sortir de
16 l’appartement. On était nu. Il a rencontré devant
17 l’immeuble Jagos. Il a parlé quelque peu avec lui.
18 Ensuite, il nous a fait revenir dans l’appartement. Nous
19 nous sommes habillées. Une fois que nous étions habillées,
20 nous sommes ressorties. Nous sommes passées à côté de la
21 mairie et nous sommes allées du côté du pont. Il avait un
22 fusil automatique. Il avait le couteau. Il nous a dit
23 qu’il allait nous égorger. Nous ne pouvions pas nous
24 approcher de la Drina et c’est la raison pour laquelle nous
25 sommes allées jusqu’au confluent Cehotina et Drina dans un
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1 village qui s’appelle Sastovci. Jagos est venu nous voir.
2 Il a parlé quelque peu. Alors, il nous a giflées. Il nous
3 a demandé également de retourner dans l’appartement et que
4 de toute façon, par la suite, il allait voir ce qui allait
5 se passer avec nous. »
6 Est-ce que vous avez déclaré ceci ?
7 R. Oui, c’est exact.
8 Q. Est-ce que vous pouvez nous donner quelque
9 peu plus de précisions ? Vous avez donné deux différentes
10 déclarations aux enquêteurs et vous avez également donné
11 une autre déclaration devant les autorités. Quand est-ce
12 qu’on vous a frappée ?
13 R. Mais au moment où nous sommes allées pour la
14 première fois vers Masala et puis sur le chemin de retour
15 également, on nous a frappées.
16 Q. Est-ce que vous êtes passées par le
17 confluent ?
18 R. Oui.
19 Q. Mais est-ce que vous avez passé également
20 devant l’immeuble de SUP ?
21 R. Oui.
22 Q. Il n’y a personne qui vous a protégées ?
23 R. Certainement pas les gens qui étaient à côté
24 sur la route. Ils riaient. Personne ne nous a pris en
25 protection. Personne ne nous a protégées.
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1 Q. Est-ce qu’on peut revenir sur la page 13,
2 s’il vous plaît, de votre déclaration que vous avez donnée
3 aux enquêteurs du Tribunal ?
4 Vous dites… c’est l’avant-dernier paragraphe et
5 vous dites : « Les deux, trois premiers jours, Klanfa nous
6 a violées. Ensuite, il a pris AB et Kostic a pris AS. 87
7 et moi-même, nous n’avions pas été abusées. Puis, rien ne
8 s’est passé pendant 10 jours. Ensuite, Klanfa a amené un
9 soir… », et cætera, et cætera.
10 R. Je pense qu’il y a une différence dans la
11 traduction. Il n’y a pas véritablement une grande
12 différence.
13 Q. Mais devant la Chambre, vous avez donné une
14 autre description par rapport à ce qui s’est passé avec
15 vous au moment où vous vous êtes rendue dans l’immeuble de
16 Lepa Brena dans l’appartement qui a été utilisé par Kovac
17 et puis, vous avez également donné une autre description en
18 ce qui concerne la manière dont il a procédé quand il avait
19 violé, l’ordre par lequel il a violé ?
20 R. Je l’ai dit et je le redis. Pour ce qui est
21 les incidents et les détails, je ne peux pas m’en souvenir
22 aujourd’hui.
23 Q. En ce qui concerne les autorités
24 d’investigation de la République de Bosnie-Herzégovine,
25 vous avez dit que vous étiez pendant 20 jours sur place,
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1 qu’il vous a violées : « Que Jagos dormait avec AS, qu’au
2 bout de 20 jours, Klanfa a pris pour lui-même 87 alors que
3 moi-même et AB, on nous a envoyées chez des hommes qui sont
4 arrivés de Serbie. »
5 Vous avez deux déclarations totalement
6 différentes sur les événements qui sont importants.
7 R. La première déclaration est certainement la
8 plus exacte, celle que j’ai donné aux enquêteurs du
9 Tribunal. Je ne peux pas véritablement me souvenir de
10 chaque détail de ce que j’ai dit à ce moment-là, de ce que
11 je dis en ce moment.
12 Q. À un moment donné au cours de notre contre-
13 interrogatoire, vous avez dit que vous êtes venue ici dans
14 le prétoire pour juger vous-même. Malheureusement, nous
15 n’avons pas le transcript et nous ne pouvons pas contrôler,
16 mais la question que je vous pose : Est-ce que c’est ça ce
17 que vous avez dit ?
18 R. C’est possible.
19 Q. Qui devait vous juger ? Est-ce que c’est
20 bien vous qui devez juger qui que ce soit ?
21 R. Non. Ce n’est pas moi qui dois juger. C’est
22 moi qui dois témoigner.
23 Q. Conviendrez-vous avec moi que pour ce qui
24 concerne la jalousie, si quelqu’un est pris par la
25 jalousie, à ce moment-là, la personne en question est
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1 disposée, prête à entreprendre quelques démarches à l’égard
2 d’un certain nombre de personnes alors que d’autres
3 personnes qui ne sont pas jalouses ne l’entreprennent pas
4 et ne sont pas dans cette mesure de le faire ?
5 R. Je ne sais pas. Je ne sais pas pourquoi vous
6 parlez de la jalousie.
7 Q. Tout simplement parce que vous avez dit
8 qu’après quatre ou cinq jours, Klanfa vous a rejetée, et
9 hier, je l’ai dit : Moi, je sous-entends que tout
10 simplement, il s’agissait de quelqu’un qui a été rejeté
11 mais qui a été aimé.
12 R. Non. Je ne pouvais pas être une personne
13 aimée par Kovac et Klanfa. Je ne sais pas d’où vous sortez
14 ça.
15 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Me Kolesar,
16 ne perdez pas votre temps. Une fois que le témoin aura été
17 contre-interrogée, on verra ce qu’elle avait sous-entendu
18 ou pas par « rejeté ».
19 R. Mais ce n’est pas possible. Moi, je ne
20 pouvais pas être une personne aimée par Klanfa. Sinon,
21 c’est mieux d’être morte que d’être une personne aimée par
22 lui.
23 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Mais je vous
24 en prie, vous pouvez poursuivre, Me Kolesar.
25 Me KOLESAR (interprétation) : J’ai encore
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1 quelques questions mais de toute façon, les 10 minutes se
2 sont écoulées. Par conséquent, je vais m’arrêter. Je ne
3 vais plus poursuivre.
4 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Me Kolesar,
5 vous savez que votre client est sujet à des accusations qui
6 sont assez importantes.
7 Me KOLESAR (interprétation) : Oui, bien
8 évidemment, Madame la Présidente.
9 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Mais vous
10 pouvez poursuivre si vous voulez.
11 Me KOLESAR (interprétation) : J’en ai terminé,
12 Madame la Présidente.
13 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Êtes-vous
14 sûr ?
15 Me KOLESAR (interprétation) : Absolument !
16 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Mais votre
17 client vous regarde, vous observe. Est-ce que vous le
18 comprenez ?
19 Me KOLESAR (interprétation) : Oui, Madame la
20 Présidente. J’ai obtenu le papier avec un certain nombre
21 de questions qui seraient des questions répétitives. Par
22 conséquent, vous pouvez demander à mon client si
23 éventuellement vous avez des choses à lui poser comme
24 questions.
25 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : D’accord.
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1 Me Jovanovic, est-ce que vous avez des questions à
2 poser ?
3 Me JOVANOVIC (interprétation) : Quelques
4 questions.
5 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Je vous en
6 prie.
7 CONTRE-INTERROGÉE PAR Me JOVANOVIC
8 (interprétation) :
9 Q. Bonjour, Madame le Témoin. Je vais être le
10 plus rapide possible.
11 Madame, est-ce que vous êtes d’accord avec moi
12 pour dire, comme vous l’avez dit, que vous ne connaissiez
13 pas Zoran Vukovic avant la guerre ?
14 R. Oui.
15 Q. Est-ce que vous connaissez quelque chose sur
16 les membres de sa famille ?
17 R. Non.
18 Q. Est-ce qu’éventuellement, vous avez donné
19 d’autres informations à un autre témoin sur Zoran Vukovic,
20 sur les membres de sa famille, ce qu’ils font, quelles sont
21 leurs activités, où ils vivent, et cætera ?
22 R. Non.
23 Q. Est-ce qu’on vous a montré un album de
24 photographies et qu’il fallait éventuellement identifier
25 Zoran Vukovic sur ces photographies ?
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1 R. Oui.
2 Q. Est-ce que vous avez réussi à identifier
3 Zoran Vukovic ?
4 R. Non.
5 Me JOVANOVIC (interprétation) : Je vais prier
6 l’Huissier de nous aider maintenant.
7 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Me
8 Jovanovic, excusez-moi mais ralentissez le rythme. Tenez
9 compte également de l’interprétation.
10 Me JOVANOVIC (interprétation) : Il s’agit d’une
11 série de photographies, d’un album de photographies que le
12 témoin a déjà vu. Il y a également un autre témoin qui a
13 vu cette série de photographies, et ceci en vue
14 d’identifier Zoran Vukovic. Je n’ai pas plusieurs
15 exemplaires. Je n’ai pas été en mesure de photocopier
16 parce que deux minutes avant que nous commencions, la
17 photocopieuse ne fonctionnait pas. C’est la raison pour
18 laquelle je donne mon exemplaire et je vais demander au
19 témoin de bien vouloir identifier ce document.
20 LA GREFFIÈRE : [Hors microphone] …tout d’abord
21 coté 60 des pièces du Procureur ?
22 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Est-ce que
23 vous pouvez donner la réponse ?
24 Ah ! c’est peut-être le Procureur. Peut-il nous
25 aider ?
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1 Me UERTZ-RETZLAFF (interprétation) : Il s’agit de
2 la pièce à conviction 60. Il s’agit d’un album de
3 photographies mais ça se rapporte à Dragoljub Kunarac. Le
4 Procureur n’a jamais montré la série de photographies qui
5 porte sur Zoran Vukovic.
6 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Je vous
7 remercie.
8 Me JOVANOVIC (interprétation) : Moi, je pense
9 avoir dit que le Procureur n’avait pas montré ce document
10 mais que ça s’est passé devant d’autres autorités, pas
11 l’Accusation. Nous avons obtenu ce document du Procureur,
12 du Bureau du Procureur.
13 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : D’accord,
14 c’est clair maintenant. Vous pouvez poursuivre. Je vous
15 en prie, poursuivez votre contre-interrogatoire.
16 Je vous en prie.
17 Me UERTZ-RETZLAFF (interprétation) : Madame la
18 Présidente, Messieurs les Juges, nous aussi, on
19 souhaiterait pouvoir voir cette série de photographies.
20 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Mais avant
21 donc de la montrer au témoin, le Procureur également
22 devrait pouvoir voir cette photographie et puis la Chambre
23 également souhaiterait voir la série de photographies.
24 Me UERTZ-RETZLAFF (interprétation) : Mais il
25 s’agit toujours de la pièce à conviction 60. Ce n’est pas
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1 de ce que nous parlons.
2 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Excusez-moi,
3 est-ce que l’Huissier peut prendre l’exemplaire auprès du
4 Me Jovanovic et vous voyez d’abord, s’il vous plaît, au
5 niveau du Bureau du Procureur, et ensuite, c’est nous qui
6 allons le voir ?
7 Est-ce que vous pouvez nous dire s’il vous plaît
8 de quoi il s’agit ?
9 Me UERTZ-RETZLAFF (interprétation) : Oui.
10 Effectivement, il s’agit du même document. Nous l’avons.
11 Nous l’avons reçu récemment de la part du gouvernement
12 bosniaque. Au moment où le témoin s’était rendue à
13 Sarajevo, où elle avait essayé d’identifier par les
14 photographies d’autres personnes, on lui a montré d’autres
15 photographies. Une de ces photographies concernait
16 Monsieur Zoran Vukovic.
17 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Bien, de
18 quoi il s’agit, s’il vous plaît ? Qu’est-ce que vous
19 avez ?
20 Me UERTZ-RETZLAFF (interprétation) : Il s’agit
21 d’un document, d’un document qui n’est pas accompagné d’une
22 légende et d’un rapport, le document du gouvernement de
23 Bosnie-Herzégovine qui concerne la procédure
24 d’identification. En passant par la photographie, ils ont
25 été en contact avec le témoin. Par conséquent, il n’y
Page 1631
1 avait pas, si vous voulez, un échange entre le Procureur et
2 le témoin mais c’était le témoin avec les autorités
3 bosniaques.
4 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : D’accord,
5 j’ai compris.
6 Vous pouvez montrer, Me Jovanovic, maintenant ce
7 document au témoin.
8 R. Oui.
9 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Je vous en
10 prie, vous pouvez poursuivre.
11 Me JOVANOVIC (interprétation) :
12 Q. Est-ce que vous avez pu identifier Zoran
13 Vukovic à cette occasion-là ?
14 R. À peu près mais je n’en étais pas sûre.
15 Q. Merci.
16 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Est-ce que
17 nous pouvons avoir maintenant le numéro ? Est-ce qu’on
18 peut attribuer un numéro ?
19 LA GREFFIÈRE : Coté D28 des pièces de la Défense,
20 D28.
21 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Ce n’est pas
22 encore admis comme pièce à conviction au dossier.
23 Me JOVANOVIC (interprétation) : Oui, oui, oui.
24 Absolument, Madame la Présidente. Je comprends bien.
25 Q. Madame, je vais vous demander maintenant, si
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1 vous voulez bien m’aider pour essayer d’éclaircir également
2 ce point sur Zoran Vukovic. Par moments, on le voit dans
3 vos déclarations, dans d’autres cas, pas du tout. Il y a
4 une pièce à conviction D24. C’est une déclaration qui a
5 été donnée du 15 au 18 novembre 1995, et dans cette
6 déclaration, vous parlez de l’Accusé Zoran Vukovic dans une
7 seule phrase. Est-ce que c’est vrai ?
8 R. C’est possible.
9 Q. Entendu ! Il y a une autre déclaration sous
10 la cote D25, déclaration que vous avez donnée à l’AID.
11 Vous ne parlez pas du tout de Zoran Vukovic. Vous ne dites
12 pas un seul mot sur lui ?
13 R. Je ne me souviens pas. Je ne sais pas.
14 Q. Est-ce que c’est vous qui avez donné cette
15 déclaration ?
16 R. Oui, c’est possible, mais de toute façon, je
17 ne me souviens pas de chaque détail, et même à ce moment-
18 là, je ne m’en souvenais pas.
19 Q. Je vais vous rappeler que dans cette
20 déclaration, vous avez donné plus de 80 noms et surnoms des
21 personnes différentes.
22 R. Oui.
23 Q. Mais il n’y a que Zoran Vukovic qui manque,
24 dont le nom manque ?
25 R. C’est possible.
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1 Q. Merci. Il y a la déclaration également sous
2 la cote D23. Vous ne parlez pas de Zoran Vukovic. C’est
3 une déclaration que vous avez donnée au Bureau du
4 Procureur. Est-ce que vous serez d’accord avec moi que
5 vous n’en parlez pas dans cette déclaration ?
6 R. Je ne sais pas. Je ne sais pas ce qui est
7 marqué dans cette déclaration. Je ne m’en souviens pas.
8 Q. Je vais vous rappeler que ce sont les
9 déclarations que vous avez données entre le mois de
10 novembre et mars 1998.
11 R. Oui.
12 Q. Les déclarations dont on a parlé.
13 R. D’accord.
14 Q. Maintenant, il y a quelque chose qui est
15 quand même intéressante. Le procès est en cours et Zoran
16 Vukovic, nous en avons parlé de plus en plus. Est-ce que
17 le 24 septembre 1999, vous avez dit que Radomir Kovac vous
18 a emmené Zoran Vukovic pour le viol et que vous étiez
19 emmenée au quatrième étage à l’hôtel Zelengora et tout ceci
20 se passait au moment où vous étiez dans l’appartement à
21 Foca ?
22 R. Mais j’étais déjà dans l’appartement au
23 moment où il m’a emmené… quand Klanfa a emmené Vukovic,
24 moi, j’étais déjà sur place dans l’appartement.
25 Q. Vous ne me comprenez pas. Je vous demande si
Page 1634
1 vous avez déclaré ça à l’enquêteur Robert Kempf le 24
2 septembre 1999.
3 R. Ça, je ne m’en souviens pas si je l’ai fait
4 ou pas.
5 Me JOVANOVIC (interprétation) : Madame la
6 Présidente, je souhaite demander à l’Huissier de nous aider
7 concernant… ça c’est un exemplaire en serbo-croate pour
8 Madame et voici les exemplaires pour les juges et les
9 collègues de l’Accusation, la version en anglais. Donc, la
10 première version est en serbo-croate et l’autre en anglais.
11 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : De quelle
12 déclaration ?
13 Me JOVANOVIC (interprétation) : Madame la
14 Présidente, il s’agit de parties du mémorandum que nous
15 avons reçu du Procureur qui concerne la procédure avant le
16 procès et au cours du procès et qui concerne les contacts
17 entre l’Accusation et le témoin dans le cadre de cette
18 procédure. Ce que j’essaie c’est d’établir si de telles
19 affirmations sont vraies. C’est pour cela que je
20 demanderais au témoin d’abord de lire le document et
21 ensuite, nous allons poursuivre.
22 LA GREFFIÈRE : Ce document sera coté D29 des
23 pièces de la Défense.
24 Me JOVANOVIC (interprétation) :
25 Q. Est-ce que vous vous souvenez de ça
Page 1635
1 maintenant ?
2 R. Je me souviens mais pas comme ça. Ça c’est
3 certainement une erreur de traduction.
4 Q. Merci.
5 Me JOVANOVIC (interprétation) : Madame la
6 Présidente, peut-on verser cela au dossier en tant que
7 pièce à conviction de la Défense ?
8 R. Parce que moi, j’étais déjà au quatrième
9 étage lorsqu’il l’a amené dans l’appartement. Ce n’est pas
10 lui qui m’a amenée au quatrième étage.
11 Q. Il faut clarifier quelque chose. Ce n’est
12 pas moi qui ai donné ces déclarations. Je n’ai fait que
13 les lire. C’est pour cela que moi, je vous pose des
14 questions à ce sujet.
15 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Il n’y a pas
16 d’objection apparemment. Donc, c’est versé au dossier avec
17 la même cote.
18 Me JOVANOVIC (interprétation) :
19 Q. Le 17 mars 2000, trois jours avant le début
20 du procès, est-ce que vous avez déclaré aux personnes
21 travaillant pour le Bureau du Procureur que Zoran Vukovic
22 s’est identifié lui-même en se présentant comme personne
23 qui a tué votre oncle ?
24 [Indication au conseil de ralentir]
25 Me JOVANOVIC (interprétation) : Merci de cet
Page 1636
1 avertissement. Je vais répéter.
2 Q. Le 17 mars 2000, trois jours avant le début
3 du procès, est-ce que vous avez déclaré aux personnes
4 travaillant pour le Bureau du Procureur que Zoran Vukovic
5 s’est présenté lui-même devant vous en disant qu’il était
6 la personne ayant tué votre oncle et vous n’avez pas
7 mentionné à cette occasion de sévices sexuels et vous avez
8 dit que le tout s’est passé dans l’appartement du coaccusé
9 Kovac ? Est-ce exact ?
10 R. Oui.
11 Q. Merci.
12 Me JOVANOVIC (interprétation) : Madame la
13 Présidente, ici, nous avons un autre document, un autre
14 mémorandum que nous avons reçu du Procureur. J’ai
15 suffisamment d’exemplaires en anglais et en serbe et si
16 vous me le permettez, nous pouvons montrer ce document aux
17 collègues de l’Accusation et, s’il vous plaît, le verser au
18 dossier également.
19 LA GREFFIÈRE : Ce document daté du 17 mars 2000
20 sera coté D30 des pièces de la Défense, D30.
21 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Apparemment,
22 il n’y a pas d’objection. Donc, il est admis.
23 Me JOVANOVIC (interprétation) :
24 Q. Dans votre déposition devant ce Tribunal le
25 30 mars 2000, en ce qui concerne ces deux événements, vous
Page 1637
1 les avez sublimés d’une certaine manière : le tout se passe
2 au même endroit et en même temps. Est-ce que vous pourriez
3 me dire laquelle de ces trois versions que je viens
4 d’exposer est conforme à la vérité ? Je ne vous entends
5 pas.
6 R. C’est vrai ça.
7 Q. Quoi ?
8 R. Ça.
9 Q. Quoi, s’il vous plaît ? Je ne vois pas bien
10 d’ici.
11 R. Le 17 mars 2000.
12 Q. Si je vous comprends bien, ça, c’est vrai et
13 le reste n’est pas vrai ?
14 R. C’est à peu près la même chose, mais en ce
15 qui concerne la traduction, ça, je ne peux pas clarifier
16 les différences.
17 Q. Donc, il s’agit d’une erreur de traduction ?
18 Très bien ! Poursuivons.
19 Maintenant, je vous demanderais que l’on revienne
20 l’espace d’un instant au moment où vous avez été emmenée à
21 Buk Bijela. Je souhaite que l’on clarifie… tout d’abord,
22 j’ai une autre question avant.
23 Est-ce que c’était la première fois que vous avez
24 vu Zoran Vukovic cette fois-ci à Buk Bijela ?
25 R. Oui.
Page 1638
1 Q. Merci. Je souhaite que l’on clarifie où vous
2 avez vu Zoran Vukovic pour la première fois, et là, je vous
3 propose deux versions : tout d’abord, la pièce à conviction
4 24, page 5, sur le chemin de baraques lorsque vous y êtes
5 amenée et ensuite, votre déposition, page 1387, ligne 25,
6 et page 1388, ligne 1, en date du 30 mars 2000, et dans
7 cette deuxième version, vous dites que ceci s’est produit
8 dans la même baraque de chantier lorsqu’on vous déplaçait
9 d’un endroit à un autre.
10 Laquelle des deux versions est vraie ?
11 R. Ce qui est vrai c’est qu’ils me déplaçaient
12 d’une baraque à l’autre et quand je suis sortie d’une
13 baraque, Zoran Vukovic est passé juste à côté de moi avec
14 mon oncle.
15 Q. Est-ce que ça veut dire que ce que vous avez
16 dit ici dans ce prétoire n’est pas vrai ?
17 R. Tout ce que j’ai dit est vrai. Ils
18 m’amenaient dans l’autre baraque. C’était devant l’entrée
19 de l’autre baraque.
20 Me JOVANOVIC (interprétation) : Madame la
21 Présidente, je pense qu’il serait utile pour nous si le
22 témoin répondait directement à mes questions et rien qu’à
23 mes questions. Ceci nous permettrait d’accélérer la
24 procédure.
25 Q. Il existe deux versions complètement
Page 1639
1 différentes : d’un côté, que ceci s’est passé à l’extérieur
2 et de l’autre côté, que ceci s’est passé à l’intérieur.
3 R. Pour autant que je m’en souvienne, c’était à
4 l’extérieur. Ils m’ont fait sortir d’une pièce, j’étais
5 dehors et c’est là que j’ai rencontré Zoran Vukovic avec
6 mon oncle et c’est là qu’ils m’ont amenée à l’autre
7 baraque.
8 Q. Je vais vous rafraîchir la mémoire.
9 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Monsieur
10 Jovanovic, veuillez attendre que le témoin termine sa
11 réponse. Attendez toujours.
12 Me JOVANOVIC (interprétation) : Merci, Madame la
13 Présidente.
14 Q. Si j’ai bien compris, ceci est vrai :
15 « Ensuite, un soldat m’a amenée jusqu’à l’autre baraque.
16 Sur le chemin, je suis passée à côté de Zoran Vukovic et
17 mon oncle. »
18 Ça, c’est vrai, n’est-ce pas ?
19 R. Oui.
20 Q. Pourquoi est-ce que vous avez proposé une
21 autre version devant les juges ?
22 R. Je ne me souviens pas avoir déclaré autre
23 chose.
24 Q. Merci. Est-ce que vous avez relaté cet
25 événement à qui que ce soit ?
Page 1640
1 R. C’est possible.
2 Me JOVANOVIC (interprétation) : Monsieur
3 l’Huissier, j’ai besoin de votre aide de nouveau.
4 Q. Maintenant, avec l’aide de Monsieur
5 l’Huissier, je vous montrerai le nom d’une personne et
6 veuillez me dire si vous connaissez cette personne ou non.
7 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Veuillez
8 répéter votre question, s’il vous plaît.
9 Me JOVANOVIC (interprétation) : Le témoin
10 connaît-elle cette personne ?
11 R. Oui.
12 Q. Est-ce que c’est l’épouse de la personne qui
13 a été tuée à Buk Bijela ?
14 R. C’est exact.
15 Q. En ce qui concerne cette personne dont vous
16 venez de lire le nom, est-ce que vous lui avez raconté ce
17 qui s’est passé à Buk Bijela ?
18 R. C’est exact.
19 Q. Est-ce que vous avez déclaré : « Zoran
20 Vukovic et Zoran Vilota étaient toujours avec lui et le
21 visage de mon mari était couvert de sang. Elle a vu que
22 ses oreilles étaient coupées. Elle m’a dit qu’ils ont
23 amené mon mari jusqu’à la rivière et qu’ils lui ont tiré
24 sur le dos. Elle a vu quand Zoran Vukovic est tombé dans
25 la rivière. Elle lui a demandé pourquoi Zoran Vukovic a
Page 1641
1 fait ça et il a dit que c’est parce que c’était un
2 vieillard. »
3 Est-ce que vous lui avez dit ça ?
4 R. Oui.
5 Q. Donc, vous avez effectivement vu ça
6 conformément à ce qui est décrit ici ?
7 R. Non, pas tout ça. J’ai vu l’oncle. J’ai vu
8 ce à quoi il ressemblait. Mais par la suite, Vukovic, il
9 m’a tout raconté parce qu’il se disait que nous n’allions
10 pas sortir de là, nous n’allions pas sortir vivantes.
11 Donc, c’est pour ça qu’il m’a raconté tout ça.
12 Q. Si j’ai bien compris, vous saviez quelque
13 chose et donc vous avez construit l’événement tel qu’il a
14 dû se produire et ensuite, vous relatez cet événement à
15 quelqu’un d’autre ?
16 R. Lorsque j’ai vu mon oncle, lorsque j’ai vu ce
17 à quoi il ressemblait…
18 Q. Un moment, s’il vous plaît. Est-ce que vous
19 avez vu que Zoran Vukovic a tiré sur votre…
20 R. Non, je ne l’ai pas vu mais il m’a dit qu’il
21 l’a chassé jusqu’à la Drina et quand l’autre voulait
22 s’échapper, qu’à ce moment-là, il a tiré sur lui.
23 Q. Je vous ai lu quelque chose. Je vous ai
24 demandé si c’était vrai. Sur la base de ceci, l’on peut
25 supposer que vous avez des connaissances directes
Page 1642
1 concernant cet événement. C’est ce que je vous demande.
2 Répondez par oui ou non et en ce qui concerne ce que Zoran
3 Vukovic a dit, nous en parlerons plus tard. Ma question
4 porte uniquement sur ça maintenant.
5 R. Oui.
6 Q. Donc, vous avez dit ça ?
7 R. Oui.
8 Q. Merci.
9 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Est-ce que
10 nous pouvons avoir un numéro pour cela ?
11 LA GREFFIÈRE : Le document sera coté D31 des
12 pièces de la Défense.
13 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Merci et
14 c’est admis sous scellé pour que ce soit clair pour le
15 compte-rendu.
16 Me JOVANOVIC (interprétation) : Madame la
17 Présidente, j’ai oublié de le dire, il s’agit d’une pièce à
18 conviction qui a déjà été versée comme pièce à conviction
19 D14, la partie que je viens de citer. Si vous vérifiez les
20 choses, vous pourrez voir que ça a déjà été admis. Je
21 m’excuse vraiment et à la Chambre et à la représentante du
22 Greffe. J’ai oublié de dire qu’il s’agit d’un document qui
23 a déjà reçu une cote, la cote D14.
24 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Je souhaite
25 que la Greffière nous le confirme.
Page 1643
1 LA GREFFIÈRE : Le document coté D14 des pièces de
2 la Défense était une déclaration d’un témoin protégé en
3 date du 8 et du 11 septembre. C’est un document donc
4 différent de ce que vient de nous donner Me Jovanovic.
5 Donc, le document, cette feuille de papier sur laquelle
6 porte le nom de ce témoin protégé, portera la cote D31.
7 Me JOVANOVIC (interprétation) : Madame la
8 Présidente, il s’agit d’un malentendu. Je pensais à un
9 autre document.
10 Q. Est-ce que vous pouvez nous dire à ce moment,
11 lorsque vous voyez votre cousin, ça a duré pendant combien
12 de temps ?
13 R. Ça n’a pas duré du tout, peut-être quelques
14 secondes. On s’est croisé, c’est tout.
15 Q. Combien de personnes se trouvaient autour de
16 votre cousin à ce moment-là ?
17 R. Je ne sais pas. Je ne m’en souviens pas.
18 Q. Quelle était la position de Zoran Vukovic à
19 ce moment-là par rapport à vous et votre oncle ?
20 R. Exactement.
21 Q. Excusez-moi, mais je n’ai pas compris la
22 réponse.
23 R. C’est exact. Il était debout ou plutôt, ce
24 n’est pas qu’il était debout, il passait avec lui puisque
25 nous ne pouvions pas être là calmes en train de parler.
Page 1644
1 Q. Je vous ai posé la question de savoir quelle
2 était la position de Zoran Vukovic par rapport à vous et
3 votre oncle.
4 R. Je ne sais pas. Je ne m’en souviens pas.
5 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Me
6 Jovanovic, il faut parfois expliquer vos questions parce
7 que peut-être le témoin ne vous a pas bien compris. Donc
8 parfois, il est important de clarifier vos questions.
9 Me JOVANOVIC (interprétation) : Oui, Madame la
10 Présidente. Mon intention lorsque j’ai posé cette
11 question, c’était de voir quelle était la possibilité
12 d’identification de la part du témoin vis-à-vis de
13 l’accusé. Je souhaitais que le témoin explique combien de
14 temps cette rencontre a duré, dans quelles circonstances
15 elle a eu lieu, quelles étaient les personnes présentes
16 pour que l’on puisse voir s’il est possible que dans ces
17 quelques secondes, puisque le témoin dit que ceci s’est
18 produit pendant quelques secondes, si ceci a pu suffire
19 pour que le témoin puisse identifier par la suite avec
20 certitude la personne, surtout étant donné que c’était une
21 personne que le témoin a vue pour la première fois.
22 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Très bien !
23 Me JOVANOVIC (interprétation) :
24 Q. Juste avant d’avoir vu Zoran Vukovic et votre
25 oncle, qu’est-ce qui vous est arrivé ?
Page 1645
1 R. Je l’ai déjà dit.
2 Q. Est-ce qu’il est exact que l’on vous a amenée
3 après l’interrogatoire dans une autre pièce ?
4 R. C’est exact.
5 Q. Après cet interrogatoire que vous avez vécu,
6 comment vous sentiez-vous ?
7 R. Je pense que je l’ai déjà dit.
8 Q. Veuillez répéter ça parce que moi, je ne peux
9 pas me souvenir de tout.
10 R. Comment voulez-vous que je me sente ?
11 J’étais meurtrie. J’étais minable. J’étais horrible.
12 J’étais à moitié morte.
13 Q. Donc, vous étiez à moitié morte. Vous avez
14 vu votre oncle pendant quelques secondes dans un groupe de
15 personnes et vous reconnaissez Zoran Vukovic ?
16 R. Je m’excuse. Il n’y a pas eu de viol. Cette
17 rencontre a eu lieu avant mon viol. Je pense que c’est
18 bien écrit dans ma déclaration.
19 Q. Si l’on vérifie ce que j’ai dit, moi, j’ai
20 parlé de « l’interrogatoire » et non pas du « viol ».
21 R. Eh bien, moi, j’avais répondu à la question
22 concernant comment je me sentais après le viol et non pas
23 après l’interrogatoire.
24 Q. Je pense que ce serait très utile si vous
25 prêtiez attention à mes questions. Je vous ai posé une
Page 1646
1 question : Comment vous sentiez-vous psychologiquement
2 après l’interrogatoire que vous avez subi concernant
3 l’existence des armes, l’endroit où se trouvaient les
4 hommes, et cætera, et cætera ?
5 R. J’étais choquée.
6 Q. Merci. Je n’ai que deux, trois questions
7 brèves concernant un événement ou plutôt la nuit au cours
8 de laquelle la mosquée Aladza a été détruite. Voici mes
9 questions.
10 Pendant cette nuit-là, on vous a conduite en
11 véhicule, en voiture jusqu’à l’appartement près de Aladza :
12 Est-ce exact ?
13 R. Oui.
14 Q. Zoran Vukovic était-il dans cette voiture ?
15 R. Je ne sais pas. Je ne m’en souviens pas.
16 Q. Est-ce que vous vous souvenez qui était dans
17 la voiture ?
18 R. Zaga et Gaga. Ça, je m’en souviens.
19 Q. Combien de vous, du Partizan ?
20 R. Quatre.
21 Q. Ça fait six ? Six personnes, je veux dire.
22 R. Je pense. Je ne sais pas avec exactitude.
23 Q. Il s’agissait de quel type de voiture ?
24 R. Je pense qu’on les appelait Pezeac. Il n’y
25 avait pas d’échappement.
Page 1647
1 Q. Puisque les juges, ni les collègues de la
2 Défense ne connaissent pas les voitures que l’on conduit
3 chez nous…
4 R. C’est Zaga qui la conduisait.
5 Q. Est-ce que vous diriez que c’est une grande
6 voiture ?
7 R. Non. Petite. J’ai oublié comment ça
8 s’appelle.
9 Q. Merci.
10 R. Je sais simplement que ça s’appelait Pezeac.
11 Q. Est-ce que c’était la première fois que vous
12 êtes allée à Aladza ?
13 R. Non.
14 Q. Merci. Je n’ai que quelques autres
15 questions, si vous êtes d’accord, concernant l’appartement
16 dans lequel, comme vous le dites, vous avez été détenue.
17 Lorsque vous employez le terme « amené », quand vous
18 dites : « Radomir Kovac a amené Zoran Vukovic », est-ce que
19 vous voulez dire qu’ils sont venus ensemble tous les deux ?
20 R. Je ne sais pas. Je ne m’en souviens pas.
21 Q. Vous ne vous souvenez pas s’ils sont venus
22 ensemble dans l’appartement à ce moment-là ?
23 R. Je ne m’en souviens pas.
24 Q. Très bien. Pourquoi étiez-vous dans la
25 cuisine ? Est-ce qu’on vous a donné l’ordre d’y être ?
Page 1648
1 Qui vous a donné l’ordre dans ce cas-là ou bien comment ?
2 R. Certainement pas de mon propre gré. Demandez
3 à Klanfa. Il sait très bien.
4 Q. C’est ce qui me pousse à conclure que c’est
5 lui qui vous a donné l’ordre d’aller dans la cuisine ?
6 R. C’est exact.
7 Q. Il vous a donné l’ordre d’aller dans la
8 cuisine avec Zoran Vukovic ?
9 R. C’est exact.
10 Q. Très bien. Est-ce que vous vous souvenez par
11 hasard quels sont les mots qu’il a prononcés à ce moment-là
12 ?
13 R. Non, je ne m’en souviens pas.
14 Me JOVANOVIC (interprétation) : Madame la
15 Présidente, je pose ces questions puisque dans la partie de
16 sa déclaration, lorsque le témoin parle des circonstances
17 dans lesquelles Zoran Vukovic s’est présenté lui-même en
18 tant que personne qui a tué son oncle, le témoin a dit :
19 « Je crois que c’était après qu’il a entendu mon nom. »
20 C’est justement pour cela que je pose ces questions, pour
21 savoir à quel moment et comment Zoran Vukovic a appris que
22 cette personne qui était devant lui était la cousine de
23 cette autre personne.
24 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Oui.
25 Me JOVANOVIC (interprétation) :
Page 1649
1 Q. Si j’ai bien compris, vous ne vous souvenez
2 pas que Radomir Kovac vous a dit à peu près : « Madame XY,
3 toi, tu vas aller dans la cuisine maintenant avec
4 Vukovic », et ce en employant votre prénom et votre nom,
5 permettant à Vukovic de vous identifier ?
6 R. Je ne sais pas. Je ne m’en souviens pas.
7 Q. Lorsque vous êtes entrée dans la cuisine,
8 est-ce que vous vous êtes présentée à Zoran Vukovic ?
9 R. Je ne m’en souviens pas non plus.
10 Q. Très bien !
11 Me JOVANOVIC (interprétation) : À la page 1450,
12 lignes 23 et 25, Madame la Présidente, l’on y parle de la
13 conversation qui a eu lieu entre l’accusé et le témoin.
14 Q. Si j’ai bien compris, vous parlez des
15 personnes vivantes et des personnes mortes ?
16 R. C’est exact.
17 Q. Après cela, la conversation commence à
18 concerner directement le détail du meurtre de votre cousin
19 ?
20 R. C’est exact.
21 Q. Zoran Vukovic s’identifie lui-même en tant
22 que personne qui a tué votre oncle en tirant sur lui ?
23 R. En ce qui concerne tous les détails de cet
24 événement, je ne m’en souviens pas. Tout ce dont je me
25 souviens, c’est le détail lorsqu’il a dit qu’il est venu
Page 1650
1 jusqu’à la Drina et qu’à ce moment-là, il a tiré sur lui
2 quand l’autre a commencé à courir en entrant dans la
3 rivière, mais je ne me souviens pas d’autres détails.
4 Q. Est-ce que vous savez qu’il ne l’a pas tué en
5 tirant sur lui ?
6 R. Ah oui, certainement pas. Il est
7 certainement resté vivant. Je suppose qu’il nous aurait
8 contactés entre-temps.
9 Q. Je ne parle pas de la question de savoir si
10 votre cousin est vivant ou mort mais je voulais savoir si
11 vous êtes au courant du fait que la mort de votre cousin a
12 été provoquée différemment.
13 R. Je ne me souviens pas.
14 Q. Je vais vous rafraîchir la mémoire. À la
15 même page de la même déclaration, vous dites que vous savez
16 que votre oncle a été égorgé. Il s’agit d’un acte
17 extrêmement brutal.
18 R. Je n’ai pas déclaré. C’est ce que j’ai
19 supposé parce que lorsque j’ai entendu à Buk Bijela à quel
20 point il hurlait, il criait, tout d’abord, il tabassait
21 tellement, donc c’est ce que j’ai supposé et c’est ce que
22 j’ai dit. Je suppose qu’il est égorgé puisque sept ou huit
23 autres des nôtres ont déjà été égorgés. C’est pour cela
24 que je l’ai supposé.
25 Me JOVANOVIC (interprétation) : Madame la
Page 1651
1 Présidente, il s’agit vraiment ici de situations étranges.
2 Permettez-moi que je vous explique la raison pour laquelle
3 je pose une question concernant la manière dont le cousin
4 du témoin est mort. Ceci ne prendra pas beaucoup de temps.
5 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Allez-y.
6 Me JOVANOVIC (interprétation) : Merci. La raison
7 pour laquelle je pose ces questions est la chose suivante.
8 Le témoin, quoi qui se soit réellement passé, nous parle de
9 brutalités qui ont eu lieu soi-disant pour que nous tous
10 qui l’écoutons puissions nous faire une idée de ce qui
11 s’est passé. C’est justement pour cette raison que je lui
12 pose cette question et je voudrais rappeler au témoin une
13 déclaration qu’elle a donnée et qu’elle confirme. Il
14 s’agit de la pièce à conviction numéro 24, je crois. Il
15 s’agit de la déclaration qui a été donnée en 1995.
16 Q. À la fin de votre déclaration, vous dites :
17 « Alors, pendant que l’on me violait, j’ai entendu mon
18 oncle crier à l’extérieur puis ensuite, j’ai entendu un tir
19 et le silence. À ce moment, j’ai compris qu’il avait été
20 tué. »
21 Donc, à ce moment-là, vous avez compris, vous
22 savez qu’il a été tué par une arme à feu et ultérieurement,
23 vous savez qu’il a été tué parce qu’on l’a égorgé ?
24 R. Je n’ai pas dit que je le savais. Je suis
25 partie de ce principe. C’est ce que j’ai pensé à cause des
Page 1652
1 hurlements que j’ai entendus parce qu’il y avait tout le
2 temps des cris et des hurlements. Il n’y avait pas que lui
3 et ça ne se passait pas qu’à ce moment-là.
4 Q. Merci. Vous conviendrez qu’il est assez
5 douloureux de parler des gens qui sont encore en vie, de
6 ceux qui ont trouvé la mort et surtout de quelqu’un qui a
7 été tué dans les circonstances où a été tué votre oncle et
8 dont vous nous dites donc que c’était des circonstances
9 d’une très grande brutalité. J’estime que ça ne vous
10 faisait pas tellement plaisir d’en parler ?
11 R. Bien évidemment. Qu’est-ce que vous vouliez
12 que je fasse ? J’aurais dû chanter peut-être et me
13 réjouir.
14 Q. Sur la base de votre déclaration, il me
15 semble que Zoran Vukovic, lui, ne semblait pas se sentir
16 très bien non plus, si bien qu’il a eu besoin de votre
17 assistance pour pouvoir vous violer ?
18 R. Oui, c’est exact.
19 Q. Est-ce que vous diriez que Zoran Vukovic est
20 un massacreur, un tueur, un violeur sujet à des émotions ?
21 R. Oui.
22 Q. Plusieurs fois à ce jour, vous nous avez dit,
23 vous avez confirmé que vous vous souveniez mieux des
24 événements précédemment qu’aujourd’hui, ce qui est tout à
25 fait normal, n’est-ce pas ?
Page 1653
1 R. Oui.
2 Q. À ce moment-là, je voudrais que vous nous
3 expliquiez pourquoi, dans le cas de Zoran Vukovic et
4 uniquement en ce qui concerne Zoran Vukovic, on constate
5 que votre mémoire s’améliore au fil du temps. Plus de
6 temps s’écoule, plus vous vous souvenez de choses.
7 R. Je ne crois pas que ce soit exact. Au fil du
8 temps, j’essaie d’oublier. J’essaie d’effacer de ma
9 mémoire ce que j’ai vécu.
10 Q. Oui, mais jusqu’en 1999, on ne voit jamais
11 Zoran Vukovic dans vos déclarations, il n’y apparaît
12 absolument pas ou il n’apparaît que dans une seule phrase,
13 mais plus tard, vous dites qu’il vous a violée, qu’il a
14 reconnu devant vous qu’il était un meurtrier, et cætera.
15 R. C’est exact. Peut-être qu’au moment où je me
16 suis entretenue avec je ne sais plus qui, peut-être que je
17 ne me souvenais pas de tous les détails parce qu’il y a
18 beaucoup de détails dont je me souvenais mais que je n’ai
19 pas mentionnés quand on m’a interrogée.
20 Q. Le nom de « Zoran Vukovic », est-ce que cela
21 suscite en vous une réaction émotionnelle particulière ?
22 R. Pas seulement celui de Zoran Vukovic, celui
23 de tous les autres.
24 Q. Oui, mais moi, ma question se rapporte à
25 Zoran Vukovic.
Page 1654
1 R. Oui. Le simple fait de penser à lui me rend
2 malade.
3 Me JOVANOVIC (interprétation) : Avant de poser ma
4 dernière question, je voudrais faire une petite remarque.
5 C’est qu’en plus de Zoran Vukovic qui a été accusé dans ce
6 procès, le témoin a mentionné un autre Zoran Vukovic
7 surnommé Kifla si je me souviens bien.
8 R. C’est exact.
9 Me JOVANOVIC (interprétation) : Donc, ma question
10 est la suivante : Zoran Vukovic, alias Kifla, avant que
11 l’on ne prononce son nom ici, ce nom n’apparaît qu’une
12 seule fois dans les déclarations du témoin et le témoin
13 l’identifie comme étant une personne dont elle l’a vu
14 entrer par effraction dans une maison musulmane afin de la
15 piller, mais ici lors de l’audience, le témoin nous dit que
16 c’est ce même Zoran Vukovic, alias Kifla, qui est entré par
17 effraction dans la maison où elle se trouvait, l’a violée,
18 l’a emmenée chez sa mère où il l’a violée de nouveau.
19 Donc, ma question est de savoir si le nom de Zoran
20 Vukovic et le simple fait de mentionner ce nom n’ont pas
21 des conséquences un peu inexplicables sur le témoin.
22 Q. Ce Zoran Vukovic, alias Kifla, vous ne l’avez
23 jamais mentionné jusqu’à il y a deux jours ?
24 R. Je pense que si.
25 Me JOVANOVIC (interprétation) : Je n’ai plus de
Page 1655
1 questions.
2 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Avez-vous
3 d’autres questions à poser, Madame Uertz-Retzlaff ?
4 Me UERTZ-RETZLAFF (interprétation) : Oui, Madame
5 la Présidente.
6 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Allez-y.
7 RÉINTERROGÉE PAR Me UERTZ-RETZLAFF
8 (interprétation) :
9 Q. Ma première question a trait à la pièce à
10 conviction de la Défense numéro 29. Madame le Témoin, vous
11 souvenez-vous qu’avant l’arrestation de Zoran Vukovic, vous
12 avez été appelée par un enquêteur du Tribunal au téléphone
13 ?
14 R. Je crois en effet m’en souvenir.
15 Q. Est-ce qu’à ce moment-là, il vous a posé des
16 questions au sujet de ce que vous saviez sur Zoran Vukovic
17 ?
18 R. Je crois qu’oui, en effet.
19 Q. Avez-vous vu ou parlé des notes qu’a prises
20 l’enquêteur suite à la conversation qu’il a eue ainsi avec
21 vous ? Est-ce que vous avez, par exemple, signé, apposé
22 votre signature au bas de ces notes ?
23 R. Je ne sais pas. Je ne me souviens pas. Je
24 crois qu’on s’est parlé au téléphone. J’ai parlé au
25 téléphone avec quelqu’un, mais je ne me souviens pas.
Page 1656
1 Q. Ma question suivante a trait à la pièce à
2 conviction de la Défense numéro 30. Madame le Témoin, vous
3 souvenez-vous qu’en mars 2000, vous avez rencontré des
4 enquêteurs du Tribunal à Sarajevo au Bureau du Procureur à
5 Sarajevo ?
6 R. Oui.
7 Q. Vous souvenez-vous de la raison de cette
8 rencontre ?
9 R. Je ne sais pas exactement.
10 Q. S’agissait-il de questions administratives
11 relatives à vos déplacements et d’autres choses relatives à
12 vous-même ?
13 R. Oui.
14 Q. En dehors de vous-même et des enquêteurs, qui
15 était présent à cette réunion ?
16 R. Qui était là ? Je ne sais pas. Vous me
17 demandez…
18 Q. Est-ce que vous vous souvenez que celui qui
19 allait devenir votre mari était présent ?
20 R. Oui.
21 Q. En la présence de votre futur mari, est-ce
22 que nous avons parlé à aucun moment d’agression sexuelle ?
23 R. Oui, je crois qu’on en a effectivement parlé.
24 Q. Je vous demande d’essayer de vous souvenir ce
25 qui s’est passé à ce moment-là. Vous souvenez-vous que
Page 1657
1 nous avons parlé de Zoran Vukovic, alias Kifla ?
2 R. Oui, je m’en souviens.
3 Q. Et est-ce que nous avons parlé de l’accusé,
4 de Zoran Vukovic l’accusé ?
5 R. Oui. Je crois qu’oui. Je crois qu’on en a
6 parlé.
7 Q. Vous a-t-on demandé de raconter les viols
8 commis par ces deux hommes à ce moment-là, alors qu’était
9 présent votre futur mari ?
10 R. Je ne pense pas.
11 Me UERTZ-RETZLAFF (interprétation) : Madame la
12 Présidente et Messieurs les Juges, je souhaite vous
13 signaler que dans le document D30, on ne fait référence à
14 aucun moment à des agressions de type sexuel.
15 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Merci.
16 Me UERTZ-RETZLAFF (interprétation) :
17 Q. Au début du contre-interrogatoire, le conseil
18 de la Défense Me Prodanovic a fait référence à deux
19 déclarations que vous avez données à l’Accusation. Il a
20 fait référence à une déclaration que vous avez donnée aux
21 autorités de Bosnie et ces déclarations, en dehors du jour
22 où vous les avez données et vous les avez signées, je
23 voudrais savoir si on vous a jamais donné à lire ces
24 déclarations afin que vous puissiez les examiner et les
25 étudier.
Page 1658
1 R. Non, jamais.
2 Q. Dans le contre-interrogatoire quand vous avez
3 parlé du gymnase Partizan, vous avez dit que certaines
4 femmes arrivaient à se glisser dehors pour aller acheter du
5 pain. Est-ce qu’elles sortaient en secret ou est-ce
6 qu’elles parlaient auparavant avec les gardes ?
7 R. Elles parlaient aux gardes. Elles leur
8 demandaient si elles pouvaient aller acheter du pain pour
9 les enfants.
10 Q. Est-ce que tous les gardes leur permettaient
11 de sortir ou est-ce que c’était uniquement le cas de ceux
12 dont vous nous avez dit qu’ils étaient bons et qu’ils vous
13 ont protégées ?
14 R. Uniquement les deux dont j’ai parlé qui nous
15 ont protégées.
16 Q. Ces femmes qui sortaient ainsi du gymnase,
17 est-ce que c’était des jeunes filles ?
18 R. En fait, il n’y avait qu’une seule femme qui
19 ait vraiment sorti. Elle, elle avait deux enfants. Elle
20 ramenait cinq ou six pains pour tout le monde.
21 Q. S’agit-il d’une des femmes dont le nom figure
22 sur la liste ?
23 R. Oui.
24 Q. Laquelle ?
25 R. Le numéro 95.
Page 1659
1 Q. Lors du contre-interrogatoire mené par Me
2 Kolesar, vous nous avez parlé en détail de votre séjour
3 dans l’appartement de Klanfa et on a parlé de la façon dont
4 les uns et les autres dormaient et avec qui, et je voudrais
5 savoir si l’une des jeunes filles ou plusieurs des jeunes
6 filles ont volontairement voulu dormir avec Radomir Kovac,
7 en a exprimé le souhait.
8 R. Non, c’est impossible. Je n’aurais jamais pu
9 faire ça. Un Chetnik qui avait tué mon propre frère, mon
10 frère de 20 ans, coucher volontairement avec un tel homme,
11 même si j’étais morte, je ne l’aurais jamais fait.
12 Q. Est-ce que les jeunes filles qui étaient avec
13 vous, est-ce que vous-mêmes vous pouviez prendre des
14 décisions quant à l’endroit où vous vous trouviez ? Est-ce
15 que vous pouviez décider d’aller ailleurs et décider avec
16 qui vous dormiez ?
17 R. Non.
18 Q. Qui prenait ce genre de décision ?
19 R. Eh bien eux, bien entendu ! Qui voulez-
20 vous ? Klanfa et son acolyte, Jagos.
21 Q. Vous nous avez dit qu’à un certain moment,
22 Klanfa s’est trouvé au KP Dom. Est-ce que vous savez quand
23 et pour quelle raison ?
24 R. Pourquoi ? Mais je ne peux pas vous dire
25 exactement. Je sais juste qu’il a été emprisonné et sans
Page 1660
1 doute pas parce qu’il avait quelque chose de bien. Et puis
2 quand cette femme âgée est entrée de force dans notre
3 appartement pour nous en chasser, à ce moment-là, Gojko
4 Jankovic est venu pour la chasser, lui à son tour, et il a
5 dit que Klanfa était en prison, il a hurlé, il a interpellé
6 cette femme, il lui a dit : « Et tu crois que Klanfa
7 sortira jamais de prison ? », et c’est ainsi que j’ai su
8 qu’il était au KP Dom à Foca.
9 Q. Et lorsqu’il est revenu, est-ce qu’il vous a
10 parlé de la raison pour laquelle il avait été emprisonné ?
11 R. Non. Je ne m’en souviens pas.
12 Me UERTZ-RETZLAFF (interprétation) : Je n’ai plus
13 de questions, Madame la Présidente.
14 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Merci.
15 Merci, Madame le Témoin, d’être venu déposer
16 devant cette Chambre. Vous pouvez maintenant quitter le
17 prétoire.
18 [Le témoin se retire]
19 Me UERTZ-RETZLAFF (interprétation) : Madame la
20 Présidente, nous avons maintenant un nouveau témoin que
21 nous allons interroger. Je pense qu’il serait peut-être
22 utile de faire la pause maintenant parce qu’il va falloir
23 prendre des dispositions techniques pour entendre ce témoin
24 suivant.
25 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Oui, en
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1 effet. Donc, il convient de prendre certains arrangements
2 techniques.
3 Je suis en train de regarder l’horloge, et donc,
4 nous allons faire la pause et nous reprendrons nos travaux
5 à 11 h 20 ici même.
6 — Suspension de l’audience à 10 h 50
7 — Reprise de l’audience à 11 h 20
8 [Le témoin entre dans la Cour]
9 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Bonjour,
10 Madame le Témoin. Je vais vous demander de prononcer la
11 déclaration solennelle.
12 LE TÉMOIN (interprétation) : Je déclare
13 solennellement que je dirai la vérité, toute la vérité et
14 rien que la vérité.
15 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Merci.
16 TÉMOIN : TÉMOIN 87 (ASSERMENTÉE)
17 INTERROGÉE PAR Me KUO
18 (interprétation) :
19 Me KUO (interprétation) : Je souhaiterais que
20 l’on montre au témoin la pièce à conviction 192 qui a été
21 également remise aux juges et à la Défense.
22 Q. Madame le Témoin, sur la pièce à conviction
23 192, est-ce que vous pouvez voir votre nom ?
24 R. Oui.
25 Q. À côté de votre nom, est-ce que vous voyez un
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1 numéro ?
2 R. Oui.
3 Q. Numéro 87 ?
4 R. Oui.
5 Q. Pendant les débats qui vont suivre, nous
6 parlerons de vous en utilisant ce nombre : 87. Comprenez-
7 vous ?
8 R. Oui.
9 Me KUO (interprétation) : Peut-on demander au
10 témoin de s’approcher du micro ?
11 Q. En dessous de votre nom, est-ce que vous
12 pouvez voir votre date de naissance ?
13 R. Oui.
14 Q. Et à la ligne de dessous, est-ce que vous
15 voyez le nom de votre père ?
16 R. Oui.
17 Q. Et à la ligne suivante, celui de votre mère ?
18 R. Oui.
19 Q. Et enfin, le nom de votre sœur ?
20 R. Oui.
21 Q. Pouvez-vous nous dire quelles sont les
22 initiales qui figurent à côté du nom de votre sœur ?
23 R. DB.
24 Q. Merci. Madame le Témoin, quel âge avez-
25 vous ?
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1 R. J’ai 23 ans et demi.
2 Q. En avril 1992, quel âge aviez-vous ?
3 R. J’avais à peu près 15 ans et demi.
4 Q. Où êtes-vous né ?
5 R. À Foca.
6 Q. Et où viviez-vous à l’époque ?
7 R. À Trosanj.
8 Q. Est-ce que vous habitez dans un quartier bien
9 précis de Trosanj ?
10 R. À Trosanj.
11 Q. Est-ce que c’est un endroit où habitaient à
12 la fois des Serbes et des musulmans ?
13 R. Trosanj n’était habité que de musulmans.
14 Enfin, je parle de la partie qui va jusqu’à la route, et
15 Mjesaja, vous aviez là aussi bien des Serbes que des
16 musulmans.
17 Q. Quelle est votre appartenance ethnique ?
18 R. Musulmane.
19 Q. En 1992, avec qui viviez-vous ?
20 R. Avec ma mère, mon père, ma sœur et mon frère.
21 Q. Quel âge avait votre frère ?
22 R. Il avait 10 ans.
23 Q. Quel âge avait votre sœur ?
24 R. Il faut que je fasse le calcul.
25 Q. Est-ce qu’elle était plus jeune ou plus
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1 vieille que vous ?
2 R. Elle était plus vieille de quatre ans.
3 Q. En 1992, est-ce que vous alliez toujours à
4 l’école ?
5 R. Oui.
6 Q. En quelle classe étiez-vous ?
7 R. J’étais à l’école secondaire, la deuxième
8 classe de l’école secondaire.
9 Q. Et où alliez-vous à l’école ?
10 R. C’était au lycée Nikola Tesla à Foca.
11 Q. Est-ce que c’est l’établissement scolaire qui
12 se trouve dans le quartier Aladza de Foca ?
13 R. Oui.
14 Q. Savez-vous quand la guerre s’est déclarée à
15 Foca ?
16 R. Je crois que c’est le 8 avril mais je ne suis
17 pas tout à fait sûre.
18 Q. À ce moment-là, est-ce que vous avez été en
19 mesure de voir ou d’entendre quoi que ce soit de
20 particulier ?
21 R. Oui. Oui. On a entendu des tirs, des
22 explosions. Parfois, il y avait des maisons qui étaient
23 incendiées. Enfin, on voyait ce genre de choses.
24 Q. Est-ce que vous avez vu des soldats ?
25 R. Je n’ai pas vu de soldats jusqu’au 3 juillet
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1 à peu près.
2 Q. Avant le 3 juillet, dans quelle mesure étiez-
3 vous affectée par la guerre ? Est-ce que vous avez
4 continué à aller à l’école ?
5 R. Non. Non. Il n’y avait plus d’école. Je
6 crois que ça s’est passé au début avril.
7 Q. Est-ce que vous êtes restée chez vous ? Est-
8 ce que vous avez continué à habiter dans votre maison ?
9 R. Pendant une très brève période parce
10 qu’ensuite, on a dû aller se cacher dans les bois.
11 Q. Et pourquoi avez-vous dû aller vous cacher
12 dans les bois ?
13 R. Parce qu’on avait peur. On avait peur d’être
14 tué ou que quelque chose nous arrive.
15 Q. Est-ce que vous aviez le sentiment que l’on
16 vous visait vous tout particulièrement parce que vous étiez
17 des musulmans ?
18 R. Oui.
19 Q. Et quand vous étiez dans les bois, qui était
20 avec vous ?
21 R. Ma famille et puis deux autres familles
22 aussi. C’était au début ça, parce que plus tard, peu de
23 temps avant que l’on ne soit attaqué, en fait, il y avait
24 plusieurs familles qui constituaient un groupe.
25 Q. Et ces gens qui étaient avec vous dans les
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1 bois, quelle était leur appartenance ethnique ?
2 R. C’était tous des musulmans.
3 Q. Quand votre village a-t-il été attaqué ?
4 R. Le 3 juillet 1992.
5 Q. Vous souvenez-vous à quel moment de la
6 journée cela s’est produit ?
7 R. Je ne peux pas vous dire l’heure exacte.
8 Enfin, disons que c’était très, très tôt le matin, vers 6 h
9 00 du matin.
10 Q. Et où vous trouviez-vous quand le village a
11 été attaqué ?
12 R. Nous dormions sous une tente dans les bois.
13 Q. Qu’avez-vous entendu ?
14 R. Nous avons entendu des tirs.
15 Q. Qu’avez-vous fait ?
16 R. Eh bien, quand nous avons entendu les tirs,
17 tout le monde a paniqué et puis les gens ont commencé à
18 fuir mais personne ne savait trop bien où aller, dans
19 quelle direction, et quand le premier homme a été touché ou
20 plutôt blessé, à ce moment-là, nous avons été pris de
21 terreur.
22 Q. Est-ce que vous avez vu qui avait tiré ?
23 R. Au début, non. Par la suite, en très peu de
24 temps, j’ai pu voir.
25 Q. Qui a tiré ?
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1 R. Il s’agissait des soldats qui portaient des
2 uniformes de camouflage. Je savais qu’il s’agissait des
3 Serbes.
4 Q. Est-ce que vous avez reconnu l’un d’eux ?
5 R. Pas au premier moment. Je n’ai pas regardé.
6 Ce n’est que plus tard.
7 Q. Est-ce que maintenant, vous vous en
8 souvenez ? Est-ce que vous savez qui étaient ces soldats ?
9 R. Ce matin, et actuellement, je me souviens
10 uniquement d’un seul soldat en ce qui concerne ce premier
11 matin et je ne pourrais pas me souvenir des autres.
12 Q. Est-ce que vous pouvez me dire quel est le
13 nom dont vous vous souvenez ?
14 R. Est-ce que je dois prononcer le nom ?
15 Q. Le nom du soldat. Oui, vous pouvez le
16 prononcer.
17 R. C’était Jagos Kostic.
18 Q. Vous avez également dit qu’il y avait un
19 homme qui a été touché. Est-ce que vous avez vu qu’il y en
20 avait d’autres qui ont été touchés ?
21 R. Oui. J’ai vu trois hommes, trois personnes
22 qui ont été tuées, pas touchées mais tuées. Il y avait un
23 homme, un homme âgé, et puis deux femmes.
24 Q. Est-ce que vous savez approximativement quel
25 était l’âge de cet homme ?
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1 R. Je ne sais pas exactement. Peut-être 50 ans.
2 Q. Et qu’est-ce que vous avez vu encore et
3 qu’est-ce que les soldats ont fait ?
4 R. Au moment où ils ont commencé à tirer, nous,
5 on essayait de s’enfuir et eux, ils nous couraient après.
6 Ensuite, ils ont encerclé un groupe. Ils ont frappé des
7 hommes. Ils leur ont demandé de dire où se trouvaient des
8 armes, où ils avaient caché des armes. C’est quelque chose
9 dans ce sens-là.
10 Q. Est-ce que vous-mêmes vous avez eu des armes,
11 vous qui étiez dans les bois ?
12 R. Non.
13 Q. Est-ce que votre père était parmi ces hommes
14 qui ont été frappés ?
15 R. Oui.
16 Q. Et qu’est-ce que les soldats ont fait après ?
17 R. Vous pensez à après ? Quand après ?
18 Q. Oui.
19 R. Ils ont séparé les hommes des femmes.
20 Ensuite, ils nous ont fait sortir du bois et ils nous ont
21 demandé de nous rendre, de descendre vers un champ. Ce
22 n’était pas très loin. Et puis, ils nous ont alignés. Ils
23 nous ont demandé si on avait de l’or, si on avait de
24 l’argent sur nous et à peu près des questions de ce type-
25 là. Ils ont trouvé sous les tentes nos documents, des
Page 1669
1 photographies également qu’on avait, et puis ensuite, ils
2 nous ont montré des photographies, ils nous ont demandé qui
3 c’était les personnes qui figuraient sur les photos, et
4 cætera, voilà, où se trouvaient-elles. Voilà !
5 Q. Mais en ce qui concerne ce champ, ce pré où
6 vous vous trouviez, il y avait des femmes et des enfants ou
7 bien il y avait des hommes également ?
8 R. En gros, c’était des femmes et des enfants.
9 Les hommes n’étaient pas avec nous. On les a mis à
10 l’écart. Si mes souvenirs sont bons, ils étaient séparés.
11 Ils n’étaient pas dans la même ligne avec nous. Ils
12 étaient séparés, ça, je m’en souviens. Ça, c’est sûr.
13 Q. Est-ce que vous avez appris ce qui s’était
14 passé avec des hommes par la suite ?
15 R. Après, on nous a dit qu’ils allaient nous
16 emmener quelque part. Enfin, ils avaient dit qu’ils
17 allaient emmener les femmes et les enfants, et puis, on
18 n’était pas très loin par rapport à ce champ quand nous
19 avons entendu les tirs. Je pense que – ça, c’est mon point
20 de vue – que ces hommes ont été tués à ce moment-là.
21 Q. Est-ce que vous avez revu votre père ?
22 R. Non.
23 Q. Et où est-ce qu’on a emmené les femmes et les
24 enfants par la suite ?
25 R. Nous avons été emmenés à Buk Bijela.
Page 1670
1 Q. Quand vous dites « Buk Bijela », est-ce que
2 vous pensez à un village, à une agglomération très
3 précise ?
4 R. Buk Bijela est une autre désignation. Buk
5 Bijela ou Mjesaja. Buk Bijela est connue… je ne sais pas
6 comment vous expliquer. Il y avait un hôtel ou c’était une
7 pension, un motel, je ne me souviens pas exactement, qui
8 était désigné comme ça, mais je sais qu’avant la guerre,
9 c’est à cet endroit-là qu’on avait organisé l’entraînement
10 militaire ou quelque chose de ce type-là, enfin, de ce
11 genre-là. Buk Bijela, c’était un motel ou un hôtel.
12 Enfin, je ne peux pas vous le dire exactement.
13 Me KUO (interprétation) : Je vais demander à
14 l’Huissier maintenant de nous aider pour montrer la pièce à
15 conviction numéro 11. Il s’agit des photographies qui sont
16 numérotées 7415 et 7416.
17 Q. Est-ce que vous reconnaissez la photographie
18 7415 ?
19 R. Je ne suis pas sûre.
20 Q. Pourriez-vous maintenant voir la photographie
21 7416 ?
22 R. Non, je ne peux pas être sûre.
23 Q. Merci. Qu’est-ce qu’on vous a dit que vous
24 deviez faire une fois quand vous êtes arrivée à Buk Bijela
25 ?
Page 1671
1 R. Tout d’abord, on a été aligné, on a été
2 aligné contre un mur et c’est là où on nous a demandé
3 d’attendre. Je ne sais pas ce qu’il fallait attendre
4 d’ailleurs et pourquoi, mais de toute façon, il y avait un
5 certain nombre de personnes qu’ils sont venus chercher et
6 puis on les a passées aux interrogatoires. C’est ce qu’on
7 avait dit.
8 Q. Quand vous dites « ils », vous pensez à qui ?
9 R. Je pense aux soldats serbes.
10 Q. Comment ils les faisaient sortir ?
11 R. Bien, c’est tout simplement qu’ils venaient,
12 ils appelaient les noms. Au début, c’était deux personnes,
13 deux noms.
14 Q. Est-ce que vous-même, vous avez été emmenée à
15 ce moment-là pour l’interrogatoire ?
16 R. Moi, j’ai été emmenée mais pas pour
17 l’interrogatoire.
18 Q. Qui vous a emmenée ?
19 R. Je ne connaissais pas cet homme auparavant,
20 mais je sais qu’il répondait au nom Pero. Je ne connais
21 pas son nom de famille. C’était son prénom. Il m’a
22 emmenée dans une pièce. C’est une chambre, une pièce. Je
23 pense que je peux appeler ça comme ça. D’abord, il ne m’a
24 pas appelée par mon nom. Il est venu tout simplement me
25 chercher. Il m’a prise par la main et puis il m’a emmenée
Page 1672
1 dans cet endroit-là.
2 Q. Est-ce qu’il vous a dit pourquoi, pourquoi il
3 vous emmène ?
4 R. Non, non, il ne m’a rien dit.
5 Q. Qu’est-ce qu’il vous a dit quand il vous a
6 emmenée dans cette pièce ?
7 R. Au moment où il m’a emmenée dans cette pièce,
8 il m’a tout simplement demandé d’abord d’enlever mes
9 vêtements. Moi, je n’ai pas refusé tout de suite, je ne
10 l’ai pas dit tout au moins, mais je n’ai pas enlevé mes
11 vêtements et c’est à ce moment-là que c’est lui qui a
12 enlevé mes vêtements et ensuite, il m’a violée.
13 Q. Pourriez-vous, s’il vous plaît, nous décrire
14 ce qu’il a fait exactement ?
15 R. C’est pénible pour moi. Il y avait le
16 rapport sexuel et contre ma volonté, il a eu ce rapport
17 sexuel avec moi. Voilà, c’est ça.
18 Q. Est-ce qu’il a placé son pénis dans votre
19 vagin ?
20 R. Oui.
21 Q. Qu’est-ce qu’il a fait après ça ?
22 R. Je ne m’en souviens pas. Je ne me souviens
23 pas des détails mais je pense qu’il y avait quelqu’un
24 d’autre qui se trouvait devant la porte et qui m’a emmenée
25 de nouveau dans un bureau où se trouvaient d’autres jeunes
Page 1673
1 filles ou plutôt dans la ligne parmi les autres filles.
2 Q. Qu’est-ce qui s’est passé une fois quand vous
3 avez été ramenée dans cette ligne ?
4 R. Je ne pense pas que quoi que ce soit se soit
5 passé. Je pense que, de toute façon, je ne comprenais plus
6 rien. Je ne savais pas ce qui se passait autour de moi.
7 Ensuite, il y a deux autres personnes qui sont arrivées peu
8 après et qui m’ont appelée par mon nom et puis une autre
9 personne également a été appelée, enfin, un autre nom et on
10 nous a convoquées, on nous a demandé d’aller assister à cet
11 interrogatoire.
12 Q. Cette autre personne, c’était votre sœur ?
13 R. Oui.
14 Q. Qu’est-ce qui s’est passé avec vous quand
15 vous avez été emmenée de nouveau à l’endroit où on vous a
16 emmenée ?
17 R. On m’a emmenée dans une pièce. Ce n’était
18 pas une grande pièce mais c’en était une petite. Il y
19 avait un lit, il y avait une table, il y avait quelques
20 chaises. Je pense qu’il y avait quatre soldats qui s’y
21 trouvaient déjà mais il y avait tout le temps quelqu’un qui
22 rentrait et d’autres qui sortaient.
23 Q. Est-ce que vous savez qui étaient ces quatre
24 soldats ? Est-ce que vous vous en souvenez ?
25 R. Je ne connaissais pas avant tous ces soldats-
Page 1674
1 là mais je connaissais le nom d’un soldat. L’autre
2 également, je le reconnaissais. Je ne connaissais pas le
3 nom mais je le reconnaissais par physionomie et les deux
4 derniers sur quatre, je ne les connaissais pas du tout.
5 Q. Est-ce que vous pouvez nous dire maintenant
6 les noms des soldats que vous connaissiez ?
7 R. Dragan Zelenovic, surnommé Zelja, et l’autre,
8 je pense, Miletic.
9 Q. Qu’est-ce qu’ils ont fait quand ils vous ont
10 emmenée dans cette chambre ?
11 R. D’abord, ils m’ont interrogée.
12 Q. Quel type de questions ?
13 R. Ils m’ont demandé d’abord sur d’autres
14 villageois de Trosanj et ils m’ont demandé où les
15 villageois cachaient des armes, si je connaissais les
16 endroits où d’autres villageois de Trosanj éventuellement
17 pouvaient s’enfuir et où ils pouvaient éventuellement se
18 cacher. Ensuite, on m’a demandé quel âge j’avais et si
19 j’allais à l’école.
20 Q. Est-ce que vous avez répondu à ces questions
21 ?
22 R. Pour ce qui est des premières questions, je
23 ne pouvais pas donner la réponse parce que je n’étais pas
24 au courant et j’ai répondu à la dernière question, quand
25 ils m’ont demandé quel âge j’avais et si j’allais à l’école
Page 1675
1 ou non.
2 Q. Est-ce qu’ils vous ont demandé encore quelque
3 chose d’autre sur vous-même ?
4 R. Ils m’ont demandé si j’étais vierge. Là-
5 dessus, j’ai dit que je l’étais quelques moments
6 auparavant, quelque chose dans ce sens-là.
7 Q. Quelle était la réaction de ces soldats quand
8 vous avez répondu à cette question ?
9 R. Je ne m’en souviens pas.
10 Q. Qu’est-ce qu’ils ont fait ?
11 R. Zelenovic m’a demandé d’enlever mes vêtements
12 et comme moi, je ne l’ai pas fait, c’est lui qui l’a fait.
13 Ensuite, il m’a violée. Ensuite, c’est Miletic également
14 qui m’a violée et puis deux autres dont les noms, j’ignore.
15 Q. Qu’est-ce qui s’est passé après ce viol ?
16 R. Je ne me souviens pas exactement. Je ne sais
17 pas qui m’a fait sortir dehors jusqu’au car. Il y avait
18 d’autres personnes qui s’y trouvaient déjà. Je sais que ma
19 mère était à l’extérieur encore. Elle ne voulait pas
20 partir avant que j’arrive et au moment où je suis arrivée,
21 je suis montée dans le car et c’est là où on nous a
22 emmenées jusqu’au lycée.
23 Q. Est-ce que vous avez dit à votre mère ce qui
24 vous est arrivé ?
25 R. Non.
Page 1676
1 Q. Pourquoi pas ?
2 R. À ce moment-là, je n’avais pas de force et je
3 ne pouvais même pas la regarder droit dans les yeux et pas
4 uniquement elle, mais personne d’autre.
5 Q. Comment vous sentiez-vous à ce moment précis
6 ?
7 R. C’est très dur de l’expliquer, de l’exprimer.
8 Je sais que j’avais été terrifiée. J’avais très peur et
9 puis j’avais honte d’une façon ou d’une autre et puis je me
10 sentais sale.
11 Q. Où on vous a emmenée par la suite ?
12 R. C’est au lycée qui était désigné, appelé
13 comme Nikola Tesla à Aladza.
14 Q. C’est l’école où vous étiez auparavant
15 l’élève ?
16 R. Oui.
17 Me KUO (interprétation) : Je vais demander à
18 l’Huissier pour montrer au témoin la pièce à conviction 11,
19 les deux photographies 7418 et 7419.
20 Q. Est-ce que vous reconnaissez 7418 ?
21 R. Oui. C’est le lycée. C’est le lycée Nikola
22 Tesla à Aladza.
23 Q. Et 7419 ?
24 R. Oui. C’est le lycée Nikola Tesla à Aladza.
25 Q. Merci. Une fois quand vous êtes arrivée au
Page 1677
1 lycée, où vous avez été emmenée ?
2 R. Au moment où nous étions au lycée, enfin,
3 devant le lycée, on nous a d’abord fait rentrer. On était
4 à un moment donné dans le couloir. Je ne me souviens pas
5 exactement. De toute façon, c’était dans le couloir. On
6 est resté un petit moment et ensuite, on nous a emmenés
7 dans une classe au premier étage. Dans cette classe, il
8 n’y avait pas de banc, pas de chaise, mais il y avait des
9 matelas par terre.
10 Q. Vous dites « ils », ils vous ont emmenée.
11 Vous pensez à qui, s’il vous plaît ?
12 R. Je pense aux soldats serbes, à ces mêmes
13 soldats serbes, mais à ce moment-là, ils étaient quatre ou
14 cinq à peu près.
15 Q. Est-ce que les soldats arrivaient dans
16 d’autres occasions également au lycée pendant que vous y
17 étiez ?
18 R. Oui.
19 Q. Qu’est-ce qu’ils faisaient au moment où ils
20 venaient au lycée ?
21 R. Chaque fois, quand quelqu’un venait, il
22 prenait des jeunes filles. Enfin, normalement, ils
23 appelaient soit les femmes, soit les jeunes filles et ils
24 les emmenaient avec eux.
25 Q. Ça, ça se passait combien de fois, enfin, à
Page 1678
1 quelle fréquence ?
2 R. Je ne pourrais pas dire que ça s’est passé
3 chaque nuit, mais de toute façon, peut-être une nuit sur
4 deux à peu près.
5 Q. Est-ce que vous-même, vous avez été emmenée
6 par des soldats ?
7 R. Oui.
8 Q. Est-ce que vous pouvez nous décrire ce qui
9 vous est arrivé par la suite ?
10 R. En général, quelqu’un venait et appelait les
11 noms des femmes ou des jeunes filles puis on nous emmenait
12 dans un appartement ou bien dans un autre immeuble et une
13 fois, je me souviens, j’ai été emmenée d’une classe dans
14 une autre. Je suis restée au lycée.
15 Q. Est-ce que vous pouvez nous donner la
16 description et nous dire ce qui se passait au moment où on
17 vous a emmenée d’une classe pour vous demander de rentrer
18 dans une autre ? Commencez par dire qui vous a fait sortir
19 de cette classe pour vous emmener dans l’autre.
20 R. Moi, je pense qu’ils étaient cinq à cette
21 occasion-là, cinq soldats. Ils ont appelé les noms de cinq
22 jeunes filles. Peut-être sur les cinq, il y avait une
23 femme mais je ne suis pas sûre. Une jeune fille, on l’a
24 fait revenir et puis on en a pris une autre. Je ne sais
25 pas quelles étaient les raisons de cette démarche.
Page 1679
1 Ensuite, on nous a emmenées dans la classe qui
2 était avoisinante, toutes les cinq. Un des soldats a fait
3 sortir une jeune fille devant la classe alors que nous
4 autres, nous sommes restées avec les quatre soldats.
5 Q. Est-ce que je peux vous interrompre ici, s’il
6 vous plaît ? Je voudrais demander l’aide de l’Huissier
7 pour vous montrer la pièce à conviction 193.
8 Me KUO (interprétation) : C’est une pièce à
9 conviction dont les conseils de la Défense et la Chambre
10 possèdent déjà.
11 Q. Vous avez dit que vous étiez cinq
12 sélectionnées. Est-ce que vous voyez les noms d’autres
13 filles sur le papier qui vous a été présenté ? Si vous
14 voyez les noms de ces filles, vous direz tout simplement
15 les numéros qui correspondent aux noms, s’il vous plaît.
16 Ne prononcez pas les noms.
17 R. C’était le numéro 75, 50, 88 et DB. Ensuite,
18 DB, on l’a fait ramener et puis c’est 95 qui a été emmenée
19 à sa place.
20 Me KUO (interprétation) : Madame la Présidente,
21 je voudrais tout simplement m’assurer que la pièce à
22 conviction 192 qui a été montrée au témoin et la pièce à
23 conviction 193 sont admises.
24 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Le numéro,
25 s’il vous plaît.
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1 LA GREFFIÈRE : [Hors microphone] …comme pièce à
2 conviction. Il est enregistré de façon confidentielle
3 ainsi que le document 193 qui est aussi enregistré de façon
4 confidentielle.
5 Me KUO (interprétation) :
6 Q. Madame le Témoin, vous avez dit qu’une des
7 filles, on l’a fait sortir devant la classe. Est-ce que
8 vous pouvez nous dire son numéro ?
9 R. Je suis désolée mais je ne comprends pas tout
10 à fait votre question.
11 Q. Excusez-moi. Je vais répéter la question.
12 Tout à l’heure, vous avez dit qu’une fois que vous étiez
13 toutes dans cette deuxième classe, une sur vous, on l’a
14 fait sortir devant la porte ou dans une autre classe. Qui
15 c’était ?
16 R. C’était le numéro 50.
17 Q. Est-ce que vous vous souvenez qui étaient ces
18 soldats qui vous ont emmenées dans cette classe ?
19 R. Il y a un certain nombre de soldats dont je
20 ne me souviens, d’autres pas.
21 Q. Pourriez-vous maintenant nous donner des noms
22 ou des surnoms des personnes dont vous vous souvenez, des
23 soldats dont vous vous souvenez ?
24 R. Il y avait Dragan Zelenovic, Zelja, et le
25 deuxième, c’était Zoran Vukovic et le troisième était Tuta.
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1 C’était son surnom. Je pense que c’était Janko Janjic. Je
2 suis sûre que le nom était Janjic, mais pour le prénom, je
3 ne me souviens pas tout à fait. « Janko », je ne suis pas
4 sûr qu’il était Janko, mais Janjic, je suis sûre.
5 Q. Vous connaissiez Zoran Vukovic ? Est-ce que
6 vous le connaissiez auparavant, avant la guerre ? Est-ce
7 que vous avez entendu parler de lui ?
8 R. Non. Je ne le connaissais pas avant la
9 guerre mais il y avait dans le groupe dans lequel j’étais
10 des personnes qui le connaissaient. C’est comme ça
11 d’ailleurs que j’ai appris également qu’il s’appelait comme
12 ça parce que sinon, moi, je ne connaissais pas son nom non
13 plus.
14 Q. Vous voulez dire : des « personnes parmi
15 vous ». Vous pensez bien évidemment aux jeunes filles et
16 aux femmes qui étaient avec vous dans le groupe ?
17 R. Non. Je ne pense pas directement à une
18 personne mais il y avait des personnes qui étaient âgées,
19 il y avait des personnes qui étaient plus jeunes et je me
20 souviens que quelqu’un avait dit mais je ne me souviens pas
21 exactement qui avait prononcé son nom.
22 Q. Est-ce que vous vous souvenez comment vous
23 avez appris son nom ?
24 R. C’était à cette occasion, à l’occasion où il
25 était venu sur place et puis quand il a quitté les lieux.
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1 Alors, je ne sais pas, comme je dis, qui l’avait dit, qui
2 avait raconté ça mais quelqu’un avait dit qu’il le
3 connaissait, connaissait de qui il s’agissait, il
4 connaissait son nom, son prénom.
5 Q. Quelqu’un qui l’avait déjà vu auparavant ou
6 ce jour-là ?
7 R. C’est ce jour-là qu’ils sont rentrés dans la
8 classe et tous ceux qui étaient dans la classe l’ont vu.
9 Q. Est-ce que vous vous souvenez que vous avez
10 donné une déclaration aux enquêteurs du Tribunal en janvier
11 1996 et vous avez dit que vous connaissiez de vue Zoran
12 Vukovic et d’avant la guerre ?
13 R. Oui, je me souviens.
14 Q. Est-ce que vous savez pourquoi vous avez dit
15 ça, ce que vous vouliez dire par là ?
16 R. Ça, je ne peux pas vous dire. Beaucoup de
17 temps s’est écoulé. Je ne sais pas très exactement ce que
18 je voulais dire par là, mais je ne connaissais pas Zoran
19 Vukovic avant. Il est possible que je l’aie vu à Foca,
20 mais je n’en suis pas sûre.
21 Q. Lorsqu’on vous a amenée dans l’autre salle de
22 classe, qu’est-ce qui s’est passé ?
23 R. Zelenovic a ordonné d’une certaine manière à
24 chacune des filles où elle devait aller. À moi, il m’a
25 donné l’ordre de me mettre dans un angle où Zoran Vukovic
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1 était déjà assis. Il a donné l’ordre à une autre fille, à
2 l’autre fille d’aller dans l’angle où se trouvait déjà
3 Janjic. Tuta et Zelenovic et un autre dont je ne connais
4 pas le nom, ils sont restés avec deux autres filles.
5 Q. Que s’est-il produit lorsque vous êtes allée
6 dans l’angle où était assis Zoran Vukovic ?
7 R. À ce moment-là, la lumière a été éteinte, je
8 ne sais pas par qui. Vukovic m’a dit de me coucher sur le
9 matelas. Ensuite, il a enlevé mes vêtements et m’a violée.
10 Q. Je m’excuse de devoir vous poser cette
11 question mais est-ce que vous pouvez dire aux juges
12 concrètement ce qu’il a fait ?
13 R. Il a placé son pénis dans mon vagin de
14 manière forcée, de force.
15 Q. Est-ce que vous avez entendu ce qui arrivait
16 aux autres filles dans l’autre pièce ?
17 R. Tout ce que j’ai pu entendre, c’était dans
18 l’angle où se trouvait Janjic, Tuta et le numéro 95. L’on
19 a entendu des coups de frappe, quelque chose comme ça. Je
20 pense que Janjic jurait. C’est tout ce que j’ai entendu.
21 Q. Quand vous dites les coups, vous voulez dire
22 que quelqu’un frappait quelqu’un d’autre ?
23 R. Oui.
24 Q. Zoran Vukovic, est-ce qu’il vous a dit quoi
25 que ce soit pendant qu’il vous violait ?
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1 R. Non.
2 Q. Est-ce que vous vous souvenez s’il était
3 armé, s’il avait une arme sur lui ?
4 R. Ça, je ne m’en souviens pas, mais de toute
5 façon, eux, ils étaient toujours armés.
6 Q. Que s’est-il produit après que Zoran Vukovic
7 vous a violée dans cette salle de classe ?
8 R. Tout simplement, ils nous ont ramenées dans
9 la salle de classe.
10 Q. La même que celle où se trouvaient les autres
11 femmes et les enfants ?
12 R. Oui.
13 Q. Est-ce que vous avez raconté à votre mère ce
14 qui vous était arrivé ?
15 R. Non.
16 Q. Est-ce qu’elle aurait pu conclure sur la base
17 de votre apparence ce qui vous était arrivé ?
18 R. Je crois qu’oui. Elle ne m’a jamais posé la
19 question et moi, je ne lui ai jamais dit mais je pense
20 qu’elle le savait. Je suis assez sûre.
21 Q. Comment vous sentiez-vous ?
22 R. Comme à chaque fois.
23 Q. Est-ce que vous avez jamais revu Zoran
24 Vukovic ?
25 R. Je pense que je l’ai vu peut-être deux, trois
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1 fois, mais je ne me souviens pas exactement pour quelle
2 raison ni quand. Je me souviens une fois lorsque j’étais
3 dans l’appartement à Brena à Foca, mais ceci a été une
4 rencontre brève.
5 Q. Vous parlez de la période pendant laquelle
6 vous étiez dans l’appartement de Klanfa ?
7 R. Oui.
8 Q. Est-ce que vous pourriez décrire comment se
9 fait-il que vous avez vu Zoran Vukovic à l’époque ? Que
10 faisait-il ?
11 R. Cette fois-ci, lorsqu’il est venu dans
12 l’appartement de Klanfa, je pense qu’il est venu avec des
13 vêtements de Klanfa. Ses vêtements étaient souillés de
14 sang. Je sais qu’il a dit que Klanfa avait été blessé aux
15 combats, quelque chose comme ça, qu’on avait tiré sur lui
16 et qu’on l’a blessé dans sa jambe.
17 Q. Est-ce qu’il vous a donné quoi que ce soit à
18 ce moment-là ?
19 R. Je ne comprends pas la question.
20 Q. Est-ce que Zoran Vukovic vous a dit quoi que
21 ce soit d’autre lorsque vous l’avez vu dans l’appartement
22 cette fois-ci ?
23 R. Tout ce dont je me souviens c’est qu’il a
24 expliqué que Klanfa avait été blessé, qu’il avait passé une
25 période dans l’hôpital et que les vêtements de Klanfa
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1 devaient être lavés. Je ne me souviens pas d’autres
2 choses.
3 Q. Est-ce que vous pourriez reconnaître Zoran
4 Vukovic aujourd’hui ?
5 R. Peut-être.
6 Q. Veuillez regarder autour de vous dans le
7 prétoire, prenez votre temps et dites-nous si vous
8 reconnaissez Zoran Vukovic.
9 R. Je pense qu’oui.
10 Q. Est-ce que vous pourriez décrire ce qu’il
11 porte sur lui et où il est assis ?
12 R. Il est la deuxième personne dans le dernier
13 rang, de ce côté-là.
14 Q. Vous voulez dire à partir du côté droit ?
15 C’est ce que vous semblez indiquer.
16 R. Oui. Si on regarde de mon point de vue,
17 c’est de droite [indication du témoin].
18 Q. Est-ce que vous pouvez décrire ce qu’il porte
19 sur lui ?
20 R. Eh bien, une chemise blanche. Je pense qu’il
21 porte une veste bleu marin et une cravate bleu marin avec
22 quelques couleurs.
23 Me KUO (interprétation) : Peut-on indiquer dans
24 le compte-rendu que le témoin a reconnu Zoran Vukovic ?
25 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Oui.
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1 Me KUO (interprétation) :
2 Q. Est-ce qu’on vous a fait sortir de la salle
3 de classe du lycée de nouveau ?
4 R. Oui. Je ne me souviens pas très bien de
5 cela. Je me souviens une fois, Zelenovic nous a amenées
6 dans un appartement dans l’immeuble de Lepa Brena et je ne
7 me souviens pas d’autres occasions, même si je sais que
8 ceci n’était pas la seule fois qu’on nous a fait sortir du
9 lycée.
10 Q. À chaque fois qu’on vous a fait sortir de ce
11 centre, du lycée, qu’est-ce qui vous est arrivé ?
12 R. À chaque fois qu’on me faisait sortir du
13 lycée, on me violait à chaque fois.
14 Q. Est-ce que vous avez vu que d’autres filles
15 ont été amenées quelque part du lycée ?
16 R. Oui. Ils ne m’ont jamais fait sortir toute
17 seule. Il y avait toujours quelqu’un avec moi, une autre
18 fille.
19 Q. Combien de temps êtes-vous restée dans le
20 lycée ?
21 R. Je ne me souviens pas très bien de ça, mais
22 je pense que ceci n’a pas duré très longtemps, peut-être
23 deux semaines, mais je ne suis pas sûre.
24 Q. Pendant cette période, est-ce que vous vous
25 sentiez libre de partir tout simplement ?
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1 R. Non.
2 Q. Est-ce que vous pouvez décrire pourquoi pas ?
3 R. Vous parlez du lycée ?
4 Q. Oui.
5 R. Tout d’abord, il y avait toujours des soldats
6 dans le lycée. Dans l’entrée, il y avait toujours des
7 soldats qui gardaient l’entrée même si à Foca, à l’époque,
8 il n’y avait déjà plus beaucoup de musulmans dans la ville.
9 Donc, nous n’étions pas en sécurité si nous sortions dans
10 la rue.
11 Q. Est-ce que toutes les personnes détenues dans
12 le lycée étaient des musulmans ?
13 R. Oui.
14 Q. Où est-ce qu’on vous a amenés lorsqu’on vous
15 a fait partir du lycée au bout de ces deux semaines ?
16 R. Ils nous ont amenés dans la salle de sports
17 Partizan. Tout d’abord, ils nous ont amené nettoyer cette
18 salle et ensuite, ils nous ont transférés là-bas.
19 Q. Est-ce qu’ils ont amené tout le monde, tous
20 ceux qui avaient été détenus avec vous dans le lycée ?
21 R. Oui.
22 Q. Combien de personnes y avait-il
23 approximativement avec vous dans la salle de sports
24 Partizan ?
25 R. À l’époque, il n’y avait au début que des
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1 gens de Trosanj. Je ne sais pas combien de personnes de
2 là-bas, pas beaucoup. De toute façon, nous pouvions tous
3 dormir dans une même salle de classe dans le lycée. Par la
4 suite, on a amené d’autres personnes que je ne connaissais
5 pas qui venaient des environs de Foca.
6 Q. Est-ce qu’il y avait des hommes parmi vous ?
7 R. Je pense qu’il y a eu des hommes âgés mais je
8 ne me souviens que de deux. L’un d’eux était très vieux,
9 l’autre était malade.
10 Q. Pendant que vous étiez dans Partizan, est-ce
11 que vous vous sentiez libre de partir ?
12 R. Non. C’est pareil que dans le lycée et
13 ailleurs. Les gardes y allaient et le fait de sortir dans
14 la rue ou quoi que ce soit entraînait des risques.
15 Me KUO (interprétation) : Avec l’aide de
16 l’Huissier, je demande que l’on montre la pièce à
17 conviction 11 au témoin, la photo 7302.
18 Q. Reconnaissez-vous cette photo ?
19 R. Oui. C’est la salle de sports Partizan.
20 Q. Merci. Est-ce que les soldats venaient au
21 Partizan aussi pour vous faire sortir, pour faire sortir
22 les filles ?
23 R. Oui.
24 Q. Ils le faisaient avec quelle fréquence ?
25 R. Parfois chaque soir, parfois un soir sur
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1 deux. Je ne me souviens pas très exactement.
2 Q. Que faisaient-ils lorsqu’ils venaient dans la
3 salle de sports afin de faire sortir les filles ?
4 R. Ils entraient simplement. Ils faisaient le
5 tour en cherchant certaines personnes, certaines jeunes
6 filles. Ensuite, ils choisissaient les personnes qu’ils
7 voulaient, le nombre de personnes qu’ils voulaient et
8 simplement, ils les amenaient avec eux.
9 Q. Est-ce que vous connaissez les noms ou les
10 surnoms des soldats qui ont fait ça ?
11 R. Je me souviens de Gojko Jankovic. Je me
12 souviens d’un certain nom appelé Zaga, qu’on appelait Zaga.
13 Son nom de famille est Kunarac. Je ne suis pas sûre en ce
14 qui concerne son prénom. Je crois que c’est Dragan ou
15 quelque chose comme ça. Puis Janjic, surnommé Tuta, il
16 venait lui aussi. Je pense que Gagovic y est venu deux
17 fois. Je ne me souviens pas. Je pense…
18 Q. La personne que vous avez identifiée en tant
19 que Zaga dont le nom de famille est Kunarac, est-ce que
20 vous le connaissiez avant la guerre ?
21 R. Non.
22 Q. Est-ce que vous pourriez le décrire ?
23 R. C’est un peu difficile. Je sais qu’il
24 n’était pas très grand, ni très gros, ni très mince. Je
25 crois que ses cheveux étaient marrons foncés. Je ne
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1 saurais pas donner plus de détails.
2 Q. Il venait au Partizan avec quelle fréquence,
3 lui ?
4 R. Je pense qu’il ne venait pas chaque soir,
5 mais peut-être tous les trois jours mais je ne suis pas
6 sûre.
7 Q. Lorsque Zaga venait, était-il seul ou bien
8 était-il accompagné d’autres soldats ?
9 R. Il était avec d’autres soldats.
10 Q. Que faisait-il lorsqu’il venait au Partizan ?
11 R. D’habitude, il prenait quelques filles, une,
12 deux, trois. Simplement, il les choisissait et il les
13 amenait avec lui.
14 Q. Est-ce que Zaga dont le nom de famille est
15 Kunarac, est-ce qu’il vous a jamais fait sortir du Partizan
16 ?
17 R. Oui.
18 Q. Est-ce que vous vous souvenez où il vous a
19 amenée ?
20 R. Je me souviens seulement de deux fois. Je me
21 souviens très exactement de deux occasions. En ce qui
22 concerne les autres fois, je ne m’en souviens pas. L’une
23 de ces fois, c’était dans une maison à Aladza et une autre
24 fois, l’autre fois, c’était dans une maison près de la gare
25 routière.
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1 Q. Est-ce que vous pourriez nous décrire la
2 première fois qu’il vous a amenée dans la maison à Aladza ?
3 Tout d’abord, où était cette maison ?
4 R. La maison était près du lycée, pas loin de la
5 mosquée de Aladza. La maison se trouve à droite si on va
6 vers le lycée. À droite, il y a une petite rue et ensuite,
7 la première maison qui fait l’angle est celle-là. Toutes
8 les fenêtres donnaient sur la rue.
9 Q. Est-ce que vous pourriez dire qui vivait dans
10 cette maison ?
11 R. Je ne suis pas sûre, quoique dans le jardin,
12 dans le rez-de-chaussée, quelque chose comme ça, de cette
13 maison, il y avait une sorte d’atelier. Je pense que
14 c’était quelque chose concernant le fait de coudre, peut-
15 être faire des vêtements ou des chaussures, mais je ne suis
16 pas tout à fait sûre.
17 Q. Lorsque Zaga Kunarac vous a amenée dans cette
18 maison, qu’est-ce qu’il a fait ?
19 R. Zaga Kunarac n’était jamais seul ou plutôt,
20 moi, je n’étais jamais seule quand il m’a amenée. Il y
21 avait d’habitude plusieurs jeunes filles avec moi.
22 D’habitude, il y avait plusieurs soldats là-bas et ensuite
23 – peut-être il faut que je dise, bien sûr – ensuite, il
24 nous violait toutes.
25 Q. Cette fois-ci, est-ce que vous vous souvenez
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1 quelles sont les autres jeunes filles qui ont été amenées
2 avec vous ?
3 R. Oui. C’était 75, 50, DB et moi.
4 Q. Est-ce que vous vous souvenez quand ceci
5 s’est produit ?
6 R. Ça, je ne m’en souviens plus, mais je me
7 souviens, j’ai l’impression que c’était la veille de notre
8 départ à Miljevina, la veille du jour où ils nous ont
9 emmenés à Miljevina.
10 Q. Est-ce que c’était la première fois qu’on
11 vous a amenée dans cette maison à Aladza le jour avant
12 qu’on vous a amenée à Miljevina ?
13 R. Non. C’était la dernière fois que j’ai été
14 dans cette maison à Aladza, quoique avant, lorsqu’on me
15 faisait venir dans cette maison à Aladza, je ne me souviens
16 pas exactement avec qui j’y étais ni quand.
17 Q. Est-ce que vous pourriez dire d’où venaient
18 les soldats qui se trouvaient dans cette maison à Aladza ?
19 R. Je pense qu’ils venaient du Monténégro. Ils
20 avaient un accent différent du nôtre, quoique eux aussi,
21 ils ont dit d’où ils venaient. Je pense que la plupart
22 d’entre eux venaient de Niksic.
23 Q. Lorsqu’on vous a amenée dans la maison à
24 Aladza, qui vous a amenée là-bas ?
25 R. D’habitude, c’était Kunarac, Zaga. Je ne
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1 sais pas qui nous ramenait. Je ne suis pas sûre quelle
2 était la personne qui nous ramenait.
3 Q. La dernière fois qu’on vous a amenée ou bien
4 plutôt avant la dernière fois qu’on vous a amenée dans la
5 maison à Aladza, donc ces autres fois, est-ce que Zaga vous
6 a violée ?
7 R. Oui.
8 Q. Vous avez dit que Zaga vous a amenée
9 également dans une vieille maison près de la gare routière.
10 Est-ce que vous vous souvenez quand ceci s’est produit ?
11 R. Je ne me souviens pas de la date exacte mais
12 c’était avant qu’on ne soit amené dans la maison, avant
13 cette occasion que j’ai décrite quand on a été amené dans
14 la maison à Aladza, mais je ne me souviens pas très
15 exactement quand.
16 Q. Est-ce qu’on vous a amenée toute seule ou
17 bien avec d’autres jeunes filles à la vieille maison près
18 de la gare routière ?
19 R. Il y avait deux autres filles avec moi, le
20 numéro 50 et DB.
21 Q. Qu’est-ce qui vous est arrivé dans cette
22 maison ?
23 R. Deux soldats m’ont violée. Je ne connais pas
24 le nom d’un d’eux et l’autre était Dragan Kunarac.
25 Q. Est-ce que vous savez ce qui est arrivé aux
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1 autres jeunes filles lorsqu’elles ont été amenées dans
2 cette maison ?
3 R. Je ne sais pas en ce qui concerne DB. Le
4 numéro 50, elle m’a dit que Dragan ou plutôt Zaga Kunarac
5 l’a violée elle aussi.
6 Q. Vous avez dit que Zaga Kunarac vous a amenée
7 à d’autres endroits dont vous ne vous souvenez plus. Est-
8 ce exact ?
9 R. Oui.
10 Q. Est-ce qu’à ces occasions, il vous a
11 également violée ?
12 R. Je ne m’en souviens pas.
13 Q. Vous vous souvenez qu’il est venu vous
14 chercher au gymnase Partizan, n’est-ce pas ?
15 R. Oui, oui. Je me souviens qu’il est venu me
16 chercher plusieurs fois. Je me souviens de deux fois, deux
17 occasions avec précision.
18 Q. Est-ce que vous vous souvenez d’une
19 journaliste qui est venue au gymnase ?
20 R. Oui, je m’en souviens.
21 Q. Vous souvenez-vous de quoi elle avait l’air ?
22 R. Elle était blonde. Elle était très mince.
23 Elle était très maquillée. C’est à peu près tout.
24 Q. Est-ce que Kunarac, alias Zaga, était avec
25 elle quand elle est venue ?
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1 R. Je ne me souviens pas, mais en tout cas, elle
2 a posé des questions à son sujet.
3 Q. Quelles questions a-t-elle posées à son sujet
4 ?
5 R. La première chose qu’elle nous a demandé,
6 c’était sur la façon dont on était traité au gymnase
7 Partizan, à savoir est-ce qu’on était maltraité, est-ce que
8 des soldats venaient s’en prendre à nous, et cætera. Je ne
9 me souviens pas exactement comment elle en est venue à
10 mentionner le nom de Zaga, mais je me souviens que
11 quelqu’un dans ce groupe a dit que lui, il viendrait
12 chercher des jeunes filles.
13 Q. Vous souvenez-vous qui s’est entretenu avec
14 cette journaliste ?
15 R. Non, je ne m’en souviens pas.
16 Q. Est-ce que vous lui avez parlé, vous ?
17 R. Non.
18 Q. Est-ce que vous l’avez revue ensuite ?
19 R. Oui. Je l’ai vue une fois à Miljevina
20 ensuite.
21 Q. Où à Miljevina ?
22 R. Dans la maison de Karaman, là où on nous a
23 emmenés après la nuit, la fameuse nuit dans la maison de
24 Aladza.
25 Q. Que faisait-elle dans la maison de Karaman ?
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1 R. Je ne me souviens pas qu’elle ait fait quoi
2 que ce soit de particulier. Elle était simplement assise
3 là. Elle n’a pas beaucoup parlé, je ne crois pas, mais en
4 fait, je ne me souviens pas très, très bien. Je ne me
5 souviens pas très bien des détails.
6 Q. Quand vous l’avez revue, est-ce qu’elle se
7 comportait comme une journaliste ?
8 R. Non, non. Elle avait l’air d’une femme tout
9 à fait ordinaire. Elle n’avait pas l’air d’une
10 journaliste. C’est difficile d’expliquer pourquoi mais
11 elle ne se comportait pas comme une journaliste et puis
12 elle n’a pas dit qu’elle était là à cause de son travail.
13 Q. Vous avez parlé de la dernière fois où on
14 vous a emmenée à la maison de Aladza et c’était la veille
15 du jour où on vous a emmenée à Miljevina. Vous en
16 souvenez-vous ?
17 R. Je ne peux pas être sûre à 100 pour cent,
18 mais je crois que c’est le lendemain du jour où on nous a
19 emmenées à la maison de Aladza pour la dernière fois.
20 Q. Que s’est-il passé ce jour-là ?
21 R. Je ne vous ai pas comprise.
22 Q. J’ai très mal formulé ma question. Je
23 reprends donc. La dernière fois où on vous a emmenée à la
24 maison du quartier de Aladza, c’était la veille du jour où
25 on vous a emmenée à Miljevina. C’est bien ça ?
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1 R. Oui.
2 Q. Est-ce qu’il s’est passé quelque chose qui a
3 trait à la mosquée cette nuit-là qui fait que vous vous
4 souveniez très, très bien de cette nuit ?
5 R. Je sais qu’il y a une nuit où il y a eu une
6 explosion dans la mosquée. La mosquée a sauté, enfin, je
7 crois, mais je ne peux pas vous dire vraiment que ça se
8 soit passé cette nuit-là en particulier. Je me souviens
9 pourtant bien de cette nuit parce que… enfin, je ne sais
10 pas exactement comment mais je sais que cette nuit-là,
11 alors que nous étions dans la maison de Aladza et le
12 lendemain, à Miljevina, je crois… enfin, j’ai l’impression
13 qu’il y a un lien entre ces deux jours.
14 Q. Bien ! Alors, parlons de cette dernière nuit
15 que vous avez passée à la maison avant que l’on vous emmène
16 à Miljevina. Qui vous a emmenée à la maison ?
17 R. Kunarac.
18 Q. Étiez-vous seule ou y avait-il d’autres
19 jeunes filles avec vous que l’on a emmenées dans cette
20 maison ?
21 R. J’étais avec d’autres.
22 Q. Pouvez-vous, s’il vous plaît, nous dire quel
23 est leur numéro ?
24 R. 75, 50, DB et moi-même.
25 Q. Lorsque vous êtes arrivée dans la maison,
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1 est-ce qu’il y avait d’autres jeunes filles ?
2 R. Je me souviens simplement d’une jeune fille.
3 Elle était déjà là lorsque nous sommes arrivées. C’était
4 le numéro 190.
5 Q. Y avait-il également des soldats dans la
6 maison ?
7 R. Oui.
8 Q. Vous a-t-on violée cette nuit-là dans la
9 maison ?
10 R. Oui.
11 Q. Qui vous a violée ?
12 R. Je me souviens de Kunarac, un homme plus
13 vieux dont je ne me souviens pas de son nom et puis il y
14 avait aussi un homme plus jeune qui s’appelait Toljic de
15 son nom de famille et son surnom, c’était Tolja. Voici les
16 trois dont je me souviens qu’ils m’ont violée.
17 Q. Dans quelle pièce Kunarac vous a-t-il violée
18 ?
19 R. Quand on entre dans l’appartement, à gauche,
20 vous avez la cuisine et à droite, la pièce, une pièce et
21 c’est dans cette pièce qu’il m’a violée.
22 Q. Étiez-vous en mesure de dire si Kunarac
23 commandait ces autres soldats ou quelle était leur relation
24 ?
25 R. J’avais l’impression que lorsque Zaga venait
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1 au gymnase Partizan ou lorsqu’il nous emmenait à la maison
2 de Aladza, moi, j’avais l’impression que c’était lui qui
3 commandait et j’avais le sentiment que les soldats qui se
4 trouvaient là lui obéissaient, l’écoutaient.
5 Q. Cette nuit-là, combien de temps êtes-vous
6 restée dans la maison de Aladza ?
7 R. Je crois que j’y suis restée jusqu’au matin.
8 Le lendemain matin, on nous a emmenés à Miljevina et je
9 n’en suis pas sûre à 100 pour cent.
10 Q. Vous n’êtes pas sûre du moment où on vous a
11 emmenée à Miljevina ou vous n’êtes pas sûre qu’on vous y
12 ait emmenée effectivement ?
13 R. Non. Ce dont je ne suis pas sûre, c’est du
14 moment où on nous a emmenés.
15 Q. Vous souvenez-vous de qui vous a emmenée à
16 Miljevina ?
17 R. Bien, je me souviens de Pero Elez. Il y
18 avait deux autres hommes. Je crois qu’il y avait deux
19 autres hommes, mais je ne sais plus quels étaient leurs
20 noms.
21 Q. Est-ce que vous vous souvenez qu’on vous ait
22 dit pourquoi on vous emmenait à Miljevina ?
23 R. Non, non. Ils ne nous l’ont pas dit. Ils ne
24 nous ont d’ailleurs pas dit où nous allions et pourquoi
25 nous y allions.
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1 Q. Qui d’autre a-t-on emmené à part vous ?
2 R. Avec moi, il y avait le numéro 75, DB et le
3 numéro 190.
4 Q. Où vous a-t-on emmenée exactement à Miljevina
5 ?
6 R. On nous a emmenés dans une maison. Je ne
7 sais pas pourquoi mais c’est une maison finalement que tout
8 le monde appelait la maison de Karaman, mais je crois que
9 c’est parce que Karaman, c’était le nom de famille du
10 propriétaire de cette maison, du propriétaire à ce moment-
11 là ou du propriétaire avant la guerre.
12 Me KUO (interprétation) : Je souhaiterais que
13 l’on montre au témoin la photographie 7355 de la pièce à
14 conviction numéro 11.
15 Q. Reconnaissez-vous ce qui figure sur cette
16 photographie ?
17 R. Oui. Il s’agit de la maison de Karaman à
18 Miljevina.
19 Q. Merci. Lorsque vous êtes arrivée à la maison
20 de Karaman, y avait-il quelqu’un déjà ?
21 R. Oui. Il y avait une autre jeune fille mais
22 aujourd’hui, je ne me souviens plus de son nom, et
23 d’ailleurs, je ne crois pas que son nom figure sur la liste
24 que j’ai devant moi.
25 Q. Y avait-il également des soldats ?
Page 1702
1 R. Oui. Je ne saurais dire exactement combien
2 ils étaient. Je crois qu’ils étaient peut-être deux ou
3 trois quand on est arrivé.
4 Q. Ces soldats, que faisaient-ils ?
5 R. Je ne comprends pas votre question.
6 Q. Est-ce qu’il y avait des gens qui habitaient
7 dans la maison de Karaman ?
8 R. Oui. C’est l’impression qu’on avait. Il y
9 en avait deux ou trois qui résidaient dans cette maison.
10 Enfin, c’est l’impression que ça donnait.
11 Q. Vous souvenez-vous qui étaient ces deux ou
12 trois soldats qui habitaient dans cette maison ?
13 R. L’un d’eux était Radovan Stankovic, alias
14 Raso. L’autre, c’était Nedzo Samardzic, je crois. Et le
15 troisième, c’était Nikola, je crois qu’il s’appelait Brcic
16 de son nom de famille mais je ne suis pas trop sûre.
17 Q. Est-ce que d’autres soldats sont venus dans
18 cette maison ?
19 R. Oui.
20 Q. Que faisaient-ils quand ils venaient dans la
21 maison ?
22 R. Eh bien, généralement, ils choisissaient une
23 des jeunes filles et ils l’emmenaient au deuxième étage.
24 Q. Pendant combien de temps avez-vous été ainsi
25 détenue dans cette maison ?
Page 1703
1 R. Je ne me souviens pas exactement. Un mois et
2 demi, deux mois peut-être, mais je ne suis pas tout à fait
3 sûre.
4 Q. Pendant cette période, que vous est-il arrivé
5 dans cette maison ?
6 R. Eh bien, moi, comme toutes les autres jeunes
7 filles qui se trouvaient dans la maison de Karaman, j’ai
8 été violée par les soldats serbes. Je crois qu’après un
9 certain temps, on a amené deux ou trois jeunes filles. En
10 tout cas, toutes les jeunes filles ont été violées soit
11 chaque soir, chaque nuit, soit une nuit sur deux, mais en
12 tout cas, très souvent.
13 Q. Avez-vous pu compter le nombre de fois où on
14 vous a violée dans cette maison ?
15 R. Je ne crois pas que ce soit possible.
16 Q. Kunarac, Zaga, est-ce qu’il lui est arrivé de
17 venir dans la maison de Karaman ?
18 R. Je ne me souviens que d’une occasion où il
19 est venu. Je me souviens qu’il était blessé, il avait un
20 plâtre et puis il avait un bandage. Je ne me souviens plus
21 très bien. Je me souviens donc de cette fois-là, mais
22 quant à savoir s’il est venu plusieurs fois, je ne sais
23 pas.
24 Q. Lorsqu’il est venu à cette occasion dont vous
25 vous souvenez, qu’est-ce qu’il a fait ?
Page 1704
1 R. Je ne me souviens pas exactement pourquoi il
2 est venu, ce qu’il faisait exactement dans la maison. Tout
3 ce dont je me souviens c’est qu’il m’a amenée à l’étage
4 supérieur, l’étage le plus haut et qu’il m’a violée.
5 Q. Est-ce qu’il y a quelque chose dans cet
6 incident qui vous soit resté en mémoire plus
7 particulièrement ?
8 R. Je crois que je me suis demandée comment
9 quelqu’un qui était blessé pouvait commettre un acte de ce
10 genre.
11 Q. Est-ce que vous seriez en mesure de
12 reconnaître Zaga ou Kunarac aujourd’hui ?
13 R. Peut-être.
14 Q. Je vais vous demander de parcourir des yeux
15 le prétoire pour me dire si vous le voyez.
16 R. Oui.
17 Q. Pouvez-vous me dire où il est assis et quels
18 vêtements il porte ?
19 R. Il est assis à gauche. C’est le deuxième à
20 partir de la gauche. Il a un blazer bleu foncé, une
21 chemise blanche. Il a une cravate, une cravate bigarrée
22 dans les tons de rouge.
23 Me KUO (interprétation) : Je souhaiterais que
24 soit porté au compte-rendu le fait que le témoin a reconnu
25 l’Accusé Kunarac, Dragoljub.
Page 1705
1 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Bien !
2 Me KUO (interprétation) :
3 Q. Pendant la période que vous avez passée à la
4 maison de Karaman, est-ce que vous étiez en compagnie
5 d’autres jeunes filles, et si c’est le cas, pouvez-vous
6 nous donner leurs initiales ou leurs pseudonymes tels
7 qu’ils figurent sur la feuille que vous avez devant vous ?
8 R. Oui. Il y avait d’autres jeunes filles avec
9 moi. Moi, je connaissais celles qui étaient venues avec
10 moi, 75, DB, 190 également, bien qu’en ce qui concerne 190,
11 au bout de quelque temps, au bout d’une assez courte
12 période, on l’a fait partir. Puis ensuite, au bout d’un
13 moment, il y a d’autres jeunes filles qui sont venues, à
14 savoir AB, AS et une autre dont je ne vois pas le nom sur
15 cette feuille, ah oui ! également le numéro 132 ainsi
16 qu’une autre jeune fille dont je ne vois pas le nom sur la
17 liste.
18 Me KUO (interprétation) : Je souhaiterais que
19 l’on donne une feuille de papier à ce témoin qui pourra
20 porter la cote 194 et je souhaiterais demander au témoin
21 d’inscrire sur cette feuille de papier le nom de la jeune
22 fille qu’elle ne voit pas sur la liste qu’elle a sous les
23 yeux.
24 LA GREFFIÈRE : Cette feuille de papier portera le
25 numéro 194 et sera enregistrée de façon confidentielle.
Page 1706
1 Me KUO (interprétation) :
2 Q. Madame le Témoin, vous avez identifié ou
3 parlé de quelqu’un qui est désigné sous les initiales AB.
4 Savez-vous quel âge elle avait à l’époque ?
5 R. Je ne pourrais pas vous dire exactement mais
6 je crois qu’elle avait 12 ou 13 ans.
7 Q. Pouvez-vous dire qui était responsable de la
8 maison de Karaman ?
9 R. Je crois que c’était Pero. C’est d’ailleurs
10 ce qu’il a dit. Il a dit que seules des personnes bien
11 particulières avaient le droit d’entrer dans la maison ou
12 que seuls ceux qui l’autorisaient à le faire pouvaient y
13 venir.
14 Q. Est-ce qu’on vous a dit ce que vous deviez
15 faire si d’autres personnes essayaient d’entrer dans la
16 maison ?
17 R. Je crois que Pero nous a donné le numéro de
18 téléphone de l’hôtel de Miljevina. C’est là qu’ils
19 habitaient, enfin, j’ai l’impression. Donc, il nous a
20 donné ce numéro de téléphone au cas où quelqu’un vienne à
21 la maison. Il nous a dit que si quelqu’un venait, il
22 fallait l’appeler pour le prévenir.
23 Q. Les soldats qui sont venus vous violer, est-
24 ce que c’était des gens qui paraissaient avoir
25 l’autorisation, comme vous nous dites, l’autorisation de
Page 1707
1 venir à la maison ?
2 R. Oui.
3 Q. Est-ce que la porte de la maison de Karaman
4 était fermée à clé ?
5 R. Non, elle n’était pas fermée à clé. C’est le
6 genre de porte qu’on peut ouvrir de l’intérieur, mais pas
7 de l’extérieur. Pour l’ouvrir de l’extérieur, il faut
8 avoir une clé. Au début, on n’avait pas le droit de sortir
9 de la maison, même si plus tard, on a pu sortir sur la
10 terrasse ou dans le jardin.
11 Q. Pourquoi est-ce que vous n’êtes pas partie ?
12 R. Pour les mêmes raisons. On ne savait pas où
13 aller puis on ne savait pas à quoi ça mènerait cette
14 tentative d’évasion et il n’y avait de sécurité nulle part.
15 Q. Est-ce que vous deviez vaquer à des tâches
16 ménagères également dans cette maison ?
17 R. Oui. On devait faire la cuisine, on devait
18 faire la vaisselle, la lessive. On devait faire le ménage.
19 Q. Quand vous a-t-on emmenée de cette maison de
20 Karaman ?
21 R. Je ne me souviens pas non plus de la date
22 exacte mais c’était peut-être à la fin septembre, début
23 octobre, mais je n’en suis pas tout à fait sûre.
24 Q. Où vous a-t-on emmenée alors ?
25 R. À Foca. Tout d’abord, on nous a emmenées
Page 1708
1 dans un appartement dans le quartier de Ribarsko et puis le
2 lendemain, on nous a emmenées dans l’appartement de Klanfa
3 qui se trouve dans l’immeuble d’habitation Brena.
4 Q. Qui est venu vous chercher à la maison de
5 Karaman ? Vous en souvenez-vous ?
6 R. Oui. Zelenovic. Gojko Jankovic, je crois,
7 était là également et Tuta, mais je ne peux pas l’affirmer
8 avec certitude.
9 Q. Étiez-vous seule ou étiez-vous accompagnée
10 d’autres jeunes filles ?
11 R. Il y avait d’autres jeunes filles. Ils sont
12 venus me chercher moi, le numéro 75, AB et AS.
13 Me KUO (interprétation) : Madame la Présidente,
14 il est l’heure de la pause-déjeuner. Peut-être le moment
15 est-il bien choisi pour suspendre l’audience.
16 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Oui. Nous
17 allons suspendre l’audience et nous reprendrons les débats
18 à 14 h 30.
19 — Suspension de l’audience à 12 h 59
20 — Reprise de l’audience à 14 h 29
21 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Bonjour,
22 Madame le Témoin. Nous allons poursuivre maintenant avec
23 l’interrogatoire principal.
24 Me KUO (interprétation) : Merci, Madame la
25 Présidente.
Page 1709
1 Q. Madame le Témoin, avant la pause-déjeuner,
2 vous avez donné la description d’un certain nombre
3 d’incidents quand Kunarac vous a violée et il vous a
4 emmenée du gymnase Partizan. Pourriez-vous dire de manière
5 très concrète ce qu’il avait fait ou bien éventuellement ce
6 que vous avez sous-entendu sous le terme « viol » ?
7 R. Quand j’ai dit « viol », c’est-à-dire qu’il a
8 placé son pénis dans mon vagin et de force.
9 Q. Quand Kunarac vous a violée dans la maison de
10 Karaman, c’était exactement la même chose ?
11 R. Oui.
12 Q. Pendant que vous étiez détenue au lycée, est-
13 ce que Zelenovic vous a fait sortir ainsi que 75 et est-ce
14 que lui-même vous a violées ensemble avec Zoran Vukovic ?
15 R. Est-ce que vous pouvez, s’il vous plaît,
16 reformuler votre question ?
17 Q. Au moment où vous étiez au lycée, est-ce que
18 vous vous souvenez si éventuellement il y avait une
19 occasion où Zelenovic vous a fait sortir ainsi que le
20 numéro 75 et qu’il vous a violées ainsi que Zoran Vukovic ?
21 R. Oui. Je me souviens qu’une fois, Zoran m’a
22 emmenée ainsi que le numéro 75 et c’est à ce moment-là que
23 nous avons été violées, mais je ne me souviens pas si
24 Vukovic était présent.
25 Q. Pendant que vous étiez détenue au gymnase
Page 1710
1 Partizan, est-ce que quatre hommes vous ont fait sortir et
2 ils vous ont violée, y compris Zelenovic et Vukovic ?
3 R. Non, je ne m’en souviens pas.
4 Q. Avant la pause, Madame le Témoin, vous nous
5 avez décrit un événement, un moment où on vous a emmenée de
6 la maison Karaman jusqu’à Foca, à Ribarsko dans un
7 appartement. Vous vous souvenez de ça ?
8 R. Oui.
9 Q. Qu’est-ce qui s’est passé dans cet
10 appartement ? Est-ce que vous vous en souvenez ?
11 R. Je me souviens de Zelenovic et je pense que
12 Gojko Jankovic et Tuta également y étaient. Je me souviens
13 que j’ai été violée par Zelenovic. Pour ce qui concerne
14 Jankovic et Janjic, je ne me souviens pas.
15 Q. Est-ce que vous savez si d’autres jeunes
16 filles également ont été violées ?
17 R. Oui, oui. Les autres jeunes filles également
18 ont été violées.
19 Q. Est-ce qu’on vous a emmenée de cet
20 appartement quelque part ailleurs ?
21 R. Oui. Le lendemain matin, on nous a prises
22 dans cet appartement et on nous a emmenées dans un autre.
23 Q. Qui est-ce qui vous a fait sortir de cet
24 appartement pour vous emmener ailleurs, dans un autre
25 appartement ?
Page 1711
1 R. C’est Radomir Kovac, surnommé Klanfa, et
2 Jagos Kostic.
3 Q. Où vous ont-ils emmenée ?
4 R. Ils nous ont emmenées dans l’immeuble Brena,
5 dans un appartement qui se trouve au quatrième étage.
6 Q. Est-ce que vous quatre, vous étiez emmenées
7 toutes les quatre ?
8 R. Oui, je pense ça.
9 Q. Je vais demander l’aide de l’Huissier pour
10 vous montrer la pièce à conviction 11 et la photographie
11 7401. Est-ce que vous reconnaissez ce qui se trouve sur
12 cette photographie ?
13 R. Non. Je pense qu’il s’agit de l’immeuble
14 intitulé Brena, enfin, appelé Brena.
15 Q. Est-ce que vous pouvez voir également
16 l’appartement, l’appartement où on vous a emmenée ou bien
17 éventuellement vous voyez la terrasse, le balcon ? Est-ce
18 que vous le reconnaissez sur la photographie ?
19 R. Je suis sûre que c’est l’immeuble appelé
20 Brena, mais je ne suis pas sûre véritablement de l’entrée.
21 Je ne sais pas si c’est véritablement l’entrée, l’entrée où
22 se trouve l’appartement dont je parle parce qu’il y avait
23 plusieurs entrées dans cet immeuble.
24 Q. Est-ce que vous vous souvenez quel était
25 l’étage, l’appartement se trouvait à quel étage ?
Page 1712
1 R. Au quatrième.
2 Q. Par conséquent, le quatrième étage en plus du
3 rez-de-chaussée ?
4 R. Non. C’est le quatrième y compris le rez-de-
5 chaussée. À partir d’en bas, c’est le quatrième.
6 Q. Merci.
7 Me KUO (interprétation) : Je vais tout simplement
8 demander d’éteindre la lumière sur le rétroprojecteur pour
9 ne pas gêner le témoin.
10 Q. Au moment où vous avez été emmenée dans cet
11 appartement dans l’immeuble Lepa Brena, qu’est-ce que Kovac
12 vous a-t-il fait ?
13 R. Kovac et Kostic nous ont emmenées dans cet
14 appartement et au moment où ils nous ont emmenées dans
15 l’appartement, moi, je me souviens que j’ai été violée par
16 Kovac. Je me souviens également que 75 avait été violée
17 par lui-même. Pour ce qui est des deux autres jeunes
18 femmes ou filles, je sais que AS a été violée par Kostic et
19 pour la quatrième, je ne sais pas ce qui s’est passé. Je
20 ne sais pas.
21 Q. Combien de temps êtes-vous restée dans cet
22 appartement ?
23 R. Je ne me souviens pas exactement. Peut-être
24 quatre mois approximativement.
25 Q. Au cours de ces quatre mois, combien de fois,
Page 1713
1 à quelle fréquence vous avez été violée par Radomir Kovac ?
2 R. Ça dépendait. Il y avait des nuits qui se
3 suivaient, chaque nuit, et il y avait d’autres nuits où
4 Kovac n’était pas dans l’appartement, il était absent
5 quelques jours, mais s’il était dans l’appartement, dans ce
6 cas-là, c’était toutes les nuits.
7 Q. Excusez-moi, mais je suis obligée de vous
8 poser encore une fois la même chose. Quand vous dites que
9 vous étiez violée, pourriez-vous dire à la Chambre à quoi
10 pensez-vous ?
11 R. Je dis que c’est par force qu’il a placé son
12 pénis dans mon vagin. C’est ce que je sous-entends sous le
13 terme « viol ».
14 Q. Est-ce qu’il a placé son pénis également de
15 force dans votre bouche ?
16 R. Oui.
17 Q. Outre des viols, est-ce que Klanfa
18 éventuellement a fait autre chose à votre encontre ou
19 d’autres jeunes filles ?
20 R. Je me souviens que Klanfa et Kostic nous ont
21 demandé une fois d’enlever tous nos vêtements, donc d’être
22 nues et une fois, Kovac m’a demandé d’enlever tous mes
23 vêtements, de monter sur la table et de danser.
24 Q. L’incident dont vous venez de donner la
25 description, quand Kovac et les autres vous ont demandé
Page 1714
1 d’enlever vos vêtements, qu’est-ce qu’il vous a dit de
2 faire ? Est-ce que vous pouvez le dire à la Chambre ?
3 R. Il nous a demandé d’abord d’enlever tous nos
4 vêtements, de nous aligner l’une à côté de l’autre. Je ne
5 me souviens pas s’il fallait se tenir sur le lit ou sur le
6 sol, sur le plancher. Je ne me souviens plus exactement.
7 Il fallait s’aligner mais je sais qu’il a fallu qu’on reste
8 nu, qu’on enlève tous les vêtements.
9 Q. Est-ce qu’il a également mis de la musique ?
10 R. Cette fois-ci, non, je ne m’en souviens pas.
11 Je ne me souviens pas si cette fois-ci, véritablement, il a
12 mis de la musique.
13 Q. Qu’est-ce qu’il a fait une fois quand il vous
14 a forcée d’enlever vos vêtements ?
15 R. Je pense qu’ils étaient assis et ils nous
16 observaient mais j’avoue que je n’ai pas vraiment regardé.
17 Je ne sais pas ce qu’ils faisaient. Je n’ai pas vraiment
18 observé.
19 Q. Est-ce que Kovac ou Kostic avait des armes à
20 ce moment-là ?
21 R. Oui. Ils portaient toujours des armes.
22 Q. Quel type d’armes ?
23 R. Je pense qu’ils avaient des fusils et des
24 pistolets et puis ils avaient des couteaux également.
25 Q. Est-ce qu’il y avait une autre occasion où
Page 1715
1 Kovac vous a demandé d’enlever vos vêtements, enfin, toutes
2 les filles étaient obligées de les enlever ?
3 R. Oui. C’était dans un appartement mais dans
4 un autre appartement. C’était à Gornje Polje, mais je n’en
5 suis pas tout à fait sûre. Il nous a demandé d’enlever les
6 vêtements et puis de monter sur la table, de rester debout
7 comme ça et c’est à ce moment-là qu’il a dit qu’il allait
8 nous emmener traverser la ville comme ça toutes nues, qu’il
9 allait nous conduire jusqu’à la rivière et qu’au niveau de
10 la rivière, il allait nous tuer.
11 Q. Quand vous dites « lui », vous pensez à qui,
12 s’il vous plaît ?
13 R. Je pense à Kovac.
14 Q. Quand vous dites : « Il a dit qu’il allait
15 nous emmener à travers la ville jusqu’à la rivière », il
16 l’a fait ou non ?
17 R. Il a dit qu’il allait le faire. Moi, je ne
18 me souviens plus véritablement si c’était lui ou Kostic qui
19 a dit qu’il fallait quand même qu’on s’habille. Eh bien, à
20 ce moment-là, on s’est habillé et c’est là où il nous a
21 emmenées jusqu’à la rivière.
22 Q. Qu’est-ce qui s’est passé à la rivière ?
23 R. J’avoue que je ne me souviens pas
24 véritablement de très près ce qui s’est passé. Je sais que
25 j’étais terrifiée et j’avais été angoissée et je ne savais
Page 1716
1 pas comment ils allaient procéder, comment ils allaient le
2 faire et je sais que beaucoup de temps ne s’est pas écoulé
3 et ensuite, il nous a ramenées dans son appartement.
4 Q. Quand vous dites « lui », vous pensez à
5 Kovac, n’est-ce pas ?
6 R. Oui.
7 Q. Vous avez également mentionné un autre
8 incident, un incident lors duquel Kovac vous a demandé –
9 vous étiez seule – d’enlever vos vêtements. Est-ce que
10 vous pouvez décrire à la Chambre ce qui s’est passé à ce
11 moment-là précis ?
12 R. Moi, j’étais seule à ce moment-là, seule dans
13 une pièce et il m’a demandé d’enlever mes vêtements, de
14 monter sur la table et de danser. Il a mis de la musique
15 et lui, il était sur le lit et il pointait son pistolet sur
16 moi.
17 Q. Est-ce que vous vous souvenez quel type de
18 musique vous avez entendue ?
19 R. Je ne sais pas mais je pense que c’était
20 notre musique type folklorique.
21 Q. Quand vous dites « notre », à quoi pensez-
22 vous ?
23 R. Bien, je pense à la musique de Bosnie.
24 Q. Quand on vous a forcée de vous conduire de
25 cette manière-là, comment vous sentiez-vous ?
Page 1717
1 R. C’est très difficile, pénible de l’expliquer.
2 J’avais peur. J’avais honte également. Je ne sais pas
3 quoi vous dire.
4 Q. Est-ce que vous avez tout simplement eu le
5 sentiment que vous pouviez maîtriser d’une façon ou d’une
6 autre tout ce qui se passait autour de vous ?
7 R. Non.
8 Q. Est-ce que vous vous sentiez comme si vous
9 étiez la propriété de Kovac ?
10 R. Oui.
11 Q. Eh bien, pourriez-vous nous dire pourquoi
12 vous vous sentiez comme ça ?
13 R. Ça aussi, c’est pénible et dur de
14 l’expliquer. Dans l’appartement, il n’y avait que Kovac et
15 Kostic et dans cet appartement, je me trouvais avec AS
16 également. On n’avait pas le droit de sortir. La porte a
17 été fermée à clé et on savait que Kovac allait me prendre
18 dans une chambre alors que Kostic prendrait AS dans l’autre
19 chambre et ça se passait toujours comme ça jusqu’à la fin.
20 Q. Avant, vous avez dit qu’au moment où vous
21 avez été emmenée dans cet appartement, juste au moment où
22 vous étiez emmenée, à part vous-même et AS, il y avait 75
23 et AB. Est-ce que c’est exact ? Est-ce que je vous ai
24 bien comprise ?
25 R. Oui.
Page 1718
1 Q. À quel moment 75 a-t-elle été emmenée
2 ailleurs et AB également ?
3 R. Je ne me souviens pas exactement quel était
4 le moment, mais peu de temps après être arrivée dans cet
5 appartement de Klanfa, mais je ne peux pas vous dire
6 exactement combien de jours elles sont restées dans
7 l’appartement avec nous deux.
8 Q. Est-ce que vous vous souvenez des
9 circonstances dans lesquelles elles ont été emmenées ?
10 R. Je ne me souviens pas tout à fait bien, mais
11 je pense qu’ils sont arrivés tout simplement, ils les ont
12 prises et puis ils les ont emmenées. Je ne me souviens pas
13 véritablement d’un détail très caractéristique, non.
14 Q. Outre le temps que vous nous avez décrit et
15 de cet incident quand on vous a emmenée jusqu’à la rivière,
16 est-ce que normalement, les jeunes filles sortaient de
17 l’appartement ? Est-ce qu’on vous a fait sortir de
18 l’appartement ?
19 R. Je me souviens qu’au moment où moi-même et
20 AS, nous étions toutes seules dans l’appartement, je me
21 souviens que nous avons été emmenées en dehors de
22 l’appartement à plusieurs reprises et quand les deux autres
23 se sont jointes à nous, peut-être deux ou trois fois, on
24 nous a fait sortir. Je ne me souviens pas exactement.
25 Q. Quand vous dites que vous étiez vous-même et
Page 1719
1 AS et que vous avez quitté l’appartement, vous êtes sorties
2 toutes les deux ou bien on vous a fait sortir ?
3 R. On nous a emmenées. On ne pouvait pas sortir
4 de l’appartement toutes seules parce qu’on était toujours
5 enfermé à clé.
6 Q. À cette occasion, où est-ce qu’on vous a
7 emmenée ?
8 R. Moi, je me souviens qu’une fois, on a été
9 emmené dans un appartement à Donje Polje. Une autre fois,
10 nous avons été emmenées dans un autre appartement, mais je
11 ne me souviens pas avec précision ce qui s’était passé et
12 plusieurs fois, nous sommes sorties avec eux dans des
13 cafés, dans des pubs. Voilà !
14 Q. Qu’est-ce qu’ils faisaient au moment où on
15 vous emmenait dans des pubs et dans des cafés ?
16 R. On nous a tout simplement demandé de nous
17 habiller. On nous forçait également de mettre sur nos
18 têtes des couvre-chefs. Il y avait des signes également de
19 leur armée ou quelque chose comme ça et puis je me souviens
20 qu’une fois, on nous a emmenées dans un café. Rien de très
21 caractéristique, enfin. C’était un café tout simple et
22 puis donc on était resté comme ça dans ce café et puis on
23 revenait à la maison.
24 Q. Quand vous dites « ils », est-ce qu’il
25 s’agissait de Kovac et Kostic ?
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1 R. Oui.
2 Q. Pendant que vous étiez dans cet appartement,
3 est-ce que Kovac ou Kostic vous ont frappée ? Est-ce
4 qu’ils vous ont passée à tabac ?
5 R. Kostic m’a frappée une fois. Ça, je me
6 souviens, il m’a frappée une fois. Une autre fois, il m’a
7 menacée avec son couteau. Il a dit qu’il allait me couper
8 le visage. Ça, je me souviens. Non, je ne me souviens pas
9 en ce qui concerne Kovac qu’il m’avait frappée.
10 Q. Est-ce que Kostic ou Kovac vous a menacée
11 d’une autre façon ?
12 R. Oui. Il y avait peut-être une ou deux fois
13 où ils nous ont menacées qu’ils allaient nous tuer, qu’ils
14 allaient nous égorger. Oui, quelque chose dans ce sens-là.
15 Q. Avant qu’ils emmènent AB et 75, est-ce que
16 vous avez pu voir quelles étaient les séquelles que ceci a
17 laissées sur AB ?
18 R. Je ne comprends pas la question.
19 Q. Est-ce que vous avez vu ou éventuellement
20 vous avez appris dans quel état physique et mental était AB
21 au moment où elle a été emmenée de l’appartement ?
22 R. Non. Sur le plan physique, je ne sais pas.
23 Non. Il n’y avait rien que je voyais, tout au moins des
24 traces concrètes, visibles, mais en ce qui concerne l’état
25 psychique, on a pu bien évidemment constater qu’elle
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1 n’était pas en bon état. Elle ne parlait pas beaucoup.
2 Elle se comportait d’une manière assez bizarre de temps à
3 autre et déjà à la maison de Karaman, à Miljevina, elle ne
4 pouvait pas dormir ou bien si elle dormait, elle faisait
5 des cauchemars.
6 Q. Est-ce que vous êtes en mesure de reconnaître
7 Kovac aujourd’hui ?
8 R. Oui.
9 Q. Pourriez-vous, s’il vous plaît, regarder
10 autour de vous très attentivement et me dire si vous le
11 voyez dans le prétoire ?
12 R. Oui, je le reconnais.
13 Q. Est-ce que vous pouvez nous donner sa
14 description, enfin, dire comment il est, comment il est
15 habillé ?
16 R. Je pense qu’il porte un costume gris foncé.
17 Je pense qu’il a une chemise blanche, mais je ne suis pas
18 sûre et puis une cravate grise, une cravate grise peut-être
19 foncée, peut-être claire. Je ne vois pas très bien.
20 Me KUO (interprétation) : Je vais demander à la
21 Chambre de bien vouloir constater que le témoin a identifié
22 l’Accusé Radomir Kovac.
23 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Oui, nous en
24 prenons note.
25 Me KUO (interprétation) :
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1 Q. À quel moment vous êtes partie définitivement
2 de l’appartement de Kovac ?
3 R. Je ne me souviens pas exactement de la date.
4 Je pense que c’était au mois de février, peut-être mi-
5 février ou éventuellement à la fin. Je ne me souviens pas
6 exactement.
7 Q. Est-ce que vous vous souvenez quelles étaient
8 les circonstances dans lesquelles ils ont décidé de vous
9 emmener, de vous faire partir de cet appartement ?
10 R. Oui. Je me souviens qu’il y avait deux
11 personnes, deux soldats du Monténégro. Ils se sont
12 entretenus avec Kovac et Kostic et ils voulaient nous
13 prendre, mais je dois dire que Kovac et Kostic voulaient
14 recevoir en retour de l’argent. Je pense que moi-même
15 ainsi que AS, nous étions vendues par Kovac et Kostic à ces
16 deux Monténégrins. Je pense qu’il s’agissait de 500
17 deutschmarks pour chacune.
18 Q. Qu’est-ce qui s’est passé avec vous par la
19 suite ?
20 R. Vous pensez à moi et à AS ?
21 Q. Oui, tout à fait.
22 R. Je ne sais pas si c’était le lendemain matin,
23 mais peu après cet entretien, on nous a transférées dans un
24 autre appartement et je pense que c’était également un
25 appartement dans l’immeuble Brena. C’est dans cet
Page 1723
1 appartement que se trouvaient les Monténégrins en question
2 et nous avons passé une nuit là-bas, à ma connaissance.
3 Ensuite, ils nous ont transférées jusqu’à un autre
4 appartement qui se trouvait dans le quartier de Brod et
5 c’est là où normalement, on était censé attendre pour que
6 les Monténégrins nous emmènent quelque part derrière la
7 frontière et en direction du Monténégro.
8 Q. Vous avez mentionné que AS a été vendue pour
9 500 deutschmarks. Est-ce que vous également, vous avez été
10 vendue ?
11 R. Oui. Nous avons été vendues toutes les deux,
12 chacune 500 deutschmarks.
13 Q. Est-ce que vous avez entendu cet entretien
14 quand ils ont négocié, ces deux Monténégrins et Kostic avec
15 Kovac ?
16 R. Oui. On l’avait entendu. Nous n’étions pas
17 dans la même pièce AS et moi-même, nous n’étions pas dans
18 la même pièce avec eux deux, mais nous avons entendu une
19 partie de cette conversation.
20 Q. Ils vous ont emmenée au Monténégro et vous
21 avez dépassé la frontière ?
22 R. Oui. Je ne sais pas combien de temps nous
23 avons entendu dans cet appartement à Brod, mais ces
24 Monténégrins nous ont conduites à travers la frontière
25 jusqu’à Niksic, pour parler très précisément.
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1 Q. Vous dites que vous avez été escortée.
2 Comment vous avez passé la frontière ? Comment ça s’est
3 passé ?
4 R. Nous sommes partis en voiture. Il y avait
5 encore un autre Monténégrin avec nous. Lui également, il
6 était de Niksic. Je pense qu’à ce moment-là également, ils
7 se sont approvisionnés en armes. Ils achetaient des armes
8 parce que, de toute façon, ils ont caché des armes un petit
9 peu partout, sous le siège dans la voiture, dans le coffre
10 de la voiture et un petit peu partout et ils nous ont dit
11 qu’une fois quand on arrivera au poste frontalier qui
12 sépare la Bosnie du Monténégro, qu’à ce moment-là, il
13 faudrait qu’on dise qu’on était des Serbes, des jeunes
14 filles serbes et ils nous ont également donné des noms
15 qu’il fallait emprunter et ils nous ont dit également qu’il
16 fallait dire au poste frontalier qu’on ne disposait pas de
17 cartes d’identité, de rien, que tout a été détruit, enfin,
18 un petit peu ce genre-là.
19 Une fois quand on était au poste frontalier, il
20 n’y avait pas véritablement de problème. On est resté une
21 quinzaine de minutes et ce n’est que par la suite, donc une
22 fois passé la frontière, nous sommes allés jusqu’à Niksic.
23 Q. Qu’est-ce qui s’est passé par la suite à
24 Niksic ?
25 R. À Niksic, nous nous sommes installées dans un
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1 appartement de ces Monténégrins, d’un de ces Monténégrins.
2 Quelques jours plus tard, nous avons commencé à travailler
3 au bar comme serveuses dans un café. Nous avons travaillé
4 tout le temps pratiquement dans ce bar et ensuite, on nous
5 a transférées jusqu’à Podgorica.
6 Q. Vous avez dit que vous avez commencé à
7 travailler comme serveuses dans un café. Est-ce qu’on vous
8 a forcée de le faire ou bien c’est vous-même qui avez pris
9 la décision de le faire ?
10 R. Non. Bien évidemment, ce n’était pas
11 volontaire, ce n’était pas bénévole. On nous a forcées de
12 le faire.
13 Q. Est-ce qu’on vous a payée pour ce travail ?
14 R. Non, absolument pas. On ne nous a pas
15 rémunérées, mais AS et moi-même, nous avons réussi à
16 économiser un petit peu d’argent parce que les invités nous
17 laissaient le pourboire un peu plus que normalement ça
18 coûtait, enfin, ce qu’ils donnaient au-delà de la facture.
19 Q. Qu’est-ce qui s’est passé par la suite avec
20 vous une fois que vous avez été transférée à Podgorica ?
21 R. On nous a emmenées dans un appartement à
22 Podgorica, dans un immeuble. Je ne sais pas très
23 exactement quel était l’étage. Je me souviens qu’un autre
24 homme, un Monténégrin, s’y trouvait, mais lui, il
25 travaillait. Donc, il était dans cet appartement peut-être
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1 seulement à partir de 3 h 00 ou 4 h 00 de l’après-midi.
2 Q. Est-ce que vous avez fini par réussir à vous
3 échapper ?
4 R. Oui. Au bout de pas très longtemps à
5 Podgorica, je ne sais pas combien de temps nous y sommes
6 restées, les Monténégrins qui nous ont emmenées jusqu’à
7 Niksic et Podgorica n’étaient pas là. Peut-être ils sont
8 venus une seule fois et puisqu’il n’y avait personne à la
9 maison avant 3 h 00 d’habitude et l’appartement n’était pas
10 fermé à clé, moi et AS, nous avons pu sortir à l’extérieur.
11 Je me souviens que la première fois, nous avions
12 très peur en nous demandant qui nous allions rencontrer
13 dans la rue, et cætera, mais la deuxième fois, c’était déjà
14 plus facile. Je crois qu’il n’y avait pas de guerre à
15 Podgorica. Ce n’était pas l’état de guerre. Les gens se
16 comportaient normalement dans les rues. Donc, nous étions
17 quelque peu soulagées.
18 Donc, une fois par la suite, nous avons essayé de
19 trouver un moyen nous permettant de partir de là-bas. Je
20 me souviens que nous avons trouvé la gare routière. Nous
21 avons réussi à savoir à quelle heure les autobus partaient,
22 quel était le prix des billets, et cætera, et donc nous
23 avons choisi un jour où nous avons décidé de partir de là-
24 bas un jour.
25 Q. Est-ce que vous l’avez fait ?
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1 R. Oui, c’est ce qu’on a fait. Je pense que
2 c’était vers le 5 avril lorsque nous avons quitté Podgorica
3 pour aller à Rozaje.
4 Q. Les deux Monténégrins qui vous ont achetées
5 de Kostic et Kovac, est-ce qu’ils vous ont agressée
6 sexuellement ?
7 R. Oui, toutes les deux, moi et AS. Ils nous
8 ont violées tous les trois, tous ces trois Monténégrins et
9 même ce quatrième qui vivait à Podgorica.
10 Q. En conséquence de tous les viols que vous
11 avez subis pendant tous ces mois, est-ce que vous avez
12 continué à souffrir ?
13 R. D’une certaine manière, oui. Je pense que là
14 j’arrive encore une fois à un moment où il m’est difficile
15 d’expliquer ce que je pense. Je pense qu’en ce qui
16 concerne beaucoup de choses, j’ai décidé d’essayer de les
17 laisser de côté derrière moi, quoique dans moi, il y a
18 toujours et il y aura toujours, bien sûr, des traces de
19 tout cela.
20 Je pense que pendant toute ma vie, certaines
21 pensées, certaines douleurs que je ressentais et que je
22 ressens toujours, ceci ne disparaîtra jamais.
23 Me KUO (interprétation) : Je n’ai plus de
24 questions, Madame la Présidente.
25 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Le conseil
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1 de la Défense. Qui va commencer ?
2 Me PILIPOVIC (interprétation) : Madame la
3 Présidente, je demanderais que le témoin s’approche un peu
4 du micro puisque j’ai eu des problèmes de l’écouter pendant
5 toute sa déposition puisqu’elle ne parle pas à haute voix.
6 Merci.
7 CONTRE-INTERROGÉE PAR Me PILIPOVIC
8 (interprétation) :
9 Q. D’après les données dont l’Accusation
10 dispose, vous avez donné aux enquêteurs de ce Tribunal deux
11 déclarations. Est-ce que vous vous souvenez s’il y en a eu
12 deux ou bien…
13 R. Oui, je me souviens. Il y en a eu deux.
14 Q. Est-ce que vous avez donné d’autres
15 déclarations à quelqu’un d’autre ?
16 R. Non.
17 Q. Donc, juste ces deux-là.
18 Me PILIPOVIC (interprétation) : Je demanderais au
19 Procureur de présenter au témoin…
20 LA GREFFIÈRE : Le Greffe voudrait savoir s’il
21 s’agit bien des déclarations de témoin des 19 et 20 janvier
22 1996 et des 4 et 5 mai 1998.
23 Me PILIPOVIC (interprétation) : Oui.
24 LA GREFFIÈRE : Donc, la déclaration de témoin
25 datée du 19 et 20 janvier 1996 sera cotée D32 des pièces de
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1 la Défense et la déclaration de témoin datée du 4 et 5 mai
2 1998 sera cotée D33 des pièces de la Défense, ces deux
3 documents étant enregistrés de façon confidentielle.
4 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Merci.
5 Poursuivez, Me Pilipovic.
6 Me PILIPOVIC (interprétation) :
7 Q. Selon la déclaration que vous avez donnée aux
8 enquêteurs de ce Tribunal en 1996, vous avez dit que vous
9 avez vécu à Buk Bijela avec votre famille.
10 R. Oui.
11 Q. Avec votre père, mère, frères et sœurs ?
12 R. Oui.
13 Q. Est-ce que vous avez vécu dans un appartement
14 ou dans une maison ?
15 R. Une maison.
16 Q. Votre maison familiale ?
17 R. Oui.
18 Q. Aujourd’hui, au cours de la déposition, vous
19 avez dit que vous avez vécu à Trosanj. Est-ce que vous
20 pourriez m’expliquer ?
21 R. Quoi ?
22 Q. Est-ce que vous avez vécu à Trosanj, à Buk
23 Bijela ou bien peut-être je n’ai pas compris quelque chose,
24 la distance entre Buk Bijela et Trosanj ou bien peut-être
25 vous êtes allée ensuite à Trosanj ?
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1 R. Non. Moi, j’ai vécu à Trosanj. Si vous
2 regardez par rapport à l’autoroute, Trosanj est en haut
3 vers les montagnes. Mjesaja, c’est autour de la route.
4 Mjesaja et Buk Bijela, je dirais qu’il n’y a pas vraiment
5 de différence entre les deux. Par exemple, si vous écrivez
6 l’adresse, vous allez écrire Trosanj et ensuite, vous
7 ajoutez Buk Bijela.
8 Q. Merci. Quel est le métier de votre père et
9 où travaillait-il ?
10 R. (expurgée)
11 (expurgée)
12 Q. Et votre mère ?
13 R. Ma mère est une femme de foyer.
14 Q. À quoi ressemblaient les rapports dans votre
15 famille ou bien plutôt avec qui aviez-vous le rapport le
16 plus intime dans votre famille ?
17 R. Je pense que c’était ma sœur.
18 Q. Merci. Est-ce que vous parliez de vos
19 problèmes avec votre sœur avant le début des conflits, des
20 problèmes dans la région de Foca ?
21 R. Pas toujours, parfois.
22 Q. Quelle était l’attitude de votre sœur ? Est-
23 ce qu’elle essayait, par exemple, de vous conseiller lors
24 de ce genre d’entretiens ?
25 R. Oui. C’est ce qu’elle essayait toujours de
Page 1731
1 faire.
2 Q. Est-ce que votre sœur vous demandait de lui
3 donner votre avis à vous concernant ses propres problèmes,
4 des problèmes quotidiens auxquels peuvent faire face deux
5 sœurs de votre âge à l’époque ?
6 R. Pas tellement. Elle était plus âgée que moi.
7 Donc, je pense qu’elle ne m’a jamais demandé mon avis, mon
8 conseil.
9 Q. Vous m’avez dit que sur le territoire de la
10 municipalité de Foca, des choses bizarres se passaient
11 avant avril 1992. Est-ce que vous pourriez m’expliquer ou
12 bien expliquer aux juges et à tout le monde ce que vous
13 vouliez dire en disant qu’il s’agissait de quelque chose de
14 bizarre ?
15 R. Bizarre ? Eh bien, par exemple, moi,
16 j’allais à l’école à l’époque, mais les cours se
17 terminaient plus tôt que d’habitude, surtout au cours de la
18 période juste avant le 8 avril, avant que les coups de feu
19 commencent. Les journées de travail et l’école étaient
20 raccourcies. Ils nous disaient de rentrer à la maison.
21 Parfois, il y avait des barrages routiers. Une
22 fois, je ne suis pas rentrée chez moi, je n’ai pas pu
23 rentrer chez moi à cause du barrage routier puis quelques
24 jours avant que les coups de feu ont commencé, il y a eu
25 une sorte de rassemblement devant la municipalité, quelque
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1 chose comme ça.
2 Q. Ce rassemblement devant la municipalité a eu
3 lieu quand et est-ce que vous savez quoi que ce soit
4 concernant ce rassemblement ?
5 R. Je ne sais pas très exactement quand ce
6 rassemblement a eu lieu, peut-être juste quelques jours
7 avant que le conflit n’a éclaté, avant les coups de feu,
8 mais je ne sais pas très exactement pourquoi ce
9 rassemblement était organisé.
10 Q. Au cours de cette période, est-ce que vous
11 avez entendu parler de l’affaire Focatrans ? Par exemple,
12 est-ce qu’on parlait de cela dans votre famille ou bien
13 est-ce que vous avez eu d’autres sources d’informations
14 concernant cette affaire ?
15 R. Ça ne me dit rien du tout l’affaire
16 Focatrans.
17 Q. Comment alliez-vous à l’école jusqu’à ce
18 moment-là, jusqu’au moment où vous avez arrêté d’aller à
19 l’école ?
20 R. Je prenais un autobus toujours.
21 Q. Quel autobus ?
22 R. Qu’est-ce que vous voulez dire ?
23 Q. Est-ce qu’il y avait quelque chose de
24 caractéristique concernant ces autobus ou bien est-ce qu’il
25 s’agissait des autobus que vous preniez d’habitude ?
Page 1733
1 R. C’était des autobus que je prenais
2 d’habitude, que je prenais toujours. Je ne peux pas citer
3 quelques caractéristiques particulières.
4 Q. Je sais que vous êtes jeune, mais est-ce que
5 vous avez des connaissances ou bien est-ce que dans votre
6 maison, on parlait du fait que certains partis politiques
7 ont été créés et qu’à partir du moment où ces partis ont
8 été créés, des rapports particuliers ont été créés entre
9 eux ?
10 R. Non. Je ne savais rien du tout à ce sujet.
11 Q. Tout à l’heure, lorsque j’ai posé une
12 question, vous avez mentionné un barrage routier.
13 R. Oui.
14 Q. Où se trouvait ce barrage routier ?
15 R. Je ne me souviens pas très exactement où se
16 trouvait ce barrage routier.
17 Q. Est-ce que vous savez qui l’a érigé ?
18 R. Je ne sais pas. Je ne pourrais pas vous le
19 dire non plus.
20 Q. Dans ce village où vous avez vécu, est-ce que
21 vous pouvez me dire combien de Serbes il y avait et combien
22 de musulmans ?
23 R. Je ne pourrais pas vous le dire.
24 Q. Est-ce que par hasard, vos voisins étaient
25 des Serbes et si oui, quels étaient les rapports entre vous
Page 1734
1 et vos voisins ?
2 R. Mes premiers voisins étaient musulmans.
3 Quand je parle du village de Trosanj, on peut parler de la
4 population musulmane. À Mjesaja, par exemple, la
5 population était mixte, musulmane et serbe, et aux
6 alentours aussi, je pense que la population était serbe.
7 Il y a eu des Serbes dans la population.
8 En ce qui concerne les rapports, je n’ai rien à
9 dire. Je n’ai rien remarqué. Rien a changé par rapport à
10 avant.
11 Q. Vous avez dit que vous-même et votre famille,
12 vous êtes allés dans les bois ?
13 R. Oui.
14 Q. Est-ce que vous pouvez me dire ce que ça veut
15 dire ?
16 R. Je ne connais pas la date exacte. Je ne
17 pourrais pas vous dire la date exacte.
18 Q. Peut-être je peux vous aider. Par rapport à
19 cet événement qui a eu lieu dans votre village le 3
20 juillet, c’était quand par rapport à cette date-là du 3
21 juillet ?
22 R. Je ne comprends pas.
23 Q. Combien de temps avant ce jour-là êtes-vous
24 partie dans les bois ?
25 R. Ça non plus, je ne suis pas sûre. Je pense
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1 que pendant une certaine période, nous étions dans les
2 bois, nous dormions avec deux autres familles et pendant
3 une certaine période, nous sommes rentrés à la maison, nous
4 étions à la maison et ensuite, nous sommes repartis dans
5 les bois de nouveau, mais quant à la question de savoir
6 combien de temps avant l’attaque ceci s’est produit, je ne
7 peux pas vous le dire avec exactitude.
8 Q. Est-ce que vous pouvez me dire pendant la
9 période que vous avez passée dans les bois, est-ce que vous
10 étiez dans les bois toute la journée, jour et nuit, ou bien
11 est-ce que c’était différent ?
12 R. D’habitude, on restait toute la journée et
13 toute la nuit dans la forêt, quoique ma mère et mon père
14 rentraient à la maison pendant la journée afin de
15 s’acquitter de certaines tâches, de s’occuper de leurs
16 affaires.
17 Q. Pendant cette période que vous avez passée
18 dans les bois, comme vous dites, et que vous rentriez à la
19 maison, est-ce que quelque chose se passait aux alentours,
20 autour de votre village et aussi autour de l’endroit où
21 vous étiez dans les bois ?
22 R. Dans les environs de notre village ou bien
23 dans notre village, je pense que rien ne se passait, sauf
24 que nous n’osions aller nulle part en dehors de ce village,
25 mais rien de typique ne se produisait avant le 3 juillet,
Page 1736
1 rien de caractéristique.
2 Q. Est-ce que vous pourriez me dire pourquoi
3 vous n’osiez pas vous déplacer librement ? Est-ce qu’il y
4 a eu des menaces ? Qui est-ce qui vous a dit qu’il fallait
5 que vous vous cachiez ?
6 R. Je ne me souviens pas très bien de tout ça.
7 J’avais 15 ans et demi. D’habitude, à cet âge-là, on
8 écoute ce que quelqu’un d’autre dit, mais je crois qu’une
9 sorte de peur existait. Je pense que tout le monde savait
10 ou bien ils ont entendu parler de cela dans les médias, par
11 exemple, en ce qui concerne les événements qui se sont
12 produits dans un autre village, et cætera.
13 Q. Vous avez dit à un moment qu’il n’y a pas eu
14 d’électricité dans votre village. Comment est-ce que vous
15 avez pu apprendre ce genre de choses, alors, ce que vous
16 venez de dire ?
17 R. Eh bien, en ce qui concerne la radio, vous
18 n’avez pas besoin nécessairement de l’électricité. Ça peut
19 fonctionner avec des piles aussi ou bien il y a d’autres
20 moyens que je ne connais pas tellement bien.
21 Q. Vous avez dit que vous étiez sous une toile
22 de tente dans la forêt, vous, votre famille et encore une
23 famille ?
24 R. Encore deux familles.
25 Q. Encore deux ?
Page 1737
1 R. Oui.
2 Q. Compte tenu des mesures de protection
3 concernant ces personnes, est-ce que vous pouvez me décrire
4 ces deux autres familles ? Est-ce que vous pouvez écrire
5 leurs noms sur un papier ?
6 R. [Le témoin le fait]
7 LA GREFFIÈRE : Ce document prendra le numéro D34
8 des pièces de la Défense.
9 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Oui, Madame
10 Pilipovic.
11 Me PILIPOVIC (interprétation) : Merci.
12 Q. Vous avez dit en ce qui concerne ces deux
13 familles… ou plutôt, d’où viennent ces deux familles ?
14 R. C’était nos premiers voisins.
15 Q. Combien de membres y avait-il dans la
16 première et combien dans la deuxième famille ?
17 R. Dans la première famille, il y a eu quatre
18 membres et c’était la même chose en ce qui concerne la
19 deuxième.
20 Q. Combien d’hommes au total qui avaient le même
21 âge à peu près que votre père y avait-il ?
22 R. Je ne sais pas l’âge exact, mais en ce qui
23 concerne les hommes un peu plus âgés, ils étaient au nombre
24 de trois.
25 Q. Combien y avait-il de personnes de votre âge
Page 1738
1 ?
2 R. De mon âge, il n’y avait personne. Il n’y
3 avait personne de mon âge.
4 Q. Sauf vous et votre sœur ? Je dis cet âge-là
5 approximativement en parlant de jeunes. Les autres, ils
6 étaient tous plus jeunes que vous ?
7 R. En ce qui concerne l’une des deux familles,
8 ils étaient plus jeunes. Je pense que l’enfant aîné avait
9 peut-être 10 ans, 12 ans peut-être. Dans l’autre famille,
10 il y a eu deux hommes adultes, âgés d’environ 25 ans peut-
11 être.
12 Q. Vous avez dit que vous avez passé la nuit
13 dans la forêt, que vous passiez les nuits dans la forêt.
14 Est-ce que quelqu’un vous gardait pendant la nuit ou bien
15 est-ce que quelqu’un de ces hommes portaient des armes au
16 cas où quelqu’un vous attaquerait ?
17 R. Personne de nous n’avait d’arme et je pense
18 que les personnes âgées qui étaient avec nous restaient
19 éveillées pendant toute la nuit.
20 Q. Vous avez dit que vous y êtes restée pendant
21 combien de temps avant le 3 juillet, 15 jours, un mois,
22 plus, moins ?
23 R. Je ne peux pas vous le dire.
24 Q. Vous ne pouvez pas ?
25 R. Non, je ne peux pas.
Page 1739
1 Q. Très bien ! Merci. Je souhaite vous poser
2 maintenant quelques questions concernant votre arrivée dans
3 le Partizan.
4 R. Oui.
5 Q. Est-ce que vous pourriez me dire quand est-ce
6 que vous êtes venue au Partizan ?
7 R. En ce qui concerne la date, je ne m’en
8 souviens pas très bien. C’était peut-être deux semaines
9 après le 3 juillet à peu près. Je pense qu’on a passé deux
10 semaines peut-être dans le lycée avant d’aller au Partizan.
11 Peut-être deux semaines. Je ne suis pas sûre.
12 Q. Est-ce que vous seriez d’accord avec moi pour
13 dire que c’était vers le 17, 18 juillet ?
14 R. Oui. On peut dire comme ça, mais comme je
15 l’ai dit, je ne suis pas tout à fait sûre.
16 Q. Est-ce que vous pourriez me dire ce 17 ou 18
17 juillet, lorsque vous êtes venue, qu’est-ce qui se passait
18 au Partizan ?
19 R. Vous voulez dire…
20 Q. Je parle des conditions, de vos rapports
21 mutuels.
22 R. Avant qu’on ne vienne au Partizan, il a fallu
23 qu’on nettoie, qu’on range tout ça. Nous dormions sur les
24 tapis de gymnastique. Les conditions de vie étaient très,
25 très difficiles. En ce qui concerne les conditions
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1 hygiéniques, elles étaient minables. La nourriture était
2 très mauvaise aussi. Je ne sais pas quoi dire exactement.
3 Q. Selon votre déclaration donnée aux enquêteurs
4 de ce Tribunal qui a été versée au dossier comme pièce à
5 conviction D32, à la page 9… si ce n’est pas un problème,
6 veuillez prendre votre déclaration. Paragraphe 3, ça
7 commence par : « Dans Partizan… »
8 R. Oui.
9 Q. Veuillez lire cette première phrase : « Dans
10 le Partizan… »
11 R. Vous voulez dire la phrase : « Nous étions
12 les premiers détenus dans le Partizan… »
13 Q. Non. Le troisième paragraphe.
14 R. Vous voulez dire : « Il y a eu parfois de
15 l’électricité dans le Partizan… », et cætera ?
16 Q. Non. Le paragraphe suivant.
17 R. « J’ai été détenue dans le Partizan environ
18 un mois. »
19 Q. Continuez.
20 R. « Pendant les trois ou quatre premiers jours,
21 ils nous laissaient seuls. »
22 Q. Merci. Cela suffit. Vous comprenez ce que
23 vous avez lu. Dites-moi maintenant, s’il vous plaît,
24 combien de temps avez-vous passé au Partizan ?
25 R. Ça non plus, je ne suis pas tout à fait sûre
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1 en ce qui concerne la période, les dates.
2 Q. Est-ce que ceci a duré un mois ou plus ou
3 moins ?
4 R. Je crois que ceci a duré environ un mois,
5 mais je ne suis pas sûre si c’était plus ou moins que ça.
6 Q. Est-ce que vous pouvez m’expliquer cette
7 autre partie : « Les trois ou quatre premiers jours… »
8 R. « …ils nous laissaient seuls. »
9 En fait, je ne comprends pas, moi, ce à quoi on
10 fait référence ici. Donc, je ne peux pas expliquer.
11 Q. Mais c’est votre déclaration ?
12 R. Oui. Bien sûr que oui, mais comme je dis, je
13 ne vois pas ce à quoi on fait référence ici en disant qu’on
14 nous laissait seuls.
15 Q. Est-ce que vous pouviez sortir de cette salle
16 de sports ? Est-ce que vous pouviez vous déplacer à
17 l’extérieur, par exemple ?
18 R. Nous pouvions sortir, par exemple, dans la
19 cour, aux alentours donc du Partizan mais pas plus loin.
20 Q. Donc, si j’ai bien compris, vous pouviez
21 sortir dans la cour ?
22 R. Oui. Je veux dire devant l’entrée à peu
23 près.
24 Q. Est-ce que devant cette salle, ce gymnase de
25 Partizan, est-ce qu’il y avait des gardes ?
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1 R. Oui, il y a eu des gardes.
2 Q. Est-ce qu’ils étaient là pendant la journée
3 et pendant la nuit aussi ?
4 R. Oui. Je pense qu’ils y étaient jour et nuit.
5 Q. Est-ce que vous savez et est-ce que vous y
6 avez rencontré une femme de nationalité serbe et est-ce que
7 vous avez parlé avec elle ?
8 R. Je ne me souviens pas de ça.
9 Q. Est-ce que le nom Vida vous dit quelque chose
10 ?
11 R. Non.
12 Q. Est-ce que vous pouvez me dire combien de
13 gardes y avait-il dans chaque équipe ?
14 R. Je ne me souviens pas. Je crois que peut-
15 être deux, mais je ne suis pas sûre.
16 Q. À quoi ressemblaient vos rapports avec les
17 gardes ou plutôt comment les gardes vous traitaient-ils ?
18 R. Je n’ai jamais remarqué ça. Je n’ai jamais
19 parlé avec eux. Alors, je ne sais pas vraiment.
20 Q. Pourriez-vous, s’il vous plaît, me dire
21 combien de fois on vous a fait sortir du gymnase Partizan ?
22 R. Je ne peux pas vous le dire. Je ne sais pas
23 combien de fois.
24 Q. Permettez-moi de vous aider et d’essayer de
25 rafraîchir votre mémoire pour vous rappeler les endroits
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1 où, d’après vos déclarations, on vous a emmenée. Est-ce
2 que je peux ainsi vous permettre de rafraîchir vos
3 souvenirs ?
4 R. Beaucoup de temps s’est écoulé depuis ces
5 événements. Je me souviens de certaines occasions où on
6 m’a fait sortir du gymnase, mais pas d’autres. Tout ce que
7 je sais c’est qu’on m’a fait souvent sortir.
8 Q. Permettez-moi de vous rappeler qu’en 1996,
9 vous avez fait une déclaration et vous en avez fait une
10 autre en 1998. Pourriez-vous, s’il vous plaît, me dire
11 quand vous vous souveniez mieux des événements dont vous
12 nous parlez aujourd’hui ? Est-ce que votre mémoire était
13 meilleure maintenant ou aujourd’hui ?
14 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Ce témoin
15 avait 15 ans et demi. Donc, elle n’est pas en mesure de
16 répondre au genre de questions que vous lui posez, à savoir
17 si sa mémoire était meilleure ou pas. Il n’est pas juste
18 de lui poser ce genre de questions.
19 Me PILIPOVIC (interprétation) : Madame la
20 Présidente, je vous prie de m’excuser, mais en 1996, le
21 témoin a donné une déclaration extrêmement détaillée au
22 sujet des événements. Donc, je voulais simplement vérifier
23 si ce qu’elle a dit à l’époque était conforme à la réalité.
24 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Oui, mais
25 vous n’avez pas à lui demander quel est l’état de sa
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1 mémoire. Vous avez simplement à peut-être lui rappeler ce
2 qu’elle a dit à l’époque, mais pas à lui poser des
3 questions de ce genre.
4 Me PILIPOVIC (interprétation) : Je vais demander
5 au témoin de passer à la page 9 de la déclaration de 1996.
6 Q. Dernier paragraphe sur cette page : « Très
7 souvent à partir du gymnase, on nous emmenait généralement
8 dans des appartements et des maisons qui se trouvaient
9 autour de Foca. »
10 R. Oui. Le plus souvent, j’étais emmenée avec
11 75.
12 Q. Est-ce que vous pouvez continuer la lecture ?
13 R. « On nous emmenait à différents endroits
14 comme Brena, Donje Polje, Gornje Polje, Trnovace, près de
15 l’école primaire de Foca et dans le quartier de Aladza. »
16 Q. Vous souvenez-vous de combien de fois on vous
17 a emmenée à l’immeuble Brena ?
18 R. À partir de Partizan ?
19 Q. Oui.
20 R. Je ne peux pas vous donner de chiffre exact.
21 Q. Est-ce qu’on vous a emmenée à partir du
22 gymnase à Brena ?
23 R. Je ne peux pas vous le dire non plus.
24 Q. Vous avez parlé de Donje Polje. Est-ce qu’il
25 s’agissait d’un appartement ou d’une maison ? Pouvez-vous
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1 nous décrire cet endroit ?
2 R. Je ne m’en souviens pas.
3 Q. Donje Polje, est-ce que vous vous souvenez
4 qui vous a emmenée ?
5 R. Non.
6 Q. Pourriez-vous m’expliquer en ce qui concerne
7 le gymnase où se trouve Donje Polje par rapport au gymnase
8 Partizan ?
9 R. C’est une partie de la ville qui s’appelle
10 Donje Polje.
11 Q. Est-ce que c’est une partie urbaine de la
12 ville de Foca ?
13 R. Oui.
14 Q. Là-bas, est-ce qu’on trouve plutôt des
15 immeubles ou des maisons individuelles ?
16 R. Les deux, je crois, aussi bien des maisons
17 que des immeubles d’habitation.
18 Q. En ce qui concerne Gornje Polje ?
19 R. Je ne peux pas vous le dire.
20 Q. Où se trouve Gornje Polje par rapport au
21 gymnase Partizan ?
22 R. Je ne peux pas vous le dire.
23 Q. Est-ce que c’est une partie de la ville de
24 Foca ?
25 R. Oui. Gornje Polje et Donje Polje sont des
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1 parties de Foca.
2 Q. Qu’en est-il de Trnovace ?
3 R. Trnovace, c’est plutôt un village. En tout
4 cas, c’est un peu plus éloigné de Foca.
5 Q. Est-ce qu’on vous y a emmenée également
6 pendant que vous séjourniez au gymnase Partizan ?
7 R. Oui.
8 Q. Pouvez-vous me dire, s’il vous plaît, combien
9 de fois on vous a emmenée à Aladza ?
10 R. Je me souviens qu’on m’y a emmenée une fois.
11 Je pense qu’on m’y a emmenée plusieurs fois, mais je ne me
12 souviens précisément que d’une fois.
13 Q. Vous nous dites plusieurs fois. Pouvez-vous
14 nous dire combien de fois, une fois, deux fois, trois fois
15 ?
16 R. Non, je ne peux pas.
17 Q. Vous souvenez-vous qui vous a emmenée
18 plusieurs fois ?
19 R. À Aladza ?
20 Q. Oui.
21 R. Je crois que c’était toujours Kunarac.
22 Enfin, je pense que vous voulez parler de la maison de
23 Aladza.
24 Q. Oui. Cette maison à Aladza, où se trouve-t-
25 elle par rapport au gymnase Partizan, à quelle distance ?
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1 Est-ce qu’on peut s’y rendre à pied ou est-ce qu’il faut y
2 aller en voiture ?
3 R. Bien entendu, on peut y aller à pied.
4 Aladza, c’est un quartier de la ville de Foca, mais je ne
5 peux pas vous dire exactement quelle est la distance.
6 Q. Oui, mais vous avez dit qu’on pouvait y aller
7 aussi bien à pied qu’en automobile. Vous, comment vous y
8 rendiez-vous ?
9 R. Le plus souvent, en voiture.
10 Q. La première fois qu’on vous a emmenée à
11 Aladza, c’était quand ?
12 R. Je ne m’en souviens pas. Je ne me souviens
13 que de cette occasion. C’était la veille du jour où on
14 nous a emmenées à Miljevina.
15 Q. Donc, je comprends. Vous vous souvenez de ce
16 jour. Je vous demanderais donc de vous référer à la page 9
17 de votre déclaration une fois encore. Vous dites :
18 « Pendant les deux ou trois premiers jours, on nous a
19 laissées tranquilles. »
20 Donc, si j’ai bien compris, cela signifiait que
21 vous étiez libre, personne n’est venu au gymnase Partizan ?
22 R. Je ne sais pas trop quoi dire à ce sujet.
23 Q. Après ces trois ou quatre jours, où vous a-t-
24 on emmenée pour la première fois et quand ?
25 R. Je ne sais pas exactement combien de jours se
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1 sont écoulés entre ce moment-là et notre arrivée, mon
2 arrivée au gymnase Partizan et je ne me souviens pas
3 exactement où on m’a emmenée cette première fois où on m’a
4 fait sortir.
5 Q. Donc, en ce qui concerne votre arrivée au
6 gymnase Partizan, ces trois ou quatre premiers jours et
7 puis le moment où on vous a emmenée à Miljevina, est-ce que
8 vous vous souvenez quand vous avez quitté le gymnase ?
9 R. Je ne comprends pas.
10 Q. Je veux parler des moments où on vous a
11 emmenée à d’autres endroits de manière organisée.
12 R. Vous voulez parler de moi ou d’autres
13 personnes ?
14 Q. Moi, je ne sais pas combien de personnes.
15 C’est à vous de nous le dire combien d’entre vous sortaient
16 du gymnase Partizan pour se rendre ailleurs.
17 R. Je n’ai eu connaissance que personne soit
18 sorti sans avoir été emmené.
19 Q. Oui, mais je voudrais vous rappeler qu’un
20 échange a été organisé pendant cette période pour aller à
21 Cajnice.
22 R. Oui.
23 Q. Vous souvenez-vous quand cela s’est produit ?
24 R. Non, je ne m’en souviens pas.
25 Q. Vous avez dit qu’il y avait plusieurs
Page 1749
1 personnes. Vous souvenez-vous qui étaient ces personnes,
2 les personnes qui sont allées avec vous ?
3 R. Je ne me souviens pas qui ils étaient.
4 Q. Est-ce que vous pouvez utiliser la liste que
5 vous avez sous les yeux ou écrire sur une feuille de papier
6 le nom des gens qui sont partis avec vous, qui sont sortis
7 avec vous ?
8 R. Je ne pourrais pas écrire le nom de tous ces
9 gens parce qu’ils étaient très nombreux et puis je ne me
10 souviens pas exactement qui c’était.
11 Q. Oui, mais vous pourriez écrire les gens dont
12 vous vous souvenez à partir de la liste que vous avez sous
13 les yeux.
14 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Pourquoi ne
15 peut-elle pas utiliser les pseudonymes, les numéros ? Il
16 s’agit bien, n’est-ce pas, de la pièce à conviction 193, de
17 la liste ?
18 Me PILIPOVIC (interprétation) : Oui. Elle peut
19 tout à fait utiliser la liste si elle souhaite le faire.
20 Elle peut nous donner les noms de code, les pseudonymes qui
21 figurent sur cette liste.
22 R. Bien, je ne suis pas vraiment sûre. Je me
23 souviens uniquement avec certitude du numéro 75 et aussi du
24 numéro 50, je crois. En ce qui concerne les autres, je ne
25 peux rien dire avec certitude.
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1 Q. Vous avez donc dit 75 et 50 ?
2 R. Oui.
3 Q. Pouvez-vous nous donner une idée du moment où
4 cela s’est passé ? Est-ce que c’était avant le 2 août 1992
5 ?
6 R. Je ne peux pas vous le dire.
7 Q. Pouvez-vous nous dire combien de nuits vous
8 avez passées à l’extérieur ?
9 R. Je ne m’en souviens pas très bien non plus,
10 mais nous n’avons pas passé beaucoup de temps.
11 Q. Est-ce que c’était une nuit, deux ou trois ?
12 R. Je ne sais pas.
13 Q. Aujourd’hui, vous avez dit que vous vous
14 souveniez d’un moment où on vous a emmenée à Aladza.
15 R. Oui.
16 Q. Quand est-ce que c’était ?
17 R. Si vous me demandez encore une fois une date,
18 je dois vous répéter que je ne le sais pas. En ce qui
19 concerne cette fois où on nous a emmenées à Aladza, je me
20 souviens que c’était la veille du jour où on nous a
21 emmenées à Miljevina, mais je ne peux pas vous donner la
22 date exacte.
23 Q. Quand est-ce que c’était ? Je veux dire est-
24 ce que c’était pendant la journée ou pendant la nuit ?
25 R. Dans l’après-midi, je crois, mais je n’en
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1 suis pas sûre à 100 pour cent.
2 Q. L’après-midi. Donc, est-ce que c’était à 5 h
3 00, 6 h 00, 7 h 00 du soir ?
4 R. Peut-être vers ces heures-là, mais comme je
5 l’ai déjà dit, je n’en suis pas sûre. En tout cas, ce que
6 je veux dire c’est que je ne pense pas qu’il faisait nuit
7 déjà, mais je ne peux pas vous le dire avec certitude.
8 Q. Qui est venu au gymnase Partizan ?
9 R. Je me souviens uniquement de Kunarac. Je ne
10 me souviens pas des autres.
11 Q. Est-ce qu’il y avait d’autres soldats avec
12 lui et combien ?
13 R. Je ne m’en souviens pas.
14 Q. Comment est-il venu au gymnase Partizan ?
15 R. Je crois qu’il est venu en voiture.
16 Q. Vous souvenez-vous quelle automobile il
17 conduisait ?
18 R. Non.
19 Q. Vous souvenez-vous de la couleur de la
20 voiture ?
21 R. Non.
22 Q. Quand il est arrivé, comment était-il habillé
23 à cette occasion ?
24 R. Je ne sais pas. Je crois qu’il portait
25 toujours une tenue de camouflage, un uniforme de
Page 1752
1 camouflage, bien que je n’en suis pas sûre non plus.
2 Enfin, ce que je veux dire, je ne me souviens pas
3 exactement et je ne suis pas trop sûre de la tenue qu’il
4 avait ce jour-là.
5 Q. Est-ce que sur cette tenue de camouflage, il
6 y avait des insignes ?
7 R. Je ne m’en souviens pas.
8 Q. Qu’en était-il des personnes qui
9 l’accompagnaient ? Vous souvenez-vous de quoi elles
10 avaient l’air ?
11 R. Non.
12 Q. Est-ce qu’elles aussi étaient vêtues
13 d’uniformes militaires ?
14 R. Je ne m’en souviens pas.
15 Q. Quand il est venu, et vous nous dites qu’il
16 est venu en automobile, vous ne vous souvenez pas qui était
17 avec lui, de quoi ils avaient l’air. Lesquelles d’entre
18 les femmes et les jeunes filles sont allées avec lui ?
19 R. Le numéro 75, 50, DB et moi-même.
20 Q. Quand vous êtes arrivée à la maison à Aladza,
21 qui y avez-vous trouvé ?
22 R. Je me souviens qu’il y avait des soldats et
23 qu’il y avait également quelqu’un d’autre, le numéro 190.
24 Q. Quand vous êtes arrivée dans cette maison, il
25 y avait des soldats. Pouvez-vous vous souvenir du nom de
Page 1753
1 certains de ces soldats ? Je veux parler de leur nom, de
2 leur surnom ou d’éléments particuliers en ce qui les
3 concernait que vous avez remarqués à votre arrivée.
4 R. Eh bien, pour ce qui est des soldats, il n’y
5 en a qu’un dont je me souvienne. Son nom était Goran. Je
6 me souviens d’un autre. Son surnom était Tolja. Son nom
7 de famille, je crois, était Toljic, mais je ne me souviens
8 pas des noms des autres. Où j’étais assise, je ne peux pas
9 vous le dire exactement.
10 Q. Est-ce que vous pouvez, s’il vous plaît, nous
11 décrire ce Goran ? À quoi ressemblait-il ?
12 R. Je ne l’ai vu qu’une fois ce jour-là et tout
13 ce dont je me souviens c’est qu’il était grand, il avait
14 les cheveux châtains ou blonds foncés.
15 Q. Est-ce que vous lui avez parlé ?
16 R. Oui, je crois, mais quant à vous dire de quoi
17 nous avons parlé, je ne m’en souviens absolument pas.
18 Q. Est-ce qu’il vous a dit qu’il avait été
19 blessé ?
20 R. Je ne m’en souviens pas.
21 Q. Combien de temps êtes-vous restés assis
22 ensemble dans la maison et pouvez-vous me décrire un petit
23 peu cette maison, la disposition des pièces ?
24 R. Qu’est-ce que vous voulez dire par combien de
25 temps on est resté là assis ?
Page 1754
1 Q. Quand vous êtes entrée dans la maison, vous
2 dites que vous avez parlé à Goran. Est-ce que vous parlez
3 à quelqu’un d’autre et combien de temps êtes-vous restée là
4 assise avec lui ?
5 R. On est arrivé là, on y a passé toute la nuit.
6 Le lendemain, on nous a emmenées à Miljevina. En ce qui
7 concerne la disposition des pièces dans cette maison, au
8 rez-de-chaussée… je ne me souviens pas, en fait, si c’était
9 le rez-de-chaussée ou un garage ou une partie attenante à
10 la maison. C’était même peut-être dans la cour. Il y
11 avait une sorte d’atelier. Ça ressemblait à un atelier.
12 On montait des escaliers à partir de là pour entrer dans la
13 maison et quand on arrivait en haut, à gauche, si je me
14 souviens bien, il y avait une cuisine, à droite, il y avait
15 une pièce et en face, il y avait la salle de bain et à
16 gauche de la salle de bain, il y avait une autre pièce.
17 Q. Où étiez-vous assise ? Dans laquelle de ces
18 pièces ?
19 R. Je ne me souviens pas, mais je crois que j’ai
20 passé la plupart du temps dans la pièce située à gauche de
21 la salle de bain et les fenêtres de cette pièce donnaient
22 sur la rue.
23 Q. Est-ce qu’il y avait de l’électricité dans la
24 maison ?
25 R. Je ne me souviens pas.
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1 Q. Vous nous dites que vous étiez dans la pièce
2 située à gauche ?
3 R. Oui. Je crois que c’était à gauche de la
4 salle de bain.
5 Q. Quand est-ce que vous vous êtes rendue dans
6 cette pièce ?
7 R. Je ne m’en souviens pas.
8 Q. À partir du moment où vous êtes arrivée ?
9 R. Non. Je ne sais pas exactement. Je ne sais
10 pas exactement dans quelle pièce j’étais, combien de temps,
11 et cætera.
12 Q. Les autres jeunes filles qui y sont venues
13 avec vous, où étaient-elles ?
14 R. Je ne m’en souviens pas non plus.
15 Q. Vous souvenez-vous du numéro 75, vous
16 souvenez-vous où elle était ?
17 R. Non.
18 Q. Et DB, votre sœur ?
19 R. Non.
20 Q. Et le numéro 50 ?
21 R. Je crois que le numéro 50, on l’a emmenée
22 ailleurs quand on est arrivé à la maison. Je crois que
23 quelqu’un d’autre l’a emmenée ailleurs.
24 Q. À partir du moment où vous êtes arrivée
25 jusqu’au moment où on l’a emmenée ailleurs, combien de
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1 temps s’est écoulé ? Est-ce que c’est avant que vous ne
2 montiez à l’étage ?
3 R. Oui, je crois.
4 Q. Vous souvenez-vous qui l’a emmenée ?
5 R. Non.
6 Q. Pendant cette soirée, est-ce que vous êtes
7 revenue dans la maison ?
8 R. Autant que je le sache, non.
9 Q. Qui vous a emmenée dans la pièce à gauche ?
10 Si j’ai bien compris, elle se trouve au dernier étage de la
11 maison ?
12 R. Bien, toutes ces pièces, la cuisine, cette
13 pièce, celle qui se trouve à gauche de la salle de bain se
14 trouvent à un étage supérieur.
15 Q. Donc, tout se trouvait à l’étage. Qui vous a
16 emmenée à l’étage ?
17 R. Je ne me souviens pas.
18 Q. Combien de temps avez-vous passé dans cette
19 pièce ?
20 R. Je ne peux pas vous le dire non plus. Je ne
21 sais pas.
22 Q. Vous souvenez-vous de quelque chose
23 d’inhabituel qui s’est passé cette nuit-là ?
24 R. Non, non, je ne me souviens pas.
25 Q. Est-ce qu’il s’est passé quoi que ce soit,
Page 1757
1 est-ce qu’il vous est arrivé quoi que ce soit cette nuit-là
2 dans cette maison ?
3 R. Qu’est-ce que vous voulez dire, qui m’est
4 arrivé ?
5 Q. Quand vous êtes allée dans la pièce située à
6 l’étage, je vous ai demandé combien de temps vous aviez
7 passé dans cette pièce à l’étage.
8 R. Je ne sais pas combien de temps j’y ai passé.
9 Q. Avec qui étiez-vous dans cette pièce ?
10 R. Je ne m’en souviens pas non plus. Tout ce
11 dont je me souviens c’est qu’alors que je me trouvais dans
12 la maison, j’étais dans une pièce, une autre pièce et j’ai
13 également été dans l’atelier qui se trouve dans la cour.
14 Q. Dans la première pièce, avec qui étiez-vous ?
15 R. Dans la première pièce à droite, j’étais avec
16 Kunarac.
17 Q. Quand est-ce que c’était par rapport au
18 moment où vous êtes arrivée ?
19 R. Je ne m’en souviens pas. Je ne me souviens
20 pas du tout.
21 Q. Avec qui étiez-vous dans la deuxième pièce
22 après ?
23 R. Je crois que j’étais dans l’atelier avec
24 Toljic, bien que je ne sois pas très sûre. Je ne me
25 rappelle plus de la séquence des événements, de l’ordre
Page 1758
1 dans lequel ils se sont déroulés.
2 Q. Pendant la nuit, est-ce qu’on vous a fait
3 sortir de la maison ?
4 R. Non, non. On ne m’a pas fait sortir plus
5 loin que la cour.
6 Q. Est-ce que vous avez pris une voiture cette
7 nuit-là ? Est-ce que vous êtes montée dans une voiture ?
8 R. Je ne m’en souviens pas.
9 Q. Est-ce que le nom de Bane vous dit quelque
10 chose ?
11 R. Je ne me souviens pas.
12 Q. Est-ce que vous pourriez, s’il vous plaît,
13 nous décrire la pièce qui est à gauche dans cette maison ?
14 À quoi ressemblait-elle et que trouvait-on à l’intérieur de
15 cette pièce ?
16 R. Je ne sais pas ce qu’il y avait dans cette
17 pièce, je ne m’en souviens pas, mais je crois qu’il y avait
18 une sorte de buffet ou une sorte d’armoire ou de vitrine et
19 puis il y avait deux lits ou divans. Enfin, c’est tout.
20 Je ne me souviens de rien d’autre maintenant.
21 Q. Sur quoi donnaient les fenêtres de cette
22 pièce ?
23 R. Sur la rue.
24 Q. Est-ce qu’il y avait de la lumière dans cette
25 pièce quand vous y êtes entrée ?
Page 1759
1 R. Je ne me souviens pas.
2 Q. Vous avez dit que vous vous êtes trouvée dans
3 cette pièce. Je voudrais savoir comment vous y êtes
4 entrée. Est-ce que vous y êtes entrée toute seule ou avec
5 quelqu’un d’autre ?
6 R. Je ne sais pas.
7 Q. Vous avez dit que vous étiez dans cette pièce
8 avec Kunarac. Est-ce qu’il est entré dans cette pièce ?
9 R. Je ne me souviens pas.
10 Q. Ce jour-là, cette nuit-là, à quoi
11 ressemblait-il ?
12 R. Que voulez-vous dire ?
13 Q. Quand il est entré dans la pièce, quelle
14 était son apparence ?
15 R. Je ne me souviens pas.
16 Q. Je sais bien que pour vous, tout ceci est
17 très, très pénible et je sais que toutes ces choses qui
18 vous sont arrivées sont extrêmement pénibles, mais je
19 souhaiterais que vous nous disiez un peu plus en détail
20 comment s’est déroulé ce contact entre vous-même et
21 Monsieur Kunarac.
22 R. Il n’y a pas eu de contact. Il est tout
23 simplement venu et il m’a emmenée dans l’autre pièce.
24 Q. Combien de temps avez-vous passé avec lui
25 dans cette pièce ?
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1 R. Je ne m’en souviens pas.
2 Q. Est-ce que quelqu’un est entré ?
3 R. Je ne m’en souviens pas non plus.
4 Q. Quand avez-vous quitté cette pièce et quand
5 êtes-vous allée dans l’autre pièce ?
6 R. Je ne me souviens pas.
7 Q. Je voudrais de nouveau vous demander s’il est
8 arrivé quelque chose de particulier cette nuit-là. Est-ce
9 que vous avez entendu une explosion, une détonation ?
10 R. Je me souviens qu’il y a effectivement eu une
11 explosion. J’ai pensé que c’était la mosquée de Aladza,
12 bien que je ne me souviens pas si cela s’est passé cette
13 nuit-là ou une autre nuit avant. En fait, je ne me
14 souviens pas bien.
15 Q. Pouvez-vous me dire si Kunarac s’est
16 déshabillé quand il est entré dans la pièce ?
17 R. Je ne vois pas ce que vous voulez dire par il
18 s’est déshabillé. Je vous ai déjà dit qu’il m’a violée.
19 Il a bien dû enlever ses vêtements.
20 Q. Dans quelle déclaration avez-vous dit qu’il
21 vous avait violée ?
22 R. Au cours de ma déposition aujourd’hui.
23 Q. Je voudrais maintenant vous demander de vous
24 référer à la déclaration que vous avez faite aux enquêteurs
25 du Tribunal en 1996.
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1 R. Oui.
2 Q. Je vais vous demander de regarder la page 9.
3 R. Oui.
4 Q. Au paragraphe ou à la phrase qui commence par
5 les mots suivants, ça se trouve à la sixième ligne dans le
6 dernier paragraphe. On peut lire : « Il y avait une
7 machine à coudre. »
8 R. Oui, des machines à coudre. Je crois que le
9 propriétaire était tailleur. Je ne sais pas exactement.
10 Q. Allez-y, lisez.
11 R. « C’est toujours Dragan Kunarac qui m’y a
12 emmenée. Les deux premières fois, il n’y avait que deux
13 soldats dans la maison et ils étaient tous deux
14 Monténégrins. Je sais que l’un d’entre eux était Dragan
15 Toljic ou Tolja. Il venait de Niksic. L’autre était plus
16 âgé, mais je ne connais pas son nom. Ces deux hommes m’ont
17 violée. La troisième fois que je vais décrire en détail
18 plus tard, cette maison était pleine de Monténégrins. Je
19 n’ai jamais vu les membres de la garde de Cosa à
20 l’intérieur de la maison. Kunarac ne m’a jamais emmenée
21 dans une autre maison que celle-là. Il ne m’a pas violée
22 les deux premières fois, seulement la troisième fois. »
23 Q. Pourriez-vous me dire, s’il vous plaît, sur
24 la base de cette déclaration combien de fois Kunarac vous a
25 emmenée dans la maison ?
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1 R. Non, je ne le sais pas.
2 Q. Je voudrais maintenant vous rappeler votre
3 déclaration donnée en 1998. À la page 4 dans la version en
4 B/C/S, dernier paragraphe, je souhaiterais que vous nous le
5 lisiez, s’il vous plaît.
6 R. « Je ne me souviens pas si Zaga m’a violée la
7 dernière fois où j’ai été emmenée à la maison de Aladza.
8 Je me souviens maintenant clairement que j’ai été violée
9 par un homme qui s’appelait Goran. Il y avait plus de
10 soldats dans la maison cette fois-là que les autres fois.
11 Ils buvaient dans la cuisine. Zaga n’était pas là tout le
12 temps. Il allait et venait. »
13 Q. Je voudrais savoir ce qui est conforme à la
14 réalité, vos deux déclarations ou ce que vous nous dites
15 aujourd’hui parce qu’en 1998, vous avez dit que c’était
16 Goran qui vous avait violée.
17 R. Qu’est-ce que vous voulez dire par où est la
18 vérité ?
19 Q. Où est la vérité ? Quelle est la vérité ?
20 R. Qu’est-ce que vous voulez dire, quelle est la
21 vérité ?
22 Q. Qu’est-ce qui s’est passé cette nuit-là ?
23 Qui vous a violée ?
24 R. Ma première déclaration a été recueillie en
25 1996, la deuxième deux ans plus tard et aujourd’hui, je
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1 vous parle et je vous dis ce qui s’est passé il y a huit
2 ans. Donc, il y a beaucoup de ces choses dont je ne me
3 souviens plus, mais je me souviens que cette nuit-là, Goran
4 et Zaga étaient présents tous les deux dans cette maison.
5 Me PILIPOVIC (interprétation) : Madame la
6 Présidente, je suis en train de regarder l’horloge…
7 Mme LA PRÉSIDENTE (interprétation) : Oui. Il est
8 temps en effet de suspendre l’audience et nous allons
9 reprendre demain à 9 h 30.
10 — L’audience est levée à 16 h 02
11 pour reprendre le mercredi
12 5 avril 2000 à 9 h 30
13
14
15
5 rue Félix Eboué - 87 031 Limoges - France
Tél. : +33 (0)5 55 14 92 34
chaire-gcac@unilim.fr