Programme de recherche : ONU et droit international pénal


Programme de recherche : ONU et droit international pénal

En faisant sien les principes de droit international reconnus par le Statut du Tribunal de Nuremberg et dans le jugement de ce tribunal  par la résolution 95 (I) adoptée à l’unanimité le 11 décembre 1946, l’Assemblée générale des Nations Unies inaugurait une relation particulière entre l’Organisation des Nations Unies (ONU) et ce qui allait devenir le droit international pénal, un corps (en développement et encore inachevé aujourd’hui) de règles internationales visant à incriminer et réprimer les comportements les plus répréhensibles des individus.

Cette relation, faîte de tensions et de progrès, est soumise et reflète les évolutions des positions des Etats à l’égard de ces règles nouvelles pour la société internationale et, plus largement, les aspirations et craintes de cette même société.

Prenant leurs origines immédiates dans la seconde guerre mondiale, l’ONU et le droit international pénal connaissent ainsi des évolutions parallèles, parfois asymétriques, mais qui traduisent des liens importants. L’ONU est ainsi très impliquée dans nombre d’évolutions du droit international pénal, d’un point de vue normatif, institutionnel et opérationnel. L’ONU joue en effet un rôle de premier plan dans l’élaboration du droit international pénal et dans sa mise en œuvre.

En matière d’élaboration du droit international pénal, l’ONU joue un rôle de premier plan depuis sa création. Des Principes de Nuremberg à la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées de 2006, en passant par les Conventions pour la prévention et la répression du crime de génocide de 1948, pour la répression de la traite des êtres humains et de l’exploitation de la prostitution d’autrui de 1949, sur l’imprescriptibilité des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité de 1968, sur l’élimination et la répression du crime d’apartheid de 1973, contre la torture de 1984, contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes de 1988, portant statut de la Cour pénale internationale de 1998, ou contre la criminalité transnationale organisée de 2000 (parmi nombre d’autres exemples), l’ONU est un des principaux, si ce n’est le principal, pourvoyeurs d’instruments juridiques visant à la répression (et parfois à la prévention) des agissements considérés comme les plus répréhensibles par la société internationale. Preuve en est :

–        l’œuvre de codification très importante de la Commission du Droit International (CDI) (du projet de code des crimes contre la paix et la sécurité de l’humanité  au projet de statut de la Cour pénale internationale (CPI), en passant par l’étude à venir de la notion de crimes contre l’humanité[1] pour ne citer que ces exemples),

–        les travaux de l’Assemblée générale des Nations Unies (et les nombreuses conventions et résolutions adoptées sous ses auspices) préparés par ceux d’importants organes principaux (comme le Comité économique et social/ECOSOC) ou subsidiaires,

–        ou de nombreuses résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies.

L’ensemble de ces activités montrent bien le rôle clef joué par l’organisation mondiale dans l’élaboration du droit international pénal.

Concernant la mise en œuvre du droit international pénal, l’ordre juridique international connaît une implication très large des organisations internationales, principalement celles à dimension politique et compétentes en matière de maintien de la paix, à la différence de l’ordre juridique interne où la répression des infractions pénales relève en priorité et exclusivement (en principe) des autorités judiciaires nationales.

L’ONU est encore ici en première ligne (même si elle n’est pas seule sur la scène internationale), que ce soit :

–        par ses actions en lien avec les juridictions internationales pénales, en étant à l’origine de ou en participant à leur création, voire de leur saisine, en sanctionnant les entraves à la répression internationale alors même que certains de ses organes politiques – principalement le Conseil de sécurité en ce qui concerne la Cour pénale internationale (conformément à l’article 16 du Statut de celle-ci) – peuvent licitement entraver le travail de ces juridictions.

–        ou en parallèle de ces mêmes juridictions, en rappelant les obligations internationales du droit international humanitaire et du droit international pénal, éventuellement en assortissant ce rappel d’une condamnation et de la demande de mettre fin aux violations, voire en demandant que les responsables soient traduis devant la justice ou en créant des commissions d’enquêtes.

De plus, l’ONU contribue, à travers divers organismes, à la coopération internationale visant à réprimer les infractions internationales qui ne sont pas de la compétence (limitée) des juridictions internationales pénales, telles que le terrorisme, la corruption, le blanchiment d’argent, le trafic de stupéfiants, le trafic de migrants et plus largement des êtres humains et soutient les Etats dans leur lutte contre ces comportements incriminés par le droit international.

 

Que ce soit dans l’élaboration ou la mise en œuvre du droit international pénal, l’action et le rôle de l’ONU s’avèrent par conséquent très importante.

L’axe de recherche « ONU et droit international pénal » vise à étudier ce lien existant entre l’organisation mondiale et cette branche récente du droit international en investiguant les différents champs de recherche que sont les activités normative, institutionnelle et opérationnelle de l’ONU en matière de droit international pénal. Il s’agira ici de proposer des travaux scientifiques sur ces thématiques qui seront notamment publier sur le site de la Chaire d’excellence Gestion du conflit et de l’après-conflit (http://fondation.unilim.fr/chaire-gcac), contribuant ainsi à enrichir les archives de la conflictualité.

 

Contact :

Rémy Prouvèze, Responsable du programme de recherche « ONU et droit international pénal » : remy.prouveze@yahoo.fr

[1] La CDI a décidé d’inclure dans son programme de travail le thème « Crimes contre l’humanité » lors de sa soixante-sixième session en 2014.